TENUE † C’était une belle journée. Oui, le ciel est bleu, il n’y a pas trop de nuages, les oiseaux chantonnent, tout est parfait. Parfait, pour aller voir le diseur de bonne aventure. Je l’aimais bien, il est agréable, gentil, bon, lui ne semble pas trop m’apprécier, je peux comprendre, je suis tout de même parfois, non souvent, très collante et chiante quand je m’y mets. Mais je ne saurai dire pourquoi un truc m’interpelle chez lui. Alors quand ça m’arrive, forcément, je suis très curieuse. Je ne reste qu’une fille après tout. Ok, je dénigre surement la populace féminine, mais je m’en fiche. Je pense comme je le veux, et là, tout de suite, je veux aller le voir. Alors sans attendre, je sortis de chez moi, pour prendre la direction du lieu où je l’avais vu la dernière fois. Assise dans le bus, je regardais par la fenêtre, en réfléchissant à un peu tout et rien. En ce moment ma vie était un peu plate. Rien de bien glorieux. Le printemps venait d’arriver, alors peut-être que ça amènerait un petit plus dans ma vie ? Qui sait. Je l’espérais, car là, je m’ennuyais un peu. Faisant craquer ma nuque, je baillais avant de fermer les yeux un instant. Le bus, ça m’endors à chaque fois. Après plusieurs minutes, je descends. Au mauvais arrêt. Sans blague. Soupirant, je fis le tour de la route pour reprendre le bus en sens inverse. Ça va, je n’ai que cinq arrêts en trop. Finissant par arriver au bon endroit, je regardais un peu partout avant de voir l’endroit où je voulais aller. Sourire au coin des lèvres, je mordillais rapidement celles-ci avant de me diriger vers lui. Sans attendre je me retrouvais face à lui avant de sourire franchement. « Bonjour, je suis venue lire mon avenir. J’espère qu’il sera bon. » Dis-je en plongeant mes mains dans mes poches. Je le détaillais longuement avant de lui sourire un peu plus. Il me rendait tellement curieuse.

TENUE † L’affaire de Jae Hyun s’était passée sans encombre et j’avais touché à une belle petite somme. En fait, c’est la première fois que je me faisais autant d’argent. Ça m’avait pris beaucoup de temps pour être fin prêt mais la récompense était de taille. Avec cette somme d’argent, je pouvais me permettre de ne pas aller « travailler » de mon côté pendant une bonne période, mais ce petit job est comme devenu un passe temps. Et puis, il me permet aussi de pouvoir m’entrainer à être plus observateur ou utiliser les clients comme sujet à mes hypnoses. C’était bien plus prudent de m’entrainer sur eux que de le faire au lycée. Je regarde l’heure, il est temps d’aller me faire un peu d’argent. Je prends mon sac à dos que je n’utilise que pour aller faire mes prédictions et le mets sur mon épaule. Ce sac est tout à fait banal, de couleur noire. Il y a juste quelques signes qui montrent qu’il est assez vieux. A l’intérieur, il n’y a que le strict minimum, une casquette, un masque utilisé lors des consultations, un livre et de l’argent liquide. Je n’emporte rien qui pourrait révéler mon identité.

A mi chemin, je mets ma casquette et mon masque. Une fois dans le quartier, à ma place habituelle, je vais retrouver celui qui me « loue » ce stand. En échange d’une petite somme, il met en place mon petit commerce. Bien sur, ça n’a rien de légal mais pour moi, ça n’a pas d’importance. Mes clients me connaissent surtout parce que je suis celui qui occupe cette place. Bref, je lui donne l’argent avant de m’installer à ma petite table. C’est comme un stand ambulant avec des petits rideaux pour garder la « confidentialité » de mes invités. Je sais que je peux attendre longtemps avant l’arrivée de ma première victime de la journée, d’où l’utilité de mon livre. Je le sors de mon sac et ouvre à l’endroit du marque page. Ma lecture est interrompue par l’arrivée soudaine de ma première cliente. Je lève les yeux avant de me figer en voyant qui s’était. Je soupire discrètement dans mon masque avant de refermer le livre avec le marque page. Je range l’objet dans mon sac à dos et fais un signe à l’infirmière de s’assoir. «  Montrez moi votre main.  » Lire les lignes de main, regarder son visage puis lui faire tirer des cartes. Voilà ce que je fais pour arnaquer mes clients. « Il y a un thème précis que vous voulez savoir ? Travail ? Santé ? Amour ? »

