Aujourd'hui, j'ai pris une grande décision ; devenir quelqu'un de respectable. Oui, parce que j'arrive à prendre de bonnes résolutions, même en plein milieu d'année!Et oui, je sais  parfaitement que personne ne tient ces décisions, mais ce n'est pas grave, je serai le premier, je changerai la donne, je me distinguerai ! Comme d'habitude mais en bien, cette fois. Enfin, pour y parvenir, il faut déjà que j'arrive à effacer mes mauvaises actions passées; repentir, rédemption. Bon, je ne suis pas un criminel, mais j'imagine que ça doit bien se faire un jour... Jusqu'au moment où j'aurai décidé que le bien, c'est relou. En attendant, il est vraiment temps que je prenne ma vie en main et que je démontre au monde entier à quel point je peux être une personne consciencieuse, adulte, mature... Je vous entends rire, vous savez. J'suis terriblement sérieux!

Tellement sérieux que, lorsque j'arrive à la fac et que mon regard tombe sur un visage familier alors que je traverse le campus, je m'empresse de rejoindre la demoiselle et de m'emparer de son bras. Je vous rassure, je ne lui arrache pas, et je n'ai pas l'intention de lui faire du mal. J'suis peut-être pas le plus malin des hommes du monde,  mais je sais quand même qu'elle en a besoin, et il faut arrêter de penser qu'à chaque fois que je pose le regard sur la propriétaire d'une paire de sein, c'est pour l'ajouter à mon tableau de chasse. Une réputation, ça ne s'efface pas aussi facilement, visiblement. Après avoir vérifié qu'elle n'était pas accompagné d'une personne potentiellement gênante ( cfr. son mec cfr. l'infirmier cfr. l'armoire à glace qui m'en a mis une l'autre jour. ), je m'adresse à Mi Ran en un sourire.

«   Salut Mi Ran ! » Oui, bon, j'ai peut-être l'air un peu bizarre à accoster les gens  comme ça, mais c'est une bonne élève et ce n'est pas comme si on n'était pas en pleine compétition débile, habituellement. Je pense qu'on ne m'en voudra pas d'être un peu plus familier, pour le coup. «   Tu vas quelque part? Enfin, je veux dire, tu crois qu'on peut parler un peu?   »

Je vous arrête tout de suite, mon intention n'est pas de me plaindre de son mec. À vrai dire, c'est plutôt de l'inquiétude. J'ai fait le con, j'ai dit des choses que j'aurais peut-être pas pu dire et j'ai envoyé des messages qui n'auraient pas du quitter mon téléphone alors... D'ailleurs je crois que je devrais en parler directement, pas jouer au con.

« Je voulais juste m'excuser pour l'autre jour; les messages, tout ça. J'espère que ça t'aura pas attiré trop de problèmes avec... Enfin, tu vois.   »

Oui, parce que j'ai vu qu'elle était partie au camp avec lui, mais j'ai préféré éviter d'aller la voir (l'instinct de survie, tout ça), alors je crois que c'est plus sûr à l'école. En plein milieu du campus. Oui. Bon, j'suis pas parfait non plus, hein, parfois il y a des petits bugs, comme partout.

TENUE J’avais toujours autant les nerfs contre Tae Hoon, la nuit ne m’avait pas portée conseil, je n’ai même pas réussi à dormir cherchant à comprendre où ça a foiré. Je dois être plus idiote que je le pensais, je n’arrive réellement pas à trouver une raison à son comportement... Je sais que recevoir des messages d'homme ce n’est pas acceptable dans le sens où moi-même je serais agacé, jalouse, énervé avec les rôles inversés, mais de là à le mettre dehors, lui parler comme une merde et ne pas écouter quand il me dit « je n’ai rien fait » c’est un peu extrême. Je suis fatiguée, je déambule dans les couloirs, la tête pensive essayant de remettre cette histoire à plus tard, une chose est sûre, je ne ferai pas le premier pas vers lui, il m’a mise a la porte et ça je digère pas vraiment après tout ce qu’on a traversé, certes je l’ai giflé, mais il le méritait ! Cet abruti, idiot... et j’en passe, non mais franchement il exagère.

Traversant le campus je sens une main agripper mon bras, une demi-seconde j’aurais voulu que ce soit Hoonie, mais quand je me retourne c’est mon professeur qui me fait face, habitué à se lancer des piques et des virus, on a développé une certaine « aise » entre nous, mais ça ne va pas plus loin et je soupire à l’idée que mon petit ami se fasse des films stupides. Le regardant curieuse de savoir la raison qui le pousse à m’interpeller de cette manière. « Qu’est-ce qui vous arrive Sensei ? » il veut me parler de quoi au juste, c’est une drôle de coïncidence entre ce qui s’est passé la veille et mon prof qui semble un peu « étrange » un peu différent de ses précédentes altercations avec moi, ce qui m’inquiète légèrement je dois l’avouer. S’excuser ? Je le regarde et la fin de sa phrase me fait tilt, c’est vrai que Hoonie m’a fait comprendre qu’il avait su pour les messages et avait rencontré Ryu, je n’en sais pas plus, mais ça semblait être plutôt tendu entre eux, je suis curieuse de savoir ce qu’ils se sont dit pour que mon copain devienne ainsi.

« Il semblerait que vous l’ayez rencontré, qu’est-ce qu’il s’est passé au juste ? » Je ne vais pas lui dire que ça a jeté un froid dans mon couple, je n’aime pas cette idée qu’on puisse être « brisé » pour une tierce personne, ça m’énerve... Et me donne l’impression que nous sommes faibles et vulnérables, je déteste vraiment ce sentiment. « Pour les messages si vous pouviez éviter à l’avenir. » Je souris, mais je suis sérieuse, je ne veux pas que ça se reproduise, même si pour moi ça ‘na aucun sens, aucune valeur, ce n’est pas la même chose pour Tae Hoon et me mettant à sa place encore une fois, je voudrais que ce genre de chose ne vienne pas entacher ma vie privée inutilement.

