C’était une soirée comme une autre. Comme la nuit précédente, et la nuit d’avant, et l’autre nuit, je n’arrivais pas à trouver le sommeil, faisant toujours le même cauchemar qui me hantait l’esprit. Je me voilais le visage, refusant toute aide, me disant que j’allais passer par-dessus avec le temps, comme je le faisais si bien souvent depuis mon enfance. Je suis une dure à cuire, je sais comment encaisser. Mais voilà que j’avais de sérieux trouble mentaux. Certes, je ne me reconnaissais plus, mais je m’en fichais. J’étais au fond du gouffre et je ne faisais que survivre une journée de plus. J’avais trop en tête, tout était de trop. Des ordres des Yakuzas, des réprimandes, des commentaires négatifs, des crises ici et là, la dépression, le désespoir, la tristesse, la colère, tout ça me rongeait, m’ayant transformé en un monstre sanguinaire tiré d’un film d’horreur. Heureusement, je ne faisais pas couler le sang sans raison. Pas encore du moins.

Au beau milieu de la nuit, j’allais me promener dans le quartier, armé d’un fusil et d’un poignard dissimulé sur moi, devant toujours me tenir prête à une éventuelle attaque. Surtout que la nuit, c’était quand même assez fréquent et comme si je cherchais à prouver quelque chose, je confrontais ce danger, me foutant bien des conséquences. Tout ce qu’il me traversait l’esprit était beaucoup plus effrayant que ce qui pouvait se cacher dans les ruelles la nuit. D’un pas confiant, capuche sur la tête avec cette forte pluie, je me rendais dans un quartier de Shibuya, à 15 minutes de marche de chez moi. Sur ma route, je rencontrais un chat devant une maison. Il miaulait pour entrer. Vu l’heure, personne n’ouvrirait. J’allais donc me faufiler sur le terrain et m’approcha gentiment de l’animal, m’accroupissant en lui présentant ma main. « Que fais-tu dehors par un temps pareil toi… C’est dangereux… Baka. » Dis-je froidement. Une fois l’animal en confiance, je retirais ma veste et la posa sur le chat pour le réchauffer, ne me souciant pas de ma petite personne. Le pauvre était frigorifié. Je l’installais dans ma veste, lui montrant que tout allait bien et qu’il était maintenant en sécurité. Lentement, je me levais, prenant ma veste avec la boule de poil à l’intérieur et m’apprêta à partir.

La boule de poile cachée dans ma veste, je la serrais doucement contre moi en soupirant lourdement, déjà épuisée de ce chat qui ne m’avait pourtant rien demandé. Je n’étais pas cruelle au point de m’en prendre à des animaux. Je l’étais avec des humains qui n’aidaient en rien l’humanité, mais n’empêche que je n’étais pas une bonne personne même si je faisais payer les méchants de Tokyo. Je restais quand même cruelle de m’en prendre à un être vivant. Mais que voulez-vous. J’ai été élevé dans cet atmosphère, bien que mes parents auraient préférés me voir à l’université et que je sois heureuse plutôt que d’être prisonnière dans ce cycle infernal. Ils sont peut-être heureux, ensemble, mais ils ne sont pas complètement libres de leurs mouvements, ni de leur temps. Ils doivent se consacrer au chef Yakuza. Pour ma part, je fais ce que je veux à présent. Je m’en fou du reste. Vraiment, je m’en fou…

Sortant du terrain résidentiel, je remarquais une silhouette au loin. Je m’arrêtais immédiatement, fronçant les sourcils en voyant s’approcher un homme. Ma main se glissa sur ma fesse droite, prête à dégainer mon arme lorsque je vis le parapluie se tenir au-dessus de ma tête. Mon attention se portait sur les yeux de ce jeune homme partiellement éclairer par le lampadaire tout près. Je ne baissais pas du tout ma garde, lui répondant froidement. « Je ne t’ai rien demandé… Continue ton chemin. » Je retournais sur le terrain résidentiel, m’assurant de regarder dans mon angle mort au cas où cet individu ne m’attaque par derrière. Je posais le chat sous la galerie, décidant de le laisser ici, à l’abri d’une éventuelle attaque quelconque. On n’est jamais trop prudent. De plus, il sera protégé de la pluie. Une fois que le chat fut bien installé à l’abri, je revins vers la rue rapidement en secouant ma veste pour retirer le poil de chat qui s’était accroché à mon pauvre vêtement, laissant les gouttes d’eau tomber sur moi, mes cheveux complètement trempés. Je frissonnais, fronçant mes sourcils.

