J’ai décidé de profiter du beau temps pour me détendre un peu. Sortir, aller respirer un peu à l’extérieur, voir mes amis. Je suis presque triste qu’Akihiro soit trop occupé pour m’accompagner. Mon frère, mon ami, j’oserais même dire le meilleur ! En tous cas, il n’est pas là actuellement et c’est bien dommage. J’y songe tandis que j’erre paisiblement dans le parc. Je regarde à droite et j’aperçois un couple qui se promène avec ses enfants. Des jumeaux, si je ne m’abuse. Un large sourire se dessine sur mon visage, une fois encore.

Quand je tourne la têt à gauche, j’aperçois un jeune homme qui mène son chien en laisse. Ou plutôt, qui se fait mener par son chien. Cela me provoque un léger rire, mais je le réprime assez vite pour ne pas passer pour un terrible moqueur. En vérité, j’ai toujours souhaité avoir un chien, mais je sais que je me ferais mener par le bout du nez si j’en avais un. À cette pensée, je réfléchis un peu. J’aurais voulu un chihuahua ! Non, un Yorkshire ? Ou plutôt un Cavalier King Charles Spaniel, comme celui de mon colocataire, Kenta. J’ai toujours pensé que Muffin était adorable, alors ça ne m’étonnerait pas.

Je suis perdu dans mes pensées tandis que je sors mon téléphone portable de fond de la poche de ma longue veste noire. Un long strap y est accroché, un objet lié à mon frère, pour être exact, et s’y balance tranquillement, au rythme de ma démarche. Je relis les messages de ces derniers jours. Rien de bien intéressant, à vrai dire, plus de questions à propos des cours que de réelles prises de contact, mais ça ne me dérange pas. Je ne suis pas là pour être adulé, mais pour protéger mon grand frère qui fait de son mieux et doit avoir bien des difficultés par moment, avec tout ce qu’il a vécu.

Cette impression, je l’ai toujours eue. Je suis le plus frêle, le plus calme, le plus petit même, et je n’aurais jamais pensé que mon frère aurait une maladie cardiaque. Pourtant, quand c’est arrivé, j’aurais donné tout ce que j’avais pour être à sa place et je pense à ce souhait à chaque fois que j’aborde le cœur en cours. Mon frère aurait pu tout perdre à cause de cette fichue déformation, mais il paraît que c’est normal, que certains enfants sont plus fragiles que d’autres. Après tout, de mon côté, j’ai déjà pas mal d’allergies et j’ai déjà failli y passer… C’est effrayant, mais cela ne m’a en partie motivé à devenir médecin, car je n’abandonnerai cette idée pour rien au monde, à vrai dire.

Je replace mon portable au fond de ma poche pendant que je déambule dans le parc. Il fait très calme ici. Je souris bêtement et un petit soupir de contentement m’échappe. Ce parc est peu animé, mais je pense que les promeneurs doivent être occupés ailleurs. Personnellement, je préfère sortir de mes études de temps à autres afin de ne pas saturer et commettre des erreurs stupides… Cela est essentiel pour un médecin, ou plutôt un futur médecin. Je fais quelques pas de plus dans le parc, sans même me rendre compte que j’ai perdu mon téléphone que je pense pourtant avoir remis dans ma poche. Sans m’en soucier, je continue à marcher tandis que l’appareil traîne derrière moi.

J’étais chez moi. Affalé sur ma table de travail. Aaaaaah….. J’ai encore dormi dessus…. J’espère que je n’ai pas bavé sur mes planches sinon il faudra tout refaire…. Je me redresse et… Catastrophe… Oh my… Non. Tout mais pas ça… J’ai bavé, mais pas que ! Mes planches étaient encrées et… j'en avais partout... OH MY OH MY… Je poussais un hurlement de désespoir profond, me tirant les cheveux. RAAAAAH !!! Il faudra tout recommencer !!! NAAAAN !!! Je n’en pouvais plus. Et puis le téléphone sonna et.. OUF. Mon chef avait posé un jour de repos pour tout le monde. Parce que lui-même en avait marre de cette semaine et qu’il voulait une pause.

Tant mieux. Je peux respirer. J’ai aussi un rapport à faire et à lui rendre. Je quittais mon bureau, encore emmitouflé dans un gros pull et une écharpe épaisse. J’avais des cernes de malade, me donnant une tête de panda, cachées derrière mes lunettes épaisses. Je traînais les pieds jusqu’à la salle de bain et commença à me laver. Non, pas dans la baignoire, sinon j’y dormirai jusqu’à choper la crève. Sous la douche. Et même là, je me sentais dormir debout. Mais je me réveillai de suite. Une fois lavé, je m’habillais. Chaudement. J’étais tellement fatigué, que je ne me permettais pas d’être habillé juste en T-shirt. (tenue) Et puis, je me pris mon petit déjeuné. un bon petit déjeun-… HEIN ? IL EST.. SI TARD ! Oh my… le petit déjeuner à cette heure-ci de la journée… Ca la fou mal. Et mon dos me faisait mal… Ca m’apprendra à dormir n’importe comment et pas dans mon lit.

Je poussais un soupir. J’avais besoin d’air. Et je me disais qu’aller faire un tour au parc de Shibuya serait vraiment pas mal. Aussi je finis donc de préparer mes petites affaires et puis je pris la route du parc. Il faisait beau. Et la chaleur du soleil, en plus de la douceur du petit vent, me firent le plus grand bien. Ceci dit, je ne donnais pas cher de la tête que je tirai. Même dans les transports je dormais debout, le menton enfoncé dans mon écharpe. J’avais même failli rater la station de métro !

Mais une fois dans le parc, je m’étirais un bon coup et profitais alors du calme pour me poser sur un banc à l’ombre et… sortir mon carnet pour dessiner. Non je n’étais pas récupérable !! J’étais comme ça. Assez maso, vis-à-vis de mon travail. Mais là, je sais pas. Je dessinais ce que je voyais et pas ce que ma tête voulais que je dessine. Ca tombait bien le parc… Parce que pour mon manga, j’en aurai besoin de ce genre de décor. Assis là, je faisais plus ou moins attention à ce qui se passait autour de moi. Et quand ce jeune homme blond passa devant moi, abandonnant son téléphone par terre, j’eus une minute de blanc.

Ah. Euh. Son portable. C’est un jeune homme prêt à le ramasser qui me poussa à intervenir et à le prendre en premier. A la face déçue du jeune homme je compris qu’il avait voulu le voler et pas le rendre au propriétaire. Euh bon. C’est bien mais… OU EST PASSE LE BLOND ?! J’avais beau regarder autour de moi, je ne le voyais pas. Je me mis donc à courir à moitié dans la direction qu’il avait prise pour tenter de le rattraper. J’étais épuisé et on me faisait courir… Ca va que mon sac n’était pas lourd et mon carnet pas trop gros.


