Cela fait désormais un moment que je ne me suis plus rendu sur la tombe de mon grand-père. En général, je le fais à la période des fêtes, en mémoire de ces réveillons passés à attendre que sonnent les douze coups de minuit en sa compagnie, mais les examens et les différentes exigences de la période m’ont contraint à remettre cette petite visite à plus tard. À chaque fois, j’ai l’impression de le léser, même s’il n’est plus là pour m’observer et avoir conscience de mes agissements. Il m’a été enlevé alors que j’étais si jeune, et pourtant je ne l’oublierai jamais.
Je déambule dans les couloirs, décidé à me rendre à la bibliothèque pour étudier quelques notions que je ne maîtrise pas vraiment – pas du tout, à vrai dire, mais le déni est toujours beau – lorsque mon regard tombe sur un visage qui ne m’est pas totalement inconnu. Une jeune femme dont j’ai déjà aperçu les traits quelque part. Rapidement, je me passe en mémoire les enfants de célébrités dont je connais les noms. Aucun d’entre eux ne me dit quelque chose. Peut-être une ancienne voisine ? Non plus. Une ex ? Je m’en rappellerais, mais alors… Ah ! illumination.
Sans attendre plus longtemps, je prends la direction de l’inconnue en question, un large sourire au visage, comme à mon habitude, avant de lui adresser un grand signe pour lui signaler ma présence. Enfin, pas trop grand quand même, j’ai une réputation à préserver ici.
« Salut ! Je savais pas que t’étudiais à la RPS. Tu te sens mieux depuis la dernière fois ? »
Très souriant, très avenant… Mais peut-être qu’elle ne se rappelle pas de moi ? Au pire on avisera si ce n’est pas le cas, hein ? C’est pas comme si on oubliait facilement une personne qui nous a soutenu lorsque l’on allait pas bien, pas vrai ? C’était à ma dernière visite au cimetière, lorsque je suis allé sur la tombe de mon grand-père pour me recueillir. Je me rappelle de l’avoir aidée alors qu’elle n’allait pas bien ; c’est dans ma nature, alors peut-être suis-je le seul à qui ce genre de choses reste en mémoire ? Enfin, qu’elle s’en souvienne ou pas, je pense qu’il est normal d’aller la voir pour m’assurer qu’elle va mieux désormais. On ne m’enlèvera pas ce petit côté spontané, même s’il est de temps à autres la raison des problèmes que je m’attire avec les étudiants ou les professeurs.
Un an… Voilà depuis combien de temps tu étais livrée a toi même plus que tu ne le seras jamais. Son absence mettait un certain vide dans ta vie. Tu n’arrivais pas a le combler malgré toi. Tu avais beau te rendre dans cette prairie où poussait chaque jour de nouvelle pierre de marbre, tu n’aimais pas cet endroit. Voir le nom de ton mère écrit sur un simple bloc ne te suffisait pas. Certes, il était récurrent que tu viennes te confier à elle, comme si tu attendais une réponse ou alors un simple signe. Sauf que la dernière fois était différente. Tu traversais une mauvaise passe et les larmes ont coulé a flot sur ta peau pâle. C’est ce genre de moment que tu remets tout en question, que tes envies de disparaître de ce monde sont les plus fortes
Tu ne pouvais pas accepter son départ. Et comme l’enfant que tu es, tu ne l'accepteras jamais. “C’est la vie” Tu ne voulais pas dire ces mots-là. Tu sais mieux que quiconque que la vie sait bien être cruelle. Tu as vu des choses, tu as subi des choses, et même si ta vie a su t'épargner un nombre incalculable de fois, tu n’arrivais pas à lui en être reconnaissante. Ingrate, peut-être… Mais si tu continuais à la blâmer elle et ton karma de t’avoir foutu de telles épreuves. Tu n’étais pas la fille au dossier impeccable tel un Prophète, mais tu pensais que tu avais le droit d’avoir la vie d’une jeune fille normale. Tu avais aussi besoin d’un repère. Et ce repère tu ne l’avais plus. C’est en regardant ce pendentif autour de ton cou, renfermant la photo de celle que tu aimais que ça te rappellait que tu étais juste au début de tes problèmes. Cependant, il n’était pas l’heure des