Tordant ma veste, je remarquais bien rapidement qu’avec la forte pluie, ça ne servait vraiment à rien de tordre mon vêtement. Je commençais à avoir froid et commençait à être grognonne, ce qui était mauvais signe. Avec le manque de sommeil, j’allais littéralement péter les plombs et malheureusement, ce sera un innocent qui en subira les répercussions. « Oui, on ne se connait pas et je ne compte pas te poser dix milles questions mais je me sens mal de te laisser sous la pluie ainsi. » Se sentir mal pour une inconnue ? Sérieusement ? Il croyait que j’allais gober ça ? « Et voilà que je tombe sur un soit disant je me prends pour un sauveur. » Dis-je toujours aussi froidement en frissonnant. Je perdis légèrement pieds, me rattrapant avec l’autre en souriant malicieusement en coin. Ce sourire qui signifiait que je n’avais pas du tout envie de rigoler. J’étais de très mauvais poil, surtout parce que j’avais froid et c’était pire avec mon manque de sommeil. Si ce jeune homme voyait la taille de mes cernes, il comprendrait que je n’avais pas fait des nuits complètes à dormir. Mais qu’est-ce qu’il en a à faire de ça de toute façon.

Je posais mes mains sur mes bras, sentant mon corps devenir lourd et ma tête me tourner. Je commençais à me sentir faible et je dus poser mes pieds de façon à bien me tenir debout.  Je le regardais s’approcher et je fronçais à nouveau mes sourcils, ne bougeant pas. « Tu risques de tomber vraiment malade alors … Laisse-moi juste t’amener quelque part au sec, sans discuter, sans poser de question. » J’étouffais un rire. « Épargnes-moi ta pitié, j’en ai rien à foutre. » En disant ces mots, je dû poser ma main sur mon front, soupirant lourdement en combattant cette fatigue soudaine. Malheureusement, je fus incapable de me tenir debout, sentant mes jambes littéralement me lâcher sous moi. Je crus être près du mur, alors j’essayais d’y poser ma main, mais ma vision m’avait jouer un tour et remarqua rapidement le vide que ma main tentait d’agripper.

L’humanité. Parlons-en. S’il savait à quel point je ne l’étais plus, il me ficherait enfin la paix. Il courerait la queue entre les deux jambes bien assez vite. « Pas vraiment sauveur mais bon, disons un humain. » Je ne pus me retenir un petit rire moqueur. M’ouais. Humain. « Je crois que tu vis trop dans ton p’tit monde de Poneyvalley, mec. » Répondais-je sèchement avant de perdre finalement le ballant. Sa main tenait mon bras, comprenant qu’il ne voulait pas que je tombe, mais tête dure comme j’étais, je le repoussais faiblement. Il m’agaçait ce mec. Je n’étais même pas en état de lui foutre ne serait-ce qu’une claque. Je détestais être dans cette position de vulnérabilité. Je suis une femme forte, je suis capable d’endurer et je suis trop orgueilleuse d’admettre que j’avais besoin d’aide. Je criais à l’aide avec mon comportement mais ça, personne ne l’avait remarqué, sauf mes parents. Je ne veux pas faire face à la réalité. Je ne veux pas faire face à mes émotions. J’ai peut-être peur ? « Sérieusement, tu vois bien que tu ne vas pas bien. » Je sortis de mes pensées en l’entendant. Je fronçais mes sourcils, n’étant effectivement pas dans mon état normal. Je finis par éclater, criant. « NON ça ne va pas et alors ?! Fou moi la paix ! » Moi, avouer que ça n’allait pas. Je n’allais vraiment pas bien ça, c’était certain. L’épuisement me faisait dire des choses que j’allais sûrement regretter. Jouer les princesses en détresse ne m’intéressait pas, mais finalement, c’était le cas, mais dans une version agressive. C’était pitoyable. Je me trouvais pitoyable.

La pluie s’abattant toujours sur notre tête, le vent continuait à souffler pour s’amuser à me geler le corps complet. J’allais finir en hypothermie si ça continuait. « Mettons à l’abris là. » Je ne regardais pas où il pointait étant dans mon monde à essayer de tenir debout. Néanmoins, je le suivais vers cet abri et dès que je sentis mon corps au sec, je m’assieds lourdement au sol en posant une main en face de moi, mon corps se penchant vers l’avant en laissant mes cheveux dégoutter parterre, restant silencieuse en ayant les yeux fermés, combattant le manque de sommeil qui me rattrapais d’un coup.