TENUE Tae Hoon n'avait plus l'habitude de dormir seul. Même lorsqu'ils ne sortaient pas encore ensemble, Mi Ran partageait son lit presque tous les soirs. Il aimait se réveiller sous ses baisers ou la découvrir encore à moitié endormie dans ses bras. Mais ce matin là, c'est la sonnerie de son réveil qui le tira de son sommeil. Cela le mit directement de mauvaise humeur. Un peu comme s'il s'était réveillé du pied gauche. Tout le monde le ressentit d'ailleurs. Ses collègues comme les étudiantes. Elles n'osaient pas passer plus de quelques minutes dans son infirmerie. Il se montrait plus que désagréable avec elles. Il ne leur souriait pas, ne plaisantait pas et les envoyait même sur les roses. Vers la fin de la journée, plus personne ne disposait de suffisemment de courage pour venir le déranger. Il était rare qu'il se retrouve seul aussi longtemps derrière son bureau et il en profita donc pour se replonger dans son dossier d'inscription. Tous les champs étaient remplis depuis des semaines. Il ne faisait que relire sans cesse les formulaires et vérifier qu'il ne manquait aucun justificatif. Tae Hoon ne se sentait pas le confier au secrétariat. Il craignait les réactions. Allait-on lui claquer la porte au nez ? En tout cas, sans l'appui de Mi Ran, il ne risquait pas de sauter le pas. Malheureusement, cela orienta ses pensées vers le souvenir de la veille. Ils ne s'étaient jamais disputés comme ça. Tae Hoon était allé loin, beaucoup trop loin. Il culpabilisait. Il s'en voulait. Il s'était comporté en gros macho doublé de grand con. Un pauvre type possessif, limite violent, voilà ce qu'il avait été. Mais en même temps, il aurait tant aimé qu'elle le comprenne. Enfin, comment le pourrait-elle si elle ne disposait que de la moitié de l'histoire ? Même pas la moitié. Elle savait juste qu'il avait discuté avec son professeur. Elle ignorait totalement le fond et la forme que cette discussion avait pris. Il poussa un long soupir, usé par cette affaire. Il se massa les tempes en sentant venir l'affreux mal de crâne. Il fallait qu'il prenne l'air.

Une mélodie annonça la fin du troisième cours de l'après-midi. Tae Hoon décida d'en profiter pour aller se dégourdir un peu les jambes. Il vérouilla donc la porte de l'infirmerie derrière lui, pivota et puis, plus rien. Il resta sur place. Il ne bougeait plus. Comme cloué au sol. Il ne s'attendait pas à apercevoir sa petite amie en compagnie de son ennemi public numéro un (enfin en ce moment en tout cas). Son sang ne fit qu'un tour. Son poing se serra. Il se préparait déjà à lui en coller un autre. Pourtant, il resta un moment à simplement les analyser. Qu'est-ce qu'ils pouvaient bien se dire ? Tae Hoon s'imaginait un tas de scénarios tous plus improbables les uns que les autres. Néanmoins, il avait raison sur un point. Ils parlaient forcément de lui. Il en était persuadé. Finalement, à grandes enjambées il traversa la foule pour les rejoindre et se dressa entre eux. Il ne tolérait pas cette proximité, d'ailleurs, pour l'éloigner un peu plus, il le bouscula avec violence manquant presque de le faire tomber. « Je crois qu'on va avoir un problème tous les deux. » Siffla-t-il entre ses dents. Ce type là ne semblait pas avoir compris le message la dernière fois. S'il le voulait, il pouvait le démolir.

À nouveau, il l'attrapa par le col de sa chemise et le secoua comme un prunier. Il mourrait d'envie de lui éclater la tête contre le mur. Son regard lançait des éclairs et il n'avait jamais été aussi en colère qu'à cet instant. Il en devenait presque effrayant. Autour d'eux, des étudiants s'arrêtaient pour observer la scène atypique qui se déroulait entre leur professeur et l'infirmier préféré du campus. « C'est à toi qu'il faut mettre une putain de laisse. Qu'est-ce que t'as pas compris au juste ? » Il continuait de l'agiter comme s'il cherchait à faire exploser une bouteille de coca. « N'approche plus Mi Ran. Ne lui parle plus. Ou je te jure que je t'en colle un deuxième. Juste pour équilibrer. » Et cette fois, il ne risquait pas de se ménager. Enfin, il ne s'était pas ménagé lors de leur dernière entrevue non plus.

M'excuser. Oui. Dans le fond, je trouve l'idée absolument merveilleuse! C'est vrai, quoi, j'ai fait une connerie et je veux m'excuser pour éviter qu'on m'en veuille. Après tout, mon but n'était pas de pourrir la vie de couple de mon étudiante quand je lui ai envoyé ces messages. Seulement voilà, comme j'ai besoin d'attention tout le temps, bah je vais la chercher au mauvais endroit. J'avais juste envie de lui faire comprendre à quel point je suis heureux d'avoir des étudiantes comme elle, qu'ils devraient tous lui ressembler même, parce qu'elle était vraiment douée dans le domaine, mais ce n'était pas forcément passé comme je le souhaitais et, maintenant, je me retrouve à m'expliquer et à essayer de réparer une de mes conneries. Je fronce un peu les sourcils quand j'entends la question de mon interlocutrice qui ne semble pas au courant de ce qu'il s'est passé. Son mec ne lui a pas expliqué? Dans le fond, il vaut peut-être mieux pas. Je suis tellement débile quand je veux!

« Oui, oui, je suis vraiment désolé. Je ne recommencerai plus.   » Sur ces mots, je hoche la tête pour lui montrer ma volonté de ne pas le refaire mais... «   J'ai fait le con, rien d'important.  »

Mais je n'avais pas prévu que l'armoire à glace arriverait à ce moment-là et se dresserait entre nous. J'ai l'air bien malin, du haut de mon mètre soixante-neuf. J'ai rien fait pour le coup et je n'aime pas qu'on s'en prenne à moi comme ça, encore moins si c'est pour me secouer comme un prunier comme c'est le cas depuis quelques minutes désormais. Putain, mais qu'il arrête ce con, bordel, j'viens réparer mes conneries, pas empirer les choses! Il veut vraiment que je me fasse avoir par la direction ou bien? Pleinement conscient, cette fois, je me saisis de ses mains et je tente de les défaire de mon col avant de répondre à ses propos.