pleurnicheries. Tu n’étais pas heureuse comme tu le souhaites, mais tu faisais tout pour remédier à ça. Tu quittais le toit de l’établissement, prenant ton sac pour te rendre a ce cours qui, tu savais ne te servira pas pour ton avenir de danseuse que tu m’étais que tu mettais tant de mal a préparer. Tu longeais ces longs couloirs, regardant - pour ne pas dire dévisager - les élèves de cet établissement. Tu n’aimais pas cette école et tous ces gosses de riche qui renfermer. Eux qui se plaignaient seulement de ne pas avoir trouvé des chaussures de la couleur souhaitaient ou alors que leur argent de poche a été diminué. Tu te contentais de soupirer, claquer ta langue contre palet et lever les yeux au ciel. Si tu pouvais seulement ces soucis-là… Non, du haut de tes dix-neuf ans toi tu avais des soucis d’argent et une vie loin d’être stable et banale. La véritable vie, ils ne connaissent pas. D’ailleurs en voilà un autre qui ne semblait pas banal. Tu étais impatiente de quitté cette école qui refermais des spécimens aussi étranges que lui. Si avoir fréquenté une école réputée ne faisait pas joli sur un cv, tu aurais mis les voile il y a un moment. Un signe en ta direction, tu n’as pas pu t’empêcher de regarder dans les alentours. C’était toi qu’il interpellait là ? Tes sourcils froncés, tu l’écoutais débiter ses paroles. Tu pris un instant pour le détailler du regard, n’oubliant aucun élément. Tu as eu ce déclique.
Tu ne l’avais pas oublié, malgré toi. Ce que tu n’avouais pas sur ton dernier passage au cimetière en dehors du fait que tu t’es effondré comme loque, c’est qu’a ce moment, ce jeune homme qui se tenait devant toi t’as prêter son épaule pour te consoler. Tu ne l’admettras jamais, mais ceci t’as fait un bien fou. Tu n’aimais pas parler de ta défunte mère a qui que ce soit. Tu n’aimais pas voir les yeux des personnes pleins de pitié ou alors qu’il fasse mine de te comprendre tandis que ce n’est pas le cas. Il était différent, mais l’admettre, tu refusais. Tu ne supportais pas cette idée d’avoir été faible. Une seule personne était autorisée à te voir aussi faible, son nom était Sakura. Elle te connaissait, elle te comprenait.. Lui, il m’a bien servi certes, mais pas au point que je fasse ami-ami avec lui. Tu poussais un lourd soupir, ta main se perdait dans ta chevelure de feu. Ton air détaché sur ton visage, cette voix habituellement sèche et ce regard déconcerté qui n’appartenait qu’a toi.
« Pourquoi tu me demandes ça ? C’était rien de spéciale qui est arrivé là-bas okay ? »
Tu voulais poser les bases, lui expliquer que tu n’étais pas une petite chose fragile. Il suffit que d’une seule fois pour que les gens ne te voient plus que de la même manière. Tu sais mieux que quiconque que la faiblesse de l’un fait la force de l’autre. Parano ? Tu ne disais pas ça. Tu es méfiante et tu te protégeais. Comme tu l’as fait toutes ces années. Rien de plus normale.
« Écoute, on s’est rencontré une fois, tu as vu qu’on était dans la même école et ca s’arrête là. Donc ca s’arrête là, tu n’as pas besoin de m’adresser la parole »
Directe et droit au but. Tu n’aimais pas faire de semblant. Tu posais les bases, lui expliquant que tu ne veux plus rien a voir faire avec lui. Même si demain tu devais a nouveau le croiser dans le cimetière
Sur le moment, je ne comprends pas la réaction de l’autre étudiante et je papillonne des cils, cherchant pourquoi elle s’adresse à moi d’une façon si sèche. Son regard est difficile à soutenir également, et je ne peux discerner ce qu’elle pense vraiment, mais j’ai comme l’impression qu’elle n’est pas aussi heureuse de me voir que je ne le suis. Une idée ? Je pourrais le croire si elle ne reprenait pas la parole en des termes qui ne laissent la place à aucune ambiguïté, pas même la plus faible. Ces propos me laissent sans voix durant quelques secondes, mais je me ressaisis rapidement. Allons, Sho, tu vaux mieux que ça, c’est pas une fille qui va t’intimider, pas vrai ?