Et puis je l’aperçu au loin. Je le rattrapais et attrapa son bras pour qu’il s’arrête. « Hey ! » Je repris mon souffle aussi et lui tendant son portable. « Tu as fait tombé ça… » Ah purée… Je me sentais pas très bien là… « … Heureusement que je l’ai vu…. on allait te le voler. » J’avais chaud. Trop chaud aussi. Et j’avais soudainement mal aux oreilles, il y avait trop de lumière aussi, tout devenait éblouissant. Je restais accroché au jeune garçon la main sur le visage.

Je sursaute assez fort lorsqu’une personne me saisit soudainement le bras. J’entends sa voix et je comprends que c’est un homme, cependant je n’ose qu’à peine me retourner. Si jamais c’est un bandit, que dois-je faire ? Non, les chances que ce genre de choses arrivent ne sont pas forcément grandes. C’est peut-être un homme qui a envie de m’emmener voir ses filles car je suis une idole connue ? J’ai tellement l’habitude qu’on me confonde avec mon frère que je ne sais réellement pas comment me placer par rapport à cette situation plutôt embarrassante.

Je ferme les yeux pendant quelques secondes et je me retourne dans le même temps. J’ouvre ensuite les yeux et je le vois me tendre mon téléphone. Il est tombé par terre ? Je dois réellement être dans la lune pour ne pas l’avoir remarqué, un peu comme d’habitude, mais je ne dois pas laisser ce genre de choses arriver si je souhaite devenir un médecin réputé. Cela serait la porte ouverte aux plus grands dangers de mon métier, voir même à la mort qui viendrait régulièrement visiter mes patients. Une chose que je ne compte clairement pas laisser faire. Encore assez surpris à cause de cette soudaine intervention, je saisis mon téléphone en adressant un large sourire à mon interlocuteur.

« Oh, merci ! Je ne l’avais pas remarqué ! »

Un léger sourire plus tard, j’ai l’impression que mon interlocuteur ne se sent pas très bien. D’ailleurs, il agit bizarrement et s’accroche à moi en se tenant le visage.

« Vous allez bien ? »

J’aimerais bien qu’il me lâche, pour tout avouer, mais le lui dire alors qu’il semble mal n’est pas forcément une bonne idée. Pour cette raison, je subis en silence et j’attends une réponse. Je suis peut-être en plein milieu de mes études, mais je ne suis pas encore devenu médecin et il est clair que j’ai toujours un peu peur lorsque quelqu’un fait un malaise devant moi. J’espère simplement que ce n’est pas son cas.

En tout cas, je suis content qu’il n’ait pas l’air d’un fan hystérique de mon frère… D’ailleurs, attendez une minute ! Si ça tombe, il fait partie d’une combine afin d’enlever Akihiro ! Non, je ne dois pas penser comme cela, on dirait un sale grand paranoïaque qui a toujours l’impression que l’on va s’en prendre à son sang. Je ferme les yeux pendant quelques microsecondes et j’attends pour voir s’il est réellement en train de faire un malaise ou s’il a juste du courir pour me rejoindre.

Lorsque je lui attrapais le bras, je le sentis sceptique, méfiant et pas rassuré. Comme si j’étais un homme qui lui voulait de sales intentions. J’avais juste récupéré son téléphone et si je n’avais crié que des « Hey ! » ça n’aurait pas servi à grand chose. Je ne connais pas son nom, mais je dois lui rendre son téléphone. Alors bon j’avais pas trop réfléchis et lui avais saisi le bras pour attirer son attention. Heureusement pour moi, il ne mis pas trop de temps pour se retourner et m’adresser un sourire tandis qu’il me remerciait. Oh ! J’aurais pu sourire aussi et le saluer avant de reprendre ma route ! Mais mon corps en avait décidé autrement.

Je ne me sentais pas bien présentement. je ne savais pas trop ce qui m’arrivait. Etait-ce parce qu’en ce moment j’ai du mal à dormir 9h d’affilée ? Etait-ce parce que je mangeais très mal ? Ou bien parce que je venais aussi de courir pour rattraper le propriétaire du téléphone ? Je n’aimais pas me retrouver comme ça, à embarrasser quelqu’un de cette manière. De plus, qu’allait-il bien pouvoir penser ? Une personne inconnue qui le tient comme ça, et qui en plus se passe la main sur le visage… Si ça ne fait pas louche ça. A sa question, je lui lâchais le bras.

« Ah pardon. Oui. Enfin je sais pas trop… » Je secoue la tête, histoire que l’éblouissement passe. Mais même quand je le regarde j’ai mal aux yeux. « Hum… on est pas en plein soleil par hasard ?… Je vois très mal… Enfin… Ca fait mal aux yeux… » Je prenais sur moi. Je n’avais pas envie de le déranger, il avait peut être aussi autre chose à faire. « … Désolé, je dois te déranger »

Je me posais même pas la question de savoir à qui il ressemblait ou pas. Pour moi ce n’était qu’un jeune garçon blond. Japonais. Qui avait perdu son téléphone et que je dérangeais avec mes soucis de santé. Non mais quelle idée d’avoir couru comme ça pour le rattraper ? Ou plutôt, peut-être serait-il vraiment bienvenue que je mange un peu mieux comme ne cesse de me le dire Adrien ? J’en sais rien. Toujours est-il que je suis en train d’emmerder un pauvre garçon qui n’avait rien demandé à personne ! Je me donne des baffes mentales parce que franchement… J’avais demandé tout sauf un aprem foutu en l’air de cette manière.

« … Tu voudrais pas m’accompagner à un banc ? Je n’ai pas envie de tomber par terre tout seul. Et puis après, promis, je te laisse tranquille. » Et joie. Maintenant je ne pouvais pas non plus compter sur moi-même. Ben tiens ! Cela aurait été trop facile !… En tout cas, qu’il se rassure je n’allais pas lui demander de s'occuper de moi : lorsque je serai assis, je pourrais me remettre tranquillement et me reposer. Et il sera tranquille.

Je pense que j'ai tendance à devenir un peu trop paranoïaque lorsqu'il est question de mon frère. Cette peur qu'un malheur lui arrive est devenue omniprésente depuis qu'il a failli mourir et il serait grand temps que je m'en débarrasse. Il ne manquerait plus que je m'inquiète pour les pires bêtises et les choses les plus inutiles qui soient ! Comment ? C'est déjà le cas ? Ah oui, j'oubliais que je viens de m'inquiéter de l'identité d'un homme comme les autres, simplement parce qu'il s'est tenu à moi pur ne pas défaillir.

« Non, ne vous en faites pas, faites attention à vous plutôt ! »

Il a vraiment l'air dans un état bizarre, cet homme. Pourtant, je ne pense pas qu'il soit plus bizarre qu'un autre, à bien y regarder... Complot Akira, complot. Non ! J'ai déjà dit que je devais arrêter ce genre de pensées, sinon je vais finir par ne plus faire confiance à personne, même à mon meilleur ami! Après tout, c'est vrai, peut-être que Kenta est ami avec moi uniquement pour pouvoir approcher mon frère... Il va falloir que je surveille cela d'un peu plus près... Je pense un peu à cette idée, et de me mettre une gifle mentale pour ne plus imaginer des choses pareilles à propos de mon meilleur ami.