TENUE † Savoir son avenir, je ne sais pas réellement ce que ça peut amener, si c’est vrai ou pas. Parfois, on rend les choses vrais nous-même. On est influencé par les dires de la personne et on agit comme tel, de fonction à réaliser la prédiction. L’être humain, peut parfois être surprenant. Mais nous étions conçus de la sorte. Mais ça me fascine tout de même. Car je sais que certains ne sont pas des charlatans. Ils savent voir l’avenir, et même le passé. Il paraît que certains en touchant la personne on des bribes du passé des gens. Mais je me demandais si c’était bien vrai. Tant que je ne l’aurai pas vu de mes propres yeux, je resterai septique. Pas que je sois comme Saint Thomas, mais un minimum quand même. J’ai besoin de voir pour y croire. Tout simplement. Même si je suis du genre à penser, qu’un jour les vampires, et tout le reste de la mythologie, ont pu exister. Après tout, pourquoi l’inventer ? Moi j’y crois dur comme fer. Naïve, que je suis. En attendant, je me retrouvais devant mon diseur de bonne aventure, favoris, avant de lui sourire. Même s’il cachait son visage, il semblait beau. « Montrez moi votre main. » Sans attendre, je tendis ma main droite, pour qu’il puisse la prendre et regarder les lignes de ma main. Je n’y comprenais rien. Je savais qu’elle était la ligne de la vie. Mais bon. Ça ne veut strictement rien dire, non ? « Il y a un thème précis que vous voulez savoir ? Travail ? Santé ? Amour ? » Je me pinçais les lèvres. « Bonne question. Humm. Le travail… Pas besoin… » Je parlais plus à moi-même qu’à lui. Je réfléchissais à voix haute, en quelque sorte. « La santé… Hm… » J’étais en bonne santé non ? « L’amour… » Je soupirais doucement avant de le regarder. « Allez. Choisissons l’amour. » Voyons surtout ce qu’il va découvrir. J’en attendais pas mal, autant sur le plan passé que futur. Pas que j’ai quelqu’un réellement en vue en ce moment. Mais j’avais besoin d’infos pour y croire. Croire en ses talents.

TENUE † Je ne dis pas que les diseurs de bonnes aventures sont tous des charlatans mais beaucoup le sont. Après tout, s’ils arrivaient tous à prédire ce qui étaient bon ou pas, ils ne seraient pas restés des marchants ambulants et auraient profité de leur pouvoir pour être dans de meilleurs conditions. Car non, ce n’est pas un métier très brave de lire le futur des autres. Mais si mentir un peu peut permettre de gagner un peu d’argent, là le problème ne se pose plus. Ce n’est pas une mauvaise chose de mentir et dire aux autres ce qu’ils souhaitent entendre. Les clients qui viennent me voir ont juste besoin que quelqu’un le donne un peu de courage et de motivation. Si je leur dis « Je vois une promotion qui arrive. », ils vont s’investir davantage dans leur boulot et croire en une promotion. Je leur vends de l’espoir donc je ne considère pas cela comme une mauvaise chose. Mais parfois, on tombe sur des clients un peu plus dur à gérer. Je n’aime pas ceux qui sont trop curieux et qui cherchent trop à savoir comment je fais. C’est comme si on demandait à chef cuisinier comment il fait pour cuisiner aussi bien. Ça n’a pas de sens. Le chef répondra surement par un sourire forcé et s’en ira dans sa cuisine. Sauf que moi, je ne peux pas faire ça. D’une part, parce que j’ai un masque qui cache la moitié de mon visage et de l’autre, parce que je n’ai nulle part où m’enfuir. Je dois faire avec, mais même si c’est ennuyeux, je fais de mon mieux. Heureusement, ça ne m’arrive pas si souvent que ça, mais il suffit d’un seul cas pour me donner mal au crâne. Et ce cas là, c’est Watanabe Joy. Je soupire intérieurement en la voyant arriver. Mais comme je l’ai dit plus tôt, il faut faire avec. Je lui demande de me montrer sa main et elle s’empresse de le faire. J’exerce une mini pression sur le bout de ses doigts avec un stylet pour que sa paume de main ressorte. Amour ? Je réfléchis deux secondes à ce que je pourrai lui dire. Je regarde ses lignes de main. En vrai, je m’y connais dans ce domaine mais ça n’a rien de très extraordinaire non plus. « Vous n’avez pas réellement connu de relations durables. Vous ne voulez pas vous fixer. Par peur peut être ? » J’arrête de regarder sa main et pour fixer son visage. « Vous êtes un oiseau. Vous volez sans jamais vous arrêtez, à la découverte de nouveaux horizons. Vous ne faites que regarder le ciel sans jamais regardez au sol. Pourtant il suffit de baisser la tête pour voir qu’il y a un arbre sur lequel vous pouvez vous reposer. » Avec des clients particuliers tel que l’infirmière, j’utilise des métaphores car les métaphores laissent court à notre imagination. C’est à la fois en dire beaucoup mais peu à la fois.