«   Non mais tu vas te calmer oui? Faut que t'arrêtes d'être parano là. Tu veux pas lui prendre la main à chaque fois qu'elle vient à mon cours aussi?  »

Ce mec a vraiment un souci de jalousie ma parole! J'sais pas, c'est pas comme si j'avais mis la main au cul de sa copine ou je sais pas quoi, qu'il me lâche les couilles un peu au lieu de m'agresser comme ça! Je déteste me laisser faire et encore moins par un mec qui profite de sa supériorité physique pour m'écraser. La supériorité physique, c'est un mythe, et j'suis sûr que je peux vous le prouver. Où vous voulez, quand vous voulez. Même maintenant s'il le faut, puisque ce mec a vraiment l'air partant à cette idée!

«   Tu veux me péter la gueule? À ta guise, vas-y, j'attends! C'est pas comme si je lui avais mis la main au cul hein. On discutait juste. Puis ça risque d'être difficile de plus l'approcher puisqu'elle est dans ma classe.   »

Et voilà où allaient les résolutions. Elles s'envolaient joyeusement dans les cieux, à la découverte de nouveau horizons agréables et paradisiaques! Ah, comme je suis fier de moi. Je me demande parfois comment j'ai réussi à conserver ce boulot plus d'un mois, parce que j'ai un comportement vraiment irrécupérable depuis un moment. Franchement, c'est quoi leur problème? En plus d'avoir des élèves débiles, ils avaient des membres du personnel à souci aussi? J'ai juste envie de lui montrer comment on calme un chien qui grogne, vous voyez? Genre un bon coup sur le museau.

«   Arrête tes conneries maintenant, ok? »

On tente de sauver la résolution une dernière fois. Pour la conscience qui est sur le point de mourir d'avoir trop pleuré. Voilà.

TENUE Je ne pouvais pas comprendre entièrement Tae Hoon, les choses avaient juste pris des proportions que je ne maitrise plus, j’étais en tort pour l’avoir giflé, mais sur un plan général, il était celui qui avait gravement merdé. Je préfère me dire qu’on a toujours une part de responsabilité quand on se dispute, l’un comme l’autre, mais cette fois je fus emporté dans un ouragan d’incompréhension, malgré ses explications je n’arrivai pas vraiment à accepter tout ce qui s'était passé chez lui, sa manière de parler, de me repousser, de me jeter dehors, tout me semblait tout simplement « trop ». Mon professeur semblait ne pas être innocent au comportement de mon petit ami, j’avais bien compris qu’ils s’étaient rencontré, mais je n’avais aucune idée de ce qu’il s’était réellement passé entre eux, je ris beaucoup avec mon professeur, on a des « passions » communes, mais je ne le vois que comme mon ainé, un homme avec qui échanger et m’instruire, un allié dans mes études et un passe-temps a mon ennui, que des choses plutôt « innocentes », mais les messages qu’il m’avait envoyé pouvaient être à double tranchant, bien que je n’y avait pas répondu, j’avoue sans peine qu’à la place de Hoonie ça me frustrerait, me mettrait en colère et me rendrait jalouse, certes pas autant que la veille, là ça avait un peu dépassé les bornes d’après moi et de toute façon je suis têtu, donc s’il veut me voir il devra venir de lui-même me chercher !

Katsura sensei avoue avoir fait le con, mais je n’ai toujours pas vraiment de réponse à ma question, qu’est-ce qu’ils ont dit, ou fait au juste ? Je veux simplement savoir pour pouvoir reconstruire le puzzle, je veux comprendre Tae Hoon, pouvoir mettre une raison à cette crise disproportionnée, savoir mes torts, j’avais simplement besoin de concret. Sur le point de répondre à mon professeur je remarque mon copain s’interposer entre nous, des yeux en forme de Bille sous la surprise, je ne m’attendais pas vraiment à ce qu’il passe par là et vienne rejoindre cet échange, bien que ça soit assez conflictuel d’entrée de jeu, je les regarde d’un air curieux, incompris et interrogatif, j’ai comme cette mauvaise impression que des choses se passent derrière mon dos sans savoir quoi exactement. Quand Hoonie attrapa le col de Ryu, je fais un pas en avant, il est en colère et je n’ai pas besoin de plus pour le déduire avec certitude, je ne l'avais pas vu aussi « rentre dedans » depuis longtemps. « Hoonie qu’est-ce tu fais ! » Les étudiants se rassemblaient autour, gardant une distance de sécurité, leurs yeux remplis de curiosité étaient posée sur la scène qui se déroulait entre l’infirmier et le professeur, une altercation qui n’était pas vraiment habituelle, fort heureusement.

Je tente une approche en regardant les deux idiots tours à tour. « Mais qu’est-ce qui vous arrive, arrêter vos conneries bon sang ! » Sérieusement, j’ai l’impression de faire affaire à deux idiots prêts à se taper dessus sans même que je sache pourquoi. « Quelqu'un m'explique ce qu'il se passe ou... ? » Bizarrement j’ai l’impression que mes mots vont passer à la trappe et qu’on va juste totalement me repousser, mais je n'ai pas sincèrement envie de voir mon petit ami frapper mon professeur,  on peut comprendre ça non ?

TENUE La rage brillait dans son regard. Ses phalanges virèrent au blanc tandis qu'il serrait de toutes ses forces la chemise de l'enseignant en informatique. Tout l'horripilait chez ce type. Sa manière de se coiffer. Sa petite gueule de bon japonais. Son air supérieur. Si cela ne tenait qu'à lui et qu'ils ne se donnaient pas en spectacle à la totalité du campus, il lui aurait refait le portrait depuis longtemps. Il s'imaginait bien lui fracasser le crâne contre le mur. Ou mieux encore, l'encastrer dans l'écran d'une des machines de sa classe. Quel fantasme. Mais à la place, il tentait de contrôler sa colère. Plutôt que de le cogner, il le secouait avec violence. Il serrait les dents et grognait presque. De quel droit il appelait à sa raison ? Se calmer ? Mais comment ? Il se disputait avec sa nana à cause de ce pauvre puis le voyait en sa compagnie le lendemain, franchement, y avait de quoi devenir dingue non ? D'accord, peut être pas. Sûrement qu'il abusait et qu'il dépassait les limites mais il n'arrivait pas à se retenir. Plus que de le détester, c'était physique. Il ne pouvait pas le voir ou plus le voir en tout cas. Surtout depuis ses allusions dégueulasses comparant sa petite amie à un animal à quatre pattes. Il le traitait de parano en plus, nan mais le comble. Y avait de quoi l'être en même temps. S'il n'y avait pas autant de rumeurs qui couraient sur ce type, ça irait mieux.

