TENUE ─ Le 6 novembre, ce jour devrait joyeux et rayonnant, mais pour moi il est tout simplement merdique et déprimant. Déjà qu'à l'origine, je ne suis pas très famille pour mes anniversaires et préfère le fêter avec mes amis, mais cette fois, je n'ai aucune envie de le faire avec personne. Ni Tora, ni Saru, ni ma mère qui reprend doucement du poil de la bête grâce aux nombreuses affaires à son boulot. Faut dire qu'elle se plonge deux fois plus qu'avant dans ses dossiers, parfois en m'ignorant durant des jours, voir des semaines. ça ne fait qu'un mois que mon père est mort et j'ai déjà l'impression qu'il nous a quitté plusieurs années plus tôt. Il n'est plus là pour me réprimander, pour qu'on se dispute sur un quelconque problème, des fois sans raison. Et c'est ça qui fait le plus mal. Où que j'amène mes yeux, je ne le vois pas. Où que je tourne la tête, je ne l'entends pas. La déprime a doucement fait son chemin jusqu'à mon esprit, parasitant ma motivation et bousillant mes journées. L'école me paraît ennuyante, taper sur les gens ne m'intéresse plus vraiment, mais j'ai développé un intérêt malsain pour fouiller dans les affaires de mon père. Je cherche des indices, des pistes où porter mon attention pour découvrir davantage. Je deviens pire qu'un savant fou, à accrocher des papiers aux murs de ma chambre, à suivre des gars dans la rue en faisant mine que j'observe le paysage, tout cela en croyant découvrir des secrets inavoués. Je me prends pour un détective, un flic en herbe, ou apprentis abrutis qui va très certainement s'attirer des ennuies à foutre son nez partout. Mais je m'en fou. Parce que je le fais pour lui, pour me racheter, pour le venger, pour n'importe quoi tant que ça en vaut la peine à mes yeux. Sauf qu'en ce 6 novembre 2016, je me vends complètement vidé, tel un zombie. Tora m'a forcé à sortir avec eux, en boite, et j'ai fait l'effort de quitter mon donjon pour leur faire plaisir. Les dix premières minutes, je tenais, j'arrivais à supporter l'ambiance mais passé ces dix minutes, un tic à la jambe m'a obligé à quitter mon siège pour prétexter un tour aux toilettes. J'ai fuis. J'ai bousculé les gens, fendu la foule sans une excuse ni un regard et j'ai pris la porte pour sortir dehors, le froid me mordant le visage. Dans un souffle, l'air est devenu spectral et j'ai frissonné. Bientôt noël, mais je n'ai toujours pas le sourire. Mes yeux vont et viennent sur la chaussée, détaillant les arbres, les bâtiments et tout ce qui passe à la porter de mes globes oculaires, jusqu'à voir ce groupe de mec plus loin. Des démangeaisons me reprennent, comme un besoin vital d'éclater des gueules... Le stresse s’empare de moi, comme un étau qui se resserre autour de ma chaire. Je ne dois pas céder, pas maintenant. D'un geste brusque, j'empoigne mon portable dans ma poche et cherche son nom, appuyant sur l'écran pour l'appeler, entendre sa voix. « Où es-tu ? » J'ai besoin de lui, pour ne pas refaire la même erreur.

TENUE ─ Mes parents sont restés à Tokyo jusqu’à cette semaine où je leur ai demandée de rentrer, j’allais mieux, en tout cas les médecins semblaient dire que le cœur tenait le coup et je pouvais de nouveau marcher sans la chaise roulante. Il en a fallu du temps je dois bien avouer que ce ne fut pas simple tous les jours, parfois j’avais des tensions trop hautes ou trop basses, je ne mangeai pas assez, je dormais mal et le manque d’exercice m’avait de nouveau engourdi les muscles, mais dans l’ensemble j’étais vivant et sur la voie de la guérison alors il y avait pire pas vrai ? Il faisait froid, le temps s’était rafraichi rapidement et le fait que j’ai passé du temps enfermé à l’hôpital m’a fait un peu louper la transition de saison, mais ce n’est pas grave, j’aurais pu ne pas être présent après tout, c’est donc avec le sourire que je me suis habillé chaudement pour sortir dehors, ma première promenade . J’avais encore de nombreuses visites obligatoires forcément, des examens aussi, mais ce n’était pas différent lorsque j’étais mourant, je devais aussi faire ses allers-retours, c’est une routine pour moi. Je mentirai cependant si je disais que je n’avais pas un gout amer depuis un mois, quand je pense à Momiji je me retrouve avec une expression plus sérieuse et pensive, me demandant comment il surmonte la perte de son père, il n’est pas venu me voir alors que je l’avais invité à le faire, mais cela ne m’a pas étonné non plus.  Levant les yeux sur le ciel obscur et étoilé, je soufflais de la buée en essayant de m’amuser à faire des formes, comme lorsque les gens fument et créaient des cercles, mais je ne suis pas doué pour ça et je rigole de cette activité solitaire, passant surement pour un idiot aux yeux des passants. Mais cela ne serait pas une nouveauté. Je pris une photo avec mon téléphone de moi pour pouvoir l’envoyé sur mon compte et montrer que je vais bien ! Mais je reçois un appel avant de terminer ‘envoie, voyant le nom qui s’affiche je suis surpris, mais répond de suite. « Momo ? » C’est étrange qu’il m’appelle, même très étrange. Regardant autour de moi, j’ai marché en ville sans vraiment avoir de but précis. « Je me balade en ville et toi ? » J’aimerais le bombarder de questions, mais je doute que ce soit ce qu’il souhaite dans l’immédiat. « Qu’est-ce qui se passe ? » Demandais-je simple d’un ton calme et posé, prêt à le rejoindre où qu’il soit.

TENUE ─ Je ne le surmonte pas, voilà tout. La mort de mon père est trop fraîche pour faire le deuil, j'ai l'impression de l'avoir perdu hier et cette impression me donne un effet vide dans la poitrine, comme si je ne ressentais plus rien. Ce soir-là, les frères Otsuka voulaient me changer les idées, me faire sortir pour m'amuser, mais je n'ai même pas le coeur à rire, ni à boire, encore moins à fumer. J'ai calmé mes doses depuis un moment déjà, oubliant presque je touchais à ces saloperies. Mon père ne voudrait pas que je continue sur cette voie, à me pourrir la vie et à risquer de me chopper une maladie mortelle, incurable. Cette sortie ne m'aide pas à aller mieux, au contraire, elle m'enfonce dans mon désarroi. Je ne me sens pas bien entouré de ces gens, j'ai la sensation d'étouffer, de ne pas exister, d'être transparent. Tora et Saru ne disent rien à mon départ, puisque mon excuse ne vaut pas le coup de s'inquiéter, alors que je sors de l'immense bâtiment pour affronter le froid de cette saison d'automne. Ce n'est pas agréable, ça pique. La ville est calme, à part le trafique des voitures sur les voies, rien ne vient gâcher ce tableau nocturne. Jusqu'à les voir, eux, ces gars que je ne connais, que j'ai pas envie de connaître mais que je désire par dessus tout cogner. Une impulsion soudaine, une pulsion insatiable et gourmande, mais c'est comme lors d'un régime, faut savoir se retenir et caler cette envie d'une autre manière. Pour cela, je téléphone à Kellian. Momo ? ça m'étonne toujours qu'il me surnomme ainsi après les crasses que j'ai pu lui faire. « J'ai besoin de toi. » ça ne répond pas vraiment à sa question, mais ce serait trop long de lui expliquer ce que je ressens. Après ce vide qui m'a bouffé toute la vide, un nouveau sentiment a prit forme et je ne veux pas qu'il aboutisse. « J'ai envie de les cogner. » Le dire à vive-voix me fait doucement rire. Ouais, j'ai envie d'aller les saluer à coup de poing, d'écraser mes phalanges dans leurs pommettes. « Je suis à Minato, devant la boite de nuit l'Exotique. Viens. » à lui, je ne lui ferais rien. Je sais que je ne lèverai pas la main sur Kellian, plus maintenant. Peut-être que mes paroles seront froides et sanglantes, mais ça sera la seule attaque face à lui. Il n'y a aucune expliquation à fournir pour le moment, juste qu'il se bouge les fesses jusqu'ici.

