Tenue ★ Le sentant se crisper alors qu’elle ne faisait qu’imiter ce qu’il lui avait fait subir, les commissures de ses lèvres s’étirèrent davantage en un sourire amusé. Avant, elle lui aurait lâché la main pour lui permettre de retrouver sa petite bulle de confort, son petit espace vital, mais pas ce soir car elle ne se sentait pas capable de rassembler ce courage sorti de nulle part en lui redemandant s’il voulait de nouveau lui emprunter sa main. Il l’avait dit lui-même, il ne voulait pas qu’elle lui parle comme à un gosse, autant ne pas s’en donner l’occasion. « Mais n’as-tu jamais souhaité pouvoir courir de nouveau ? » Abandonner cette béquille qui représentait ce passé dont il n’arrivait à se défaire. Il s’en était accommodé, mais cela restait un poids, une ombre qui le restreignait dans sa propre liberté. Uriyel n’avait pas besoin de lui demander de qui il faisait référence, elle devinait ce mot longtemps tabou dans la famille des Beckford. Plutôt que chercher davantage d’explication dans les inédits qu’il lui soufflait, elle ne faisait que lui retourner sa propre question. « Pas grand-chose je t’avoue, mais juste que tes sourires… ont l’air triste. » Chuchota-t-elle doucement, s’amusant à chatouiller le dos de la main d’Ethan en lui répondant avant de décoller ses lèvres pour ajouter. « Enfin, quelque chose du genre. Bizarre, non ? » Elle ne saurait réellement lui expliquer cette sensation qu’il lui donnait, si bien qu’elle s’attendait même à le voir se mettre davantage sur la défensive voire même à la traiter d’idiote. Pouffant doucement de rire à sa remarque, elle n’avait jamais envisagé pareille carrière. Après avoir terminé ces études en la matière, elle comptait changer de cursus histoire de fuir le monde du travail le plus longtemps possible. « Je n’ai pas cette prétention voyons, et puis je doute de pouvoir changer quelqu’un… Et puis, je t’avouerais que… changer comme ça parce qu’on me le demande, me ferait peur. Qu’est-ce que je ferais si je devenais quelqu’un que je n’aime pas être ? » Elle connaissait sa propre réponse, en voulant changer sous la pression de son père, elle n’avait fait que se détester davantage, se détruire à petit feu et elle avait finir par blesser ceux à qui elle tenait. « Dormons, j’ai vu l’aubergiste sortir des pelles avant d’entrer dans la chambre. » Prétextant de vouloir s’étirer, elle lui lâcha finalement la main.

Tenue ★ Voilà que sa fiancée se lançait dans des métaphores qu'il n'était pas certain de réussir à comprendre. Enfin, il avait plutôt envie de jouer à l'idiot et d'ignorer totalement où elle essayait de l'emmener. À sa question, il se contenta de secouer la tête. Il doutait pouvoir recourir un jour comme disait Uriyel. Le boulet qu'il traînait était plus lourd que ce qu'elle imaginait. Bien sur, elle savait que sa mère était partie du jour au lendemain sans rien dire. Tout le monde était au courant de cette histoire. Elle pensait que tout venait sûrement de là. Mais tant de facteurs entraient en fait en compte. L'enfer qu'il avait vécu auprès de son père, la violence de ce dernier, son adolescence tourmentée, la rupture avec son ex. Il n'avait pas du tout envie de lui parler de tout ça. Il ne comptait pas le faire un jour. C'est pourquoi il ressortit un peu les griffes histoire de la repousser. Mais encore une fois, sa réponse le désarma. Elle trouvait ses sourires tristes ? On n'avait même jamais fait attention à ses sourires, comment pouvait-elle y détecter quelque chose ? Il passa sa main libre dans ses cheveux pour les ramener en arrière pour éliminer sa nervosité. « Parce que tu fais attention à ça ? » Il baissa les yeux sur les lèvres de la demoiselle qui frôlaient le dos de sa main et lui déclenchaient quelques frissons pas désagréables. Comprenant où elle voulait en venir, il soupira néanmoins. Une femme plus sensée aurait répondu autrement. « Si tu n'étais pas aussi bête, tu aimerais que je change. Ou alors peut être que tu espères secrètement que tu vas transformer le bad boy en parfait petit fiancé ? » L'ironie dans sa voix montrait qu'il ne pensait pas ce qu'il disait. Il commençait à la connaître et quelque chose lui murmurait que cette solution n'avait jamais fait partie de ses plans. Uriyel finit par lui lâcher la main et l'anglais dissimula tant bien que mal sa déception. « Ouais, dors bien. » Il se tourna alors de l'autre côté de manière à lui présenter désormais son dos. Petit à petit, il reprenait ses distances et replaçait ses barrières correctement. Après quelques minutes à regarder dans le vide, il finit par s'endormir.