Il soupira et dans un geste brutal, le propulsa en arrière afin de le relâcher. Après quoi, il passa sa main dans ses cheveux avant de lever les yeux au ciel pour montrer combien tout ceci l'exaspérait. Il tournait en rond, comme un poisson dans son bocal, ou un requin autour de sa proie. Bref. Il était à deux doigt d'en faire son dîner. Il en oubliait presque la présence de Mi Ran. En fait, il l'avait même totalement zappé. Il n'entendait que les paroles de l'autre pauvre type. Et il ne la fermait pas en plus. Le simple son de sa voix lui dégommait les tympans. « Mais ta gueule ! Par pitié n'empire pas ton cas. » Il l'intima avec sa main de garder ses distances. Mais c'était plutôt à Tae Hoon de se tenir. Encore un peu, et il explosait. Mi Ran se manifesta une nouvelle fois et il daigna enfin lui accorder un peu de son attention. Ah, si elle savait. Mais l'infirmier avait trop de fierté pour lui raconter toute leur confrontation. Il n'était pas une vulgaire balance. Il ne se sentait pas jouer la victime en plus. Car une part de lui comprenait bien qu'il agissait comme le dernier des cons. « Ce qui se passe ? Y se passe que ce mec mériterait mon poing dans sa figure. » Il marqua une petite pause, et adressa un rictus mauvais à l'enseignant. « Une deuxième fois. » Cette petite précision n'était là que pour le provoquer. C'était bien immature de sa part d'ailleurs. Mais en même temps, comment résister ?

« J'croyais que j'avais été clair ? Ne lui parle pas. Si ce n'est pas pour lui faire cours, ne lui adresse même pas la parole. Ne la regarde pas. Bref, ne l'approche pas. » Ces consignes lui paraissaient plutôt simples à suivre, il devrait y arriver non ? De toute manière, l'enseignant n'avait pas tellement le choix. Tae Hoon pouvait le démonter en quelques secondes. Il risquait d'encaisser quelques coups mais il était sur de prendre le dessus rapidement. Peut être que cette confiance mal placée était à mettre sur son jeune âge ou bien son mauvais caractère, en tout cas, il était prêt à le démolir si sa réponse ne lui convenait pas.

Empirer mon cas ? Non mais ce mec a une petite idée de la manière dont il m'adresse la parole là ? Je sais que je ne suis pas irréprochable, loin de là même, mais à partir du moment où j'essaie de m'expliquer calmement, il pourrait au moins témoigner d'un peu de respect envers un professeur, non. Saleté. Je savais que ce jour viendrait où je m'attirerais encore plus d'ennuis que je n'en ai déjà, parce que je suis tout simplement incapable de faire autrement, visiblement. Cela m'arrache un soupir excédé alors que j'essaie tant bien que mal de garder mon calme. Putain de merde, pourquoi a-t-il fallu que je croise ce type alors que je n'étais pas totalement clean, hein ? Pourquoi est-ce que j'ai été con à ce point ? En vérité je n'ai pas envie de retourner aux racines de mon comportement d'imbécile fini, alors je préfère me concentrer sur la réponse que cet idiot donne à sa petite amie. Oh oui, je le mériterais, mais il sait parfaitement à quel point l'idée est mauvaise. Après tout , ce n'est pas comme si nous étions au beau milieu de l'université, hein. À son « rappel », je ne peux retenir un ricanement.

« Si quelqu'un doit prendre cette décision, ce n'est pas toi. Arrêter de jouer au con maintenant, putain.  »

Je sais que je ne devrais pas insulter le personnel en tant que professeur, mais passer pour un imbécile profiteur aux yeux de tout le monde comment à clairement me taper sur les nerfs. Ce n'est pas parce que tous ces enfoirés de la RPS ont probablement connu une existence paisible baignée dans le fric ou le talent que c'est le cas de tout le monde. Certaines personnes ont du bosser pour atteindre ce statut, un statut qui aurait normalement du inspirer le respect et pas les commentaires désobligeants. Franchement, j'y peux quelque chose si Hikari a décidé de se barrer il y a cinq ans ? Si elle a décidé que tout ce qu'on avait n'importait pas vraiment ? Ce que je lui ai dit ce soir-là, à ce con d'infirmier, c'est simplement des conclusions que j'ai tirées de cette expérience néfaste : si sa copine n'est pas heureuse avec lui, alors ce n'est pas la tenir par la main où qu'elle aille qui changera quelque chose à son désir de se barrer.

C'est vrai quoi, il a pas envie de comprendre que c'est pas nous qui décidons de tout ça ? Hikari s'est barrée. Mi n'est pas au courant de ce que je ressens. Yun Hua portait mon gosse mais a décidé de le faire partir sans me mettre au courant. Les femmes sont décidément indomptables et j'ai l'impression de me faire avoir à chaque fois. C'est pas étonnant après que Roy soit le seul à qui je parle de mes problèmes. Mais ce n'est pas le problème. Mon souci est une armoire à glace qui me cherche un peu trop.

«  Me force pas à te rendre le coup de la dernière fois, d'accord Hoonie ?  » Repris-je avec une légère moquerie.