TENUE ─ Alors que je profitais de ce petit moment à l’extérieur je reçois un appel qui me surprends, entendre sa voix, sa façon de parler, ses mots qui me paralysent sur place, j’ignore pourquoi, mais l’entendre dire qu’il a besoin de moi me donne envie autant de sourire que de pleurer, qu’il en vienne à me dire cela c’est qu’il doit se sent extrêmement mal et je n’ai pas besoin qu’il m’en dise plus pour le comprendre. « Mais tu ne l’as pas fait. » Même s’il en a envie il m’a appelé avant de se laisser porter par ses pulsions, l’ancien Momiji n’aurait jamais agi ainsi et se serait laissé guider par cette colère, je ne peux pas dire que je sois fier de lui parce que je n’ai aucune raison de l’être, mais pourtant je le suis, qu’il fasse appel à moi aussi me rend heureux, bien que je ne puisse pas vraiment m’en réjouir vu la situation. Gardant le téléphone allumé je fais signe à un taxi de se stopper, mais il ne m’a pas vu, tant pis je commence à marcher rapidement dans la direction qu’il m’a indiquée. « Je ne suis pas si loin, attends-moi. » Je raccroche simplement pour pouvoir me dépêcher, au début j’ai peur de courir, mais en me souvenant que j’ai un nouveau cœur je prends le risque de le mettre à l’épreuve en laissant mes jambes s'activer librement vers cette boîte de nuit qui devrait être à seulement quelques minutes à pied, une chance que je sois dans le bon quartier. Ne pas être essoufflé me semble complètement irréel, certes je peux sentir les battements de mon cœur s’accélérer sous l’effort, mais je vais bien. Je me stoppe lorsque j’entends de la musique, des gens sont rassemblés un peu partout dans ce coin-là, mais je cherche seulement Momo et lorsque je le trouve j’anéantis la distance entre nous pour me placer face à lui, reprenant mon souffle. « Je suis là » Annonçais-je comme s’il ne l’avait pas remarqué. « Pourquoi tu m’as appelé ? » Demandais-je simplement. « Ça ne va pas hein ? » C’est plus une affirmation qu’une question.

TENUE ─ C'était ma seule option pour ne pas déraper, bien que ça ne m'enchante guerre de l'appeler. Je crois que sur le coup, je n'ai pas réfléchi à ce que je voulais ou non de lui, mais je ne voulais pas céder à cette vile tentation de faire encore injustement du mal. Ces gars n'ont rien demandé, ils sont comme les victimes de nos hapslap, au mauvais endroit au mauvais moment. La voix de Kellian me permet d'être concentré sur quelque chose d'autre que les rires de la bande à quelques mètres de moi. « Non. » C'est évident, sinon je ne parlerais pas au téléphone avec lui. J'aurai de suite raccroché pour aller me bastonner avec ces types, sans prendre conscience des bonnes paroles du malade. En même temps qu'il doit bouger, Kellian me parle, m'informant qu'il n'est pas loin. Hasard ? Ce n'est pas sûrement pas le destin. Pourquoi je pense toujours ainsi avec cet idiot ... à coup de hasard ou de destin, comme si nous étions obligés de nous revoir à chaque fois. L'appel terminé, je regarde mon portable en silence, jusqu'à ce que l'écran s'éteigne et que je ne puisse admirer que mon reflet sombre dans la vitre de l'appareil. Le temps devient une éternité à patienter sur ce trottoir, mes iris voyageant d'un point à l'autre, revenant par moment sur mon portable inactif. ça m'angoisse, doucement mais sûrement. Suis-je si vulnérable pour ressentir ce genre d'émotion grotesque ? Kellian débarque avant que je ne me prenne davantage la tête et malgré moi, je suis bien content de le voir. Y a-t-il besoin d'une raison pour le faire courir jusque là ? J'aimerai lui dire que non ou juste de la fermer. « Non. » ça ne va jamais, ça fait un mois que rien ne va plus. J'ai mal au coeur à la simple pensée de savoir que j'ai vingt ans aujourd'hui, mais qu'il n'est pas là pour me souhaiter quoi que ce soit. « ça n'est jamais bien allé depuis qu'il est mort. » Je ne cherche pas de la pitié ou de la compassion, juste de pouvoir parler et non m'énerver. « ça me reprend comme avant... » Dis-je en serrant et desserrant mon poing, les yeux rivés dessus. Je redeviens cette bête sauvage qui n'écoute que son instinct primaire, tuer. Sauf que moi, je tape.

TENUE ─ Je savais qu’il n’avait pas cédé sinon il ne m’aurait pas appelé, mais je le confirme au téléphone pour parler, simplement qu’il m’entente et réponde, je l’aurais bien gardé avec moi le temps que je fasse le chemin pour l’empêcher de se retrouver isolé et susceptible de craquer, mais je devais absolument arriver le plus vite possible auprès de lui et avec le portable cela aurait considérablement ralenti ma course. Une fois face à lui je m’impose, en annonçant ma présence déjà évidente, mais de cette manière je peux lui demander ce qui se passe, surtout pourquoi il a fait appel à moi, il a des amis, pourquoi moi ? Je pourrais surement lui demander, pourtant je ne le fais pas, voyant qu’il ne va pas bien, je n’ai aucune raison de chercher des réponses pour l’instant futile, je sais déjà qu’il souffre, je ne suis pas idiot. « J’ai pensé à toi. » C’est surement étrange et trompeur dis comme ça, mais je veux dire par là que même si on ne s’est pas vu j’ai pu partager à distance cette douleur qu’il ressent, le simple fait de le voir encore vulnérable me fait mal, mais il est normal qu’il souffre, cette absence doit le peser plus qu’il ne peut l’expliquer. Je ne souhaite pas le prendre en pitié, mais je compatis à sa douleur, je suis comme ça et cela ne changera pas, je me considère comme son ami, peu importe comment il me voit et les amis souffrent ensemble lors des coups durs. Voyant qu’il sert son poing je m’accroupis pour l’attraper avec mes deux mains et l’entourer en secouant lentement la tête de gauche à droite tout en le regardant dans les yeux. « C’est faux. » Je l’affirme sans hésiter. « Si tu étais comme avant tu n’aurais pas cette réticence à le faire, tu ne m’aurais pas appelé non plus, tu as surement besoin de te défouler et c’est normal, mais il y a d'autres manière de le faire que de se battre. » Voyant que de plus en plus de gens sortent de la boîte en empiétant sur notre espace « intime » je me redresse en attrapant la main de Momo, le forçant à se lever, nous éloignant de l’endroit. « Allons ailleurs. » Là où on pourra discuter et être tranquille.

TENUE ─ L'attente m'a parut longue quand il a raccroché pour me rejoindre. J'ai dû m'asseoir sur un muret en pierre, canalisant ma violente pulsion à travers des exercices psychiques. Compter les voitures qui passent ou les secondes qui s'écoulent entre un feu rouge et une feu vert, retracer des yeux les lignes sur sol, jusqu'à la route lisse. Je me suis perdu là-dedans jusqu'au moment où il a débarqué dans mon champ de vision et que je ne l'ai plus lâché depuis. Il est là, c'est le plus important. J'ignore pourquoi j'ai autant besoin de lui, alors que j'étais avec mes meilleurs amis quelques minutes plus tôt. Ils savent tout de moi, comment je réagis, comment je suis, ils sont prévisibles et ils chercheront à me changer les idées à leur manière, mais ce n'est pas celle dont j'ai envie ce soir. Kellian est plus calme, plus reposant, je cherche en lui une façon de m'apporter de la sérénité, pas de l'agacement. Penser à moi ? Mes sourcils se froncent doucement, l'incompréhensible se dessine sur les traits de mon visage, mais je comprends pas à quel moment il a pensé à moi. Pourquoi ? Cette question me brûle les lèvres, mais ne les franchissent pas. Il n'a jamais perdu un proche, comment peut-il partager ma douleur ? Ah oui, il a été à la place de mon père avant d'être opéré et sauvé. Proche de la mort, mais pas si loin de vivre. Sauf que l'un n'a pas eu la chance de l'autre. Kellian serait mort sans mon père et je serais au même point qu'auparavant. Est-ce ça l'évolution ? Perdre une chose pour en gagner une autre ? Je souffle à cette pensée, revenant à lui. Je lui explique ce début de rechute qui me trouble et m'angoisse, le voyant s'accroupir devant moi pour saisir mon poing tremblant de ses mains. Je ne comprends toujours pas sa façon d'agir envers moi. à croire qu'il en sait beaucoup sur moi, ou suffisamment pour me cerner. « Comment ? » Il parle de se défouler d'une autre manière, mais de laquelle ? Je le fixe toujours dans les yeux, quand il se redresse et attrape ma main. Quelle étrange sensation, comme un frisson qui remonte de mes doigts jusqu'à la racine de mes cheveux. Avec son aide, je lève mes fesses du muret et me remet sur mes deux jambes, le suivant d'abord mollement, puis normalement. « Où vas-tu m'emmener ? » Ce n'est sûrement pas l'endroit idéal pour avoir la paix et parler, mais pour une fois, je lui fais confiance et le laisse me tirer là où il voudra.