Tenue ★ Même loin de son confort habituel ou plutôt du canapé qu’elle squattait en guise de lui, Uriyel plongea rapidement dans un sommeil profond, sans rêve. Ce fut bien avant le premier chant du coq qu’elle se réveilla, s’étirant doucement et longuement dans la chambre encore plongé dans l’obscurité, elle jeta un regard amusé en direction de son fiancé. Rehaussant sur lui sa couette, elle quitta son futon pour fouiller dans son sac et sortir avec sa trousse de beauté. Minutieusement, elle ouvra la porte et la referma derrière elle, laissant le bel endormi sommeiller plus longtemps. Saluant l’aubergiste qui était déjà levée, elle se dirigea vers le petit robinet au fond du jardin pour se rincer le visage, se brosser les dents et tenter de se réveiller davantage. « Aiish, toujours pas levé à cet heure-ci ? C’pas comme ça qu’il va nourrir sa famille. » La brune se contenta de passer sa main dans ses cheveux, ne sachant pas réellement quoi y répondre et surtout, rien qu’en repensant à leur conversation, cela commença à l’embarrasser. « D’ailleurs, vous ne vouliez pas que je vous aide justement ? Pour votre… potager ? » « Vu la taille, c’est plus un potager mais un champ, suis-moi, c’est juste derrière. » Restant immobile quelque instant, perdue dans ses pensées, elle se décida néanmoins à retourner dans la chambre voire si Ethan était levé, mais voyant que ce n’était pas le cas et soudainement nerveuse, elle se résigna à le laisser ainsi. Vêtues dans des vêtements plus confortables bien qu’extrêmement démodée, elle fut rapidement armée d’un panier d’osier pour y mettre les mauvaises herbes arrachées, avant de retourner la terre et planter de nouvelles graines. « Je vais aller lever ce bon à rien ! Il va bien m’entendre ! » Elle n’eut pas le temps de répliquer que l’aubergiste disparut.

Tenue ★ Depuis longtemps, Ethan ne parvenait plus à profiter d'un sommeil de qualité. Il souffrait d'insomnie ou se réveillait à plusieurs reprises au cours de ses nuits. Mais là, loin de son confort habituel, il s'endormait avec une rapidité étonnante et sombra dans les bras de Morphée. Il ne rêva pas mais bénéficia d'un sommeil des plus réparateurs. Si bien que le matin, alors que sa fiancée s'éclipsait de leur chambre, il dormait encore à poings fermés. Il ne s'attendait certainement pas au réveil brutal que lui réservait l'aubergiste. Celle-ci débarqua avec grand fracas mais tira en plus sur ses couvertures d'un coup sec. Ethan frissonna sous cette fraîcheur soudaine mais n'ouvrit pas encore les yeux. Il fallut qu'elle se mette à hurler pour qu'il se redresse enfin. « Debout là-dedans ! On a pas idée d'être un tire-au-flanc pareil, non mais quel honte. Votre petite dame travaille déjà. » Elle lui décocha plusieurs petites tapes derrière la tête qui finirent de le tirer du pays des songes. Assis sur son futon, il se frottait les yeux en grognant. La bonne femme finit par disparaître et il dut résister à l'envie de se recoucher. Sans savoir d'où il tirait cette force, il se leva pour enfiler un jogging gris et un sweat noir ainsi que ses affaires de toilettes. Il passa rapidement par le petit robinet du jardin pour se rincer le visage et se brosser les dents. Les yeux à peine ouverts, il ne parvenait pas vraiment à se réveiller. Il ramena sa trousse dans la chambre puis retrouva enfin sa fiancée. « 'jour. » Souffla-t-il l'air endormi. Il avait de petits yeux et ses cheveux partaient dans tous les sens. Sur sa joue, on trouvait encore la marque de l'oreiller. Dès que l'aubergiste disparut après lui avoir livré ses consignes, il poussa un long soupir puis croisa les bras et bailla. « Hors de question. » Il espérait qu'Uriyel comprenne par là qu'il ne comptait pas mettre la main à la patte. Il dormait encore debout et cela le rajeunissait drôlement, lui donnant l'air juvénile d'un adolescent rebelle. Il possédait même la mauvaise humeur matinal qui s'accordait avec cette image.