Juste retour de provocation, quand on voit le sourire que j'affiche désormais en soutenant le regard de la bête incontrôlable. Je suis professeur, il est infirmier, la hiérarchie devrait pourtant être claire à ses yeux. Il n'a pas à lever la main sur moi et, dans le même sens, je n'ai pas à l'attaquer, mais s'il a décidé de se livrer à un petit jeu d'intimidation, alors je peux essayer d'entrer dans le sien, même si je suis plus petit. Ce n'est pas comme si je ne me battais jamais, après tout, même si je n'ai pas sa carrure... Mon impulsivité ne m'aidera jamais.

TENUE Pourquoi ai-je l’impression d’être devenue totalement invisible ? En fait je me fiche totalement qu’ils fassent attention à moi ou non, mais je suis totalement bouche bée devant leurs comportements, je ne sais pas ce qui se passe entre eux et je ne suis pas idiote, loin de là... Donc c’est sans peine que je sais en être la principale cause, de toute façon Hoonie n’agirait jamais ainsi si je n’étais pas celle qui avait déclenché un minimum sa colère d’une manière ou d’une autre. J’observe et sincèrement j’hésite à courir dans mon club de radio pour gueuler au micro afin qu’il m’entende, non parce que parler dans le vent ce n'est pas mon tripe et on dirait qu’a cet instant quoique je puisse dire va passer aux oubliettes, pourtant j’ai une jolie voix merde ! Ouai bon... C'est pas vraiment le sujet important là tout de suite, mais entre mon petit ami qui souhaite envoyer un coup de poing au professeur pour la « seconde fois » et le professeur qui doit bouillir lentement devant tant d’agressivités je ne sais plus qui regardait et quoi dire pour les calmer. Les insultes et les mots doux fusent dans les deux sens, pardonnez mon ironie, mais je me retrouve à les imaginer tous les deux en... coq. Oui oui, piaillant l’un sur l’autre avec leur petite crête sur la tête où je ne sais trop quoi, mais sérieusement j’ai des idées bizarres, la faute à eux ! Non mais je vous assure, je devrai peut-être aller chercher un... non une barrique d’eau pour leur verser sur la tête, je vois presque la fumée sortir de leurs cerveaux, les pauvres ils vont faire une surchauffe d’une heure à l’autre... Oui je vois large.

Entre mon copain qui impose à mon professeur de ne pas me parler en dehors des cours et Ryu qui est prêt à envoyer le coup donner, je suis censé dire quoi ? Me mettre entre les deux et danser la Macarena ? Non ? Ouai bon... La danse des canards alors ? Non plus. Oh, je devrais mettre ça aux prochaines heures de radio, je suis sûr que ça mettra l’ambiance tient. Surtout en japonais. Bref. Je croise les bras en espérant simplement qu’un des deux devienne raisonnable et si les coups partent bah... je sors les menottes et je les enferme tous les deux dans la même cellule ! fufufu, diabolique hein ? Bon après je doute du bon rapport avec mon mec et mon prof, mais ils m’agacent à ne pas me mettre au jus, je suis totalement en mode « exclus » et trop curieuse pour ne pas me demander ce qu’ils ont dit en privé pour en venir à ce que cela soit tendu et je pèse mes mots bien entendu.

« Vous voulez pas des gants de boxe et des protégez dents par hasard ? Non parce que j’aime le sourire de mon mec si vous pouviez éviter de vous casser en deux. » Sait-on jamais qu’on m’entend, un peu d’humour les gars, quoique, je suis sérieuse en fait. Je vais éviter de dire que le prof a un beau sourire aussi sinon je crois que je vais juste lancer la bagarre avec mes bêtises. Puis le prof qui a donné un surnom à mon copain, il cherche aussi mine de rien... Ah~ quelle belle journée, vraiment.

TENUE On ne domptait pas quelqu'un comme Tae Hoon. On ne lui faisait pas entendre facilement raison non plus. Il tenait ce très fort caractère de son père. On lui répétait d'ailleurs souvent qu'il ne s'agissait pas là d'un compliment et que ça lui porterait plutôt préjudice dans la vie. Mais impossible de le changer à présent. Il ne restait qu'à espérer que Mi Ran l'accepte ainsi. Elle le connaissait maintenant par cœur. Il ne ressemblait plus tellement au petit garçon qu'elle avait rencontré sur la plage. Elle s'en rendait compte. Tae Hoon se dressait devant Ryû en homme prêt à en découdre pour protéger sa perle rare. En même temps, cet homme lui tapait sur les nerfs. Son petit air supérieur l'agaçait. Il le sentait bien. Il avait beau le surplomber et tenter de l'effrayer avec sa carrure, il lisait dans son regard ce qu'il pensait de lui. Alors quoi, un infirmier valait moins bien qu'un petit enseignant en informatique ? Tae Hoon avait derrière lui un paquet d'années d'études, des études qu'il aurait pu achever brillamment s'il n'était pas venu dans ce foutu pays pour retrouver son frère. Il mélangeait tout. Et il se détestait un peu de se sentir, malgré lui et juste à cause de sa profession, bien trop bas dans l'échelle sociale pour être crédible face à Ryû. Plus les minutes passaient, plus il se disait qu'alors il était celui qui avait le moins à perdre dans cette histoire. Malheureusement oui, cette réflexion n'était pas des plus intelligentes et l'unique résultat de sa colère. Cela ne laissait néanmoins pas le droit à ce pauvre mec de l'insulter.

L'infirmier voyait rouge. Il avait eu le culot de le traiter de con. Qu'est-ce qu'il savait de leur relation pour parler ainsi ? Est-ce qu'il connaissait si bien que ça Mi Ran ? Tae Hoon serra les dents. S'ils étaient encore des étudiants tous les deux, il lui aurait donné rendez-vous après les cours. Ils n'avaient décidément pas besoin de se donner en spectacle de la sorte. Pour autant, il ne semblait pas prêt à se calmer. Et comme à son habitude, il finit par ouvrir sa gueule. Sa trop grande gueule. « Pardon ? Qui est le con ici ? Moi ? Ou le pauvre mec qui a comparé ma copine à un chien ? » Et sur ces paroles, il colla sa grande main sur le torse de l'enseignant pour le bousculer avec animosité. Sur le visage du coréen, un sourire déformé qui s'accordait à sa fureur. « Ah, je vous le confirme maintenant, excusez-moi d'avoir voulu garder ça pour moi lors de notre dernière entrevue mais... ouais, c'est un sacré bon coup. » Et le volume sonore du brouhaha ambiant augmenta en flèche. On murmurait encore plus. On riait autour d'eux. Les filles se cachaient derrière leurs mains, choquées. Mais là, Tae Hoon ne pensait pas du tout aux conséquences de ses paroles. Il ne voyait pas qu'il mettait son job sur la sellette.