TENUE ─ Peu importe que j’ai perdu quelqu’un ou non, cela ne veut pas dire que je ne suis pas capable de le comprendre et de le soutenir, mes sentiments sont réel, mes émotions aussi et les siennes sont palpables, je peux donc aisément me mettre à sa place, rien qu’imaginer sa souffrance et sa solitude me fait mal, il n’a aucun doute à avoir sur moi, je n’ai jamais fait semblant et je ne recherche rien en l’aidant, le soutenant, je le fais parce que c’est ce que je souhaite et tant qu’il aura besoin de moi alors je serais là. Il semblerait qu’il ait envie de craquer, frapper quelqu’un, se défouler et lorsqu’il pense rechuter je l’arrête en enroulant sa main gelée et tremblante avec les miennes, le regardant en lui disant que ce n’est pas le cas, il a changé, le simple fait de réfléchir et non d’agir le prouve. Il y a d’autre moyen de se défouler, il doit juste en trouver un qui lui convienne. « Pratique un sport ? Trouve une passion ou même quelqu’un qui sera capable de te faire oublier cette envie de cogner ? Je suis certain qu’il y a une façon pour toi d’évacuer toute cette énergie et cette colère qui te bouffe. » Il doit juste trouver laquelle et je suis prêt à l’aider pour ça. Mais pour l’instant j’ai surtout l’impression d’être esquiché dans cette masse de gens qui s’impose, attrapant sa main, je l’emmène plus loin, le tirant quelques mètres plus loin avant de m’arrêter et de le regarder en lui souriant innocemment. « Dans un endroit plus chaud. » Il fait frais dehors, autant aller quelques pas se réchauffer au calme. Je reprends la marche en le tenant toujours, ça ne me semble pas perturbant ou étrange, le guidant jusqu’à un petit café isolé, le genre d’endroit avec des tables proches d’une cheminée et peu de gens pour brailler, j’aime bien ce genre de lieu reposant et tranquille surtout lors des baisses de moral. Poussant la porte je salue les personnes qui nous accueillent en nous guidant d’un geste de la main la direction à prendre, à cette heure-ci les gens sont surement au chaud dans leurs lits. Ça donne une ambiance chalet et chaleureuse. Le laissant s’assoir où il veut je pose mes deux mains sur la table en le regardant, encore debout. « Tu veux boire quoi ? » Que je puisse prendre commande. Retirant ma veste, je la pose sur les fauteuils, on a la cheminée à côté, ça fait du bien cette température. « Il caille dehors, tu n’as pas froid sans veste ? » Il a un pull, mais peut-être que c’est seulement moi qui ai été surpris par la température après cette « isolation ». Je change un peu de sujet juste le temps de se poser, j’aimerais pouvoir le détendre aussi, lui faire penser à autre chose même si ce n’est qu’un court instant et qui se sente moins oppressé.

Ayant passé les commandes je m’installe face à lui et le fixe un moment. « Je viens de réaliser, mais la première fois qu’on s’est rencontrés c’était dans cette boîte j’ai l’impression que ça fait une éternité. » Je hausse les épaules en gardant cette légère esquisse. Reprenant mon sérieux, je soupire un peu embarrassé de parler sans réellement savoir comment aborder certains sujets. « Tu as trouvé des pistes ? » Il doit savoir de quoi je parle, vu qu’il est celui qui cherche à venger son père.  « Tu aurais dû venir me voir si tu n’allais pas bien, j’ai attendu. » Dis-je un peu maladroitement, mais peut-importe comment il me traite, je veux être là pour lui d’une certaine manière.

TENUE ─ C'est étrange de l'entendre dire que je ne suis plus le même qu'avant, que j'ai changé même un tout petit peu. Si j'étais toujours le Momiji qui ne réfléchit pas avant d'agir, je me serais déjà jeté sur ces types pour les tabasser sans raison, quitte à me prendre des coups en retour. Pas cette fois, j'ai trouvé bon d'appeler Kellian à l'aide, pour ne pas ruiner mes efforts. Faire du sport ? Trouver une passion ? Avoir quelqu'un ? Je le regarde, toujours de la même manière. « Tu es là. » ça en dit long, n'est-ce pas ? Ce quelqu'un capable de me faire oublier est sous mes yeux. Je ne vais pas mentir, ni me voiler la face ou faire l'abrutis, je sais parfaitement que Kellian est apte à m'apporter ce que je recherche. Tora et Saru auraient été choqués de m'entendre dire ça, mais ils ne sont pas là pour jouer les spectateurs. « J'ai la boxe. » Comme passion, même si ça été un bon défouloir et un moyen de m'apprendre à me battre, c'était avant tout une passion. Ma main dans la sienne, il me guide ailleurs, dans un endroit que j'ignore, un endroit chaud d'après lui. C'est une enseigne de café ou de salon de thé qui nous accueil en premier, avant d'entrer dans le bâtiment à la suite de Kellian qui salue les employés. Je me contente d'un signe de tête, par politesse, mais ne fais rien de plus. Ils sont ouverts tard, c'est étonnant de trouver un café ouvert à cette heure-ci. Suivant les indications données, je m'installe à l'une des tables, laissant mes yeux se balader dans la pièce pour décrire la décoration et l'ambiance chaleureuse qui se dégage de ce lieu. Ce n'est pas le genre d'endroit où j'irai normalement, mais ça me convient quand même. « Peu importe. » La même chose que lui, ça m'ira très bien. Je ne suis pas difficile, puis je sais boire autre chose que de l'alcool. Encore un haussement d'épaule vague, oui et non, j'ai eu froid mais c'était supportable pour ne pas mourir. Puis il fait bon ici, mon pull me suffit pour rester à bonne température, sans avoir trop chaud, ni trop froid.

Kellian est allé commandé nos boissons, pendant que j'attendais en regardant le feu crépiter dans la cheminée. Cette boîte ? Il me faut quelques secondes pour comprendre ce qu'il raconte, avant de me souvenir que c'était là-bas que je l'avais agressé pour la première fois, avant qu'on se rencontre souvent par hasard. Bizarrement, cette pensée me fait légèrement sourire. C'est un souvenir comme un autre, un souvenir que je ne risque pas d'oublier. Les doigts sur ma tasse, je me réchauffe rapidement de cette manière, mes yeux ancrés aux flammes qui dansent et illuminent la salle. Des pistes ? Mes orbes reviennent sur lui, dans un court silence. « Oui et non. » Je n'ai rien trouvé de concret à proprement parlé, des bases, des indices, mais rien d'important. « J'allais bien. » Grâce à mes recherches, j'allais bien. Mais ce soir je ne suis pas plongé dans mes affaires, ni dans mes cours, alors ça remonte plus facilement. « Tu as mon numéro ? Tu aurais pu me joindre aussi. » Ce n'est pas à sens unique, du moins ça ne l'est plus. J'ouvre des portes pour lui permettre d'entrer, de façon gauche et incertaine.