« Rien de spécial ? »
Jamais je n’ai supporté et jamais je ne supporterai les larmes d’une autre personne, pas même la plus odieuse de toutes, alors je ne peux accepter que cette fille prétende qu’il ne s’est rien passé de spécial. Elle était en pleurs, elle était seule sur cette tombe, à pleurer un être disparu et dont je ne savais rien, et je suis naturellement allé vers elle. Personne ne devrait rester seul dans un moment de faiblesse, personne ne devrait être abandonné, livré à soi-même. C’est pour cette raison que mes sourcils se froncent un peu à sa rétorque. L’incompréhension, et même un peu de tristesse, se lit dans mon regard, alors que j’enfonce les mains dans le fond de mes poches pour jouer avec quelques yens qui s’y trouvent.
« C’est normal que je vienne voir comment tu vas, non ? reprends-je après un instant. Tu n’as pas besoin d’être aussi rude. »
Les raisons pour lesquelles elle m’a répondu aussi sèchement m’échappent encore, et à vrai dire je n’ai pas envie de savoir pourquoi elle s’est adressée à moi de cette façon, alors que j’ai été présent pour elle lorsque nous nous sommes rencontrés ce jour-là, mais je ne suis pas du genre à me laisser faire sous prétexte que « ce n’est rien de spécial ». Il ne manquerait plus que ça. Quant à respecter sa volonté de ne pas me parler et de ne pas m’entendre lui parler… Nous dirons que je suis quelqu’un de particulièrement têtu, lorsqu’il le faut, et que je n’aime pas obéir aux ordres de ceux qui se trouvent à mon niveau. L’école est déjà assez compliquée comme ça, pas besoin d’en rajouter avec la réglementation des étudiants en eux-mêmes.
Brute ? Tu l’étais et tu l’assumais à 200%. La vie n’a jamais été tendre avec toi, et ce, depuis que tu es née. La seule personne qui a toujours su te protéger était parmi les anges. Tu ne voulais plus compter sur les gens. Il te restait Sakura en effet, mais elle avait ses propres problèmes de… Taille a régler de son coté. Il était quand même vrai que c’était elle que tu aurais préféré croiser dans le cimetière ce jour-là. Montrer une seule fois que vous êtes faible et c’est terminé, ce sera votre étiquette. Alors valait mieux que tu replaces ces barrières autour de ton coeur et éloigner tout petit curieux comme lui. Voilà pourquoi tu n’aimais pas pleurer, montrer quelconque sentiment. Encore moins devant des inconnus ou ceux que tu ne pensais pas revoir. Tu baissais la tête laissant un lourd soupir t’échapper. Tu finissais par la lever puis rabattre tes mèches en arrière. Ce réflexe que tu possèdes depuis que tu as acquis ta longue chevelure. Une mine faussement abattue détendait les muscles de ton visage, prenant une moue presque mignonne. Tu n’oubliais non plus la voix qui accompagnait le tout pour voir a quel point tu étais triste pour lui.
« Oups… J’ai touché ton petit coeur, désolée… »
Ta main sur ta bouche, tu laissais croire que tu as été touché de l’avoir blessé ainsi alors qu’au fond, tu en avais rien a foutre de ce qu’il pouvait penser de toi. On ne t’appelait pas Ice pour n’importe quelle raison. Tu as prit l’habitude d’entendre toute sorte de vacherie depuis ta venue au monde. Alors tu ne vas pas changer du jour au lendemain. Ta carapace est plus résistante désormais. Ton regard glacial habituel, tu reprenais un air plus sérieux avant de continuer.