Tenue ★ Relevant son petit chapeau de paille, plus décoratif qu’utile vu la timidité des rayons de soleil, un sourire illumina gauchement son visage lorsqu’elle vit la silhouette d’Ethan entrer dans son champ de vision. Sa tenue et surtout sa démarche lente et un peu vacillante, nul besoin d’être devin pour comprendre qu’il avait encore du mal à émerger. « Oh, te voilà ! Bien dormi ? » Elle ne put s’empêcher de glousser doucement quand elle repensait à la petite crise qu’il avait fait en découvrant l’absence de lit. Et ce même gugusse qui s’était indigné de n’avoir pas de couche digne de son nom, avait dormi comme un loir. « Ce n’est pas à moi qu’il faut dire ça » fit-elle amusée de constater le super pouvoir qu’avait la vieille dame sur son fiancé. Finalement, elle considérait que c’était peut-être une bonne chose que cette dernière soit partie le réveiller, si elle avait essayé de le faire, il avait peu de chance qu’il se daigne à se lever ou la suivre jusqu’ici. Même si une vingtaine de pas les séparait, elle n’avait pas besoin d’être face à lui pour deviner l’expression refrognée qu’il tirait. C’était typiquement lui. « Plutôt que rester planté là comme un piquet en attendant qu’elle revienne, approche. » D’un geste de la main, elle l’invita à la rejoindre avant de se reconcentrer sur ce qu’elle faisait. La vieille dame lui avait dit de désherber une rangée fraisier sauf qu’en s’activant à faire son travail, elle avait fait une petite découverte. Prise d’un brin d’impatience en le voyant encore tout mollasson, elle se leva, faisant craquer ses articulations, pour lui dévoiler ce qu’elle venait de cacher dans son dos, le mettant tout juste sous ses yeux. « Regarde… je t’ai trouvé ! » Un petit hérisson qui ronronnait doucement par les balancements qu’elle décrivait de ses deux mains pour le dorloter un peu après l’avoir extirper de sa cachette.

Tenue ★ Pour toute réponse, Ethan se contenta de hôcher la tête. Il appartenait à cette catégorie de personnes ayant besoin d'un certain temps pour se mettre en marche le matin. De même qu'il était plutôt de mauvaise humeur au réveil et qu'il valait mieux éviter de trop lui parler. Il passa sa main dans sa chevelure désordonnée et bailla une nouvelle fois en marmonnant des paroles incompréhensibles. Il pestait bien sur contre l'aubergiste et le travail qu'on lui demandait de faire alors qu'il venait de se lever. « Jamais. » Lâcha-t-il alors qu'elle l'invitait à s'approcher. Il l'imaginait déjà lui refourguer du boulot et Ethan n'avait aucunement l'intention de mettre la main à la pâte. Si bien que lorsqu'elle vint à lui, il recula d'un pas en se questionnant sur ce qu'elle voulait. Après les événements de la veille, il préférait garder ses distances avec la brune. Heureusement qu'elle se comportait comme s'il ne s'était rien passé, ça évitait le malaise de son côté. Puis pouf, sous ses yeux se trouvait à présent un hérisson que sa fiancée tenait entre ses mains. Ethan cligna des yeux plusieurs fois alors qu'il était nez à nez avec la bestiole puis fronça les sourcils. « Attends, tu viens pas vraiment de me comparer à ce truc ? » Bon d'accord, il devrait plutôt le prendre comme un compliment, non ? La petite bête était adorable après tout. Et malgré ce qu'il venait de dire, il la prit entre ses mains à son tour. Il l'observa d'un peu plus près ne se souciant dès lors plus vraiment du reste. « Tu crois que c'est un bébé ? » Avec son air endormi et sa question, Ethan ressemblait à présent à un gamin. L'air de la campagne lui faisait décidément du bien.

Tenue ★ La méfiance d’Ethan qui s’exprimait par un refus catégorie la fit sourire, sourire bien qu’un peu exaspérée. Avait-il passé sa vie à être trompé pour penser que tout le monde cherchait à la duper ? Qu’importe, s’il refusait de venir vers elle, elle pouvait simplement fouler cette distance qui les séparait pour le trouver. C’était aussi simple et puis, le voir aussi sensible, l’amusait tout comme la rassurait. Il n’y avait pas qu’elle qui trouvait les évènements de la nuit dernière, bizarre. Non pas qu’elle aurait voulu les effacer, mais se fixer dessus rendrait les choses encore plus étranges. « Pourtant…N’est-il pas trop mignon ? » demanda-t-elle d’une voix flûtée et amusée de voir le contraste qu’il y avait entre ses mots et ses actions. Le sourire d’Uriyel s’étira davantage lorsqu’il prit délicatement entre ses mains la petite boule de pique. « J’imagine, mais il était tout seul dans le trou », elle hausse les épaules, peut-être avait-t-il passé l’âge de faire sa vie tout seul ou que maman hérisson était partie sans pouvoir revenir. « Tu voudrais en faire quoi ? Enfin… on pourrait tout de même lui trouver un petit nom. » Levant les yeux pour regarder quel genre d’expression pouvait tirer Ethan, elle remarqua alors sa tignasse toute ébouriffé. « Bouge pas, t’as une feuille coincée dans les cheveux », levant la main, elle attrapa rapidement celle-ci et la lui montrer. Après tout, il pourrait penser qu’elle voulait juste en profiter pour le toucher, mais ce n’était pas le cas. Ou presque, mais ça, elle se garda de le lui dire. « Dis-moi, t’en as des épis sur la tête, nouvelle coiffure ? » Avant qu’il ne puisse réagir, elle lui attrapa la main pour y glisser les fraises qu’elle avait récolté et qu’elle comptait déguster toute seule plutôt que les mettre dans le panier. « Faut que j’y retourne. »

