TENUE † Thanksgiving. Ce n’était pas une fête qui était réputée au Japon, pour autant, je le fêtais chaque année, puisque j’avais des origines Américaine. J’aimais énormément cette fête, et puis, je ne pouvais pas m’en cacher, j’adorais manger de la dinde, des plats avec du potiron et j’en passe. Ça changeait complètement de l’alimentation qu’on pouvait avoir au Japon. Je suis d’ailleurs peut-être folle, mais en ce jour, au lieu de le passer avec mes parents, comme chaque année, j’avais décidé d’inviter Eden… Et puis ça tombait bien, puisqu’il finissait assez tôt les cours cet après-midi. J’avais eu le temps de tout préparer pour le repas. Il ne me resterait plus qu’à réchauffer le moment venu. Regardant l’heure, je me grouillais pour prendre une douche, me coiffer et me maquiller rapidement. Enfilant mes vêtements, je décidais de mettre des bas porte jarretelles pour ne pas avoir froid aux jambes. Enfilant mes baskets, je me mis doucement à rire à l’idée qu’avec quelqu’un d’autre, j’aurais mis des talons hauts. Mais bizarrement, j’aimais bien être plus petite qu’Eden… C’est complètement con quand même. Secouant ma tête, j’attrapais une veste avant de l’enfiler. Sac à main pris, je regardais si j’avais bien tout ce qu’il me fallait avant de quitter mon appartement. Je lui avais demandé de me rejoindre dans l’une des plus grandes avenues de la ville. Noël en approche, les décorations étaient de mise avec tout ce qui allait. Alors autant profiter de cette ambiance si magique. Je voulais en profiter un maximum, passer simplement du bon temps avec lui… Frissonnant doucement, je regardais le ciel grisâtre avant de prendre le bus. Je ne vivais pas loin, alors c’était tout au plus bénéfique pour moi. Frottant mes mains pour me réchauffer, j’avançais dans cette rue bondée de monde. Heureusement qu’on s’était donné l’ordre de s’attendre devant une boutique spécifique, sinon, l’horreur… Avançant vers la dite boutique, je le vis, dos à moi. Un sourire aux lèvres, je m’avançais avant de me mettre sur la pointe des pieds pour susurrer un « bouh » à côté de son oreille. Me décalant, je finis par lui faire faire avant de lui tirer la langue. « Tu es là depuis un moment ? Tu n’as pas trop froid ça va ? » Je lui avais demandé de ne pas venir en tenu scolaire. Parce qu’aujourd’hui… Je n’avais pas vraiment envie d’être une sensei avec un élève. Je voulais être Joy avec Eden…

TENUE † Après Jae Hyun, c’était au tour d’Akio de quitter Royal. Comme mon mentor, elle ne m’a laissé qu’une simple lettre. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle se confesse à moi. Ce n’était pas la première confession que je recevais mais je ne savais pas qu’elle pouvait m’aimer comme le ferait une fille avec un garçon. Elle agissait tellement…différente des autres que ça m’a fait bizarre sur le coup. Mais je n’ai pas eu le temps de faire quoi ce soit qu’elle était déjà partie, emmenant Hikaru, son frère. C’était aussi étrange que son cadet parte avec elle mais ça devait être le cas puisque Hikaru a disparu lui aussi. Surement parce qu’ils étaient plus proches qu’ils ne le paraissaient. J’aimerai moi aussi que ma relation avec Méliodas s’améliore. « Grâce » à l’accident d’Halloween, il y a eu quelques progrès et j’en suis bien content. Prenant mon mal en patience, je ne veux pas brusquer les choses avec lui. Puis comme l’avait dit Sensei, les choses finiront par s’arranger parce que nous sommes frères. En parlant de Sensei, elle m’avait demandé de la rejoindre pour la Thanksgiving. Je n’avais encore jamais fêté cette fête. Pour moi, elle n’était pas si importante que cela. Mais puisqu’elle l’était pour Sensei, j’ai accepté de jouer le jeu. Malgré le temps passé depuis la première séance de parkour, je n’oublie pas la frayeur qu’elle m’avait faite. Ça m’avait fait réaliser que je ne la connaissais pas réellement. Du moins, qu’elle ne semblait pas être si « spontanée » qu’elle en avait l’air. Je sors du dortoir en une tenue de civil. Elle ne voulait pas que je sorte en uniforme alors je me suis changé exprès pour elle. Les rues de Tokyo restaient animées à n’importe quelle heure de la journée. Surtout qu’avec les fêtes qui approchaient, ça ne faisait qu’empirer. Mettant mes mains dans mes poches, je longe la rue en me dirigeant vers le point de rencontre. Elle n’était pas encore arrivée. Je me décale sur le côté tout en l’attendant. Je n’ai pas eu de mal à deviner que le « bouh » murmuré à mon oreille venait de Sensei. Je tourne nonchalamment la tête vers elle, croisant par la même occasion son regard. Elle a l’air contente. C’est une bonne chose. Je souris tendrement. « Non ça va. » Je la regarde de haut en bas. « Vous n’avez pas froid ?  » Dis-je avec un ton moqueur. C’est bien une femme, elle n’a pas peur du froid pour se faire jolie.