TENUE † J4étais de nature curieuse, alors ce n’était pas bien difficile pour moi de faire ce genre de chose. Allez voir un diseur de bonne aventure. J’étais toujours curieuse, et j’essayais de voir si c’était vrai ou faux. Parfois ça passait, parfois, ça ne le faisait pas du tout. Et aujourd’hui, c’était un jour où j’avais envie de savoir quelque chose sur ma vie. Quel plan, j’en sais strictement rien, ce n’est pas bien grave, je verrais sur place. D’ailleurs, j’arrivais bien rapidement, et je tendis ma main sous sa demande. Je me demandais bien ce que j’allais bien pouvoir entendre. Il me demandait de choisir, et je lui demandais l’amour. C’était le seul où je pourrais plus ou moins voir, s’il disait des conneries. Je voulais un peu le tester, bien qu’il puisse m’intriguer. Il se cachait, c’est stupide. Mais c’est marrant, moi ça me donne envie de savoir qui il est… Je le sentis faire une pression sur ma main, je plissais les lèvres, alors que je le regardais faire. Il avait des mains chaudes et plutôt masculines. Il était jeune. Que ça soit à la voix, ou aux mains. « Vous n’avez pas réellement connu de relations durables. Vous ne voulez pas vous fixer. Par peur peut être ? » Je me mordis les langue. Il marquait un point, même si j’avais été avec Hiro pendant à peu près trois ans… Mais ce n’était pas une relation saine. On s’était mis ensemble sans s’aimer, c’est au fil du temps qu’on s’était aimé… Mais aujourd’hui il était mort. Il m’avait laissé derrière lui. « Vous êtes un oiseau. Vous volez sans jamais vous arrêtez, à la découverte de nouveaux horizons. Vous ne faites que regarder le ciel sans jamais regardez au sol. Pourtant il suffit de baisser la tête pour voir qu’il y a un arbre sur lequel vous pouvez vous reposer. » Je le regardais avant de rire. Putain. Ce con avait tellement juste. C’était moi. Je changeais constamment de partenaire, je ne voulais pas m’engager, par peur, et aussi car on a qu’une vie et qu’il faut en profiter. Mais je me demande bien qui pourrait être cet arbre dont il parlait. Car là, pour le coup je ne vois pas. « Hum. Est-ce que cet arbre, se trouve sur mon lieu de travail ? » demandai-je curieuse. Car là… C’est bizarre. Un élève ? Un professeur ? Autre ? Il me rendait curieuse. « Comment vous faites, pour savoir ça ? »

TENUE † Si j’ai choisi ce « métier », c’est parce qu’il requiert simplement de l’observation et de la perspicacité. Il faut savoir être réactif et ne pas paniquer si jamais on commence à partir dans de fausses suppositions. Mais il suffit d’avoir confiance en ce qu’on dit pour réussir à faire douter l’autre. Et sans me vanter, toutes ces qualités me définissent. J’observe les personnes et déduis leur façon de vivre, un peu comme un profiler mais réaliser sur des personnes banales. Je ne suis pas non plus un spécialiste mais je ne suis pas mauvais. Demander la main de mes clients n’est qu’une diversion pour pouvoir les observer plus longuement, les amener à montrer leurs petits gestes et habitudes qui leurs sont invisibles. Chaque détail est important, il suffit de bien observer. Mais dans le cas de sensei, j’ai eu le temps de plus l’observer. On ne s’était jamais réellement parlés jusqu’à l’arrivée du dernier incident mais la croiser de temps en temps dans les couloirs m’a permis d’avoir plus d’éléments à analyser. Les métaphores m’aident à rester dans le vague et ne pas trop m’aventurer dans l’inconnu. Elle rit et m’a fait presque douter de mon analyse. Mais elle a l’air de me croire car elle me demande plus d’information. Lieu de travail ? Je me redresse sur ma chaise. « Ça, je ne sais pas, mais c’est fort possible. » Qui sait, notre infirmière est charmante, un professeur a peut être un petit coup de cœur pour elle. Bien entendu, je laisse à la trappe les commentaires puérils de mes camarades sur sensei. Ça n’a rien de sérieux. Sa deuxième question est une question qui me revient tout le temps. Je ne l’aime pas mais bon, le client est roi. « C’est marqué sur vos lignes de main. Celle qui représente l’amour est à l’origine de plusieurs ramifications. » Je pointe la ligne pour illustrer mes propos, à elle de décider si elle voit ce dont je parle. De l’autre côté du rideau, j’entends un peu d’agitation. Je fixe pendant deux secondes les rideaux derrière l’infirmière. Mais comme ce quartier est loin d’être calme, je me reconcentre sur elle. « Pour le reste, c’est secret défense. Si je vous disais comment je fais, vous ne viendrez plus me voir. »