« Ecoute, je vais bien d’accord. »
C’était ce qu’il voulait savoir non ? C’était totalement faux. Émotionnellement, tu étais au plus bas ; cependant, il a fait une fois sa bonne action. Tu préférerais t’enfermer dans ta bulle et t’appuyer sur ton sort, comme tu as su toujours le faire durant toutes ces années. Tu tournais les talons, afin de te rendre a ton prochain cours, mais pas si sûr que tu y assistes vu que tu te sentais contrarier. Instinctivement, tu serrais ce pendentif qui te tenait tant a coeur. Te mordant la lèvre que tu pouvais presque sentir le goût métallique du sang dans ta bouche. Tu t'éclaircissais la voix puis tu te retournais vers sa silhouette
« Et une dernière petite chose, ne t'avise même pas de dire que tu m’as vu ce jour-là d’accord ? »
Qu’on sache que Antachai Katreeya a pleuré, non tout sauf ça… Non tu préférais le mettre en garde s’il ne veut pas que sa vie devienne un enfer a cause de moi
S'il y a bien une chose que je ne comprendrai jamais, c'est la raison qui pousse certaines personnes à s'adresser aux autres avec aussi peu de politesse. Je ne suis pas forcément le plus poli des garçons, et il m'arrive de jurer, bien que ce ne soit pas forcément dans ma nature d'être impoli et désagréable volontairement, mais parfois, ça me blesse un peu de voir que certains ont l'air de s'en moquer totalement. Et le comportement de cette fille n'est pas des plus sympathiques. Et plus qu'être impolie, elle me choque par son comportement froid. Elle n'avait pas l'air aussi... Bizarre, quand je l'ai vue la dernière fois. Malgré moi, je ne peux pas m'empêcher de froncer un peu les sourcils, perplexe.
Mais avant même que je puisse ouvrir la bouche pour m'adresser à elle, l'autre étudiante s'éloigne de moi, me laissant ainsi dans la plus complète des incompréhensions. Quelle n'est pas ma surprise de la voir faire volte-face, quelques secondes plus tard, pour m'adresser la parole, ce qui m'offusque tout simplement, cette fois.
« Alors écoute, tu peux parfaitement penser que je n'ai pas à m'inquiéter pour toi, mais ne viens pas faire comme si j'étais prêt à raconter ça à tout le monde. »
Cela ne m'intéresse pas du tout. Après tout, j'ai conscience qu'un moment comme celui qu'elle a du vivre dans ce cimetière, cette tristesse qui s'empare de nous lorsque l'on se recueille sur la tombe d'une personne qui nous a été chère, est terriblement difficile à supporter, et qu'il s'agit d'un sentiment très personnel que l'on n'aime pas forcément porter à connaissance des autres.
« Je ne suis pas du tout ce genre de personne. »
Et elle doit s'en foutre totalement, compte tenu des propos qu'elle tient et de son attitude, mais je préfère largement avoir à faire à une personne que je dois réconforter ou encourager qu'à un mur d'indifférence comme ça semble être le cas actuellement. Un soupir m'échappe alors que je regarde un peu autour de nous, désormais plus crispé à cause de l'insatisfaction que cette conversation me procure, car il faut avouer que c'est vraiment dommage de voir une personne se renfermer sur elle de cette façon.
« Dans tous les cas, si t'as besoin de parler, tu peux venir me voir. »
Je sais, c'est donner le bâton pour se faire battre, mais je ne suis pas du genre à abandonner. Pas du tout, même.
Tu voulais qu’il s’éloigne de toi tout simplement. Repenser a l’épisode du cimetière était beaucoup trop dur pour toi. Déjà te recueillir sur cette tombe t’était difficile. Pas parce que ceci était une corvée ou un calvaire, mais, malgré l’année qui est passé tu n’arrivais pas a accepté la mort de ta génitrice. Beaucoup trop difficile. Donc parler du jour où tu as littéralement craqué, tu ne voulais pas. Avec les années, tu as appris a canaliser toutes tes émotions et les enfermer dans un boite en boite. Tes problèmes, tu ne les confessais pas, pensant que tu pouvais tout gérer et que ceci ne regardait personne. Aussi parce que tu savais que les personnes qui te disaient qu’ils te comprennent ne te comprenais pas du tout. Tu étais juste une boule d’émotions qui n’attendais qu’a exploser, et c’est ce qu’il s’est passé au cimetière ce jour-là. Mais commencer a te laisser aller, déverser toute ta tristesse sur l’épaule de n’importe qui, en l’occurrence lui tu n'étais pas psychologiquement prête. Tu arquais les sourcils un sourcil. Il n’était pas ce genre de personne ? Ceci restait à prouver. Un seul faux pas de ta part et tu te sentirais fichue. Tu avais toujours cette impression que tu devais te méfier de tout le monde. Tu étais tellement habituée à être déçue de ce dernier… Les dernières paroles du japonais ont cependant su te surprendre. Tu n’avais pas l’habitude qu’une personne que tu venais de bâcher puisse agir de la sorte avec toi. C’était une première. C’était tellement inattendu de sa part.