TENUE † Partager Thanksgiving avec Eden, c’était …. Une nouveauté à part entière. J’étais tout aussi excitée que quand j’étais une gosse. Ou quand je croyais encore au Père Noël, un truc dans le genre. Il faut dire que plus je pensais à lui et plus je me sentais bizarre. Peut-être que je me voile la face, j’en sais trop rien, mais au fond de moi, je sais ce que ça veut dire. C’est stupide. Il est lycéen, je suis une adulte, on a presque dix ans d’écart, si ce n’est pas dix ans tout court… C’est du pur suicide que de penser ça…. Je n’arrêtais pas de chasser mes pensées, surtout quand elles devenaient aussi persistantes sur ce fait là. Il était là, il était arrivé le premier, dans le fond, ça ne m’étonnait pas de lui. Mais ça me plaisait. Je pouvais presque le reconnaître de dos. Sa carrure, le fait qu’il soit grand, sa posture… tout. C’est dingue. Je devais trop trainer avec lui pour que je puisse le reconnaître comme ça. Je m’amusais à lui faire peur, pour autant, je savais qu’il n’allait pas être effrayé. Je lui souriais, en plongeant mon regard dans le sien. « Non ça va. Vous n’avez pas froid ? » « Non ça va, ma veste me tiens chaud. » Mes collants aussi ceci dit. Mais c’est vrai que mes jambes étaient froides. Mais ce n’est pas grave. Je souris un peu plus avant de lui attraper le bras pour qu’on démarre notre petite journée. « A New-York en général, j’achète un bon chocolat chaud avec des marrons chauds. Tu aimes les marrons chauds ? » Demandai-je en regardant un peu les stands de rues pour voir si pour cette journée spécial, il n’y en avait pas qui en faisaient. En général il y en a toujours un ou deux. « Au fait, comment était ta journée à l’école ? » Demandai-je en entrant dans un café pour pourvoir commander deux boissons chaudes à emporter.