« Si, suivez-moi. »

Je garde donc cet inconnu sous le bras avant de l'emmener un peu plus loin, jusqu'au premier banc que je trouve sur mon chemin. Le laisser ainsi m'inquiète beaucoup en réalité. C'est sans doute mon côté d'étudiant en médecine qui reprend le dessus. Malheureusement, c'est aussi dans ce genre de cas que l'on se rend compte de notre incapacité et, comme je ne suis pas encore au bout de mes études, j'ai toujours peur de devoir faire face à une catastrophe et d'être incapable de sauver la vie d'une personne.

Je ne sais pas vraiment comment je réagirais si cela venait à arriver, mais comme je ne suis pas dans ce cas je tente de calmer un peu mon anxiété en me contenant de sourire à cet inconnu. Je cherche à paraître rassurant, même si ce n'est pas évident, même si c'est profondément inutile. Je m'adresse à lui une fois que je l'ai accompagné jusqu'au banc et que je l'ai aidé à s'y asseoir.

« Vous êtes certain que cela va aller? »

Je préfère lui demander deux fois plutôt qu'attendre et le voir tomber comme une crotte sur le sol du parc. Maintenant, s'il ne me répond pas, je n'aurai pas vraiment le choix... Même si une absence de réponse peut aussi vouloir dire qu'il ne va pas bien du tout, tellement pas bien qu'il est incapable de s'exprimer ! Ah, ces angoisses stupides, injustifiées... Elles me vont tellement bien.

Je ne faisais même plus du tout attention si je lui faisais peur ou non, si j'avais l'air louche ou pas. Non, là pour le moment je me disais uniquement que je voulais m'assoir assez vite, avant de finir évanoui par terre. Et bonjour les réprimandes d'Adrien si après ça, le jeune homme m'emmène à l'hosto. Hahaha... Il sera tellement content de me voir de nouveau dans son établissement pour manque de glucides, et autres trucs du genre. Je me tenais au bras du jeune homme histoire de ne pas m'étaler par terre, ceci dit je ne lui serrai pas non plus le bras comme une grosse brute : j'ai une force ridicule.

Faire attention à moi ? Hahahahaa... La bonne blague... C'est sans doute ce que j'aurais du faire avant de sortir... « C'est peut-être ça que j'aurais du me dire avant de prendre l'initiative de mettre un pied dehors.... Hahaha.... » J'ai tellement l'air irresponsable de moi-même là... Même un papy l'est plus que moi !

Enfin, heureusement pour moi, il accepte de m'accompagner à un banc. Tant mieux ! Au moins je risque pas de marcher comme un type bourré, sans être bourré, ou finir par terre. Enfin assis sur le banc, je le remerciais et poussai un léger soupir, tandis que je m'installais les jambes légèrement étendues, la tête légèrement en arrière sur le dossier du banc. « Certain ? ... Je sais pas... Mais déjà être assis, ça aide : je me sens moins... mal. » Oh je sens que je vais encore l'embêter.... Mon dieu, que je déteste ça, d'être ainsi. Un jour je me fouterai une baffe et me ferai un VRAI repas avant de faire quoi que ce soit. « Dis... T'aurais pas de quoi grignotter ? Juste que je me dis que j'ai peut être pas assez mangé avant de me taper un sprint pour te rattraper... Et comme j'ai pas l'habitude de courir... » Oui hein... s'il savait comme ma vie de mangaka est dure ! A ne pas voir le soleil parfois. Alors si en plus je mange mal... Et c'est là qu'en fait je parle à un médecin... Même s'il fait jeune pour être déjà médecin... Ca serait drôle ça en tout cas.

Mais le pire ? Je me mis à lui parler comme si tout allait bien, comme si... c'était le moment surtout de faire les présentations... « Oh ! Et tu peux me tutoyer hein. Mon nom est Andrea....Baek Andrea» Non je ne me fis même pas la réflexion qu'il pouvait connaître mon nom, savoir d'un coup qui j'étais et tout.. Trop dans les vappes pour ça.

Je suis peut-être un peu trop gentil pour mon propre bien, mais cela ne me pose pas de problèmes. En cet instant, si je m’inquiète pour ce garçon, c’est en grande partie parce que mon futur travail va consister en cela. Je souris un peu à mon interlocuteur avant de lui demander s’il est certain d’aller bien… Bien évidemment, il ne l’est pas, j’aurais du m’en douter… Au moins, je sais qu’être assis lui fait du bien. Je m’inquiète quand même car je me demande ce qui lui arrive, mais je n’ai pas l’occasion de lui demander réellement car il me demande déjà si j’ai quelque chose à grignoter…

Hm…Je dois bien avoir quelque chose sur moi, mais c’est une barre de céréales que j’ai normalement préparée pour le moment où j’irai rechercher mon frère à l’agence… J’hésite un peu, puis mon côté futur médecin reprend le pas sur mon côté frère acharné. Je souris un peu avant de m’adresser à lui.

« Je dois avoir ça, attendez un peu…  » Dis-je avant de commencer à fouiller paisiblement à l’intérieur de mon sac.

Heureusement, je suis assez doué lorsqu’il s’agit de gérer mon stress. Je fais de gros efforts pour ça, même si cela semble un peu étrange car j’ai quelques phobies inexplicables. Après quelques courts instants de fouille, je finis par tomber sur la barre de céréales, une barre énergisante, plus précisément, que je lui tends en souriant. J’espère que cela lui suffira pour se remettre un peu… Une hypoglycémie ? Peut-être bien. Cela me semble probable en tout cas. Un léger sourire se dessine sur mon visage tandis que je continue à réfléchir à toutes les variables…J’aime me mettre en situation, comme si le cas était grave, à chaque fois.

Après un instant supplémentaire, l’inconnu me donne son nom. Baek Andrea… Il n’est pas d’ici lui, non ? Je souris un peu avant de lui adresser la parole à mon tour.

« Je suis Asano Akira. Enchanté de faire ta connaissance ! »

Je souris de toutes mes dents et j’attends de voir s’il va mieux, mais il a l’air quand même assez mal en point. Je ne sais pas si mon frère lui est connu, mais au moins les présentations sont faites et je n’ai plus à me préoccuper de connaître son nom ou pas. D’ailleurs, je l’enregistre bien dans un coin de ma mémoire, histoire de pouvoir le nommer par la suite.

« Tu as bien déjeuné au matin? » Demandé-je comme pour confirmer ma théorie pourtant plus qu'évidente.

Je crois que j’ai une chance inouïe d’être tombé sur lui. Il est gentil, même si j’ai sans doute l’air le plus bizarre du monde, il n’a pas l’air non plus d’être pressé de partir ou d’avoir des trucs à faire… C’est plutôt rassurant, vu dans l’état où je suis. Bon déjà, je suis assis et je me sens moins tout drôle. La tête fait moins mal, et j’entends de nouveau correctement. Le soleil n’éblouit plus non plus… Mais je me dis qu’au cas où, manger un peu pourrait m’aider à aller encore mieux ! Et là encore, la chance me sourit : il a de quoi grignotter. Je le laisse chercher dans son sac et puis le remercie quand je reçois sa barre de céréales. Vous pouvez être sûr d’un truc, je lui dois beaucoup là.