TENUE ─ « Tu es là » Moi ? Je ne sais pas comment je dois prendre ça, étrangement j’ai senti ce nouveau cœur s’emballer sous cette réponse inattendue, je ne me serais jamais douté qu’il puisse me voir ainsi ou dire une chose pareil, pourtant quand on y pense c’est moi qu’il a appelé et malgré tout, on a souvent partagé nos coups dur que ce soit par coup du sort ou par envie, c’est la même chose. Je n’arrive pas à trouver de mot à lui répondre, mais je souris tendrement en hochant la tête pour lui montrer que c’est vrai, je suis là et je le serais tant qu’il aura besoin de moi. Niveau passion il semblerait qu’il soit un adepte de boxe, il devrait vraiment se mettre à fond dedans et vider son énergie dans ce sport, même si parfois ça peut être aussi violent, lorsqu’il se battra ce sera légal. « Montre moi la prochaine fois. » Je n’ai jamais pu faire de sport et maintenant, même si je dois être prudent je suis capable d’en faire et je veux rattraper toutes ces années, courir, nager, sauter, danser, il y a tellement à tester, même frapper ! Tant que ce n’est pas contre des gens ça me va de le regarder s’entrainer ou d’apprendre à me battre aussi, puis je suis un futur médecin je pourrais soigner ses blessures !

J’aurais pu l’emmener au parc où s’isoler quelque part, mais avec ce temps je trouve beaucoup plus agréable de s’installer dans ce café ouvert la nuit, je ne connais pas énormément d’endroit à Tokyo, après tout je ne suis là que depuis un peu plus d’un an, mais malgré ma maladie j’ai transgressé beaucoup de règles en faisant plusieurs boulots ! Mon docteur m’en avait d’ailleurs reproché mon inconscience quand il l’a appris, mais grâce à ça j’ai pu découvrir certains lieux que peu connaissent ou fréquentent, de bouche à oreille j’ai quelques adresses intéressantes et ce petit salon assez intime et chaleureux me semble être la meilleure idée pour se poser et discuter. Je prends un chocolat chaud et un autre pour Momo, revenant avec les tasses je la pose devant lui et m’installe face à lui, je ne sais pas comment aborder le sujet principal, mais je suis certain qu’il a besoin d’en parler, comme l’autre jour, je suis surement le mieux placer pour lui permettre de s’exprimer sans filtre, même s’il venait à exploser, m’insulter, pleurer, peu importe ce qui arrive il sait que je serais capable de gérer la situation et de l’accepter, je peux passer pour quelqu’un d’idiot et de naïf pour accepter ça, mais je suis simplement comme ça et je ne compte pas changer, comprenant surement plus ses sentiments qu’il ne peut l’imaginer.  « Menteur. » Soufflais-je. « Tu tu n’es jamais allé bien. C'est ce que tu as dis tout à l'heure pas vrai ? » Et c’est normal. Je lui souris doucement et tourne ma tasse sur la table. « Tu as raison, mais moi je n’ai jamais dit que je ne voulais pas te voir. » Contrairement à lui. « Puis je n’étais pas certain que tu aies envie de me parler non plus. » Il peut surement le comprendre voir la façon dont il me repousse sans cesse. « Mais je le ferai à partir de maintenant. » Concluais-je, tant pis s’il ne le souhaite pas, il m’a ouvert une porte et je compte bien l’emprunter. « Qu’est-ce qui s’est passé ? » Pour qu’aujourd’hui soit pire qu’hier, il semble vraiment abattu et j’aimerai pouvoir l’aider.

TENUE ─ Il est là, sur le coup, ça me paraissait évident. Il n'y avait personne d'autre avec moi à ce moment précis. Aucun sous-entendu à mes paroles, sauf peut-être le fait que je m'adoucis légèrement, sans m'en rendre compte. Je pourrais lui montrer à l'avenir, ce que je sais faire en boxe, mais quand, c'est autre chose. Je me contente d'un simple hochement de tête pour acquiescer, lui promettant en quelque sorte que la prochaine fois, je lui montrerai. ça fait un moment que je ne suis pas allé à la salle de boxe, il serait temps que j'y remette les pieds et renoue les liens avec mes anciens partenaires. Avec la mort de mon père, j'ai un peu tout lâcher sans prévenir, sans m'en soucier. à présent que je peux en parler franchement à quelqu'un, je parviens à remettre de l'ordre dans ma tête. Kellian me mène dans un endroit que je ne connaissais pas, alors que j'ai toujours vécu à Tokyo. à croire que je préfère squatter les bars et boites de nuit, plutôt que les cafés. Ils sont ouverts tard, ce qui est plutôt un bon point. Je me demande comment il a su pour ce commerce, qu'ils n'étaient pas fermés, même à cette heure-là. Finalement, la question ne se pose pas et je me contente de le suivre, en silence. à l'intérieur, une fois tranquillement installé, Kellian s'en va commander pour nous deux. Je le laisse choisir ma boisson, ayant subitement confiance en lui. Ce qu'il ramène me semble convenable, un chocolat chaud fumant à la bonne odeur sucrée. Touillant avec ma cuillère le liquide marron, je réponds vite fait à mon interlocuteur, sans entrer dans les détails. Quant à mon humeur, elle va bien seulement quand ça m'arrange. Kellian le remarque et me traite de menteur, ce qui me fait relever la tête de ma tasse pour lui lancer un regard. « Bonne mémoire. » Commentais-je, un sourire en coin. Il se souvient parfaitement de mes premiers mots et tout le monde sait que la première réponse est toujours la vraie. Il n'a pas tord sur ce point, avant cet épisode, je n'aurai très certainement pas voulu le voir, ni lui parler. à cela, je me tais et me contente de soulever la tasse pour boire une gorgée. Avant, je l'aurai inexorablement repoussé, mais désormais ce n'est plus le cas. « Les gars m'ont proposés de sortir s'amuser. » Répondis-je après avoir éloigné la tasse de mon visage, ma langue glissant lentement sur mes lèvres. « Je ne suis pas d'humeur festive. » L'ambiance m'étouffait, elle me rendait nerveux et davantage de mauvaise humeur. Ce n'est pas seulement mon anniversaire aujourd'hui, mais aussi le jour où mon père est justement devenu père. « Ils voulaient juste me changer les idées, mais on dirait que ça n'a pas fonctionné. » Soufflais-je, à peine contrarié. Normalement, j'adore m'éclater avec eux, mais pas aujourd'hui, ni demain et ça été aussi le cas hier et les jours d'avants.  

TENUE ─ Si la boxe pouvait l’aider à extérioriser sa colère et lui permettre de frapper quand il le désire il devrait en faire plus souvent et se vider l’esprit autant que possible. Quoiqu’il arrive je serais là, même si c’est étrange tant qu’il aura besoin de moi j’accourrais et il doit s’en douter... En cas d’urgence je suis une personne fiable qui ne se ménage pas même quand je le devrais, c’est comme ça. En tout cas il n’a pas refusé de m’emmener avec lui la prochaine fois et de me montrer sa passion. Je suis impatient de voir ça, mais pour le moment j’aimerais qu’il se détende dans ce café où je l’ai emmené, il est tranquille, calme et parfait pour réfléchir et parler à l’abri des curieux ou des regards. Il peut bien me dire qu’il allait bien je ne suis pas dupe, ses propres paroles m’ont affirmé le contraire et je ne suis pas idiot pour ne pas retenir une chose aussi importante. « Je sais, ça surprend souvent au début. » Plaisantais-je pour intégrer une petite touche d’humour a la situation, même si l’heure n’est pas aux rires ça ne fait pas de mal de sourire un peu. Rapidement je reprends mon sérieux pour le questionner, qu’est-ce qui est diffèrent aujourd’hui. « Il y a quelque chose à fêter ? » Je ne sais pas que c’est son anniversaire, donc je demande surtout pour savoir pourquoi s’amuser dans cette situation, Momo a clairement besoin qu’on lui change les idées, mais l’emmener danser ou dans un endroit bondé par la « joie » de vivre et l’exagération ce n’est pas une bonne idée, il n’a pas encore fait son deuil et pour l’instant je pense qu’il devrait éviter ce genre de lieux. « Ce dont tu as besoin ce n’est pas de cette ambiance, ne te force pas à t’amuser ou à voir les autres le faire si tu n’es pas prêt. » Il y a tellement de façons de se changer les idées. Je lui souris brièvement, buvant une nouvelle gorgée.

