On se sentait que l’été approchait. Les journées comme les soirées étaient assez lourdes, il faisait chaud. C’était atroce mais tout aussi agréable. Je voulais vraiment apprécier ce week-end, en particulier avec ma meilleure amie. Il faut dire que j’étouffais un peu chez moi ces derniers temps. Mes parents étaient quasiment désespérés qu’avec la majorité approchante, je n'étais pas foutu de décrocher mon diplôme de lycée. Bon j’ai compris que j’étais une déception, pas besoin de me le rappeler. Quoi qu’il en soit, j’avais besoin de me changer les idées et je ne connaissais personnes d’autre de mieux que ma petite Yuzu.

Je pris les quelques bombes de peinture qu’il me restait que je foutais dans mon sac. Je vérifais que chacun des adulte de la maison vaquait a une occupation pour m'eclipser en douce. Quelques minutes de métro pas avec les mecs les personnes les plus fréquentables puis de marche, je me rendais compte que j’étais un peu en avance. Bon ce n’était pas grave. Ça me permettait de profiter un peu de la légère brise nocturne et aussi observer un peu la population nocturne tokyoïte. Enfin, je savais que Yuzu était une fille un peu de la nuit et débrouillarde, mais bon je m'inquiète toujours un peu pour elle. Cependant, il y a bien plus de peur que de mal. Je repérais la silhouette svelte de la jeune fille que j'interpellais d’un signe de la main. Je me levais pour ainsi la rejoindre.

▬ J’ai repéré un super endroit pour taguer.

Dis-je tout sourire. J’ouvrais mon sac pour regarder les quelques bombes de couleurs que j’avais en ma possession

▬ Par contre, je n'ai pas eu le temps de refaire mon stock de peinture donc tu n'auras pas beaucoup de choix. Mes parents sont un peu trop sur mon dos ces derniers temps.

Dis-je d’un ton presque blasé en les évoquant.

▬ Enfin bref, toi, tu vas bien ?

Je pouvais aisément sentir que quelque chose clochait avec Yuzu. Elle qui était d’habitude avait plus d’entrain, qui était plus joyeuse, elle semblait si réservée d’un coup. C’était bizarre la manière dont elle prouvait son enthousiasme - même si je ne pouvais pas appeler ça de l’enthousiasme -. Enfin bref, ca ne m’enchantait pas de la voir ainsi. Il semblerait bien que nous avions chacun nos problèmes, et moi, je ne cachais pas du tout la frustration que me causaient mes parents en ce début d’année scolaire. Je ne relevais pas son ricanement, mais ses propos, du moins son ton me laissait pas totalement indifférent. Je soupirais puis je fermais mon sac que je remplaçais sur mon épaule

▬ Aux dernières nouvelles, tu accompagnes une fois plus cette année non ? Je ne pense pas que tes parents t’ont aussi ménagé

Répondais-je aussi froidement qu’elle. Je pouvais être cool quand je voulais, mais je n’ai pas apprécié qu’elle me parle ainsi. Pour moi, il était normal que je lui rende la pareille, chaque personne avait sa limite. Bon, évitons quand même la prise de tête, c’était bien la dernière personne contre qui je voulais pester aujourd’hui. Je lui fais un signe de la tête pour qu’elle me suive. Nous nous faufilions a travers d’étroites ruelles, escaladions quelques murets pour arriver a notre destination. Cependant, l’ambiance était toujours aussi lourde. C’était assez rare. Lorsque que nous arrivions devant ce mur blanc et immaculé. Accroupis au sol. J’ouvrais une fois de plus mon sac après l’avoir posé par terre. Mais d’abord, il fallait que j’éclaircisse quelque chose

▬ Putain dit moi, c’est quoi ton problème Yuzu ? Qu’est-ce qu’il se passe pour tu sois aussi froide aujourd’hui ?

Dis-je en levant les yeux sur elle. J’étais dans l’impasse. Elle me disait qu’elle allait bien, mais je le sentais bien que ce n’était pas le cas. Elle qui avait l’habitude de se confier, je ne sais pas pourquoi semblait si silencieuse. Avais-je fait quelque chose qui l’a contrarié ? Si c’est le cas, je me demande bien quelle connerie….