Je souris et fis un mouvement de tête, quand il me dit son nom, afin de signifier que moi aussi j’étais enchanté. Je ne captais même pas que le nom Asano était un nom connu. Après tout le mien aussi est connu. Alors bon. En tout cas, le voir sourire, me rassure un peu sur un point : je ne lui ait pas fait si peur que ça finalement. Et puis vint la question fatidique. Le genre de question qui me fait agir comme un môme de cinq ans qui veut cacher à ses parents qu’il a fait une bêtise. « Bien déjeuner ? Je sais pas. Oui ? Peut être ? » Une petite moue prit place sur mon visage. Non mais je sais qu’il faut que je fasse des efforts pour mieux manger… mais c’est duuur ! Le regard déviant un peu, ma main libre - l’autre tenant la barre de céréales- et l’air un peu embarrassé : « Hum… J’avoue que je ne sais pas trop en fait… Je n’ai pas ce que l’on peut appeler un rythme de vie normal et sain. Je suis du genre à ne pas m’arrêter de travailler… Surtout quand je sais que j’ai du retard. » Je mangeais un peu et puis la bouchée avalée j’annonçais mon métier. « Pour tout te dire, je suis assistant d’édition et mangaka. Alors, mes journées sont très très chargée et… euh… Bah, j’ai toujours eu du mal à prendre le temps de me faire à manger, ou autre chose dans le genre… Et puis tu verrais la tête de mon chef : un drogué au café. Moi encore, j’en bois pas ! J’aime tellement pas ça. Et puis bon, je suis déjà bien assez nerveux sans avoir besoin d’en rajouter par du café. »

Je sais pas du tout si je l’ai rassuré. A vrai dire je crains le pire là. Mais je terminais la barre de céréales et m’étirai un peu. « En tout cas, ce matin… j’ai mangé un peu. Mais très certainement pas assez. » S’il savait… J’ai fait peur à Adrien la première fois qu’il m’a vu aux urgences… « En tout cas, merci pour tout. Je te devrais bien tout ça une prochaine fois ! » Je suis vraiment pas du genre à ne pas rendre un service ou un geste que l’on m’a donné. Alors oui, je lui devrai peut être au moins un repas quelque part.

Hm… sa réponse me laisse un peu dubitatif. Je pense qu’il n’a pas déjeuné correctement ou qu’il fait semblant… un peu comme un enfant. Je souris un peu à cette idée mais attend la réponse qu’il va me donner, espérant que celle-ci sera complète. Visiblement, il travaille trop et ne mange pas assez… J’ai même envie de dire, à tout hasard, qu’il ne dort pas son compte ! Un nouveau sourire, un peu inquiet cette fois, prend place sur mon visage, peu avant que je reprenne la parole pour lui exprimer mon opinion qui, en ce moment, est un peu inutile puisque j’imagine qu’il est au courant de son propre état.

« Je pense que tu te surmènes… Tu as moyen de prendre congé ? Des vacances ? Je ne sais pas, mais j’ai l’impression que tu en aurais bien besoin. Et de manger correctement, aussi. »

Je ne suis pas médecin, pas encore en tout cas, mais je sais parfaitement que tirer sur ses réserves d’énergie comme ce gars le fait n’est pas une bonne chose du tout. Un petit sourire se dessine sur mon visage et je ris un peu avant de reprendre la parole quand il me dit qu’il me devra tout ça la prochaine fois. Je secoue un peu la tête pour lui signifier que ce n’est pas vrai.

« Ne t’en fais pas, tu ne me dois rien. Par contre, si tu as vraiment du mal à manger correctement, tu devrais songer à voir un diététicien. Je pense qu’il serait capable d’adapter tes horaires de repas en fonction de ton travail et ça t’éviterait de te retrouver dans une telle situation. »

Oui, les diététiciens sont parfois bien plus utiles qu’on peut le penser. J’adresse un nouveau large sourire à mon interlocuteur et je réfléchis encore, observant les gens qui circulent dans le parc, car il y a bien quelques personnes ici… Je ris un peu et, après quelques secondes, je reprends la parole d’une voix amusée, comme pour me parler à moi-même.

« Dire que je voulais sortir un peu pour déconnecter de mes études, c’est plutôt raté ! À force je vais finir par croire que tout est mis en oeuvre pour m’y ramener ! »

C’est vrai quoi ! Je sors un peu au parc pour ne pas avoir à penser à mes cours et POUF je tombe sur une personne qui ne se sent pas bien. Je trouve cela plutôt drôle, même si cela peut sembler stupide à d’autres personnes, voire carrément énervant.

Assis à côté du jeune homme, grignottant la barre de céréales qu'il m'a donné, je commence déjà à me sentir mieux. Et voilà que l'on commence à parler de ma santé. Pas que c'est un sujet qui me passionne, mais apparemment c'est un sujet qui revient souvent lorsque je rencontre quelqu'un. Me surmener ? Oui sans doute. Mais ce n'est pas comme si j'avais le choix. J'avais un chef plutôt tyrannique et qui détestait les employés mous ou qui traînent trop. Manger correctement ... hahaha il n'est pas le premier à me le dire. Mais je ne sais pas pourquoi c'est un défi permanent pour moi. Prendre des congés ? le rêve ! L'air un peu dubitatif, me gratouillant légèrement la tempe :

« Hum... Sans doute que tu as raison, je dois me surmener. Mais bon... Disons que c'est aussi le travail qui veut ça. Je rêve de pouvoir avoir des vacances. Je songe même à en prendre ! C'est un tout petit peu compliqué à cause de mon chet ceci dit, mais ça peut se faire. Et... manger correctement.... C'est...Quasi trop difficile pour moi.»

Il est vraiment gentil à me donner tout ces conseils. Mais je commence aussi à me demander ce qu'il fait dans la vie. Il a l'air de s'y connaître pas trop mal dans ce qui est soin et santé... Etais-je tombé sur un médecin ? Enfin, au moins, il n'était pas aussi dur et sévère qu'Adrien concernant la nourriture !

« Oh vraiment ? Je me sens trop redevable pourtant. Enfin ! En tout cas, merci pour tes conseils. Je verrais ce que je peux faire pour le diététicien. Tu aurais des adresses de diététiciens compétents ? »

J'osais demander. Au cas où ! En tout cas, je pense qu'il a raison. Adrien ne m'a jamais conseillé de voir des gens compétent. Mais déjà que j'ai du mal à faire des courses... Ou plutôt de trouver le temps d'en faire. Et je déteste les nourritures sur le pouces. D'où le fait que je mange très mal, parce que je ne mange que gâteaux et autres douceurs pour mes papilles. Hors de question de manger de l'instantané !