Je restais silencieuse après sa réplique, ne me sentant pas du tout suffisamment en forme pour commencer à me débattre sur ce sujet. Je commençais vraiment à mal me sentir, manquant presque de rencontrer le sol dont je n’avais pas envie de connaître. Tout se passa si vite que d’une minute à l’autre, j’étais assise parterre, un peu plus au sec à essayer de me tenir réveiller. J’avais maintenant l’habitude de me réveiller quelque part dans une ruelle, alors je ne m’en inquiétais pas, mais j’étais en présence de quelqu’un et il me stressait à jouer les trop gentils. Je ne lui faisais aucune confiance, ni à lui ni à personne d’autre. Dans ma situation, ayant perdu ma seule source d’ancre dans ce monde omis mes parents, je me méfiais de tout le monde et ne voyait que du négatif partout. Pour moi, ma vie était terminé, mais ma rage, ma tristesse et mon orgueil me gardait sur cette Terre, voulant me venger contre la vie. Celle qui m’a enlevé mon premier amour. Mon premier dans tout. Je la détestais cette vie, au plus haut point.

Je voyais du coin de l’œil qu’il me tendait sa bouteille dos, me conseillant d’en prendre. À son offre, je repoussais sa bouteille de ma faible main, reprenant mon ton agressif. « Je t’ai dit de me foutre la paix… tête dur… C’est pas croyable… » Je soupirais longuement avant de redresser mon corps pour que mon dos se colle au mur. Je posais mon regard sur le jeune homme, l’éclairage du garage lui éclairant légèrement chaque facette. Je souris légèrement en coin en étouffant un rire. « J’aurais cru avoir affaire avec un homme de 30 ans. Qu’est-ce qu’un pré-adulte comme toi fait dehors ? » Je sortis un sac en plastique en essayant de le cacher, regardant mes deux joins restant avant de décider de les ranger à nouveau dans ma poche, ne préférant pas être stone. J’en avais déjà l’impression de toute façon. Je soupirais donc avant de fermer mes yeux. « Tyu peux dégager maintenant, j’suis au sec. » Lui dis-je avec un ton moins froid et moins agressif, étant totalement épuisée.

" T'es aussi pas mal buté dans ton genre. " Mon regard se posa sur le japonais. Un léger sourire amusé se dessina sur mes lèvres, aimant bien que quelqu’un me remette à ma place. J’avais l’impression d’entendre Jaxon quand il était à bout de nerfs avec moi. Rien que de penser à lui me rendait furieuse. Furieuse contre la vie. Et malheureusement, ce jeune homme était avec moi au mauvais moment. « J’suis comme ça, j’en ai rien à foutre. » Dis-je froidement avant de le traiter de pré-adulte. " Pré-adulte ? Je pense que tu fais ailleurs ma petite, je pense être plus âgé que toi " « M’ouais… » Bien sûr, il le prenait mal et c’était dans mon but. Dans la culture asiatique, traiter son aîné ainsi était très mal vue. Mais me concernant, ce genre de chose me passait par-dessus ma tête. Je broyais du noir. Je ne mangeais presque plus et je ne dormais presque plus. Je me lavais encore à tous les jours, mais c’était le seul effort que je faisais pour prendre soin de moi. Le reste, je m’en fou. Je me vengeais de la vie, voilà ce que je faisais. Elle m’a prise mon Jaxon, alors j’allais me venger, lui montrer à quel point elle me décevait, qu’elle me frustrait. À commencer par foutre en l’air ma vie.