TENUE † Voir Sensei en dehors des établissements de Royal était devenu quelque chose banale. C’était comme des sorties entre amis, sauf que je ne pouvais pas réellement la considérer comme une amie. Pourtant, ce n’était pas l’âge le problème. Enfin, je ne crois pas. Le seul adulte, hormis mes parents, que j’appréciais était Jae Hyun et c’était différent. Il était plus comme mon mentor qu’un ami. Mais au final, est ce si important de savoir si elle est mon amie ou pas ? J’apprécie les moments passés ensemble et c’est, à mes yeux, le principal. Même si c’était elle qui m’avait donné le lieu de rencontre, je suis le premier arrivé. Non pas parce qu’elle était en retard mais tout simplement parce que j’aime bien être en avance. De toute façon je n’avais pas de devoirs urgents à faire donc ce n’était pas ces quelques minutes d’avance qui feraient tout changer. Mains dans les poches, je l’attends tout en regardant les passants. Quelqu’un essaya de me surprendre mais je devinai rapidement qui s’était. Ce soir, elle était particulièrement souriante. C’est rassurant. Je regardai sa tenue puis sa veste. Il est vrai qu’elle avait l’air de tenir chaud. Elle m’attrapa le bras et je me laissai entrainer par son enthousiasme. «  Je n’en ai jamais gouté.  » Comme je ne savais pas si j’allais apprécier, je n’osai pas utiliser mon argent pour quelque chose que je pourrai regretter. « Vous avez vécu longtemps à New York ? » Ça devait être bizarre de tout abandonner et de venir au Japon. « On nous a rendu nos exams. Je suis premier de la classe.  » Mais pas des troisièmes années. Je n’avais pas encore annoncé la nouvelle à mes parents. « Nous sommes encore à la recherche d’une vice-présidente pour le conseil des élèves. Akio est partie étudier aux States. Mais je pense qu’une personne viendra rapidement la remplacer. En fait, depuis qu’elle est partie, nous recevons pas mal de propositions mais on n’a pas encore fermé les candidatures.  » Généralement, ce n’était que des filles qui étaient volontaires. Je sortis mon porte feuille pour payer ma boisson. « Et votre journée ?   »

TENUE † « Je n’en ai jamais gouté. » Un sourire aux lèvres, telle une petite enfant, je comptais bien lui faire goûter cela. « Eh bien, mon petit homme, tu vas en goûter aujourd’hui. » Dis-je en lui serrant un peu plus le bras. Il n’allait pas y échapper. Oh, ça non. « Vous avez vécu longtemps à New York ? » Je le regardais, un peu surprise de sa question. « Tu trouves que je fais Américaine ? Pourtant, je n’y suis allée qu’en vacances, je n’ai jamais réellement vécu à New-York. » Mais c’était déjà pas mal d’y passer de nombreuses vacances, ça, j’en étais bel et bien consciente. D’autres n’en avaient pas la chance… Les gens affluaient dans la rue, certains s’extasiaient d’autres, couraient, d’autres, prenaient leur temps. « On nous a rendu nos exams. Je suis premier de la classe. » Entendre ça, me rendait heureuse. Même si je me demandais, si lui, l’était vraiment. « Bravo. Si j’étais élève dans ta classe, je te collerai non-stop pour des cours privés. J’étais le genre à être dans les derniers de la classe. » Je ne m’en cachais pas, je n’étais pas une fille super bonne à l’école, j’étais une fille normale, dans la moyenne, ni nulle ni bonne. Quand quelque chose m’intéressait, je m’y mettais à fond. Je l’écoutais me parler du conseil des élèves puis de Akio. Ma tête se posait sur son épaule, avant un air assez moqueur. « Il paraît qu’elle s’est confessée ? Tu n’as pas trop blessé son petit cœur ? » J’étais plus curieuse sur ça qu’autre chose. « D’ailleurs, pourquoi tu l’as rejetée ? » Il ne voulait surement pas de copine, préférant se concentrer sur les études… Dans le petit café, je l’écoutais me parler en le voyant sortir son portemonnaie. Je l’attrapais avant de lui donner un petit coup sur la tête. « Alors, là, dans tes rêves. Aujourd’hui, tu ne paies rien. » Je tendais ma carte à la serveuse, avant de mettre le fameux portefeuille d’Eden dans mon sac. « Sinon ma journée ? Je l’ai passé à cuisiner. J’ai même cherché sur le net, comment remplacer les œufs dans les recettes. Tu verras. Tu vas te régaler. » J’attrapais nos boissons avant de lui tendre la sienne.