Et puis je lui offris un sourire assez amusé par ce qu'il venait de dire.  « Tes études ? Tu es étudiant en quoi ? A quelle université ?... si cela n'est pas trop indiscret de le demander. » J'étais curieux. Même si pour l'université, je me disais que ça devait être la RPS. Ca ferait une super coïncidence puisque j'y étais étudiant y'a quelques années ~

Je suis parfaitement certain que ce garçon se surmène, ce n’est d’ailleurs pas bon du tout pour son organisme qui risque de ne pas tenir le coup… Je ferme les yeux pendant quelques secondes quand il me dit qu’il songe à prendre quelques vacances : cela me semble être une bonne idée, pour ne pas dire que c’est la meilleure qui soit afin qu’il puisse se reposer un minimum et reprendre des forces, car je suis certain qu’il en manque lourdement. Un petit sourire se dessine d’ailleurs sur mon visage, un sourire rassurant, car je suis sûr qu’il arrivera à trouver un moment où il pourra se reposer comme il se doit.

Quand je l’entends me poser une question, un peu plus tard, je lui adresse un large sourire et je reprends la parole à mon tour. Des diététiciens compétents… Hm… Bonne question. Je souris un peu et je reprends la parole.

« Pas franchement, non, mais j’imagine qu’il doit y en avoir pas mal en ville. »

Après tout, la mode est à rester mince et, pour cela, il faut faire régime, être à la diète, bref, surveiller son alimentation correctement afin de garder la forme, ou pour être encore plus fin, même si certains aiment cela à outrance. Je souris un peu à mon interlocuteur tandis que je réfléchis : non, définitivement, je ne connais pas de diététicien, juste des étudiants, peut-être, haha.

Plus tard, il relève mes propos, au moment où je parle de mes études, et je lui adresse un sourire amusé. C’est vrai, je n’ai pas encore évoqué ce sujet… Mais il faut dire aussi que je ne suis pas sorti pour le faire, à la base, mais plutôt pour m’en détacher un petit peu avant d’y retourner avec plus de motivation encore. Je souris un peu et je m’adresse à lui après quelques secondes.

« Je suis étudiant en médecine, à la Royal Private School. » Dis-je avec un large sourire.

Je ne suis pas dérangé à l’idée de parler de mes études, après tout je les fais pour mon bonheur futur, ou du moins pour permettre à mon frère et à d’autres frères de ne plus avoir à souffrir dans l’avenir… C’est peut-être stupide, mais je suis sûr que je parviendrai à sauver pas mal de vies si je fais de gros efforts… Je veux tellement, mais tellement rendre mon frère heureux que j’ai fini par oublier mes propres désirs de carrière… D’ailleurs, si j’en avais, je n’ai même plus envie de m’en souvenir.

Des vacances. J’en rêvais tellement. Même si avec Adrien c’était un peu compliqué au vu de nos jobs respectifs, j’avais toujours qu’une hâte, que l’on se prenne tout les deux des vacances en même temps pour partir se changer d’air, et se vider la tête.

Au vu de la réponse qu'il me donne pour les diététitiens compétents, je me contente d'une petite moue et d'un hochement de tête un peu déçu. Dommage ! S'il en avait connu, je pense que je me serais moins cassé la tête. Je pousse un petit soupir et puis en lui souriant je lui répondis :

«Mah ! Oui sans doute ! Mais ce n'est pas grave, je demanderai à mon médecin ! Je n'aime pas l'embêter avec mes soucis de santé... Je l'ai déjà mis dans tellement de complications. Mais, au moins cette fois, je l'embêterai avec une question sensée et pas parce que j'ai une hypoglycémie, hahaha ! »

J'eus un rire un peu embarrassé et me frottais un peu la nuque. Adrien. Le pauvre. Il en avait bavé avec moi. Et ce n'est pas fini non plus d'ailleurs. J'avais aussi manqué de dire son nom ou de dire "mon petit-ami"... Enfin, heureusement que je ne l'ai pas fait... ou de l'ajouter derrière "mon médecin"... Ca aurait été une cata' sinon.

Quand on passa au sujet des études, mon visage s'illumina d'un coup. UN RPS !! J'eus également un grand sourire.

« Oh ! Tu étudies à la RPS ? J'y ai fait toute une partie de mes études aussi ! Comme quoi le monde est petit ! Et médecine... Ca ne me surprend pas bizarrement haha ! Mais je dois dire que pour un futur médecin tu es vraiment bien parti. Enfin... j'veux dire par là, que même face à un type comme moi, t'as su trouvé les bons trucs pour que j'aille mieux hehe » Nouvel embarras. « Elle a changé l'université ? C'est comment maintenant ? Ca fait un bail que je n'y suis pas allé.  »

J'avais passé tellement de bon moment là bas. Il y avait tellement de bon souvenirs ! Je me demandais vraiment si la réputation de l'Université était restée la même depuis le temps où si elle avait fini par changer avec le temps.

Je hoche un peu la tête quand j’entends mon interlocuteur me dire qu’il va demander à son médecin s’il connait un diététicien correct en ville. Il faut dire qu’à ce niveau je manque cruellement d’information. Après tout, si je deviens médecin généraliste au lieu de chirurgien, j’aurai sans doute besoin de connaître certains spécialistes afin d’orienter mes patients en cas de doute, non ? Ou alors peut-être devrais-je travailler dans un hôpital, histoire d’avoir des noms rapidement et sûrement ? Je souris un peu en y réfléchissant et je range cette idée de liste dans un coin de ma tête. Je me trouverai un calepin plus tard et j’y inscrirai les noms des personnes capables de m’aider pour différentes choses, ça sera sans doute très pratique ! J’en suis même certain.

Quelques instants plus tard, au moment où j’évoque mon appartenance à l’université RPS, je me vois soudainement assailli de questions plus inattendues les unes que les autres, ainsi que d’un compliment que je trouve plutôt sympathique. Je souris un peu quand je l’entends me demander si l’université à changé … Je ne sais pas à vrai dire.

« Hm...Aucune idée, je n’y suis sans doute pas depuis assez longtemps pour pouvoir en juger. » Avoué-je en riant un peu.

Il faut dire que je ne sais pas trop quoi raconter sur cette école car, bien que je l’apprécie réellement, elle comme ses cours, j’ai l’impression de ne pas réellement participer à la vie étudiante. Je suis un véritable rat de bibliothèque, toujours concentré sur mes livres, sur mes études, sur ces choses si passionnantes que sont les microbes et les virus, mais au final j’en oublie de profiter de ce temps en plus qui m’est donné avant d’entrer dans le monde des adultes, dans le monde du travail, exigeant et difficile à supporter et à comprendre.

« En tout cas, elle est géniale. » Dis-je avec sincérité, ponctuant ma phrase d’un large, très large sourire.

Après quelques secondes, je pousse un petit soupir avant de reprendre la parole, juste histoire de discuter un peu, même si je ne connais pas cet homme.