TENUE † « Ça, je ne sais pas, mais c’est fort possible. » Ca je me demandais qui ça pourrait bien être. J’ai déjà envie de partir à la chasse, de voir qui ça pourrait être. Un professeur ? Un étudiant ? Je penchais légèrement ma tête. Un lycéen ? C’est tout de même jeune, non. Même si je sais très bien ce qui se dit derrière moi. Je ne suis pas sourde non plus. Les rumeurs vont vite dans une école. Ça me fait plutôt rire qu’autre chose. L’infirmière, qui est mignonne, les garçons qui y viennent pour un rien. Moi ça m’amusait. Car j’avais passé l’âge de me prendre la tête pour ce genre de broutille, ils sont dans la fleur de l’âge c’est normal, d’agir de la sorte. « C’est marqué sur vos lignes de main. Celle qui représente l’amour est à l’origine de plusieurs ramifications. » Je fis ressortir ma lèvre inférieure en regardant ma main. Je connaissais les lignes et ma main. Juste celle de la vie et de l’argent, je crois ? Mais est-ce qu’on peut vraiment s’y fier ? Je me demandais vraiment… Certains avaient une petite ligne de vie, et vivaient très vieux… Des bruits dehors, me firent lever la tête. Détournant le regard, je regardais derrière moi avant de soupirer doucement. « Pour le reste, c’est secret défense. Si je vous disais comment je fais, vous ne viendrez plus me voir. » Je passais rapidement ma langue sur mes lèvres avant de secouer les mains négativement. « Non, non, je viendrai quoi qu’il arrive. Ce n’est pas drôle sinon. Se faire soit même les prédictions… Ce n’est pas tip top, vous ne trouvez pas ? » Bon, il était peut-être un charlatan, mais pas grave. Il ne me ruinait pas non plus. Soupirant, je le fixais quelque peu en plissant les yeux. « Vous me rendez tout de même curieuse. J’ai envie de savoir qui vous êtes. D’habitude les diseurs de bonne aventure ne se cachent pas autant. » Le masque, les lunette de soleil… « Vous êtes une célébrité ? » Question stupide, mais on ne sait jamais. Je ne vois que ça comme solution.

TENUE † Si elle a demandé d’avoir une prédiction sur l’Amour, c’est que finalement, elle cherche à se poser.  J’aurai pu lui dire que cette année ne sera pas la bonne et qu’elle devra faire des efforts si elle veut rencontrer la personne désirée, mais je lui ai donné une prédiction qui est assez positive. Bien entendu, ce n’est pas fondé et je l’ai dit sans viser une personne particulière. Qui sait, peut être que grâce à moi, elle rencontra réellement quelqu’un à Royal, ce qui serait assez drôle. Je lui montre ce dont je vois. Il n’y a aucun fondement scientifique mais il y a des personnes qui y croient, alors je joue le jeu. Je lache un petit rire à son commentaire. « Vous avez raison. J’attends votre prochaine visite avec impatience. » De simples belles paroles puisque j’espère tout le contraire. Ça m’arrangerait si elle évitait de me voir sous mes deux identités aussi souvent. Je suis certes bien camouflé, mais il suffit que je ne fasse pas attention pour que je me trahisse moi-même, par le biais de mes habitudes par exemple. Ça va être fatiguant de tout le temps rester sur mes gardes mais je n’ai pas le choix. Elle me fixe à travers mes lunettes et son regard ne me rassure pas du tout. C’est louche. Ses mots confirment mes craintes. Je la rends curieuse et ce n’est pas bon. Cependant je ne pus m’empêcher de rire brièvement à sa question. Une célébrité qui gagne des sous en se faisant passer pour un diseur de bonnes aventures… Elle a de l’imagination. « Non pas du tout. Mais je n’aime pas faire comme les autres. » C’est tout ce que je trouve à dire pour me justifier, je me racle la gorge. « Ce que je veux, c’est gagner de l’argent, pas de la reconnaissance. Alors ça ne me servirait à rien de montrer mon visage. » J’espère que cette réponse allait la satisfaire même si ce n’était pas entièrement faux. Un mineur qui travaille n’est jamais bon. Je m’apprêtais à lui demander si elle avait d’autres questions mais un homme que je « connais » surgit de nulle part. « Barre toi, y’a les flics. » Je ne me fais pas prier et me lève d’un coup. Je range rapidement mes affaires. « Désolé, je dois y aller. Vous feriez mieux d’en faire autant. » Tant pis pour la séance gratuite mais si je me fais arrêter, bonjour les ennuis.