Je voulais prendre un joint, mais je me retins de le faire. Mes bras commençaient à s’engourdir tellement mon corps était épuisée. Je disais même à cet inconnu de partir, me sentant tout près d’abandonner mon combat contre le sommeil. Ma vision se troublait peu à peu et j’entendais sa voix résonner. Je ne l’entendais pas très bien en fait. Lorsque je le sentis prendre ma main, je sursautais légèrement, me débattant faiblement avant de finalement abandonner la partie et de me ramasser sur son dos, mon côté droit collé à lui. Je passais faiblement mes bras par-dessus ses épaules avant de sentir mes paupières deveni lourdes. Cette chaleur d’un corps. Cette odeur masculine. Je ne pouvais pas me mentir : tout ça m’apaisait et je ne pouvais pas me retenir de m’endormir ou probablement perdre conscience sur le dos de cet inconnu. Si mon destin était de mourir aujourd’hui, alors que cela se tienne. Je n’allais pas me battre. Je n’en avais plus la force de toute façon…

Honnêtement, je ne savais plus combien de fois que je répétais la même phrase « J’en ai rien à foutre ». Je disais ça pour m’en convaincre que je n’en avais rien à faire. Je n’étais pas une psychopathe qui se foutait de tout. J’avais envie de le faire croire, mais c’était tout le contraire. Ça ne me plaisait pas de faire du mal aux autres, mais j’étais vraiment en colère. J’échappais à tous mes problèmes en consommant, tombant littéralement dans un véritable troue noir.  Je me sentais mal envers les personnes à qui j’ai déverser ma colère. Chaque soir, ça me hante, mais je continue quand même à le faire parce que je suis stupide. Je suis stupide de me laisser entraîner comme ça par ma triste et ma colère. Je suis faible. Faible de ne pas faire face à la vie, préférant me venger d’elle au lieu de la voir comme une future alliée.

Ce jeune homme avait bien la patience et je commençais à baisser les bras. Cette carapace était toujours présente, mais elle ne piquait presque plus. Surtout que je ne tardais pas à perdre conscience une fois installé sur son dos. Je l’entendais à peine me poser une question, ne l’entendant pas très bien et même si j’aurais voulu lui répondre, rien ne sortait. J’étais déjà ailleurs. Dans un monde rempli de cauchemars et malgré ça, je restais toujours endormie. La tempête rageait sur nous, mais je ne me réveillais aucunement. Mon corps ne me répondait simplement plus.

Me sentant déplacé, je grommelais un peu en fronçant mes sourcils, ne sachant plus où j’étais. Je n’entendais plus la tempête. C’était le calme. Malheureusement, je ne pouvais pas ouvrir mes yeux, voguant entre la conscience et l’inconscient. Je finis par retomber endormie, m’agitant en subissant les mêmes cauchemars qui me hantais chaque nuit. Mon corps était raidi, sur le qui-vive. Si quelqu’un me touchait, j’allais répliquer en me réveillant dans un sursaut. J’étais en mode défense comme à chaque fois que je m’endormais dans la rue. Dès que je sentis une présence à mes côtés, je donnais un coup sur cette personne, m'assoyant sur ce truc moue en sortant de ma poche un petit couteau de chasse. « Fait gaffe mec j'ai un couteau... »

Depuis ma rencontre avec ce jeune homme, j’étais sur les nerfs ou plutôt, sur la défensive. Même s’il n’avait pas l’air d’un Yakuza ou d’un membre de gang de rue, je me méfiais quand même. Il ne fallait jamais se fier aux apparences. J’étais très vulnérable en ce moment et j’en étais consciente. C’est pour quoi lorsque je sentais sa présence tout près de moi, je me réveillais en sursaut, pointant ma lame de mon couteau de poche près de sa gorge. « Je me rappel très bien de qui tu es. » J’étais quand même loin de lui, mais j’étais très sérieuse. Je ne savais pas où j’étais, j’avais probablement perdue conscience en chemin. Néanmoins, rien ne semblait être malsain. À ses mots, je me calmais un peu en rangeant mon couteau de poche à sa place, posant mon regard sur les serviettes qu’il m’avait apporté. J’en pris une pour me réchauffer, frigorifié. Je le regardais aller dans sa cuisine, fronçant légèrement mes sourcils. « Pourquoi ? » Oui, pourquoi il prenait soin de moi cet inconnu ? Après les nombreuses tentatives à le repousser, il s’entêtait à quand même prendre soin de moi. Je ne comprenais pas. « Pourquoi est-ce que tu m’as amené chez toi ? Tu ne me connais pas. J’aurais très bien pu te faire du mal. » Quoiqu’il aurait pu le faire bien avant que j’en ai le temps. Néanmoins, il ne semblait pas du tout ce genre. À force de l’observer, je commençais à me détendre de plus en plus, sentant mon corps devenir faible. J’étais tellement crispé d’inquiétude, de colère, de tristesse que mon corps répondait en étant sur les nerfs. N’étant plus dans la rue sous cette pluie battante à regarder autour de moi par prudence, mon corps relaxait enfin. Serais-je capable de dormir ? Ça, c’était autre chose.