« Au moins, j’aurai pu mettre en pratique ce qu’on m’apprend à l’école. » Je ris un peu et je reprends. « Même si généralement on préfère éviter, car ce n’est jamais joyeux. »

Je ferme les yeux pendant quelques secondes et je pousse un petit soupir. J’aimerais tellement que toutes les maladies soient curables, que les gens soient heureux et n’aient pas à pleurer la perte d’un proche pour raison médicale…[/color]

Je ne m’étais vraiment pas attendu à tomber sur un étudiant de la RPS. J’étais content que ce soit le cas. RPS était connue pour contenir parmi les meilleurs étudiants de la région. Donc Akira était forcément très doué. Les études de médecine étaient très connues pour être extrêmement difficile. Alors j’étais plus qu’honnoré de m’être fait soigné par lui. Parce qu’il devait être sans aucun doute très doué dans sa discipline. Du fait de cette découverte je me m’étais à lui poser des questions sur l’université, savoir si elle avait changé ou pas, si c’était comme avant ou pas. Bien entendu, cette question était un peu bête… Mais peu importe. Je souris à sa réponse et je demandais :

« Cela fait combien de temps que tu étudies là-bas ? »

Je devenais peut être un peu trop curieux, mais j’avais envie d’un coup d’en savoir un peu plus sur lui. De toute façon, il faut bien un moment ou un autre, passer par là quand on rencontre des gens. Et puis qu’importe j’ai envie de le connaître. S’il ne veut pas me répondre, ce sera son choix, et je ne l’en empêcherai pas. D’autant que j’apprécie le fait de pouvoir parler à quelqu’un qui ne me connaît pas. Ca change des gens qui vous reconnaissent dans la rue, ou qui viennent vous assaillir de questions au point d’en devenir vraiment indiscret,s juste parce qu’ils viennent de savoir qui vous êtes.

« Je suis d’accord ! c’est une très très bonne université. L’une des meilleures. Mes meilleures années d’études ont eu lieu à RPS. J’en garde de très très bons et beaux souvenirs. »

Et nous voilà bien parti pour papoter un moment. Il repart d’un coup sur le sujet de ses études et sur le fait qu’il m’a soigné en dépit de tout. Je ris à mon tour. Et comme je n’ai jamais fait médecine et que je ne connais ce genre d’études que par ce que l’on en dit, je lui demandais :

« Vraiment ? C’est si dur que ça ? Enfin, tout le monde dit que c’est extrêmement difficile. Mais comme il y a toujours un décalage entre ce que l’on dit et ce qui l’en est vraiment… » Je lui souris « En tout cas si jamais tu as des questions par rapport à tes études, je peux te passer le numéro de mon médecin ? En fait c’est… un très bon ami, donc si jamais ça t’intéresse… Il travaille aux urgences. » Je sens la gêne revenir aussi. Alors souriant un peu embarrassé « Enfin, je sais que l’on vient à peine de se rencontrer et donc ça pourrait paraître très étrange, mais comme tu m’as aidé, c’est donnant/donnant si tu veux ! »

Je m’éclaircis un peu la gorge avant de soupirer un peu et laisser le silence s’installer entre nous pendant une petite minute, avant de reprendre :

« Tu voudrais faire quoi comme métier plus tard ? »

Je suis un peu embêté par les multiples questions de mon interlocuteur, mais je mets un point à le lui cacher car c’est ce qui se fait habituellement lors d’une conversation polie. Cette gêne n’est pas due à l’indiscrétion des questions, mais bien à mon inconscience de la réponse. Comment pourrais-je comparer mon école à ce qu’elle était avant sans même avoir connaissance de l’état des choses avant que j’y entre en tant qu’élève ? J’ai beaucoup de mal à me figurer la situation mentalement, mais j’en ai encore plus à dire des bêtises, raison pour laquelle je me raccroche à sa nouvelle question comme je l’aurais fait avec une bouée de secours lancée à la mer, ceci afin de remonter sur le pont de notre discussion.

« Quelques années désormais, 3 tout au plus. » Réponds-je sans trop attendre.

Cette question était plus facile que la précédente. Je souris après quelques instants et essaie de me remémorer quelques souvenirs des années passées à RPS. Il y en a pas mal, des bons comme des mauvais, et je pense que ce genre de conversation est une bonne occasion pour y repenser… On oublie trop facilement de s’attarder sur les bons événements de mon passé, pourtant il s’agit du meilleur moyen d’éveiller suffisamment de nostalgie pour chercher à revivre les mêmes moments, les mêmes sensations.

« Vous y avez étudié ? Quel cursus avez-vous suivi ? Enfin, si ce n’est pas indiscret. »

J’estime qu’il peut répondre à cette question comme il m’a posé la même quelques instants plus tôt. En plus, il a piqué ma curiosité désormais et je ne pense pas pouvoir faire demi-tour, ravaler mes mots et tourner les talons pour me faire oublier maintenant que les paroles ont franchi mes lèvres. Un petit sourire plus tard, j’attends donc, calmement, la réponse à mes propos, espérant qu’on ne m’en voudrait pas pour ma curiosité dévorante et ma soif de savoir parfois…perturbante.

« Oh, ce n’est pas une question de difficulté. » Réponds-je en riant un peu. « C’est juste que je ne souhaite pas que les autres tombent malades. Du coup, même si j’adore mes études, j’aimerais avoir à m’en servir le moins possible, car cela signifierait que les maladies et les blessures seront majoritairement guéries… Vous comprenez ? »

J’ai tendance à m’emporter légèrement lorsque je parle de mes études et des raisons pour lesquelles je les ai entreprises, mais l’on me perd encore plus facilement lorsqu’il est question des raisons pour lesquelles j’aimerais ne pas avoir à me servir de tout ce savoir acquis à force d’étude et de travail dans des amphithéâtres bondés et des salles d’examens angoissantes.

« Cela peut être utile, au cas où j’aurais une question ou une information à demander. » Reprends-je après quelques secondes, sans cesser de sourire.

« J’aimerais devenir chirurgien… Neurologue ou cardiaque. » Réponds-je quand il me demande ce que je compte faire plus tard.

Il est rare d’être aussi sûr de soi à mon âge concernant son avenir, mais je veux devenir chirurgien pour épargner à de nombreux frères, sœurs et parents de souffrir comme je l’ai fait lorsque mon frère est parti dans cette salle d’opération après son problème cardiaque… Je veux voir le visage souriant d’une fratrie ou de géniteurs heureux lorsque mes patients ressortiront de ma salle d’opération… C’est vraiment ce que je veux faire, mais je crois que peu de gens peuvent le comprendre.

« Mais j’ai encore du chemin à faire pour y parvenir. C’est pourquoi je m’applique énormément. » Dis-je en souriant un peu à nouveau. « Parfois, j’ai l’impression que mon frère et mon meilleur ami me reprochent d’être aussi peu disponible, mais je dois passer beaucoup de temps dans mes livres si je veux avoir un bon niveau… Ils ne peuvent pas prendre tout le monde, après tout, et je ne pense pas qu’une place puisse être accordée aux élèves « moyens » dans un domaine aussi crucial que la chirurgie. »

Sur ces quelques mots, un petit soupir m’échappe et je regarde devant moi… Pour mon frère, pour ces familles, pour ces amis qui pourraient souffrir de la détresse physique d’un proche, nous ne devons pas, nous, futurs médecins et chirurgiens, nous accorder le moindre droit à l’erreur.

Trois ans. Tu m'étonnes qu'il n'ait pas pu remarqué les changements entre la RPS que j'ai connu et celle qu'il connaît actuellement. Quelle question bête de ma part. En plus je n'ai pas du le mettre à l'aise ou alors j'ai du passer pour un idiot fini. Ou pour un type ayant une vision du temps... illogique.