Oups, la boulette. Je me sentais assez mal soudainement. Je me rendais compte que je ne connaissais pas Yuzu aussi bien que je le pensais. Il faut dire que lorsque nous nous sommes rencontrés, on ne s’était pas respectivement présenté, nous contentant de nos prénoms avant de découvrir que nous étions dans le même lycée. En fait non, on ne connaissait rien du tout de l’un et de l’autre. Je ne lui avais jamais parlé de ma famille recomposée et elle de ses parents. Si j’avais su, j’aurais tourné sept fois ma langue dans ma bouche. Enfin bon, ce qui est fait est fait. Une seule chose me préoccupait, elle. Quelque chose me disait qu’elle n’était pas de bonne humeur, et je ne faisais qu’intensifier les problèmes. Je lui soufflais rapidement des excuses, parce que je voyais bien que j’avais merdé sur le coup.

En attendant, je l'emmenais jusqu'à l’endroit que j’avais repéré, qui me semblait parfait pour qu’on puisse l’enduire un peu de peinture. Cependant, l’ambiance était toujours aussi glaciale tout au long et je trouvais ça vraiment bizarre. Alors je me décidais de briser la glace en lançant la question vue qu’elle ne semblait pas très bavarde. Je n’aimais pas du tout la voir comme ça. Ca ne lui ressemblait pas, elle qui était toujours pleine de vie. Je la suivais du regard, la voyant geindre, plaindre de… Mon père ? Je n’ai pu m’empêcher d’arquer un sourcil à cet instant.

▬ Quoi ?

Je ne comprenais pas pourquoi elle mettait mon père dans cette conversation. J’avais du mal à croire que ce soit mon père qui soit la cause de sa mauvaise

▬ Je me suis excusé pour tes parents. Je te redis, mais je suis désolé, ok ? Mais bordel explique moi ce qu’il t’arrive. J’ai fait quelque chose de mal ?

Je me levais pour me placer devant elle

▬ Et puis, pourquoi tu me parles de mon père ? Qu’est-ce qu’il a à voir dedans ?

Je le sentais bien qu’elle n’était pas dans son assiette, je ne l’avais pas vu comme ça depuis que je la connaissais, mais j'espérais quand même pouvoir lui redonner le sourire. Cependant, tout ce qu’elle arrivait a faire à cet instant c’était de m’agacer et m’énerver. De plus, je ne comprenais pas pourquoi elle mettait mon père dans la conversation. Il semblerait que soit la cause de toute cette colère. D’ailleurs, ma cadette ne perdait pas de temps pour me le faire comprendre, m’asseyant de coup contre moi, me secouant dans tout les sens avec sa maigre. A cet instant, j’ai rapidement perdu mon sang-froid. J’attrapais fermement ses poignets pour la stopper.

▬ Hé, tu vas te calmer bordel ?

Non parce que jouer les hystériques nous mènera rien.

▬ C’est quoi ton délire, je n’ai jamais volé ton père d’accord?

Hurlais-je avant de la lacher. J’essaie d’analyser un peu mieux ses paroles. Elle me disait qu’elle n’avait pas de parents, pourquoi soudainement me lançait-elle que nous avions soudainement le même père ? Réfléchissant quelques secondes, je la regardais, perdant presque mes mots

▬ Putain, alors c’est toi…

Dès le jour ou j’ai vu que nous avions le même nom, j’aurais dû faire le rapprochement. Il faut qu’il est vrai que le nom Hisagi n’est pas commun. Putain, j’ai été totalement con. Je passais rapidement ma main sur mon visage.

▬ Mes parents se fréquentent depuis plus de deux ans, ok ? Je n’avais rien demandé à l’origine.

Mais je mentirais si je n’étais heureuse de voir ma mère se consacrer à elle et d’avoir été capable d’aimer quelqu’un à nouveau

▬ Il a été présent pour ma mère et moi et est le seul parent masculin que j’ai eu de ma vie. Alors normal que je le considère comme mon père. Tu ne peux pas me blâmer de m’être attaché à lui et l’appeler mon père

Je n’ai pas eu la chance de grandir avec père, et là, la vie m’avait me l’avait finalement donné. Pourquoi devrais-je être triste de ça ?