TENUE † « Non pas du tout. Mais je n’aime pas faire comme les autres. » J’hochais la tête à cette annonce. Il n’aimait pas faire comme les autres. Chacun voit midi à sa porte. Mais ça me rendait extrêmement curieuse dans tous les cas. Pourquoi se cacher ? C’était bien le premier que je voyais se cacher. Il n’avait pas envie d’être reconnu, je pouvais aussi comprendre. Mais n’entendre que la voix, sans pouvoir le dévisager… J’avais terriblement envie de le voir, de savoir à quoi il ressemblait. N’était-ce pas normal ? « Ce que je veux, c’est gagner de l’argent, pas de la reconnaissance. Alors ça ne me servirait à rien de montrer mon visage. » De l’argent. Donc, il était en manque d’argent. N’est-ce donc pas un charlatan dans ce cas-là ? S’il voyait vraiment l’avenir, il travaillerait en priorité, pour faire partager son don, quoi que… De plus en plus de voyant, prennent très cher les consultations… C’est devenu un vrai business, alors qu’avant, ce n’était pratiquement rien… « Je vois… De l’argent… » Dis-je simplement en méditant dans mes pensées. Tout à coup, quelqu’un arriva, ce qui me fit sursauter. « Barre toi, y’a les flics. » les flics ? Quoi ? C’était illégal son truc ? Ah. « Désolé, je dois y aller. Vous feriez mieux d’en faire autant.  » Oui, parce que participer à quelque chose d’illégale, c’était aussi néfaste pour le client.  « Je vais devoir courir à cause de vous. Vous n’avez même pas pu prédire cette fuite ? Vous êtes sûr d’être voyant ? » Non mais c’est vrai quoi. Sans attendre je sortis de là, en enfilant mes lunettes de soleil sur le nez. La police n’était qu’à deux trois mètres de moi, de nous. Me figeant alors qu’ils me pointaient du doigt, je sentis le diseur de bonne aventure sortir à son tour. « J’espère que vous courrez vite. » Dis-je avant de machinalement lui prendre la main et partir en courant. Je remerciais le seigneur pour ne pas avoir mis de talons aujourd’hui. Je ne savais pas trop où on courait, mais on courait. Passant devant un stand de panier en osier, j’en profitais pour, sans scrupule, le faire tomber et ralentir les flics qui nous coursaient sans être fatigué.

TENUE † Parler d’argent m’a semblé tout à fait normal. C’est parce qu’on est rémunéré derrière qu’on travaille aussi dur. Ce que je voulais dire c’est que je ne recherche pas la gloire ni la reconnaissance, mais tout simplement à faire mon boulot de diseur de bonnes aventures. Lorsqu’une personne est riche, ce n’est pas pour autant qu’elle va partager son argent avec tout le monde. Donc même si une personne était réellement capable de lire l’avenir des autres, il me parait tout à fait légitime qu’elle se fasse de l’argent avec ça. Mais visiblement, ça n’a pas l’air d’être si évident pour l’infirmière. D’un côté, ça ne m’étonne pas puisque la majorité des gens à Royal sont très riches alors peut être qu’elle est elle-même issue d’une famille aisée. Je m’apprêtais à lui demander si elle avait d’autres questions mais on me signale de m’enfuir. Peut être que cette intervention lui fera comprendre pourquoi je ressens le besoin de me cacher. « Savoir lire l’avenir ne signifie pas forcément être capable de l’éviter. Ce qui est censé arriver arrivera quoi qu’il arrive. » Dis-je pour me justifier alors que je récupère mes dernières affaires pour les mettre dans mon sac. Sensei sort la première et je suis de près. J’allais partir dans une autre direction qu’elle pour que la police se divise aussi mais l’adulte fit autrement. « Quoi ? » Elle m’attrape soudainement la main et me force à courir avec elle. Je suis sportif donc cette course ne m’est pas difficile. J’écarquille les yeux en voyant l’incroyable action de l’infirmière. Je ressens un peu de peine pour le propriétaire mais si ça pouvait nous permettre de semer nos poursuivants, je n’y éprouve aucune culpabilité. On a gagné un peu d’avance sur eux mais notre course est loin d’être terminée. Voyant un centre commercial avec beaucoup de monde, je tire l’infirmière avec moi pour entrer dans l’immense batiment. Après avoir tourné dans une allée, je nous arrête. « Enlevez votre veste et retournez la. » Le rouge, c’est trop voyant. Ayant un peu chaud, j’enlève ma casquette et me ventile avec, tout en regardant derrière nous afin de vérifier si les policiers nous ont perdus de vue. Personne. Mon attention revient vers l’infirmière. J’ignore pourquoi mais en la regardant, je commence à rire.