Fixant le vide, je relevais ma tête lorsque le jeune homme me demandait si je voulais des Ramyuns. Je le regardais un moment avant de secouer ma tête. J’allais probablement être malade si j’essayais d’avaler quelque chose. « Non, je n’en veux pas. » Au fur et à mesure que la cuisson se faisait, mon ventre commençait à crier famine pour une fois. C’était bien rare que j’eusse faim. Grelottant, je tirais un peu plus sur les serviettes pour me réchauffer, me positionnant en petite boule sur le coin du divan. D’ailleurs, celui-ci allait être tout trempé. Je me levais et m’assoyais faiblement parterre, en indien, essayant de trouver un peu de chaleur.

Je me demandais sérieusement pourquoi il s’entêtait à prendre soin de moi alors que je l’ai repoussé tellement de fois, sans compter que je viens tout juste de le menacer avec un couteau de poche. À sa réponse, j’esquissais un léger sourire en coin, amusée. « En tout cas, t’es borné comme mec. » Dis-je en grelottant. Mes parents m’avaient bien élevé, seulement, j’ai choisi la mauvaise voix. Jaxon et moi, nous nous étions enfoncés dans un monde qui n’était pourtant pas le nôtre. Je l’avais transformé en un monstre dans ses derniers moments. Il aurait pu être une meilleure personne et aujourd’hui, il ne serait pas décédé. J’avais été stupide de nous entraîner chez les Yakuzas. En tout cas, je n’avais pas été autant impliqué avant de rencontrer Jaxon.

Je refusais son offre même si mon ventre criait famine soudainement. J’étais trop orgueilleuse en ce moment pour accepter de manger quoique ce soit. Descendant du divan pour ne pas mouillé celui-ci, j’entendais le jeune homme me proposer de prendre une douche. Ce n’était pas une mauvaise idée. J’avais beau dire que je n’avais rien à foutre de tout, mais en réalité ce n’était pas le cas. Je me levais donc en prenant appui sur le divan et serra la serviette autour de mon cou, regardant le brunet. S’il me touchait, il allait sévèrement le regretter. Tôt ou tard. « De toute façon, je sais bien me défendre. Tu en as eu une petite expérience. » Il était probablement plus fort que moi et je ne pourrais absolument rien faire contre lui. À l’observer, je ne crois pas qu’il tenterait quoique ce soit. Néanmoins, j’allais rester sur mes gardes.

Marchant, je regardais autour avant de voir la salle de bain. Il avait été bien gentil de me prêter des vêtements pour me garder au sec. Encore-là, je refusais de le remercier par orgueil. Je fronçais plutôt mes sourcils et entra dans sa salle de bain, le regardant en lui jetant un regard qui voulait tout dire : je t’ai à l’œil. Je fermais la porte et retira mes vêtements trempés, frissonnant avant de me glisser dans la douche, allumant l’eau. J’ouvris davantage la chaleur et me réchauffais doucement. Je regardais partout dans la douche, ayant toujours un œil sur la porte avant de constater qu’il n’y avait que des trucs pour hommes. Il était probablement célibataire. Je soupirais longuement et décida de me frotter le plus possible avec simplement l’eau de la douche. Je ne voulais pas utiliser son shampoing, encore moins son savon. J’optais donc pour un nettoyage au naturel.

Après une demi-heure, je finis par sortir, tordant mes cheveux et me sécha avec les serviettes. J’enfilais les vêtements qu’il avait déposer sur le comptoir, me sentant mal à l’aise de ne pas porter mes sous-vêtements. Ils étaient trempés. Soupirant, je sortis finalement de la salle de bain et serra son chandail que je portais, celui-ci allant jusqu’à mes genoux. Passant une main dans mes cheveux, je sentais la bonne odeur de la bouffe et décida finalement d’accepter son offre. « J’en prendrais s’il t’en reste… » Dis-je en retournant me blottir sur le divan.