« Dis moi, pourquoi tu t’inquiètes autant pour moi ? »
Ta voix s’était adoucie, ton visage était plus détendu qu’auparavant. Tu te rapprochais à nouveau du jeune homme, les bras croisés contre ta poitrine. Ce garçon était plein de surprises. T’avoir par les sentiments n’est pas chose aisée habituellement.
« Tu ne me connais même et je suis sure que tu as aucune envie de me connaître… Alors j’ai besoin de savoir pourquoi mon état te préoccupe autant »
Tu ne pouvais pas croire que ce garçon soit d’un altruisme aussi naturel. Disons que tu n’étais pas habituée. Tu étais exécrable et détestable alors pourquoi ressentit-il le besoin de me rassurer en étant une oreille attentive
Dernière édition par Antachai Katreeya le Lun 14 Mar - 13:18, édité 1 fois
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Ce message a été posté Mer 2 Mar - 20:28
On m’a déjà dit souvent que je me mêlais trop peu de ce qui me regardait, que je fourrais un peu trop mon nez dans les affaires des autres, mais ce n’est pas de ma faute ! Au fond de moi, j’ai l’intime conviction que ce n’est qu’en venant en aide aux personnes tristes que celles-ci verront revenir leur sourire. Mon grand-père passait beaucoup de temps à s’occuper de ceux qui allaient mal. Je le sais, on me l’a raconté. Il était quelqu’un de bien et, tout comme lui, j’aimerais que ma vie serve à quelque chose, qu’elle serve aux autres. Vraiment. Et je relève les yeux quand elle me pose une question.
« Eh bien… Parce que je voulais être sûr que tu allais mieux, simplement ? » Mon regard reste posé sur elle alors s’est approchée. Pourquoi, encore ? « Je ne sais pas exactement pourquoi. Je l’ai ressenti comme ça, c’est tout. »
Sur ces mots, je baisse un peu les yeux, trouvant soudainement mon comportement stupide. Seul un idiot chercherait à connaître l’état d’un parfait inconnu. Mais je ne suis pas idiot, je sais parfaitement que si je suis allé vers elle pour lui demander comment elle se portait, c’est avant tout parce que je sais que la situation dans laquelle elle se trouvait n’était pas agréable ! Un soupir m’échappe alors que je relève la tête et essaie de mon montrer aussi compréhensif que possible.
« Si vraiment ça t’embête, excuse-moi, je ne viendrai plus t’embêter. Mais n’oublie pas ce que je t’ai dit. »
Un léger soupir m’échappe alors, et je regarde encore autour de nous pour vérifier que personne ne se trouve à une distance où il serait capable de nous écouter.
« On ne doit pas se retrouver seul dans ce genre de moment. »
De mon côté, je sais que j’aimerais que l’on s’inquiète pour moi. Je sais que ma vision des choses est un peu idéaliste, que je suis du genre à être ami avec tout le monde, ou du moins à essayer de le faire, mais je voudrais vraiment que cela soit le cas.
Ironique que tu parles du sujet qui te fâche le plus avec un mec que tu connaissais a peine. Oui tu trouvais ça vraiment étrange. Mais bon, tu as à fait une bourde en te laissant aller. Tu ne comprenais pas pourquoi ce garçon était aussi prévenant avec toi. Ce n’est pas une chose dont les gens faisaient rarement preuve avec toi. Pour ne pas dire pas du tout. A force, une habitude s’installer et vous n’attendez jamais de compassion de la part des autres. Donc ceci arrive, on ne sait jamais comment régir. Tu étais face a ce cas de figure. Même avec toute la volonté du monde et toute la noirceur dans ton coeur, tu ne pouvais pas nier, ca t’as un peu toucher mine de rien. Mais il n’avait pas besoin de le savoir selon toi. Lorsqu’il finissait sa petite leçon de morale, tu soufflais un moment, rabantant des cheveux écarlate en arrière. Un ton toujours aussi sarcastique raisonnait a travers tes paroles.
« Très bien, j’en prendrais note si ca peut te faire plaisir »
“C’est vrai tu as raison” tu ne pouvais le sortir. Ton orgueil en prendrait un coup. Tu ne te rabaissais jamais devant les gens. Ton credo. Alors plutot mourir plutôt que d’admettre que ses propos était vrais. Totalement vrai. Quand ta mère est décédée, tu t’es retrouvée plus seule que jamais. Tu étais tellement prise de regrets et de haine à ce moment. Si Sakura n’était pas là pour te soutenir lors de cette épreuve, tu ne sais pas où tu en serais aujourd’hui. Même si tu l’adorais plus que tout, elle ne pouvait pas réellement savoir ce que ton coeur refermais. Tu ne la blâmais pas du tout. Un petit moment d’hésitation, et puis tu osais finalement demander.