- J'ai suivi un cursus Arts pour me spécialiser dans ce que je fais aujourd'hui. Même si mon but de départ n'était pas tellement de faire Mangaka. J'y suis resté 5 ans en tout

Ce n'était pas une question indiscrète bien au contraire, et je trouvais même sympathique qu'il s'intéresse à ce que j'avais pu faire à l'université. Cela me ramenait de bien joli souvenir d'ailleurs. Même si le choix de mon cursus avait été l'occasion d'un dur bras de fer avec ma mère.

J'avais de l'admiration pour les gens qui comme lui se lançait dans des études longues et aussi intenses que la médecine. Je lui fis part un peu de ce qui se disait sur sa filière. Il m'expliqua un peu comment il voyait les choses. Ne pas avoir à les utiliser... Car cela signifierait que les maladies et blessures seraient majoritairement guéries... Je clignais un peu des yeux, quelque peu perdu, parce que selon moi cela n'était de toute façon pas possible, mais je me repris et souris comprenant vraiment où il voulait en venir.

- Oui je vois ce que tu veux dire. C'est sûr que ce serait vraiment plus pratique si on arrêtait de tomber malade ou si on pouvait ne pas avoir à se soigner pour la moindre petite égratignure. Mais on n'aurait pas conscience de nos limites.

Je lui parlais alors d'Adrien -sans le nommer pour le moment- et je souris, ravi de voir qu'il acceptait d'avoir son contact. Je pris un bout de papier et un crayon et nota le numéro de mon cher et tendre avant de donner le tout à Akira : - Tiens ! Fais en bon usage !

J'espère qu'Adrien ne m'en voudra pas d'avoir fait une telle chose... Il avait tellement de boulot parfois... La conversation continua et débuta sur ce que voulait faire le jeune homme. De nouveau j'étais admiratif.

- Wow ! Neurologue ou Chirurgien cardiaque ! Eh beh... J'espère que tu y parviendras ! Et mon contact te seras décidément bien utile. Je lui souris et le laissais ensuite parler de son implication et des soucis que cela posait dans son entourage. Oh comme je pouvais le comprendre.... J'étais moi-même dans ce cas là.

Posant ma main sur son épaule, je me mis à la tapoter amicalement.
- Ne te mets pas trop martèle en tête par rapport à ton frère ou ton meilleur ami. Plus tard, tu risques aussi de ne pas être aussi présent qu'ils le voudraient, et il faudra bien qu'ils s'y fassent un jour ou l'autre. Je lui souris.

-Concentre-toi sur ton objectif ! Et puis si tu as du temps libre accorde-le pour eux. Prendre le temps aussi de se poser, c'est ce qu'il y a de mieux... Et crois-moi, je sais de quoi je parle...

Je ne sais pas si c'était vraiment rassurant tout ça. Mais bon. Il avait tout pour réussir, je le sentais. Alors je terminais mon speech en lui disant :

- Le jour où tu seras chirurgien, ton meilleur ami et ton frère comprendront que tu as eu raison d'accorder autant de temps pour tes études, au risque de les mettre parfois de côté.

Cet homme est sympathique et notre conversation se révèle bien plus intéressante que ce que je pensais… Une chance que je sois passé par là aujourd’hui ! Cela me donne envie de sortir de mes cours plus souvent, mais je sais que ce n’est pas de cette façon que je réussirai mes études. Pour ce faire, je dois plancher, encore et encore, sur mes cours, sur la matière à étudier, sur les difficultés qui se placent sur mon chemin… Oui, je dois y arriver ! Je vais y arriver. Un petit sourire se dessine sur mon visage et, quand il reprend la parole je souris un peu plus.

« Je ne parle pas de ce genre de maladies ou de petits bobos… Je pense aux choses bien plus sérieuses. Les tumeurs, les arrêts cardiaques, les malaises… Ce ne sont pas réellement des questions de limites, pas vrai ? » Demandé-je, toujours aussi sérieux.

Certaines personnes meurent du jour au lendemain, sans dire au revoir, et je n’ai pas envie que ce genre de choses arrive aux personnes qui m’entourent. Pour cette raison, je souris un peu à Andréa et je reçois le numéro de son contact avec un large sourire. Quelques instants plus tard, je remercie d’ailleurs celui qui vient de me le donner et, quand il semble admiratif face à mon ambition de devenir chirurgien, je souris un peu plus encore.

« Je ferai de mon mieux pour cela en tout cas et n’hésiterai pas à contacter si vous pensez qu’il pourra m’aider. »

Sur ces mots, je range soigneusement le morceau de papier dans ma poche afin qu’il ne soit pas abîmé et, quand je lui ai fait par de mes inquiétudes par rapport à Kenta et Akihiro, je suis un peu soulagé. Il a l’air de me donner raison, mais je sais aussi que cela ne durera qu’un temps… Si je n’ai pas le temps maintenant, je n’aurai peut-être pas le temps une fois que j’aurai un travail stable, ou même à partir du moment où j’aurai des stages… Cela me fait peur, perdre ma famille, mes amis, mes proches… Dans ces moments-là, habituellement, je pense à ce que je veux faire, je cherche à savoir si c’est réellement mon choix et… oui, je crois que c’est réellement ce que j’ai toujours voulu faire.

« Je veux pouvoir consacrer tout mon temps à mon frère…Je veux être prêt si quelque chose lui arrive à nouveau, en fait… »

Je sais que la route est encore longue avant le diplôme, que son opération a déjà eu lieu, mais j’ai toujours peur que cela se produise à nouveau, que mes études aient à servir pour ma moitié, mon autre, cette partie de moi qui pourtant ne m’appartient pas. On l’aura compris, ma relation avec Akihiro est particulière et je le considère plus comme mon autre moitié que comme mon frère, mais c’est cela, la beauté d’avoir un jumeau, non ?

Parler avec Akira était un véritable plaisir. Parler ainsi de tout et de rien, cela faisait vraiment bien passer le temps. Et puis j'avais la chance de pouvoir papoter avec un garçon très sympathique. Je me sentais mieux, mais je ne me voyais pas quitter ce banc. Je souris quand on se mit à débattre sur les maladies et autres et le fait qu'il voulait que tout ça n'existe pas.

- Cela dépend sous quel angle on les regarde. Par exemple le cancer est apparut avec les différentes révolutions industrielles. Donc d'un côté on est content d'avoir fait ces révolutions, mais on en paie le prix parce que cela a créé des tumeurs et de nouvelles ne cessent d'apparaître. Et puis si tu prends l'exemple d'Alzheimer... Ca peut être vu comme une dégénérescence liée à l'âge. Donc oui, si on avait été plus raisonnable, on n'aurait pas les cancers et si on avait un véritable traitement contre Alzheimer, on vivrait heureux et en effet, tu n'aurais pas grand chose à faire.