▬ Ca fait des mois que je retourne tout dans cette foutu maison pour savoir qui était ma petite soeur puisque mes parents ne veulent rien me dire mais…

Je me raclais la gorge

▬ Mais c’est comme s’il t’avait rayé de sa vie.

Aucune photo, nada. Je ne devais peut-être pas lui dire ça, mais on a été dans le flou bien longtemps. Si j’avais su depuis le début que Yuzu et moi faisions partie de la même famille, je lui aurais caché ?

▬ Yuzu, tu peux m’expliquer ce qu’il s’est passé entre mon… Notre père et toi ? Pourquoi tu ne vis plus avec lui ?

Si mes parents ne me donnaient des réponses, je les prendrais auprès de la concernée

« Bien sûr que si tu l’as volé ! ». À ces mots, je roulais des yeux. Elle commençait sérieusement à m’agacer à jouer de cette façon avec mes nerfs. Bon, c’est vrai que Yuzu a toujours eu ce côté enfantin qui m’a toujours amusé, mais la, c’était une véritable gamine que j’avais en face de moi. Mais je prenais sur moi. Je voyais aisément que je la faisais souffrir avec mon franc parlé et mon manque de tact. Je m’en voulais pour ça. D’autant plus lorsqu’elle m’avoua que la perte de sa mère coïncidait avec le début de relation avec mon père. Je trouvais ça tellement égoïste de leur part. Je me sentais vraiment mal et honteux. L’estime que j’avais pour mon père a disparu en quelques secondes. Je voulais absolument savoir tous de cette famille Hisagi. J’en avais assez des secrets… Cependant, Yuzu ne semblait pas être de cet avis. J’avais plus l’impression de parler à un mur. La voyant s’en aller, j’ai perdu mon sang-froid. J’attrapais son bras pour la plaquer sur le mur. Je gardais fermement mon emprise sur elle et la toisais du regard

▬ Nan, mais tu vas m’écouter une bonne fois pour toute et arrêter de jouer les gamines bordel

J’en avais assez aussi des mensonges et des cachotteries. Maintenant, je voulais jouer cartes sur table

▬ Depuis le jour où j’ai appris que j’avais une soeur, je ne cesse de savoir qui c’est.

J’ai retournais cette maison de fond en comble pour trouver ne serait-ce qu’un indice, mais rien. Mon père a fait tout pour la faire disparaître. Ça me rendait malade et triste en même temps. Mon ton et mon regard étaient glacés

▬ Tu crois une minute que si j’avais su toute l’histoire depuis le début, je t’aurais mis sur le banc de touche, t’es dingue ou quoi ? Bien au contraire, j’aurais tout fait pour que tu viennes vivre avec nous

Yuzu était ma meilleure amie. Depuis qu’on traînait ensemble, je la considérais comme ma petite soeur. Et la savoir que c’est ma vraie soeur ne faisait que renforcer l’envie de la protéger et qu’elle fasse partie de ma vie. Alors oui, je l’aurais fait revenir dans cette maison que ça plaise ou non. Je lâchais un peu prise, voulant éviter de lui faire un hématome. Je soupirais légèrement pour retrouver mon calme.

▬ Je suis désolé. Déjà pour ta mère, mais aussi de t’avoir fait souffrir involontairement..

Je sais que la vérité n’était parfois pas bonne à entendre, cependant je jugeais qu’il y avait trop de mensonge de tous les côtés.

▬ Tu as toutes les raisons d’être en colère, je le conçois, mais tu ne peux pas m’en vouloir alors que j’étais dans le flou.

Elle rejette la faute sur moi, parce que j’ai eu le malheur d’accepter l’homme que ma mère avait choisi ? Si j’avais su tout depuis le début, jamais je n’aurais pris son nom de famille ; jamais je ne l’aurais laissé entrer dans nos vies

Je pouvais comprendre qu’elle était sur les nerfs et été en colère. J’avais ce même sentiment. On a été berné tous les deux par cet homme qu’on appelle notre père. J’étais triste de voir l’image que j’avais de cet homme s’effacer d’un revers de la main. Des milliards de questions me traversaient l’esprit. Mais c’est surtout comment un père est-il prêt à abandonner sans scrupule sa fille unique. « ça change rien au fait que mon père m’a abandonné pour toi. » Je passais une main sur mon visage avant de soupirer bruyamment.