TENUE † « Savoir lire l’avenir ne signifie pas forcément être capable de l’éviter. Ce qui est censé arriver arrivera quoi qu’il arrive. » Ah, ça sonnait presque comme une fatalité dans la bouche de ce garçon. Non mais vraiment, on met cette réplique dans un drama historique, et ça passe crème, je vous le dis. C’est limite flippant pour le coup. « Je vois, alors je ferai face à mon destin, encore une fois. » J’avais bien survécu avec Hiro, alors quoi qu’il m’arrive, je serai forte, et je ferai avec. Ce n’est pas un souci. C’est que la vie a décidé de me tester, tout simplement. Pourtant, je suis forte, même si je suis devenu un peu folle, et que je n’ai pas peur de mourir comme tant d’autres personnes. En attendant, la police est là, et il semble falloir fuir. Ce n’est pas un souci. J’ai des baskets. Et heureusement. Ce n’est jamais pratique de fuir avec des talons. En tout cas, main dans la main, on fuyait, en courant de toute notre force pour fuir les policiers. Je ne sais pas pourquoi je l’ai embarqué avec moi. J’en sais rien, et je ne préfère pas y réfléchir, on a pas le temps. On s’immisce dans un centre commercial, avant qu’il ne nous stoppe. Le souffle court, je me penche en avant, mains sur les genoux pour récupérer mon souffle. « Enlevez votre veste et retournez la. » Hein ? Je me redressais avant de regarder ma veste. Ah oui. Rouge. L’enlevant, je la retournais, tant pis, ce n’est pas tip top à l’envers, mais c’est noir. Je l’enfile avant de le regarder s’aérer avec la casquette et je me mets à rire. « Si seulement on avait fait du parkour on aurait pu les fuir bien plus vite. » Dis-je en attachant mes cheveux. « Le masque plus les lunettes ça ne doit pas aider. Mais je suppose que vous ne les enlèverez pas. » Je pouffais doucement avant de regarder autour de nous. Pas de policier à vue d’œil. J’attrapais mon portefeuille avant de filer dans la petite boutique en face de nous pour commander deux smoothies bien frais. Payant, je donnais deux fois mon prénom, avant de revenir vers lui, le temps que les boissons se préparent. « A défaut d’enlever tout ça, je vous ai pris une boisson fraiche. Ça sera toujours mieux que rien, non ? » Je le regardais longuement avant de croiser les bras. Il m’intriguait, tellement. Entendant mon prénom, je me tournais avant d’aller chercher les boissons. Lui donnant la sienne je me mis à sourire. « Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression que vous êtes jeune. Plus jeune que moi. Je me trompe ? »

TENUE † Je ne m’attendais pas à ce que Sensei me prenne la main pour s’enfuir avec elle. On aurait eu plus de chance si on s’était séparé. Surtout que si elle se faisait attraper seule, elle n’aura pas d’aussi lourde conséquence que si elle l’était avec moi. Là elle passe pour une complice. Enfin, peut être qu’elle n’avait pas pris le temps de réfléchir et s’est contenté d’attraper ma main comme un simple réflexe. On finit par atterrir dans un centre commercial. Il y a du monde et on se fera moins remarqué si l’infirmière veut bien enlever sa veste rouge. Les policiers se sont surement que souvenu d’une jeune femme en rouge et d’un homme en noir. Le contact entre nos mains se rompt naturellement lorsqu’elle enlève sa veste. Après m’être aéré avec ma casquette, je me mets soudainement à rire. C’était puéril mais ça me fait bien rire. De toute ma vie en cachette, c’était la première fois que je me faisais littéralement poursuivre par la police. Heureusement, ça ne s’est pas fini en une mauvaise expérience. Ayant trop chaud, je range ma casquette dans mon sac à dos. Elle ne peut pas me voir, mais mes yeux expriment de la surprise. « Vous savez en faire ? » Ou alors ce n’était qu’une simple plaisanterie de sa part et là, j’aurai été idiot de lui avoir demandé. « Mais vous courrez déjà assez vite, ça m’a beaucoup étonné, vu la longueur de vos jambes. » J’étouffe un rire. Ce genre de propos, je peux librement les formuler sous ce masque. Je ne suis ni le prince Eden, ni un lycéen. Je suis tout simplement moi. C’est bien pour ça que je ne retirai pas ce masque. Je fais un « non » de la tête pour lui répondre. L’infirmière s’éloigne de moi. Dos au mur, main dans les poches, je vérifie quand même aux alentours. Sensei revient. « Ce sont les frais de ma consultation ? » Je préfère demander, on ne sait jamais. Elle me fixe et c’est perturbant puisque justement, mon visage, tel qu’il est, n’a rien à voir. Est-ce que mon masque a un trou quelque part ? Je tourne la tête pour éviter de « croiser » son regard. Heureusement, nos boissons sont prêtes et elle s’arrête de me dévisager. « Merci. » Dis-je en récupérant ma boisson. Je tire doucement le masque en avant, juste assez pour insérer la paille. Mais j’arrête tout mouvement à sa question. « Vous paraissez jeune donc je ne voudrai pas m’avancer non plus. » J’esquive en douceur sa question et bois dans la boisson. Ça fait du bien.