TENUE † Je hochais nonchalamment de la tête avec un sourire. Je ne voyais pas l’intérêt de refuser, surtout qu’elle semblait bien déterminée. Je sentis sa prise se serrer sur mon bras. « Très bien, mais lachez moi le bras.  » lâchai-je surement avec trop peu de conviction car elle m’ignora. En y réfléchissant, c’était bizarre qu’elle me tenait ainsi le bras non ? « Vous êtes ouverte d’esprit et tactile alors je pensais que ça pouvait venir de là. » Et puis elle était la première à me parler de New York alors j’étais curieux. « C’est ce que tu crois. Les gens ont tendance à ne pas vouloir s’approcher de moi. Justement parce que je suis premier. » Les filles c’était une autre histoire. Contrairement à ce que l’on pouvait croire, j’étais bien souvent seul qu’entouré. Je secouai mon épaule pour faire bouger sa tête et la dissuader de venir s’y poser. « Vous êtes au courant ?  » Je soupirai. Les rumeurs circulent très vite. « Je ne l’ai pas rejetée. » C’était vrai. J’allais surement le faire mais je n’ai pas eu le temps de faire. Elle est partie bien avant que je ne puisse lui dire. Je ne voulais pas entrer dans les détails pour ne pas créer plus de rumeurs sur cette histoire mais comme il s’agit de Sensei, je pouvais bien le lui dire. « Elle s’est confessée à moi en m’écrivant une lettre. Je l’ai reçue qu’après son départ.  » Donc officiellement, je ne l’ai pas rejetée. « C’est bizarre parce que je suis à la fois content et triste qu’elle parte. Content parce que je n’ai pas à « blessé son petit cœur ». » comme l’avait dit Sensei. « Mais triste parce que j’ai perdu une amie. C’est égoïste n’est ce pas ? » Sans que je ne le remarque, Sensei piqua mon portefeuille. J’ouvris la bouche par surprise. « Mon portefeuille ! Ça s’appelle du vol. » Une voleuse qui achète une boisson moi. « Ce n’est pas parce que je suis lycéen que je n’ai pas d’argent.  » Elle n’a pas à s’en faire. « Vous n’aurez pas du. J’aurai pu tout simplement mangé les plats sans œufs. Mais merci. » Elle s’est donné beaucoup de mal et c’est gentil. « Ça aussi, vous n’aurez pas du. J’achète les marrons dans ce cas. » J’attends qu’elle accepte avant de récupérer la boisson.  

TENUE † « Très bien, mais lachez moi le bras. » « T’es d’un rabat-joie. Je ne peux rien faire avec toi. » Dis-je en lâchant, juste un peu, son bras. Le côté Américain ? Je pinçais mes lèvres avant d’hausser les épaules. « Je crois pas ? Beaucoup de Japonais sont tactiles aussi, tu sais. Tu ne les as simplement pas croisé encore, c’est sûrement pour ça. » Je le taquinais, bien évidemment, mais faudrait quand même, qu’il se décoince un peu. Non ? J’ai envie de lui tenir le bras, de lui faire des câlins, tout ça… Il ne pouvait pas me laisser faire ? « C’est ce que tu crois. Les gens ont tendance à ne pas vouloir s’approcher de moi. Justement parce que je suis premier. » Tu ? Oh. Il venait de me tutoyer. Je souris doucement l’air de rien, je trouvais ça bien plaisant. « Ils savent pas ce qu’ils ratent… Cependant, moi, je peux profiter de toi, comme ça, et ça, c’est cool. » Je lui tirais la langue. « Tu peux continuer de me tutoyer d’ailleurs. » Ajoutai-je l’air de rien. Je l’écoutais me parler de Akio. Je pouvais comprendre son ressentiment. Ce n’était pas si égoïste que ça dans le fond, mais disons que ça lui permettait d’avoir à dire quelque chose qui pourrait la blesser. Et puis, elle part le cœur léger ? Elle s’est confessée, peut-être n’attendait-elle pas de réponse, en le faisant de la sorte. On ne saura jamais… « C’est toujours délicat, dès que l’amour s’en mêle… » Et ça, je ne pouvais pas le nier. Je payais les boissons en volant son portefeuille. Il ne semblait pas apprécier d’ailleurs. Pas grave. « Je n’ai pas dit que je te faisais économiser des sous. Je sais que tu peux payer. Mais aujourd’hui, c’est moi qui t’invite. Arrête de pinailler et laisse-toi te faire inviter bon sang. T’es têtu, Eden. » Dis-je en fronçant les sourcils. J’aimais bien son côté têtu, mais pas dans ce genre de moment. Parce que j’avais l’impression qu’il tentait de m’éloigner de lui. Qu’il repoussait toutes mes approches à son égard. Je lui donnais sa boisson, en lui racontant ma journée à savoir, cuisiner, tous les plats, sans œufs. Je l’écoutais me répondre avant de lui donner une pichenette sur le front. « T’es toujours obligé de râler ? Tu ne peux pas accepter le fait que je fasse ça pour toi, car ça me fait plaisir ? Je t’aime bien tu sais. Alors faire tout ça, ne me dérange pas du tout. » Je bus une gorgée de mon chocolat en prenant la direction de la sortie de la boutique. « Et tu ne paies rien du tout. Sinon je boude. » Dis-je en soupirant.