▬ Mais bordel Yuzu tu veux que je fasse quoi face à ça ? J’ai rien demandé ! Tu auras beau continuer à chouiner, geindre et te plaindre, je suis dans ta position.

Hurlais-je. Elle arrivait facilement a me faire perdre mon sang froid. J’avais l’impression de parler à un mur. Franchement, elle voulait que je fasse quoi là ? Moi, j'étais prêt à faire des pieds et des mains pour la faire revenir chez elle, mais elle faisait la sourde oreille. J’étais vraiment agacé. Cependant, je ne m’attendais pas qu’elle me lance de but en blanc que son père était infidèle. Cela signifiait que ma mère était sa maîtresse ? Putain… ça je ne n’arrivait pas à le concevoir… Ma mère dans le rôle de la briseuse de ménage ? Voilà comment perdre l’estime de ses parents en un soir

▬ Putain, mais t’es malade de penser de telle chose. Commence pas à la jouer parano

L’infidélité, c’est une chose, mais là elle parlait de meurtre. Nos parents ne sont pas parfaits, mais de là à penser que notre père aurait pu planifier l’accident. On va loin là.

▬ C’est dingue. Ok, nos parents ne sont pas de saints, mais ne pense pas à des trucs glauques comme ça

J’étais moi-même sous le choc de toutes ces révélations. Ça faisait beaucoup trop. J’avais aussi l’impression que mon monde aussi s'écroulait. Cette famille que j’aimais tant et dont j’ai été longtemps fière… Et même penser que ma mère soit tombée si bas entre l’adultère et rejeter la fille de son mari. Je m’adossais contre le mur pour regarder le ciel.

▬ Le mieux c’est qu’on aille direct le voir pour régler cette histoire une bonne fois pour toute

Si habituellement son côté têtu et borné m’attendrissait, la, je devais dire qu’il m'agaçait. J’avais juste envie de la secouer et lui dire de grandir. Je conçois ce que mon… Enfin, son père a fait était totalement dégueulasse. Mais ce n’est pas une raison pour me prendre comme bouc émissaire et ça je ne peux pas l’accepter. Qu’elle ne soit pas surprise que j’agisse aussi froidement. Moi qui espérais que ce serait la joie d’avoir une petite soeur qui embêter, il s’avère que c’est un véritable bébé. Agacé, je passais une main sur mon visage.

▬ Je te force pas de considérer ma mère comme la tienne. Je sais très bien qu’on ne remplace pas une mère. Mais tu n’as pas à me blâmer parce que j’ai accepté le tien

J’ai grandi sans père. J’ai été raillé toute mon enfance à cause de ça. Il est le seul exemple masculin que j’ai eu dans ma vie. Et puis il semblait bien prendre soin de ma mère qui était amoureuse depuis des années. Quelles auraient été les raisons de le rejeter ? Mais ça Yuzu ne semblait ni le comprendre, ni l’accepter « Pourquoi ? Tu ne veux pas admettre tout ça ? Tu ne connais pas mon père, pourquoi tu le défendrais ? ». Je soupirais. J’ai passé quand même deux années quotidiennement avec lui. Je pense quand même le connaître un peu. Enfin, c’est ce que je pensais...

▬ Tu sais quoi, tu as raison… Je ne sais pas ce que j’espérais

Je parlais surtout à un mur. Qu’elle boude dans son coin. Je ne suis pas un toutou qui va passer sa vie à courir après elle.

▬ Mais sache une chose. Si tu veux tant ravoir ton papa chéri dans ta vie, il va falloir que tu te décides de prendre le taureau par les cornes parce que ce n’est pas en chiounant dans ton coin et te plaignant du monde que tout va s’arranger

D’un geste de la main je lui fis signe de partir...

▬ Vas y, fout le camp et continue à geindre dans ton coin

J’attrapais une bombe de peinture et laissais le spray exprimer ma rage sur le mur.

▬ Au fond, cette vie là te plait plus que tu ne le dis….