« On me le dit souvent » Il était au courant, c’était déjà ça. J’avais également des défauts. Des tas de défauts et j’en étais bien consciente. Quelqu’un qui ne l’étais pas ou qui ne l’assumais pas, ça me tapait sur les nerfs. Quant à lui, il semblait bien l’accepter. C’est pour quoi je restais silencieuse, ne lui lançant pas de pique. Habituellement, je provoquais les gens, mais je n’en avais pas envie avec lui. Après tout, je lui devais un peu de ma gentillesse après tout ce qu’il faisait pour moi. Néanmoins, je l’avertissais de ne pas tenter quelque chose. Il ne semblait pas vraiment terrifié, seulement blasé par mon comportement aussi agressif. J’étais comme un chiot qui aboyait et qui montrait les dents, mais je n’attaquerais pas. Enfin, je n’en avais pas la force et ce jeune homme ne le méritais pas. J’avais quand même conscience du bien et du mal, alors il ne méritait pas de recevoir autant d’agressivité de ma part.

Me calmant finalement sous la douche, je retrouvais un peu de ma sérénité, chose qui était devenue bien lointaine chez moi. Je n’étais plus la Maya que tout le monde connaissait. J’étais devenue pire qu’avant. Je ne me reconnaissais plus, mais à quoi bon travailler sur moi lorsqu’on avait tout perdu ? certes, mes parents étaient toujours là et je les aimais énormément, mais l’amour d’un homme était bien différent de l’amour des parents. Émergeant de mes pensées en humant l’odeur de la bonne bouffe en sortant de la salle de bain, je décidais finalement de manger. Mais pour le moment, j’allais m’installé dans son salon, m’assoyant sur son canapé en me blottissant contre un coussin. Je le voyais venir avec son plat, le déposant sur la table basse. Je restais dans mon coin, le laissant commencer à manger. Je mangerais ce qu’il reste, même s’il me proposait de manger. J’allais attendre et de toute façon, il se présentait et je décidais de faire de même. C’était la moindre des choses que je puisse faire en ce moment.

« Maya… »

Lentement, je commençais à accepter son aide. Quoique ce n’était pas encore ça. Néanmoins, j’étais devenue moins agressive, me perdant dans mes pensées en fixant le plat. J’entendais et voyais toujours des souvenirs, mais surtout le fameux souvenir qui m’avait marqué à vie. Le coup de feu, les cris, mes cris, le dernier respire de Jax, son sang, son sang partout sur moi, son regard vide, son corps devenant froid. Tout ceci ne cessait de me hanter, comme si on repassait en boucle un filme à plein volume.

Honnêtement, j’étais partagé par toute sorte d’émotion qui se chavirait l’un par-dessus l’autre. Je ne savais plus comment réagir face à autant d’aide. J’avais tendance à repousser pour je ne sais aucune raison. Probablement mon moyen de crier à l’aide. Ma carapace ayant tellement été endurci depuis ce dernier mois que plus rien n’était pénétrable. Enfin, presque. Et c’est justement le comportement gentil de ce jeune homme qui me déstabilisait, n’y voyant que négatif. Voir que quelqu’un prendrait sous son aile une jeune femme délabré provenant de nulle part qui se traîne sous la pluie et qui emmerde tout le monde sur son passage. Il me déstabilisait. Ça, je ne pouvais pas le nier.

Je sortis de mes pensées lorsqu’il m’annonça qu’il avait terminé de manger. Il était sur son téléphone à se distraire. Je devais avouer que l’atmosphère était pesante et je n’aidais en rien à l’améliorer. Lentement, je me glissais au sol, sachant que je risquais de faire tomber le bol sur le divan et créer davantage de problème. Je m’assoyais donc au sol, me servant un peu. L’odeur était délicieuse. Je me penchais vers l’avant et prit une bouchée. Je mastiquais un bon moment, cherchant à avaler, mais tout était bloqué par les émotions. Je réussis finalement de peine et de misère, passant près de m’étouffer. Je toussotais un peu, gardant toujours mon regard sur le plat. « C’est bon… » Je ne mentais pas. Ce n’était peut-être pas la meilleure chose au monde, mais ce n’était pas du tout désagréable à manger. Je tentais une seconde fois de manger, avalant difficilement. « Je… Je crois que je ferais mieux d’y aller… » J’avais de la difficulté à manger et l’atmosphère était pesante. Je regardais dehors. Le déluge frappait aux fenêtres, mais ça m’importait peu. Je me levais, prenant le bol et alla le porter dans levier, le nettoyant. Heureusement que je n’en avais pas pris beaucoup, sinon j’aurais gaspillé.