TENUE † Je lui parlais de mon incapacité à me faire des amis. Je ne suis pas aussi sociable que je ne le montre. Les gens avaient même tendance à m’éviter parce qu’il ressente une certaine pression. Enfin, c’est ce que je crois avoir compris. Je parle plus souvent à Sensei qu’à des camarades dans la classe. Ah je l’avais tutoyé ? Je ne l’avais pas remarqué. C’était une erreur, j’ai parlé un peu trop vite. Je continue à parler et j’évoque Akio. «  Les relations humaines sont difficiles à gérer. » Que ce soit en amitié ou en amour. Je suis nul pour les deux. Je frotte mon front, à l’endroit où elle m’a donné une pichenette. Mais les paroles de Sensei prennent plus de sens. Peut être est ce à cause de mon entêtement que je repousse les autres ? Comme le fait de ne pas aimer me sentir redevable à quelqu’un ? Je ne fais surement pas attention aux sentiments des autres. Sensei m’a ouvert les yeux. «  Désolé. » Dis-je en émettant un rire gêné. Je ne voulais pas la blesser ou la vexer dans mon comportement. Je souris. « J’ai compris. Alors ne boudez pas s’il vous plait. » Autant elle avait, par moment, l’air d’une adulte responsable, autant elle pouvait agir comme une enfant. Elle est une personne fascinante. Je bois dans mon chocolat chaud pour lui montrer que j’accepte sa générosité. On sort de l’enseigne puis déambule dans la grande rue «  Mais j’espère que cette promesse ne s’applique qu’à partir de maintenant. » Je sors un élastique pour cheveux de ma poche. Il y a une fleur rouge en guise de motif. Je l’avais acheté hier dans un stand à côté du « mien ». Ce n’est pas grand-chose mais je l’ai acheté en pensant à Sensei. Je le trouvais joli. Mais en repensant, c’est vraiment stupide comme cadeau. Je commence à me rétracter en refermant ma main sur l’élastique. «  Oubliez, je ferai mieux la prochaine fois.  »

TENUE † « Les relations humaines sont difficiles à gérer. » Il marquait un point, mais il semblait se compliquer la tâche plus qu’il ne le devrait… Et ça, c’est loin d’être agréable, quand on se met des limites… « Tu devrais simplement laisser faire. Je pense que tu te poses trop de questions. Ou alors que tu t’imposes des barrières inutiles. Sois toi-même. » Au final, c’est tout ce qui compte, être soi-même. Je trouvais Eden agréable et gentil, mais parfois, j’avais l’impression, de ne pas le connaître tout à fait. Comme s’il cachait volontairement une grande partie de lui. Il ne le faisait peut-être pas exprès, mais je ne m’empêchais pas de le lui dire. Parce que si ça pouvait l’aider, à changer, alors autant le faire. Il est jeune, il a encore toute la vie devant lui. Il doit découvrir tellement de chose. Il ferait mieux de profiter maintenant que d’avoir des regrets plus tard… « Désolé. J’ai compris. Alors ne boudez pas s’il vous plait. » Moi bouder ? Je ne suis qu’une pauvre fille. Je boude trente secondes… Pas plus. Surtout avec les gens que j’aime. Mais bon, ça, je ne comptais pas le lui dire. Je savais que ça allait le faire fuir, ou le braquer… Une « sensei » qui lui dit qu’elle l’aime bien… Dans sa tête qu’est-ce que ça pourrait donner ? Enfin bon. Il ne comprendrait pas le sens. Parce que pour moi ça sonnait plus qu’un je t’aime bien… « Je ne boude pas. C’est difficile de te faire la tête. Surtout avec ton petit regard là. » En tout cas, maintenant, on sortait de la boutique, le froid se faisait sentir mais rien de bien méchant, du