TENUE † « Vous savez en faire ? » J’hochais la tête. Bien évidemment l’habit ne fait pas le moine, et peu de personne savent que je fais souvent des sports extrêmes. Je suis toujours à la limite du danger. Je n’ai pas peur. Au contraire, ça m’excite, ça me donne une dose d’adrénaline. Peu pourrait comprendre. Mais si je devais mourir, je voudrai mourir en tombant dans le vide. D’ailleurs, c’était aussi une manière de vouloir me mettre au rooftopping. Qui sait. Peut-être un jour. « J’en fais depuis plusieurs années déjà. » Répondis-je simplement. Je n’étais pas non plus la meilleure, mais je n’étais pas pour autant la plus nulle. Je suis mince mais musclée. Les apparences sont trompeuses. « Mais vous courrez déjà assez vite, ça m’a beaucoup étonné, vu la longueur de vos jambes. » Je pinçais mes lèvres avant de rire. « Yah ! Je suis pas si petite que ça…Ce n’est pas sympa. » Je ne boudais pas, je ne lui en voulais pas, il marquait un point. Je suis petite. J’en profitais pour venir me coller contre lui pour voir la différence de taille. « C’est juste vous qui êtes grand… » Ah… Il pourrait presque poser son menton sur le dessus de ma tête… En tout cas, après une course pareille, j’avais soif moi. Et j’en profitais pour en payer un pour monsieur le diseur de bonne aventure. Il n’était pas si méchant que ça après tout. « Ce sont les frais de ma consultation ? » Je souris en coin avant d’hausser les épaules, sous un petit air provocateur. Qui sait. Allant les chercher, je me mis à boire bien rapidement. C’était tout de même bon. Et rafraichissant. Je le regardais faire. Tout ça pour pas que je vois son visage, ça reste enfantin, et mignon dans un sens. « Vous paraissez jeune donc je ne voudrai pas m’avancer non plus. » je me mis à rire sans le vouloir. Il était malin. Il était sacrément malin. « Ah, si vous continuez, à me tourmenter ainsi, je vais venir plus souvent afin de pouvoir voir votre visage. » Dis-je avant de m’approcher de lui et poser une main sur sa joue pour la remonter sur son front et toucher sa peau du bout des doigts. « Vous avez la peau douce. »

TENUE † Wow. Elle m’a réellement surpris avec sa réponse. Même si je déteste ceux qui se fient aux apparences, je n’aurai jamais deviné que l’infirmière serait capable de telles prouesses. Elle est pleine de surprises et c’est…comment dire…intéressant. Je me demande ce qu’elle est capable de faire aussi. Je lui fais une remarque sur sa taille. Elle n’est pas spécialement petite mais on ne peut pas dire qu’elle soit grande non plus, en tout cas, pas à côté de moi. Lors de la dernière visite à l’infirmerie, je n’avais pas pu remarquer sa vraie taille parce qu’elle avait ses talons mais avec des chaussures plates, la différence est facilement repérable donc la remarque était gratuite. Elle vient se positionner près de moi. Je souris mais mon masque cache ma réaction. Comme je l’avais prédit, elle est petite et je hausse les épaules à sa remarque du style « mais oui. » Est-ce que je l’ai vexé ? Elle part soudainement mais en voyant la direction qu’elle prend, je peux affirmer que non. Même après tout cela, elle m’offre une boisson. Je lache un petit rire à sa réaction. Tant pis si c’était les frais, je lui dois bien ça après cette course poursuite. Ce n’est pas évident de boire avec un masque mais je n’ai pas le choix, ce n’est pas comme si je pouvais le retirer devant elle. Ce n’est pas la première fois que je le remarque mais sensei rigole beaucoup en ma présence. J’ignore si tout le monde arrive à la faire autant rire mais j’ai remarqué qu’elle rigole souvent. Le pire, c’est que je ne cherche pas spécialement à la faire rire. «Qui vous dit pas que c’est ma façon d’attirer les clients ? » En vrai, il n’y a qu’elle qui tient tant à voir ce qui se cache sous ce masque. Un frisson me parcoure le corps au moment où elle touche ma joue. D’habitude, j’ai toujours eu cette « aura » qui empêche les autres de s’approcher de moi et d’être aussi familier mais ça n’a visiblement pas l’air de fonctionner sur l’infirmière. Je remercie le masque de cacher la couleur de mes joues et je pousse sa main à l’aide de mon revers de main. « Ce n’est pas drôle. » Je tourne la tête. « Si vous ne comptez pas me payer, je vais y aller.  » Elle pourrait croire que je serai offensé par son geste mais ce n’est pas du tout la raison de mon départ mais même si c’est agréable d’avoir parlé, je ne peux pas rester avec elle.