TENUE ─ Sa façon de me traiter de menteur prouve qu'il m'écoute à chaque moment, dès que je lui réponds ou dès que je parle simplement. La première chose que j'ai dites au téléphone, c'est que je ne suis jamais allé bien depuis la mort de mon père. Et là, quand il redemande, je fais genre d'aller mieux même si ce n'est pas à cent pour cent vrai. Je félicite sa bonne mémoire, pas beaucoup de gens aurait retenu ma précédente réponse ou alors, ils se seraient contenté de ce que je raconte simplement. Kellian n'est pas comme ça, il a de l'humour pour détendre l'atmosphère et en même temps, il peut être sérieux pour ne pas trop s'éloigner du sujet. Comment ne pas parler des Otsuka quand il me questionne sur mon état ? Ils n'ont rien fait de mal, au contraire. Ils voulaient bien faire, c'est juste moi qui ne suis pas d'humeur à ça. Quelque chose à fêter ? J'aimerai répondre que non. « Ma naissance. » Ou mon anniversaire, mes vingt ans, s'il préfère. Ma mère a toujours fêté ma naissance plutôt que mon âge ou le jour même. C'est le jour où je suis venu au monde, où ils sont devenu père et mère. Ce n'est pas pour autant que j'ai envie qu'il me souhaite un bon ou joyeux anniversaire. Cette journée n'est ni bonne, ni joyeuse et ça ne tenait qu'à moi, je souhaiterai que tout le monde l'oublie. Malheureusement, je dois subir et prendre sur moi. Kellian vise juste, il a compris que faire la fête n'était pas le meilleur moyen de m'aider. Il est perspicace, je ne peux pas lui enlever. Un sourire se dessine sur mes lèvres, un sourire que j'efface rapidement en buvant une gorgée de ma boisson chaude. « Je ne sais pas encore qui c'est... J'ai plusieurs pistes sur eux, mais c'est un groupe qui traîne en ville. » Dis-je subitement en parlant des gars que je recherche, mais qui m'échappe encore pour le moment. Il y a plusieurs bandes de voyous à Tokyo, des mafieux, des malfrats de bas-étage, des cons dans mon genre. Je ne sais pas encore où ils se situent, ce qu'ils font ou ce qu'ils cherchent, mais je me doute déjà qu'ils déteste les flics pour avoir tiré sur mon père. « J'en ai pas encore parlé avec ma mère, ça lui ferait trop de mal de voir son fils s'impliquer dans une histoire aussi dangereuse. Mais je ne compte pas lâcher l'affaire et réunir suffisamment de preuve contre eux pour les attraper. » Ce n'est pas la violence que j'utiliserai pour une fois, mais ma tête. Suffit d'avoir assez de preuve contre eux pour que la police s'intéresse à ce cas et décide d'agir, pour le moment ils ne peuvent rien faire, sans rien.

TENUE ─ Je ne m’attendais pas ce qu’il m’annonce que c’était son anniversaire, je me rends compte que bien que ce soit un jour heureux pour beaucoup, lui doit y faire face seul et pour la première fois son père n’est pas là, je prends conscience qu’au cours de l’année, surtout en cette période il va souvent se sentir seul et je me mets sans m’en rendre compte à le fixer sans un mot durant quelques instants, par par pitié ou compassion, mais parce que j’aimerais l’aider à ne pas se sentir ainsi, j’ignore pourquoi, mais tout comme lorsqu’il était avec moi durant mes instants de doute et de solitude, j’aimerais qu’avec ma présence cela puisse ne serait-ce qu’un peu atténuer sa souffrance. Je ne suis personne et j’en ai conscience, je ne cherche pas à prendre la place de ses amis ou de qui que ce soit d’autre, juste qu’il me laisse être là quand il en a besoin me suffit. Je ne lui souhaite pas sa fête, mais toujours sans rien dire je me lève et m’éloigne pour aller à l’accueil demandé un de ses petits gâteaux, tout simple avec une bougie, pas de chichi, juste que malgré tout, il est né ce jour-là et je suis sur que même son père voudrait qu’il ait une reconnaissance, quelqu’un pour lui faire comprendre « merci d’être né » ou « content que tu sois là » peu importe. Je reviens à la table et pose le gâteau avec la bougie allumée face à lui. « Fais un vœux et souffle. » Il peut même souhaiter d’attraper ses gars qu’il pourchasse. « Ce serait déplacé de te souhaiter un bon anniversaire, mais ça reste unique alors mange au moins ça. » Je lui souris, si j’avais su je lui aurais même apporté un cadeau, mais je l’ignorais. « Tu cherches tout seul je suppose ? » ça me semble évident, mais c’est plus dur sans personne pour l’aider. « Si tu veux seulement les arrêter, je peux t’aider, je suis plus intelligent que j’en ai l’air et j’ai l’impression que tu ne pourras pas reprendre une vie normale tant que tu ne les auras pas fait enfermer pas vrai ? » J’aimerais qu’il laisse toute cette histoire de côté, mais je suis bien placé pour savoir qu’il ne le fera jamais, pas tant qu’il n’en aura pas terminé.

TENUE ─ Dans la famille, nous n'avons jamais et adepte des effusions d'amour. Nous nous souhaitons à peine nos anniversaires, mais le soir de ce jour spécial, nous mangions ensemble comme pour le fêter sans faire de fête. Les employés nous cuisinaient un gâteau pour le dessert, et voilà tout. Aujourd'hui, je ne pourrais pas faire cela avec mes parents, ni même avec ma mère. Elle a trouvé un client pour se faire inviter à manger ce soir et je ne peux pas lui en vouloir. Ma mère est comme moi, elle doit trouver un moyen de se changer les idées et de ne plus se morfondre dans un coin de la maison tel une momie qui prendrait la poussière. Être avec Kellian à cette date précise ne me dérange pas, je me sens même étrangement apaisé en sa présence. à cause de son coeur ? Du fait qu'une part de mon père soit là avec nous ? Je ne crois pas à tout cela, mais pour une fois, je voudrais que ce soit le cas. Kellian quitte la table et je le suis des yeux jusqu'à ne plus pouvoir, ramenant mon attention sur mon chocolat chaud que je sirote lentement. J'ignore ce qu'il mijote, mais ça ne risque pas forcément de me plaire. Quand il revient vers moi, je peux remarquer le petit gâteau avec la bougie et c'est dure de ne pas retenir un soupir. C'est l'intention qui compte, comme qui dirait. « Je ne crois pas à ça. » Commençais-je, avant de croiser son regard. Que pourrais-je bien souhaiter ? Attraper ces gars ? Ce n'est pas cette bougie qui va m'aider et Kellian sait que je ne crois pas aux miracles, bien qu'il soit toujours vivant. « Tu viens de le faire. » Il l'a dit dans sa phrase, donc ça compte aussi. Réfléchissant deux secondes à quelque chose que je pourrais vouloir, je souhaite finalement le bonheur de ma mère et souffle sur la petite flamme. « Pour le moment. Je ne peux pas le dire à quelqu'un d'autre, ils ne comprendront pas. » Sauf lui. Il y a que Kellian pour comprendre par quoi je passe ou du moins, me soutenir sans faire d'histoire. Il ne cherche pas à m'arrêter, il ne me dit pas non plus que ce sont des bêtises. « Pourquoi voudrais-tu m'aider ? Mais tu as raison, je ne pourrais pas reprendre une vie normale sans avoir réglé ce problème-là. » Attrapant ma cuillère, je la plante au milieu du gâteau après avoir retiré la bougie et le sépare en deux part égale, dont l'une que je pousse vers lui. Ce n'est pas la première fois que je partage avec lui. « Je ne pourrais pas le manger seul. » C'était la même excuse qu'avec le crabe, sauf qu'il était vraiment gros pour le manger seul. « Comment pourrais-tu m'aider ? »