moins pour l’instant. Buvant mon chocolat chaud, je regardais un peu les stands qui étaient dans la rue, pour vendre quelques objets en rapport à noël. « Mais j’espère que cette promesse ne s’applique qu’à partir de maintenant. » Je posais ma main libre sur son dos, pour le frotter doucement. Il réfléchit vraiment trop. « Oubliez, je ferai mieux la prochaine fois. » Je relevais le regard vers lui, avant de sourire en coin. « La prochaine fois ? Quand ça ? Tu fais quoi pour Noël d’ailleurs ? » Je demandais, j’osais, pour savoir. Est-ce qu’il restait à Royal, ou bien est-ce qu’il rentrait chez lui ? Le passait-il avec son frère ? Ou pas ? Voyant un stand vendant des écharpes, je m’approchais, avant d’en choisir une bien épaisse et classe. Donnant mon gobelet à Eden pour qu’il le tienne, je payais le monsieur avant de prendre l’écharpe et me tourner vers Eden. Lui souriant, je me mis à l’enrouler autour de son cou, avec précaution. « J’ai pas envie que tu attrapes froid. » Dis-je doucement avant de bien l’arranger. Tirant quelque peu dessus pour le faire se pencher, je me mis sur la pointe des pieds pour venir déposer un baiser sur sa joue droite. « Merci d’être venu… » Récupérant mon gobelet, je me remis à marcher, tranquillement pour faire le tour des stands.

TENUE † Etre soi-même. Je me demande qui est le vrai moi. J’ai l’impression de ne pas me connaitre. Suis-je un enfant modèle qui essaye de se rebeller ou est ce le contraire ? Je ne sais pas. En y réfléchissant, l’idée ne me ne parait pas si étrange. Après tout, le seul visage qu’on ne peut pas voir de nos propres yeux, c’est le sien. J’ai l’impression que Sensei me connait plus que je ne me connais. Je ne saurai décrire cette sensation mais j’ai l’impression que c’est la seule personne qui me voie, celui que je suis. Du moins, j’ai l’impression d’être moi-même quand je suis avec elle. Je lance un sourire victorieux avant de sortir de la boutique. S’en suit ensuite une vague d’intenses réflexions sur si je dois lui offrir l’élastique que j’ai acheté ou pas. Je me rétracte et range l’objet. « Avec ma famille, je pense. Et vous ? » Comme je n’ai pas de petite amie, Noël est plus une fête entre famille qu’entre amoureux. Ce serait bien que Méliodas puisse nous rejoindre. Ça pourrait être le meilleur cadeau pour mes parents. Je suis Sensei qui s’approche d’un stand. J’attrape son gobelet tout en la fixant. Elle choisit une belle écharpe. C’est étrange car je n’ai pas l’impression que ce soit son style d’écharpe. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle me passe l’objet à travers le cou. Elle me tire vers le bas puis dépose un baiser sur ma joue. Gros vide mental. J’ignore pendant combien de temps je suis resté perdu mais quand j’ai repris mes esprits, Sensei était déjà loin. Je sens mon cœur s’emballer à une folle vitesse et mes joues chauffer. Qu’est ce qui me prend ? Je touche la nouvelle écharpe qui est maintenant la mienne. Faisons comme si rien ne s’était passé. De toute façon, j’avais clairement raté le timing pour demander les explications. J’essaye de ne pas y penser et pars rejoindre Sensei. « Vous semblez particulièrement joyeuse aujourd’hui. Il s’est passé quelque chose ?  »