Avec tout ça, il en oubliait totalement la présence de sa dite petite amie. Il ne l'entendait même plus. Gants de boxe, et tout le reste. Ça ne parvenait pas jusqu'à ses oreilles. Cela ressemblait plus à un fond sonore ou à un bourdonnement. Agaçant donc. « Mi Ran, t'en mêles pas et retourne en cours, tu veux ? » Cela ne risquait clairement pas d'améliorer leurs rapports. Et rattraper toute cette histoire n'allait pas être simple non plus. Mais Tae Hoon continuait de creuser sa propre tombe. Il s'enfonçait encore et encore. Pouvait-il seulement encore sauver les meubles ? Non, apparemment il n'en avait pas l'intention.

Ça le démangeait depuis le début. L'entendre l'appeler par son surnom déclencha le geste. Comme un automatisme. Son petit ton railleur avait touché la corde sensible. Il cogna si fort qu'il ressentit lui-même une petite douleur dans les phalanges mais cela ne devait pas être grand chose face au choc que Ryû avait dû avoir. Tout juste s'il lui avait pas déboîté la mâchoire. Autour, les gens poussèrent des cris alors que d'autres s'écartaient pour éviter de toucher l'enseignant. Tae Hoon secoua sa main et massa son poignet. « Alors ? ça pique monsieur Katsura ? » Il se mit à rire mais s'étouffa en croisant le regard de sa petite amie. « Quoi ? Il l'a cherché. C'est pas moi. » Ou la réponse d'un gosse qu'on s'apprêtait à envoyer au coin.

Levant les yeux au ciel, je ne sais pas si je dois rire ou pleurer de constater qu'il est resté bloqué sur les propos d'un homme ivre. Vraiment, j'ai pas l'intention de revenir là dessus de mon côté, parce qu'il est vraiment con, mais je déchante un peu quand je me fait bousculer.

« Eh bien je suis content pour toi, vraiment. » Soufflé-je en haussant les épaules. « Qu'est-ce que ça peut me foutre, hein? . »

Dire que tout partait d'une bonne intention, que j'avais simplement envie de m'expliquer avec une élève et de lui présenter mes excuses pour les potentiels problèmes que j'ai pu lui apporter. OK! J'admets : Mi Ran est belle. Mi Ran est une très bonne élève que je serais triste de perdre, mais par tous les dieux, que cet imbécile arrête de me piétiner allègrement les couilles parce qu'il est persuadé que j'ai des vues sur elle! Genre, j'ai pas assez de problèmes avec ces dames depuis quelques temps, j'aurais besoin d'en ajouter une couche? Qu'il arrête un peu son cirque et redescende sur terre au lieu de faire la guerre pour ces conneries : il est tombé sur moi le mauvais jour, j'avais bu, j'étais pas d'humeur, ça a dégénéré. Fin de l'histoire. Mais putain pourquoi est-ce que je tombe toujours sur des imbéciles lorsque j'essaie de mettre un peu d'ordre dans mes affaires, hein? Et qu'on ne vienne pas me dire que je devrais écouter la demoiselle, parce qu'elle n'arrange pas grand chose pour l'heure! J'vous jure, être professeur, c'est clairement plus ce que c'était. Au moins, sa blague m'arrache un sourire. Ou plutôt un rictus, oui, parce que j'aurais bien envie de lui refaire les dents, moi, à son mec. Sauf que.

Il me faut quelques secondes pour réaliser ce qu'il vient de se passer mais, rapidement, je porte une main à ma joue, comme pour vérifier si elle est encore en place. Cet enfoiré a remis ça. Il a vraiment osé me toucher encore une fois? J'ai simplement envie de commettre un meurtre. Et encore plus quand j'entends cet idiot se mettre à rire comme un abruti. Il me cherche vraiment. Tellement qu'un instant plus tard, c'est à mon tour d'envoyer un coup dans sa direction et, contrairement à ce que j'aurais pu penser, je ne mesure pas ma force. Oh, je ne suis pas une armoire à glace, et encore moins un boxeur de compétition, mais on dit souvent que la colère renforce un peu, non? Et croyez-moi, je suis vraiment en colère sur le coup.

« Tu veux jouer à ça, Kang? » Un rire mauvais m'échappe alors que je lève les yeux vers lui. « Arrête. Tes conneries. Putain. »

Et la moitié des gens présents (au moins ça!) nous observe en plus. J'crois que j'aurais pas pu trouver un meilleur endroit pour me battre, tiens. Non, franchement, au milieu de l'école où j'enseigne, je crois que c'est vraiment la pire idée qui ait pu me venir, même si elle m'a clairement été soufflée par le plus grand abruti que la terre ait porté.

TENUE Je suis entouré d’idiots... Je n'ai jamais vu ça, autant je connais le caractère de Tae Hoon et son fort tempérament, autant celui du professeur tentant de le raisonner me semble plus une bonne idée, pourquoi en venir à une guerre pareille ? Je suis dans le flou total, ce pion sur l’échiquier qui se fait évincer au premier tour, bref je suis totalement perdu. Puis quoi ? Mon regard passe de Hoonie au prof et du prof à Honnie, comparer sa copine à un chien ? Je pige plus, pourquoi il m’a comparé à ça ? On dirait qu’il y a une histoire plus complexe dessous cette conversation, mais l’idée que je sois concerné sans en avoir aucune idée me tape sur le système, puis bordel... Tae Hoon. Autant dire que lorsqu’il parle sans discrétion du « bon coup » je pose ma main sur mon front en hochant la tête, je vous jure celui-là, si j'étais une fille normale, je rougirai surement d'embarras en essayant de me faire toute petite. Quand il est en colère j’ai l’impression que rien ne l’arrête et pas même moi, je pensais avoir un minimum de « pouvoir » sur lui, mais même en essayant de détendre l’atmosphère à ma façon pour éviter les emmerdes, il me « renvoie » comme pour me faire comprendre que je n’ai rien à foutre ici... Je grogne, mécontente par sa façon de parler, il n’écoute décidément rien du tout. Je ne compte pas retourner en cours et les laisser, ça il peut se gratter, je ne suis pas du genre à rester sagement assise, je dois déjà me contenter d’observer deux gosses censés être adultes alors bon...