TENUE ─ Même si on n'y croit pas parfois il suffit de se laisser simplement aller, il ne faut pas se fermer et juste faire confiance. Je ne sais pas, je peux être maladroit dans mes actes, mes mots ou même mes intentions, mais je ne compte pas rester juste là à le regarder en le laissant seul se morfondre, je préfère tenter tout ce qui peut l’être pour lui apporter du soutien et du réconfort, même si c’est moi et qu’il préférerait surement quelqu’un d’autre pour ça, il n’a pas vraiment le choix, après tout il m’a appelé le premier. Le petit gâteau devant lui j’attends qu’il souffle. « C’est vrai, je l’ai dit. » Même si je n’ai fait que le prononcer, s’il veut l’entendre ainsi il le peut, je le laisse voir comme il le souhaite. « Tu me l’as dit. » C’est vrai, surement que c’était sur le moment ou parce qu’il est capable de me gueuler dessus et de tout me dire plus aisément, puis je ne suis pas du genre à le ralentir ou encore à répéter tout ce qu’il pourrait m’annoncer, je devrais me sentir fier qu’il puisse me faire partager ses projets, même si ce n’est pas forcément d’une manière positive. « Pour justement que tu puisses reprendre ta vie. Puis le Momo qui m’insulte et me repousse pourrait me manquer à force. » Je le taquine en lui tirant la langue. Ce n'est pas totalement vrai, j’ai simplement envie qu’il soit lui-même et qu’il ne soit pas obnubilé par cette histoire. Le voir « gentil » avec moi est troublant, j’aime ça, mais ça reste perturbant, mais c’est dans ces moments-là, quand on a vraiment besoin de quelqu’un qu’on se rend compte parfois de l’importance des gens. Je l’ai compris ce jour-là, quand j’ai pleuré, criser de colère, simplement le voir et l’écoute m’avait calmé et même s’il était désagréable il ne m’a pas tourné le dos. Je ne lui tournerai jamais non plus. Je souris en demandant une autre cuillère pour manger avec lui. « Le jour de mon anniversaire je dormais, c’est gentil de partager. » Souriant, je dis ça comme si être dans le coma ou inconscient n’était rien qu’un détail banal. « il est quand même plus petit que le crabe celui-là. » Momo est toujours comme ça, il est fier et y a des choses qu’il ne dira pas forcément. « Tu as essayé avec l’hôpital ? » Je mange une cuillère en levant les yeux sur lui. « Si ton père a été blessé, tu as essayé de voir s’il y avait pas des voyous blessé en même temps, je suis sûr que ton père ne s’est pas laissé faire sans tenter de riposter. » Ce n’est qu’une idée. « Après je ne suis pas sportif donc oublie les courses-poursuites, je ne suis pas encore habitué au fait que je puisse courir un marathon... » C’est nouveau pour moi. « Mais je peux surement t’être utile d’une façon ou d’une autre, si tu as besoin tu sais où me trouver. »

TENUE ─ Kellian aurait bien pu me le souhaite, cela ne m'aurait pas dérangé. à une époque, je me serais offusqué à coup sûr, mais pas cette fois-ci. Même pour ça, je n'ai pas le coeur à vouloir me contrarié ou me vexer parce que je n'ai pas envie qu'on me souhaite mon anniversaire. Il sait très bien que je ne crois pas aux souhaits et à ce genre de truc qui ne tient que d'une force divine inexistante. Je le fais quand même, plus pour ma mère que pour mon père, parce qu'elle est toujours là et qu'elle surmonter cette épreuve. Relevant un sourcil à ses paroles, je secoue légèrement la tête, hilare. « Tu es maso, ma parole. » Aime-t-il quand je suis dégueulasse et injuste avec lui ? Qui sait, ça pourrait redevenir comme avant d'ici peu, mais je ne suis pas sûr que mon comportement de connard lui manque tant. Ce n'est pas vraiment être gentil, mais plutôt normal. Je me comporte ainsi avec Tora et Saru, même si nous partageons des délires cons et similaires, comparé à Kellian qui déteste cela. La violence, la moquerie, ces trucs-là qui nous amuse mais pas avec le malade. Coupant le gâteau en deux, je lui donne une moitié sans savoir qu'il a loupé son anniversaire. « C'était le mois dernier ? » La dernière fois que je l'ai vu, c'était un six octobre et il ne pouvait  pas encore marcher par lui-même. Je pourrais lui demander directement la date, mais à quoi bon. Autant partager mon gâteau avec lui, comme si nous fêtions chacun le notre ensemble. Sa remarque me fait rire, malgré moi. C'est vrai qu'il est beaucoup plus petit qu'un crabe et que je l'aurai sûrement mangé en deux bouchés, mais je me contenterai d'une seule, seulement. Des voyous blessés ? Je secoue négativement la tête. « Il n'y avait personne ce jour-là aux urgences, personne en rapport avec mon père. » Il était seul à mourir pendant que ses assaillants prenaient la fuite tel des lâches. « Qui a parlé de course poursuite ? » Je ne compte pas courir après eux, sinon je vais être grillé. « Je préférerais que tu reste à l'écart de cette histoire, même si tu pouvais m'aider. » Si quelqu'un doit se blesser, c'est uniquement moi. Je ne veux impliquer personne dans mes histoires, surtout pas s'ils terminent par s'attirer des ennuies. « Je te remercie de ton aide, sincèrement. Mais mon père m'a suffit. » Ce n'est pas tant que je tiens à lui ou qu'il m'est précieux, mais une part de moi ne désire pas qu'il soit attaqué par ma faute. Goûtant à mon gâteau, j'en dévore la moitié d'une grosse cuillère que j'engloutis sans attendre. ça passe bien, mieux qu'une soirée en boite de nuit. « Merci, pour le gâteau » Dis-je la bouche pleine, me fichant pas mal d'être pas très élégant.

TENUE ─ Maso ? Non je ne pense pas, en fait je suis content qu’il s’ouvre à moi et me laisse l’opportunité de parler avec lui sans pour autant me gifler verbalement toutes les secondes, mais ce que je veux dire c’est que même s’il venait à m’insulter ou m’attaquer à nouveau je serais toujours là comme avant, il a beau me repousser je ne suis pas du genre à abandonner facilement, en fait je crois que je suis trop tenace pour ça. Il partage son gâteau et je trouve ça sympa, surtout que cette année je pensais ne pas fêter mon anniversaire et en soi je n’ai pas vraiment pu le faire vu que je me trouvais à l’hôpital sur une chaise roulante ou allongé dans mon lit à dormir et être soigné. « La veille du jour où on s’est croisé à l’hôpital. » Maintenant que j’y pense je l’avais oublié à ce moment-là, c’est Orion qui c’était ramené avec mes parents pour me le rappeler, mais faut dire que j’avais encore la tête ailleurs avec ce nouveau cœur. Je n’aurais jamais du vivre au-delà de la majorité et pourtant je suis là mangeant du gâteau avec lui, j’ai encore quelque vieilles habitudes surtout niveau alimentaire, je ne mange toujours pas de sel et j’ai une ration de liquide qui me colle à la peau, mais avec le temps j’arriverai à m’en détacher, à me dire que c’est terminé. Le sucre par contre j’adore toujours ça et je ne m’en lasse pas ! Je tente de trouver quelques indices pour l’aider, mais je ne connais pas vraiment l’histoire donc je ne peux que faire des suppositions. « Je vois. » J’ai parlé de courses poursuites simplement pour qu’il comprenne savoir s'il a besoin de mon aide physiquement ce serait plus compliquer pour moi, en guise de réponse je souris et hausse les épaules en avalant une cuillère de gâteau, il est bon, je pourrais le manger rapidement, mais je prends mon temps en l’ayant coupé en petits morceaux. « Tu n’as pas besoin de me protéger si tu ne comptes pas les affronter. » Je peux l’aider, j’en suis sûr. « Ton père et moi n’avons pas la même valeur. » Il ne peut pas comparer. « Puis je ne compte pas me faire tuer. » À moins qu’il m’ait menti en disant qu’il ne les affronterait pas de face. « De rien, ce n'est pas grand-chose, je ferais mieux la prochaine fois. » Maintenant que je sais quel jour il est né ce sera plus facile si nous sommes encore là et en contact dans un an. Je souris en y pensant, je ne pouvais faire aucun projet il y a un peu plus d’un mois, les choses sont étranges. Reprenant une bouchée de mes petits morceaux, je me lève en tenant ma tasse chaude entre les mains et m’approche du feu de la cheminée, je trouve ça trop classe et beau, j’en ai une chez moi aussi, mais au dortoir faut se contenter des chauffages. M’accroupissant je me laisse basculer en arrière, cul au sol les genoux repliés contre mon torse, les yeux rivés sur les flammes en prenant une gorgée de mon chocolat.