« Dit moi c’est qui ? C’est un de tes parents que tu as perdu ? »
Il fallait avouer que ceci te titillait. Même un peu trop.
Le comportement de cette fille m’interpelle malgré moi. Pourquoi se montrer aussi hostile envers une personne qui ne souhaite rien de plus que l’aider ? Jusqu’à preuve du contraire, je n’ai pas été impoli, ni même hypocrite envers elle. Certes, elle n’est pas dans ma tête mais… Non, vraiment, j’ai du mal à comprendre où se situe le problème, cela me peine légèrement et je me renfrogne jusqu’à ce qu’elle reprenne la parole.
« Mon grand-père. »
Oui, on pourrait dire que je n’ai aucune raison d’être si triste à la période de fin d’année, parce que ce n’est « que » mon grand-père, mais il était un tel modèle à mes yeux que j’ai encore du mal, aujourd’hui, à accepter son départ. Pourtant, je ne l’ai connu que quelques années, avant qu’il ne s’éteigne d’un mal que je ne pouvais comprendre, comme j’étais encore jeune. Mon regard se perd dans le vague quelques secondes, mais je me reprends rapidement et j’affiche un sourire malgré tout.
« Je vais souvent le voir à cette période-ci. Ça me permet de me rappeler quelle personne il était. »
Peut-être que l’on s’en moque, peut-être que ça n’a aucune important aux yeux de cette fille, mais j’ai toujours éprouvé un incroyable soulagement lorsque je me rendais sur la tombe de mon grand-père. J’ai d’ailleurs pris l’habitude de parler de lui comme s’il était toujours là, quand j’évoque mes visites au cimetière. Un soupir m’échappe finalement.
« Tu sais, je peux parfaitement comprendre que tu n’aies pas envie d’en parler, mais évite juste de m’agresser la prochaine fois. »
Cette fille semble plus jeune que moi. C’est un peu comme si j’étais son grand frère, non ? Le sourire me revient rapidement alors que je regarde l’heure qu’il est sur mon téléphone. Elle doit peut-être se rendre à un cours ou je ne sais où ? Dans tous les cas, j’aimerais simplement qu’elle retienne ce que je lui iai dit.
Ta mère avait raison, tu restais quelqu’un d’impénétrable. Tu n’aimais pas te mettre a nue. Paraitre dure, impassible, voire cruelle était la seule carapace que tu as su forger au fil des années pour éviter de t'attacher et qu'on s'attache à toi. Et ce garçon tentait en vain de la briser en se préocupant autant de toi. Cette même carapace a été fissurée malgré toi. Tu soupirais. Tu voulais savoir qui il avait eu le malheur de perdre. Son grand-père… Tu ne pouvais réellement le comprendre. Tu avais perdue toi-même tes grands parents il y a 12 ans mais ca ne t’avais jamais atteint. Tu avais perdu même un bon nombre des membres de ta famille lors de ce tsunami, mais seul le décès de ta mère a su te marquer. Mais bon, pour lui son grand-père devait compter vu comment il parlait de lui, même brièvement. Ca, tu pouvais néanmoins le comprend. Tu ne savais pas ce qui il était pour lui, mais s’il allait le voir à une période aussi spécifique comme il le disait, c’est qu’il comptait énormément pour lui. Tu soupirais puis roulais des yeux lors de ses dernières paroles.
« C’est fou ce que les mecs sont susceptibles de nos jours… »
Bien évidemment tu ne voulais pas en parler. Même avec ta meilleure amie, tu n’en parlais pas. Pour ne pas pleurer, pour arrêter de te plaindre, de culpabiliser d’avoir été un enfant terrible. Tu voulais aller de l’avant malgré cette petite crise de nerfs au cimetière. Cependant, tu penses que tant que tu n'auras pas fait ton deuil, ce serait peine perdue
« Au fait, j’ai omis de me présenter… Je m’appelle Katreeya. Je pense que c’est la moindre des choses pour avoir été aussi “odieuse” »
Ton ton se voulais sarcastique. Tu n’étais pas du genre à dire “désolée” ou encore “merci”. Tu n’étais pas du genre à être prise de remords ou de choses comme ça. Non, c’était ta fierté et ton orgueil qui te permettait d’agir ainsi. C’était pour cette raison que tu restais difficile à vivre et imbuvable. Croisant tes bras contre ta poitrine, un fin sourire se dessinait sur tes lèvres.