Je ne m'y connaissais pas tellement en médecine et tout, mais j'avais lu pas mal de bouquin d'histoire parlant de toutes ces questions d'hygiène et autres... Tout ça pour pouvoir pondre des histoires les plus crédible possible en tant que mangaka. Mon boulot c'était ça aussi. Fouiner dans des tas de livres différents afin d'y puiser l'inspiration. Ceci dit, je ne voulais pas m'étendre sur la question. Très honnêtement ce n'était pas mon champ de savoir alors bon...

Je lui donnais ensuite le contact de mon petit-ami et souris alors qu'il l'acceptait.

- Je le pense oui. Il travaille aux urgences. Mais il est très joignable et je pense qu'il se fera vraiment un plaisir de t'aider en cas de besoin.

La discussion bifurqua sur ses inquiétudes par rapport au fait que son frère et son meilleur ami parfois n'arrivaient pas à comprendre qu'il soit ainsi à fond dans ses études. Je tentais de le rassurer. Mais il ne semblait pas plus rassuré en fait. Il me paraissait très proche et très lié à son frère. Je trouvais ça incroyable un tel lien. Je souris de nouveau, ma main toujours sur son épaule.


- Devoir se donner du mal pour ses études c'est bien. Mais si c'est tout le temps, tu risques de finir... Un peu comme moi ? Je ris un peu. Non sérieusement. Ce que je veux dire, c'est que tu m'as l'air très attaché à ton frère. C'est tout à fait légitime de ta part de vouloir te consacrer pleinement à sa protection et autre. Mais rien ne t'empêche de le faire, sauf les propres barrières que tu t'imposes par rapport à ton travail. Tu dois être vraiment bien placé pour savoir que ne faire que travailler n'est pas très sain. Profite de chaque moment de liberté pour t'occuper de lui ou de ton meilleur ami. Et quand tu auras un travail, ce sera pareil. Dès que tu as un moment, donne le à tes proches. Même si ce n'est que 30 minutes !

Je libérais son épaule et lui souris encore.

- Ne te mets pas trop la pression. Même si ça ne fait que peu de temps que l'on parle toi et moi, je sens que tu es quelqu'un de sérieux et je suis sûr que tu parviendras à faire ce que tu veux comme métier. Juste, accorde toi des instants privilégiés que tu peux avoir avec tes proches. Regarde moi : à me plier en quatre juste pour mon travail, je vois rarement le soleil, j'en oublie de manger, ou parfois de dormir, et je quitte ma bulle seulement quand un pote m'appelle pour papoter ou bien simplement quand j'ai un jour de congé. Mais bon.... la plupart je les consacre à récupérer du sommeil que je n'ai pas eu avant !

Je ris un peu, me disant que je n'étais vraiment pas l'exemple à suivre et qu'il était vraiment trop bien placé pour le savoir.

Le cancer et les révolutions… Je ris un peu quand il termine de parler.

« Le moment où ces maladies sont apparues m’importe peu. Ce qui compte, c’est celui auquel elles disparaîtront. »

Je suis très sérieux, après tout. Je ne dirai pas que j’aurais souhaité que l’on n’avance pas, que j’aurais aimé que l’homme stagne sans prendre de risques, cela fait partie de la nature humaine, après tout, notre petit côté animal curieux, mais je souhaite de tout mon cœur que ces maladies soient éradiquées au plus vite… Malheureusement, je sais que de nouvelles maladies font fréquemment leur apparition au moment où d’autres disparaissent, souvent plus graves et dangereuses que d’autres, plus sournoises, plus silencieuses, bien que la maladie la plus grande soit à jamais incurable… ce besoin de combattre les autres, souvent à leur détriment.

« Je ferai de mon mieux dans ce cas. » Dis-je en souriant un peu à mon interlocuteur. « Même si je ne veux pas être simplement un chirurgien moyen. »

Dans ce genre de profession, la compétition peut être incroyable et il est parfois difficile de discerner amis et rivaux. Je suis de ceux qui craignent les coups dans le dos, bien que je sois trop gentil pour refuser d’aider les autres…

Pendant que j’y pense, je laisse le silence s’installer et, quelques instants plus tard, je sens mon téléphone vibrer et j’entends une sonnerie (une chanson de Kenta, mon meilleur ami) se déclencher. Je laisse sonner et, quelques secondes plus tard, je reçois un message que je lis en m’excusant auprès de mon interlocuteur.

« Oh, c’est mon meilleur ami justement, il a besoin de moi… » Dis-je d’une voix un peu gênée. « Je vais devoir vous laisser. Dans tous les cas, ce fut un réel plaisir de parler avec vous. »

Je lui adresse un très large sourire et je m’incline un peu devant lui avant de ranger mon téléphone et de laisser mon interlocuteur sur ce banc où je l’ai amené… C’est stupide, mais je me sens toujours coupable de devoir mettre fin à une discussion… Après, j’avoue avoir envie de voir Kenta, surtout qu’il n’est pas du genre à m’envoyer des messages très souvent, encore moins à m’appeler, alors cela doit être relativement important, même si j’ignore totalement de quoi il souhaite me parler… Peut-être qu’il veut simplement me faire sortir un peu ? Ou alors peut-être est-ce pour me parler des nouveaux projets qu’il a au travail ? J’en entends souvent parler avec Akihiro alors, franchement, cela ne m’étonnerait pas.

J'aimais beaucoup la manière de pensée d'Akira. Il semblait vraiment combattif et bien motivé. Cela me fit assez sourire de l'entendre ainsi parler de son "combat" contre les maladies. Il n'avait pas tort. Le plus important était le temps où il n'y en aura plus. Ou plutôt le moins possible. Et pour être très honnête, j'étais déjà persuadé qu'il ferait un très bon médecin, quelque soit sa spécialité.

- Vu comment tu es parti, je doute que tu deviennes un chirurgien moyen !

J'étais sincère. Sa façon dont il parlait de ses études, son engagement pour celles-ci, son ambition d'être le meilleur... tout ceci pourra lui permettre de devenir le chirurgien qu'il rêve d'être, même si cela implique qu'il mette de côté parfois sa vie privée, ses amis etc.. Peut être que son frère ou son meilleur ami lui en voudront pour ça. Mais ils seront sans aucun doute assez fier d'avoir un chirurgien aussi doué que lui dans leur entourage. J'en suis persuadé.

Tiens, en parlant justement de son meilleur ami, voilà qu'il reçu un coup de fil de ce dernier. Je souris de nouveau à l'étudiant, me levant du banc et le saluant à mon tour.

- J'ai aussi apprécié de parler avec toi ! Merci aussi pour ton aide tout à l'heure... Et fais attention à tes affaires cette fois !

Je lui fis un petit clin d'oeil et le laissa partir de son côté. De nouveau seul et me sentant en pleine forme après ce moment passé avec le jeune homme, je poussais un soupir satisfait et pris le chemin pour rentrer chez moi. Ce n'était pas tout ça, mais il y avait des planches à refaire, des planches à terminer et des planches à faire ! Pas de temps à perdre ! J'espérais sincèrement qu'Akira profitera bien de ce petit moment avec son meilleur ami. Et moi j'espérais pouvoir trouver un jour de congé voire même plus pour passer du temps tranquille avec Adrien.