TENUE ─ Je sais par avance qu'il est tenace et que même si je redeviens le même bâtard que les fois d'avants, il ne reculera pas devant moi, il ne me tournera pas le dos et ne partira pas. à force, j'ai compris que Kellian n'était pas ce genre de garçon à s'enfermer dans un bunker dès qu'un soucis pointait le bout de son nez. Il est toujours là, bizarrement quand j'ai besoin de lui. Ce gâteau tombe à pique pour fêter nos anniversaires, même si le sien date du mois dernier. Avec son hospitalisation, ça n'a pas dû être super chouette et joyeux. Je suppose que sa famille était là, son petit frère et ses deux parents, mais l'ambiance ne devait pas être tip-top. Je ne savais pas qu'on avait si peu d'écart, même si globalement j'ignore son âge. Partager avec lui est une première, mais ça ne dérange pas tellement, au final. Revenant sur le sujet de mon père, il me propose une piste que j'écarte aussitôt. L'hôpital n'a rien décelé, j'ai déjà fait le tour de ce côté-là. La police doit savoir, mais ils n'ont rien voulu me dire en sachant qui j'étais. Peut-être pensent-ils que je vais débarquer dans la planque d'une bande mafieuse avec une mitraillette et tirer sur tout ce qui bouge. Pour une fois que je veux faire simple et dans les règles, faut qu'on m'en empêche. Son aide me serait bien utile, mais je la repousse. ça ne serait pas réglo si je l'impliquais dans mes affaires, surtout en sachant qu'un homme est mort. « Qui a dit que je voulais te protéger ? » Je n'ai jamais clairement dit que je l'écartais de l'affaire pour le protéger, bien que ce soit similaire en beaucoup de point. « ça revient au même, une vie est une vie. » Il insiste, bon sang. Je roule des yeux en soufflant, lâchant le morceau. Je ne sais pas comment je vais réagir face aux cons qui ont tués mon père. Je pourrais les dénoncer, comme ne pas me contrôler. Bref, je le remercie pour le gâteau, déjà bien entamé. Kellian quitte la table pour se rapprocher de la cheminée, s'installant devant les flammes avec sa tasse. De ma place, je peux l'observer de dos durant plusieurs secondes. « Le miracle a fonctionné ? » Demandais-je en parlant de son coeur. Il a l'air d'aller mieux, donc je pense qu'il supporte ce coeur. Terminant mon gâteau et ma tasse, je me lève pour venir m'asseoir à côté de lui, scrutant les flammes. « Ton frère doit être content. »

TENUE ─ Je ne sais pas si c’est une bonne idée que je m’implique, mais je m’en fiche totalement, je ne m’arrête pas a ce genre de chose, si je peux l’aider tout en restant à l’écart je le ferai, il n’y arrivera pas tout seul. Peu importe a quel point il est tenace il doit savoir que si c’est lui qui est derrière tout ça on risque de ne pas le prendre au sérieux, les policiers pourraient voir là une vengeance et les coupables ne seraient plus ennuyés, il faut être prudent et ne pas sauter dans le tas, je pense qu’avec ma façon plus calme d’aborder les choses je peux lui venir en aide et le conseiller, il doit juste me faire confiance et me laisser faire partie du plan. Je souris simplement à sa question, haussant les épaules. Même si ce n’est pas dit ainsi je pense qu’il veut vraiment qu’il ne m’arrive rien et je l’en remercie, qu’il se braque dessus ou non je me fais ma propre opinion. « Je n’aurais pas pensé entendre ça de ta bouche. Vu le nombre de fois où tu m’as dit de crever. » Je le taquine, en fait le fait que j’en parle ça prouve justement que je n’ai aucune rancœur ou aucun souci avec ça. « Je veux juste t’aider, laisse-moi faire. » J’insiste sans vraiment lui permettre de me rejeter d’une certaine façon, le regard franc et droit. Puis par la suite je me lève pour me mettre près du feu, ça fait du bien, j’aime cette chaleur, cette ambiance. « J’ai l’impression d’être dans un chalet. Même si je n’y suis jamais allé. » Je n’avais pas la santé pour ça, et m’éloigner de la ville était un trop gros risque que mes parents n’ont jamais voulu prendre. Le miracle ? Je tourne ma tête vers lui, puis le voyant me rejoindre je le regarde simplement en souriant doucement. « Il bat. » Dis-je en posant ma main sur mon cœur. « J’ignore qui m’a permis de vivre, mais j’y pense sans cesse. Je ne voulais pas que quelqu’un meurt pour me sauver. » Ça n’a jamais été mon souhait. Les yeux rivés sur les flammes. « Mais je suis vivant et je compte bien en profiter pour deux ! » ça peut durer un an, dix ans, on ne sait pas quand une transplantation peut se mettre à faire des siennes, mais ça peut aussi durer pour de bon et je préfère croire en cette chance que j’ai de simplement pouvoir respirer. « Il l’est, même si je ne le vois pas souvent, il doit être avec son copain. Mais bon je ne vais pas l’empêcher d’avoir sa vie. » Il est celui qui a le plus prier pour ce miracle. Bien qu’il fût absent pendant les jours les plus difficiles, vu que celui qui était là à ce moment-là, c’était Momo.

TENUE ─ Même si j'ai souhaité à plusieurs reprises qu'il crève, je ne l'ai jamais poussé à le faire réellement. Ce n'était que des paroles dans le vent, une manière de m'exprimer à ma façon, avec méchanceté et visant là où ça fait le plus mal. Kellian ne s'est jamais vexé pour mes insultes, aujourd'hui il n'en porte plus aucune rancœur et c'est stupide de vouloir le tenir à l'écart seulement pour l'épargner. Je sais que je n'ai aucun droit sur sa vie, qu'il fera ce qu'il veut qu'importe ce que je dis. Il est têtu, autant que je suis borné. Il pourrait être le frein qui m'évitera de foncer dans le mur, ce que je ne cautionne pas encore pour le moment. Son insistance pourrait me causer des soucis, mais comment lui refuser avec ce regard ? Je soupire fortement, montrant bien ô combien ça m'agace qu'il veuille autant s'impliquer dans une histoire qui ne le regarde pas. Quittant la table pour la cheminée, Kellian complimente l'endroit, poussant mon observation plus loin. Moi non plus, je ne suis jamais allé dans un chalet, parce que mes parents n'avaient jamais le temps pour voyager ou quitter la ville. Nous sommes jeunes, nous avons le temps de le faire plus tard. Terminant ma boisson et mon gâteau, je ramène mes fesses vers lui et le questionne un peu, pour une fois. Il bat. ça veut dire qu'il est bien vivant, mais surtout que mon père lui a sauvé la vie. Donc, il l'ignore ? à ce moment-là, j'aurais bien voulu lui dire la vérité mais je sais que certaines ne sont pas bonnes à prendre, alors je me tais et garde mon silence. Profiter pour deux ? Vivre pour mon père, je suppose. Un nouveau soupir m'échappe, involontaire. ça doit être étrange de vivre pour deux, sans savoir pour qui d'autre. Il me parle de son frère quand j'avance une hypothèse sur son cas. Même si Kellian va mieux, ce n'est pas pour autant que j'apprécie son cadet. Non, lui, je ne peux toujours pas me le sentir. Haussant les épaules, je fais genre que le sujet ne m'intéresse pas, surtout pour Orion. « Ce n'est sûrement pas grâce à lui que tu es vivant. » Dis-je simplement, en me relevant. « Tu ne comptes pas rester assis ici toute la nuit ? » Le chocolat et le gâteau étaient très bon, mais je ne suis pas du genre à m'éterniser au même endroit pour rien. Puis, c'est à mon tour de prendre les choses en main et de le guider là où je veux. Attendant qu'il se bouge, je vais régler nos consommations sans lui laisser le choix, patientant proche de la sortie. J'aime beaucoup l'ambiance chalet de cet endroit, mais j'ai besoin de bouger et de faire autre chose qu'être assis devant un feu de cheminée à papoter. Surtout que la conversation risque rapidement de s'écourter, vu mon degré de parole.  