TENUE † « Avec ma famille, je pense. Et vous ? » Au vu de son âge, le passer en famille, c’était tout à fait normal. A son âge aussi je passais noël et les fêtes avec ma famille. « Tout dépend. Si j’ai envie d’aller jusqu’à Kyoto ou pas. Mais à mon avis, je resterai seule. » Ce n’était pas un souci pour moi. Il faut dire que depuis sa mort, je m’étais éloignée de mes parents. Parce que je leur faisais honte, parce qu’ils n’avaient pas apprécié ma réaction, parce qu’il y avait beaucoup trop de non-dit et j’en passe. Moins je les voyais et mieux je me portais au final. En tout cas, j’étais bien contente d’être avec Eden. A tel point que quand je vis cette écharpe, je ne pus m’empêcher de la lui acheter. Un cadeau, quelconque, une simple écharpe, mais je dois dire que j’avais bien aimé lui faire ce bisou sur la joue. Peut-être à cause de la douceur de sa peau ? Son odeur ? Il était encore jeune, sa peau semblait douce et non rêche à cause du rasage. C’est sûrement ce qui me rappela encore une fois, qu’il était bien trop jeune. « Vous semblez particulièrement joyeuse aujourd’hui. Il s’est passé quelque chose ? » Je tournais le regard vers lui pour l’observer quelques instants. Le simple fait qu’il soit là me rendait heureuse. « Je suis contente de passer Thanksgiving avec toi. Ça faisait longtemps que je ne m’étais pas senti aussi joyeuse. Merci. » Je finissais ma boisson avant de jeter le gobelet dans une poubelle. Me frottant les mains, je m’arrêtais avant de me tourner vers lui. « Que veux-tu faire ? Tu veux qu’on continue à trainer dehors ? Ou on va chez moi ? » Le simple fait de poser cette question affolait mon cœur à un point… C’est dingue.

TENUE † Quand j’ai évoqué ma famille, ce n’était pas encore avec Méliodas. Il n’était pas prêt pour être avec mes parents. Même si on s’est nettement rapproché, c’est encore une situation gênante pour mon jumeau. Je ne dis rien sur son programme de Noël. Si c’était ce qu’elle voulait. Sensei est une personne indépendante donc il n’y avait pas de quoi faire un plat sur cette « solitude ». Après tout, ce n’était pas parce qu’on était seul qu’on devait forcément être triste. Il n’y avait rien de déprimant à vouloir être seul. Les cadeaux s’enchainent. Après avoir reçu le chocolat, Sensei m’offre cette fois ci une écharpe. Elle est décidemment trop têtue pour que je puisse refuser quoi ce soit. J’ai l’impression que les situations m’échappent quand je suis avec elle. La preuve, j’ai été incapable d’agir même lorsqu’elle a déposé le bisou sur ma joue. Elle m’a eu avant que je réagisse à temps. Mais mon expression de surprise en dit long sur ce que je ressens. C’est étrange qu’elle m’embrasse ainsi. Je suis assez perdu. Pourquoi ce bisou ? Cette écharpe ? Je dois réellement avoir l’air d’un gamin pour elle pour qu’elle me considère comme un enfant de la sorte. Elle me remercie mais je n’ai pas l’impression d’avoir fait grand-chose. Je ne la comprends pas. Je n’arrive pas à saisir le fond de sa pensée. Pourtant, généralement, je suis assez doué pour « lire les pensées » des autres. Sensei s’arrête devant moi en se frottant les mains. Je soupire discrètement mais un nuage de fumée trahit mon geste, signe de la rude température d’hiver. « Vous avez froid. Allons chez vous. » J’enlève mon écharpe pour la lui mettre autour du cou, en faisant plusieurs tours. « Vous me la rendrez chez vous. Vous en avez besoin plus que moi. » Il n’y avait que ses yeux qui dépassaient de l’écharpe. A cette vision, je laissai échapper un rire avant de la laisser nous guider jusqu’à chez elle, où un bon repas nous attendait.