J’ai toujours chéri l’image que j’avais de mon grand-père. Il était un homme honnête, avec un grand cœur, et il donnait beaucoup de sa personne afin de faire le bonheur des personnes qui l’entouraient. Malheureusement, cela n’a pas suffi à le garder sur cette bonne vieille Terre plus longtemps qu’il l’aurait fallu. Mes parents m’ont souvent répété que j’étais terriblement attaché à mon grand-père, mais qu’il fallait que j’arrête de me rendre triste avec sa perte à chaque fois qu’arrivait la période des fêtes, mais je n’ai jamais totalement réussi à passer au-dessus. Heureusement, je fais de gros efforts pour y parvenir.
Pour éviter de la relancer dans son cercle d’ironie, je me retiens de répondre à cette fille qu’elle a tort. Avec ma chance, elle le prendrait mal ou s’en servirait contre moi, ce n’est pas franchement utile. Je me contente alors de soupirer pour moi-même, mécontent de ce que j’ai entendu, avant de m’étonner de ces présentations tardives.
« Sho, mais je doute que tu prennes la peine de le retenir. »
Je suis peut-être gentil, mais je n’aime pas qu’on me marche sur la tête ; c’est pour cette raison que mon ton s’est fait légèrement plus dur, tout comme mon expression, alors que je croise les bras à mon tour, sans cesser de la regarder.
« Je trouve ça dommage, vraiment. »
En se comportant comme ça, cette fille va se retrouver totalement seule et ça me désole profondément. M’enfin, ce n’est pas comme si j’étais son père ; je n’ai absolument aucun moyen de lui faire entendre raison, alors je vais me contenter de faire comme si de rien n’était et continuer ma petite vie de mon côté, puisqu’elle n’a pas l’air coopérative. Dire que je voulais juste l’aider. Certaines personnes m’étonneront toujours avec leur ingratitude et la façon dont ils s’adressent aux autres. Ça a le don de m’énerver. Au moins, de mon côté, j’aurai fait de mon mieux en lui proposant de discuter si elle en avait besoin.
Un léger sourire ornait tes lèvres. Ce n'est pas parce que tu l'as pourri que tu allais oublier son nom pour autant. En fait tu n'oublieras pas son nom tout simplement à cause de son geste. Tu ne lui diras pas qu'au fond, ça t'a fait du bien d'avoir quelqu'un qui te comprenait, qui savait ce que ça faisait de perdre un être chère. S'il pouvait juste le penser, même difficilement, ça te convenait parfaitement. Tu arquais un sourcil en l'entendent. Quoi ? Qu'est-ce qui était dommage ? Que tu sois à la limite de la misanthropie ? Le fait que tu sois quasiment antipathique... Ce n'était pas le premier à te dire ça, que passais à côté d’énormément de chose avec ton caractère de merde... Mais tu pensais que tu n'avais pas le choix. C'était mieux que de ressortir encore d'une déception pensais-tu. Tu étais lassée et énervée de ressentir cette émotion qui te dévorait de l'intérieur et qui t'as fragilisé plus d'une fois. Tu cessais de rassurer en répétant qu'il valait mieux être seule que mal accompagné. Cependant y croyais-tu ? Tu ne savais pas vraiment... et cette rencontre te faisait te remettre en question. Mais, encore une fois, tu ne compromettras pas ta fierté. Tu sortais de tes pensées plongeant son regard dans le sien.
« Très bien Sho... Je dois aller en cours. Je suppose que maintenant que nous fréquentions deux endroits communs, on sera amené à se croiser »
Tu lâchais ceci dans le sarcasme. C'était vrai, vous allez sûrement supporter la vue de l'un et de l'autre ; malgré vous
« Alors je te dis à la prochaine… »
Un bref clin d'oeil à son adresse, tu tournais les talons. Tu savais que tu le reverrais un jour... Tu sais que cette prochaine rencontre serait tout aussi épique. Surtout pour le garçon...
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