Et là c’est le pompon... Voyant Hoonie frapper mon professeur je le fixe, mes mains sur ma bouche comme pour dire « bon sang il l’a fait » il y a des tas de témoins, tout le monde parle, encourage ou attire les autres étudiants à venir voir, ça devient le bordel autour, aucune discrétion tout cela va rapidement remonter au directeur et ils vont clairement avoir des problèmes, pourquoi ne pensent-ils pas deux secondes aux conséquences de leurs actes ! C’est pas vrai... « Tais-toi idiot ! Tu fais vraiment n’importe quoi ! » Oui je haussais le ton et je m’énervais contre mon petit copain, mais je n’avais aucune envie qu’il ait des ennuis, ne peut-il pas comprendre ça ? Qu’ils se parlent où s’insultent ça peut s’arranger, mais là ça devient un combat de coqs, l’enseignant s’y mettant aussi, j’ai l’impression que je ne peux pas les arrêter, pourquoi on doit se retrouver dans une situation pareil... Je suis déjà fatigué. « Espèce de gamins. » soufflais-je dans un constat que je faisais pour moi-même, de toute façon il ne m'écoute pas donc... Je choisis d’agir en me plaçant entre les deux avant qu’un ne décide de renvoyer le coup et que ça n’en finisse plus. « Stop maintenant bande d’abrutis ! » Sérieux, les mecs ne grandissent vraiment jamais.

« Vous réalisez ce que vous êtes en train de faire ? Vous vous êtes frappés, c’est bien, cool je suis fière de vous, maintenant faudrait peut-être penser à réfléchir, vous m’emmerdez royalement avec vos conneries. » Et je pèse mes mots. Je me fiche des histoires ou du reste, je sais que mon copain fait ça parce qu’il tient à moi ou parce que Ryu à trop parler à mon sujet, je l’ai bien compris... Mais c’est réglé non ? « Vous comptez vous battre jusqu’à vous faire renvoyez ou bien ? Comment ça se passe dans vos têtes, stupide que vous êtes. » Bon je pense que je suis assez clair là non ? S’ils abandonnent pas je leur met un coup de pied au cul et les envoie moi-même dans le bureau du directeur, voilà qui est dit !

TENUE Honnêtement, il ne se passait plus grand chose dans la tête de Tae Hoon. Ça ne tournait pas rond chez lui quoi. Il ne réfléchissait pas vraiment à ce qu'il disait et encore moins aux conséquences que toute cette histoire risquait d'engendrer pour lui, son couple et ce connard d'enseignant qui se tenait devant lui. Il ne pensait qu'à une chose : son irrépressible envie de lui éclater la figure. Il se fichait d'avoir l'air totalement ridicule. Car, en toute franchise, il se pavanait en parfait dindon de la farce. Sa crise ne valait rien, son comportement laissait à désirer et les spectateurs de cette comédie se demandait sans doute à quel moment il comptait redescendre sur terre. Parmi les murmures, on entendait les mecs employer des noms d'oiseaux pour le nommer. Les demoiselles levaient les yeux au ciel face au cas désespéré et désespérant qu'il représentait. Pauvre Mi Ran, devaient-elles se dire. Mais à moins de pouvoir le foutre sous une bonne douche froide, il ne paraissait pas prêt à se remettre en question. Avec pour preuve à l'appui son magnifique poing qui s'écrasa contre la mâchoire de Ryû. À force de résister à la tentation, on finissait toujours par y céder. Il mourrait d'envie de le cogner depuis qu'il l'avait aperçu en compagnie de sa belle. Désormais, c'était chose faite. Sauf que, bizarre, cela ne le soulageait pas pour autant. Était-il réellement énervé à cause de ce mec ? Où ne se trouvait-il pas juste dégoûté de son propre comportement ridicule et macho ? Les horreurs qu'il avait balancé au visage de sa petite amie continuaient de le hanter et il culpabilisait. Alors quoi de mieux pour ne pas perdre la face que de se venger sur quelqu'un d'autre ?

Car le plus con des deux, c'était bien lui. Et tout avait commencé lors de sa dernière entrevue avec Ryû ou plutôt que d'ignorer ses propos de pauvre ivrogne, il avait pris la mouche. Comme une meuf, cette histoire de messages nocturnes s'était insinuée dans ses pensées jusqu'à le rendre parano. Ah la jalousie, ce vilain défaut. Il méritait lui aussi qu'on lui remette un peu les idées en place. Ryû parut entendre cette petite voix divine et lui sonna les cloches. Un peu surpris, Tae Hoon manqua de perdre l'équilibre et exécuta quelques pas malhabiles en arrière. Deux étudiants le rattrapèrent de justesse avant qu'il ne s'effondre. « Lâchez-moi ! » Ingrat, il les bouscula prêt à en découdre avec le trentenaire informaticien. Mais cette fois, c'est sa petite amie qui s'interposa entre eux. Peut être qu'il manquait ça pour qu'il prenne conscience de la situation grotesque dans laquelle il se noyait. Elle avait raison sur toute la ligne. Plus ça allait, plus il se sentait con. Il porta sa main à sa mâchoire qu'il massa du bout des doigts. Il s'était pas retenu le vieux.