TENUE † Fuir, c’était pas dans mes habitudes, mais là, on peut dire qu’on n’avait pas eu le choix. On avait fui, un petit moment, avant de finir par s’arrêter dans ce centre commercial, assez important. J’avais retourné ma veste, pour ne pas attirer l’attention. Lui avait enlevé sa casquette mais n’avait pas pour autant enlevé lunette et casquette. Il me faisait rire en tout cas. « Qui vous dit pas que c’est ma façon d’attirer les clients ? » Je ne pus m’empêcher de rire avant de passer brièvement ma langue sur mes lèvres. « Ne serait-ce pas plutôt pour attirer les filles avec votre côté mystérieux ? Moi je suis sûre que c’est ça. » Je le lui lançais sous un petit ton assez provocateur. Rien de bien méchant, c’était bien évidemment de la taquinerie. En attendant j’allais acheter de quoi boire, pour nous rafraîchir un peu, parce que mine de rien cette course, elle nous avait tout de même donné chaud, on ne pouvait pas le nier. Une fois les boissons en mains, je le détaillais longuement avant de venir caresser sa joue. J’avais terriblement envie de lui enlever ce masque. Il m’agaçait, j’étais curieuse de voir qui il était. « Ce n’est pas drôle. Si vous ne comptez pas me payer, je vais y aller. » Je levais les yeux au ciel avant de mettre la paille dans ma bouche pour aspirer le liquide sucrée et fruité. « Combien je vous dois ? On dirait que vous êtes en manque d’argent. Je persiste. Vous êtes jeune. Etudiant en manque d’argent ? » J’essayais de gratter, au maximum. Je voulais en savoir plus sur lui. Vraiment plus. Finissant par fouiller dans mon sac, je pris mon portemonnaie pour en sortir plusieurs billets et les lui tendre. « Ca suffira ? »[/Color] Pas que je sois riche, dans le fond je me contente du salaire de la Royal, même si de temps en temps mon père me virait de l’argent.

TENUE † Si elle savait mon âge et mon identité, peut être qu’elle n’aurait jamais osé me parler ainsi. Elle ne pensait surement pas à ce qu’elle a dit mais il n’empêche que je reste son élève. Mais ça, je ne pouvais pas lui en vouloir puisque c’est justement l’effet que je cherche. Avec mon masque, personne ne va se douter que je sois encore au lycée. Et vu ma grande taille, je peux aisément me faire passer pour un étudiant. Bien que je souhaite à tout prix devenir un adulte, le côté joueur et aguicheur m’échappe encore. Recevoir des cadeaux de la part des filles de mon âge et se faire taquiner par une femme sont deux choses différentes. Même si au final, l’infirmière m’offre une boisson pour nous hydrater après la course. C’est sympa et avenant de sa part. Je ne suis qu’un inconnu dont le visage est masqué mais elle me l’a quand même offert, pas parce qu’on a vu mon visage mais parce qu’on a fui ensemble. Mais son intérêt à voir ce qui se cache sous mon masque est trop gênant. Elle me touche le visage et j’ai cru qu’elle allait enlever ma protection. Mon cœur a frôlé l’arrêt. Et avant qu’elle se sente tenté à le faire, je pousse sa main. « 1500 yens. » Je hausse les épaules à son hypothèse. « Si vous le dites. » J’attends qu’elle me sorte les billets. Elle me donne deux billets de 1000. « C’est même trop. » Mais il ne me semble pas avoir de monnaie sur moi, je vérifie quand même en ouvrant mon sac à dos, mais je n’ai réellement aucune monnaie. Je soupire. « Si vous me faites confiance, je vous rendrais ces 500 yens la prochaines fois. » Je tenais à les rendre. Elle risque de ne pas me trouver pendant un certain moment puisque je vais attendre que la police se calme avant de réapparaitre, mais je pourrai certainement les rendre lorsqu’on sera au campus. Je range les billets dans ma poche de pantalon et mets ma capuche sur ma tête. « Au revoir. »