TENUE ─ Je sais bien comment est Momiji, même si je ne le connais pas depuis si longtemps que ça nos nombreuses rencontres et les situations dans lesquelles on s’est retrouvé ont mis à nu beaucoup de choses, autant sur lui que sur moi. Il a été facile de se cerner et aujourd’hui on sait comment agit l’autre, presque comment il pense et ça prouve que malgré cette haine qu’il me porte où me porter je l’ignore, ben il y a une part de complicité qu’on ne peut pas ignorer. Assis devant le feu je lui parle, réponds à ses questions, simplement sans chichi ou sans effusion de sentiments, je n’ai pas besoin de ça et lui non plus. Parlant de mon frère, il mène sa vie avec Kaoru, il continue de suivre les cours, il vient me voir, me SMS, nous sommes proches après tout. Mais maintenant que le miracle a marché je dois apprendre à vivre avec ça et je ne pense pas qu'Orion puisse m’aider. Je souris à Momo sans rien dire, je sais qu’il ne porte pas mon petit frère dans son cœur donc autant ne pas en parler davantage. « Tu as une meilleure idée ? » Je le regarde tout en étant encore assis, penchant seulement ma tête vers lui alors qu’il s’est levé. Me relevant à mon tour je me secoue pour m’être assis au sol et prends ma veste pour la remettre et remonter la fermeture jusqu’au bout. Momo a déjà payé alors que je compter l’inviter. « Hey, tu aurais pu me laisser régler. » C’est son anniversaire, il a payé son propre « gâteau » ce n’est pas cool. Saluant les employés je sors d’ici pour le rejoindre dehors. « Où tu veux aller ? » J’irais où il ira de toute façon, je ne compte pas le laisser seul tant qu’il ne sera pas lassé de moi.

TENUE ─ La vie continue malgré tout. Mon père est mort, Kellian est toujours vivant, son frère mène sa vie, ma mère remonte doucement la pente, les gens ne font pas attention à nous. Bref, rien n'a vraiment changé, même si quelques détails ont été modifiés en route. Parfois, ça me blesse de voir l'aiguille tourner si rapidement, mais que personne ne le remarque et s'en contente. Je dois être le seul sur cette terre à vivre au ralentis, comme si j'attendais que mon heure arrive. Kellian me permet de ne pas regarder cette horloge, ni de faire attention au temps qui s'écoule. Il remet les pendules à l'heure, sans s'en rendre vraiment compte. Son frère me sort par les yeux, en vérité. Depuis la première fois où nous nous sommes rencontrés, jusqu'à maintenant. C'est le genre de garçon qui m'insupporte, qui me donne envie de le martyriser jusqu'à le voir chialer et me supplier. Ouais, autant changer de sujet de suite. « Bien sûr. » Sinon je ne le forcerai pas à bouger ses fesses. Le temps qu'il se relève et remette sa veste, j'ai vite fait de payer la note. Ouais, c'est censé être mon anniversaire, tout ça, mais je ne suis pas patient. « Fallait bouger son cul. » Dis-je en haussant mes épaules, comme si je m'en fichais complètement qu'il ait voulu m'offrir le gâteau. Il fait froid dehors, l'air passe à travers mon pull pour me faire frissonner. Lâchant un souffle, je regarde la fumée blanche s'élever dans l'air. Ouais, bientôt l'hiver, noël, ce genre de chose qui m'agace plus que d'habitude. Kellian à mes côtés, je dépose un instant mes yeux sur lui. « Tu verras. » Traduction, suis-moi et ta gueule. Ou fais moi confiance, en plus poli. Prenant la route, je longe l'avenue avant de m'arrêter, interpellant un taxi. Le véhicule se stoppe aussitôt et je passe en premier, laissant la portière ouverte pour Kellian. « Chiyoda, s'il vous plait. » Simplement. L'homme acquiesce et démarre aussitôt l'autre garçon installé. Je n'en dis pas plus, ne voulant rien gâcher. Il y a divers endroits à Tokyo qui vaut le coup d'oeil, mais celui-là est superbe. Avec les gars, on s'y prend pour boire de la bière ou fumer, mais ce soir je ne ferais rien de cela. Juste profiter de l'endroit et prendre l'air.

TENUE ─ Il y a des jours plus durs que d’autres, des périodes où on se remet sans cesse en question, je sais que Momo passe des moments difficiles et ça me fait me sentir mal aussi, j’ignore pourquoi, je ne sais pas si ce serait le cas avec quelqu’un d’autre et je n’ai pas envie d’essayer... Mais je veux l’aider et je le ferai. Il semble avoir une idée en tête et bien que j’ignore tout de ce qu’il prévoit de faire je me lève, mettant ma veste, il paie alors que c’était à moi de le faire... Je rouspète un peu, mais ce qui est fait est fait. « Je le bouge. » Soufflais-je simplement. La chaleur de l’endroit me manque déjà, il fait frais dehors, d’un autre côté ça fait du bien aussi, je ne suis pas du genre à m’arrêter sur une température, j’aime profiter de chaque instant, que ce soit devant un feu de cheminée ou sous la fraicheur d’une nuit d’automne. Il ne veut pas me dire où on va et cela ne m’étonne pas, souriant simplement alors qu’il appelle un taxi, ça me rappelle celui que j’ai loupé tout a l’heure avant de me mettre à courir à toute vitesse vers lui. « Chiyoda ? » Je lui demande en espérant qu’il détails un peu, mais non. Tant pis je regarde le paysage défilé dehors, il est tard et malgré tout il y a encore quelques gens qui circulent dans les rues. Posant mon regard sur Momiji, je me contente de le fixer un moment, s’il me regarde je souris, mais ne détourne pas le regard, c’est étrange de se balader comme ça, mais j’espère toujours qu’il me balance l’endroit où il m’emmène, me fichant que ce soit peine perdu, de toute manière en voiture on ne devrait pas mettre longtemps à arriver.

TENUE ─ Kellian n'a pas à se sentir mal pour moi, je ne voudrais pas que ce soit le cas. Chacun à ses problèmes, je n'ai pas été peiné quand il était malade, ni quand il allait mourir. Alors je ne lui demande pas de l'être pour moi non plus. Après, il fait ce qu'il veut, je ne vais pas l'empêcher d'être ce qu'il est. Ma façon d'agir me rappel étrangement cette fois-là où j'ai fait croire à un bal masqué pour le piéger et lui montrer l'un de nos hapslap. Parfois ça me manque, de taper sur des innocents, mais j'ai d'autres choses à penser et à faire que ça. Kellian râle et le contre-carre en lui disant de bouger ses fesses, qu'on ne va pas y passer la nuit. La température change brusquement, mais ce n'est pas cela qui va me faire rebrousser chemin ou m'arrêter. Kellian me suit toujours, tant mieux. Faut avoir l'art et la manière pour appeler un taxi, pas tout le monde sait faire ça. J'ai vécu toute ma vie à Tokyo, je sais comment stopper ce genre de véhicule sans me louper. Une fois à l'intérieur, je donne le quartier où je veux qu'il nous emmène puis le laisse conduire. « T'es toujours aussi chiant ? » Il sait très bien que je ne dirais rien, autant qu'il économise sa salive. Le regard à l'extérieur, j'observais encore les passants avant de sentir ses yeux sur moi, avec une insistance qui me force à détourner les miens de la vitre. Il me sourit, je fronce légèrement les sourcils et tourne à nouveau ma tête vers ma portière. Il est bizarre. Le trajet dure une dizaine de minute à peine, avant qu'il ne se gare à l'endroit que j'ai indiqué. Pressant Kellian de sortir, je donne l'argent au conducteur puis refermer la porte derrière moi. Il repart aussi tôt, sans demander son reste. D'un signe de la main, j'indique à Kellian de me suivre et me dirige vers une rue, puis un parc. Ce n'est pas n'importe quel parc que l'on trouve à Tokyo, mais le Wadakura fountain park. Y en a pas deux comme lui dans toute la ville, un grand espace où on été implanté des fontaines, qui jaillissent à certains moment. à mes yeux, c'est le plus beau lieu de Tokyo, en dehors des cerisiers en fleur qui sont difficile à admirer si jamais tu loupes la bonne période. Ici, c'est toute l'année pareil. « Mon coin secret. » Révélais-je enfin en tendant les bras comme pour lui présenter le parc illuminé, avec ses lumières se reflétant à la surface de l'eau.