Mais reconnaître qu'il avait tort ? Plutôt crever. Et on se demandait pourquoi il ne réussissait jamais à garder une femme à ses côtés. Mi Ran en découvrait les raisons. Le terme de jalousie ne suffisait même plus pour le qualifier. « Vous m'emmerdez. » Cracha-t-il en regardant tour à tour sa petite amie et son foutu enseignant. « Et vous aussi ! » Il hurlait s'adressant cette fois à leurs spectateurs. « Dégagez, retournez en cours ! » Avec de grands signes, il envoya balader les trop nombreux voyeurs et témoins de la scène. Le brouhaha se dissipa peu à peu jusqu'à ce que le silence reprenne possession des couloirs. Et maintenant ? Il n'avait plus envie de rester là. Plus envie de voir ce con. Et pas tellement envie d'affronter sa petite amie non plus. Qu'est-ce qu'il pourrait bien lui dire ? Désolée chérie, je suis le pire idiot que la terre a jamais porté ? Il passa ses mains dans ses cheveux et bascula la tête en arrière tout en poussant un très long soupir. Tout cela allait avoir des répercussions énormes. Il le savait.

« Cela ne m'étonne pas que tu sois seul, Ryû. » Un rire nerveux lui échappa, tandis qu'il le regardait à nouveau. Il l'avait cogné, il s'était défoulé. Quelque part, Tae Hoon avait eu ce qu'il voulait. C'était sans doute bête et méchant. Puéril aussi. Mais dans quels extrêmes un homme jaloux pouvait se propulser. Calmement, il lui rappela les règles. Il se fichait que Ryû proteste, qu'il continue à dire qu'elle décidait de ça seule, il le mettait en garde. La prochaine fois, ça ne sera pas juste un coup de poing. « Plus de message, plus de tweet, plus de comparaison douteuse. » Il haussa les épaules puis frôla du bout des doigts le coin de ses lèvres qui saignait un peu. Il grimaça légèrement en passant sa langue dessus. Et comme un malheur n'arrivait jamais seul, des bruits de pas résonnèrent. Le jeune infirmier se retourna découvrant sans grande surprise le directeur qui fonçait droit vers eux. Dès qu'il arriva à sa hauteur, le coréen se pencha en avant dans une courbette respectueuse et qui demandait déjà pardon. « Monsieur Kang, dans mon bureau. » Sans adresser un regard à Mi Ran, trop agacé et honteux face à tout ça, il lui passa devant en prenant la direction de l'administration à grandes enjambées. Il fuyait la scène du crime mais se doutait bien de ce qui l'attendait plus loin. « Et vous monsieur Katsura, on parlera de ça plus tard. » L'un risquait sans aucun doute de perdre son travail, quand à l'autre peut-être sera-t-il épargné. Mais chaque partie avait des leçons à tirer. 

Je fais de mon mieux pour éviter de m’attirer des ennuis plus graves que ceux que j’ai déjà, et voilà qu’on vient encore me chercher des noises alors que je tente d’en résoudre un. Non, franchement, j’en ai ma claque de ce type qui passe son temps à me reprocher de draguer sa copine alors que non, juste non. Mi Ran est mon étudiante et, mis à part une certaine soirée que je regrette profondément, je ne couche pas avec les étudiantes. S’il vous plaît, on ne va pas venir me dire qu’un homme de trente-et-une piges est incapable d’aller chercher ailleurs, hein ? J’ai juste envie de lui casser la gueule, qu’il comprenne un peu qu’il n’a rien à me dire et que je suis largement capable de le remettre à sa place s’il le souhaite, et c’est ainsi que mon coup fini par partir. Je n’ai pas l’intention de m’avouer vaincu face à un type sous prétexte qu’il est plus grand, plus baraqué, plus je ne sais quoi. Par contre, je sais que Mi Ran a raison et que nous battre n’est pas du tout, mais alors pas du tout malin, surtout dans la situation actuelle, mais je me permettrai simplement de vous dire que ce type l’a cherché.

Une fois de plus, j’ai tenté de le calmer, d’empêcher qu’une catastrophe ne se produise, déjà qu’un coup lancé est largement de trop entre deux adultes comme nous, ce que je n’aurais pas forcément réalisé en étant ivre, mais il faut attendre l’intervention de Mi Ran pour que le conflit se calme légèrement. Très légèrement, malheureusement, car je me sens bouillir de l’intérieur, et je plante mon regard dans celui de Tae Hoon lorsqu’il reprend la parole en m’énonçant des «règles ». Vraiment ? Si ça peut éviter un meurtre dans cette foutue école, j’vois pas pourquoi je le ferai. En plus, ces sms étaient occasionnels ; j’étais ivre, je ne savais plus où j’en étais et j’ai cherché un peu de réconfort auprès d’une personne que j’estimais. Si j’avais su, j’aurais certainement appelé Mi. Mi n’avait pas de copain pour me casser la gueule, au moins.

« Hm. »

Je n’ai plus envie de voir ce type, j’aimerais qu’il dégage et qu’il arrête de me dire ce que je dois faire. Sa copine, c’est aussi mon élève, c’est tout. Mon but n’est absolument pas de chercher des emmerdes avec les compagnons de mes étudiants et encore moins de me les faire, alors pourquoi est-ce qu’il s’acharne ? J’ai juste l’impression de devenir dingue. À l’arrivée du directeur, je m’incline respectueusement, sans doute plus bas que je ne l’ai jamais fait, car je sais parfaitement qu’il risque de me faire un reproche, si pas pire. Quand j’entends les mots qu’il adresse à mon « adversaire », je ferme les yeux, puis me redresse enfin. Malheureusement, le mien suit rapidement et je hoche la tête, trop conscient de ce qui pourrait advenir de moi après ce petit combat débile. Certes, je n’ai fait que me défendre d’un coup qui m’était porté, j’ai essayé de calmer le jeu et d’être un minimum exemplaire, mais j’ai déjà trop déconné, beaucoup trop, et je crois que ça ne jouera pas en ma faveur. Alors que le directeur s’éloigne, je me redresse et jette un regard en direction de Mi Ran, les lèvres pincées.

« Je suis désolé. »

Sans doute ne l’ai-je plus été aussi sincèrement depuis longtemps. D’ailleurs, je ne tarde pas à quitter les lieux, ne souhaitant pas m’attirer d’autres ennuis. Il est largement temps que je me reprenne en main, et ce à tous les niveaux, pour éviter d’autres catastrophes du genre.