Tenue ★ Ethan n’appréciait pas particulièrement les animaux. Il manquait souvent de délicatesse et de tendresse pour les approcher. Son chat demeurait le seul à le tolérer même si ces derniers temps il le trahissait pour se faire cajoler par Uriyel. Néanmoins, il faudrait être totalement insensible pour ne pas craquer devant la minuscule bestiole qu'il tenait désormais entre ses mains. Bon d'accord, on pensait souvent qu'il était dépourvu de cœur mais ça n'était pas le cas. Il grimaça quand elle décréta que le petit hérisson était mignon et par assimilation lui aussi. Il choisit de ne pas répondre. Il n'avait pas envie de relever ça. Surtout après leur discussion de la vieille. Il préférait éviter toute situation s'y rapportant ou y ressemblant. « Le pauvre. On l'a abandonné. » Souffla-t-il soudain plein de sympathie pour le minuscule être qu'il dorlotait. Mais il secoua la tête quand elle proposa de le baptiser. « Et puis quoi encore ? Après tu vas vouloir le ramener. À ce rythme tu vas transformer mon appartement en véritable ferme. » Il faisait bien sur référence aux écureuils. Il déposa le hérisson par terre et le poussa légèrement pour lui intimer de s'éloigner. Quand il se redressa, il se retrouva face à Uriyel qui le débarrassait d'une feuille parasite. Il passa ensuite ses doigts dans ses cheveux indisciplinés. « Tu veux pas arrêter de me materner ? » Et voilà qu'elle se moquait de son allure matinale. Il leva les yeux au ciel comme un gamin consterné. « T'es chiante. Retourne travailler. » Mais avant ça, elle lui glissa des fraises dans la main et Ethan ne put retenir un petit sourire. Il adorait ça. D'ailleurs, même si elles n'étaient pas nettoyés, il en fourra une dans sa bouche après l'avoir un peu frottée contre son haut. « J'ai vraiment pas envie de faire ça. » Et par magie l'aubergiste apparut derrière lui le faisant sursauter. « Voilà qui tombe bien mon petit parce que j'ai un autre boulot à te confier. » Ethan jeta les fraises dans le petit panier et enfonça ses mains dans ses poches avant de la suivre. Un peu plus loin, la bonne femme le chargea de déplacer jusqu'à une remorque des dizaines de gros sacs de graines. Autant dire qu'il se mit à suer plus rapidement que prévu, il se débarrassa donc de son sweat pour rester en t-shirt. Après les sacs, ce fut au tour de longues planches en bois. Il se demandait bien à quoi elles allaient servir mais s'exécuta sans broncher. À la fin, il retira carrément son t-shirt et épongea son visage avec tout en retournant auprès d'Uriyel maintenant qu'il n'était plus surveillé. « Franchement, je déteste la campagne. Je déteste mon père aussi et ses idées à la con. » Il râlait encore et toujours. « Tu as bientôt terminé ? Je commence à avoir faim. » Il commença ensuite à passer le tissus sur son torse humide sans même regarder la brune. Parce que oui, il était à l'aise avec son corps.

Tenue ★ Si la veille il semblait avoir fait un pas vers elle, présentement il donnait l’impression d’avoir reculé de trois voire même davantage. Pour autant, la situation était loin d’exaspérer Uriyel, bien au contraire, cela lui donner la possibilité de souffler et faire du tri dans son esprit. Néanmoins, elle ne pouvait pas rester indifférente, le titiller, bien que légèrement, la tentait plus que tout. Même si parfois, le comportement d’Ethan la laissait perplexe, comme cette fixation qu’il semblait avoir à ne pas vouloir être traité comme un enfant. « Que dois-je faire dans ce cas ? Laisser tes épis se faire la guerre toute la journée ? » Un rire amusé résonne tandis qu’un sourire moqueur se dessine sur ces lèvres, elle recule tout en faisant face à lui, histoire de l’ennuyer jusqu’au bout, de faire la chieuse. «Tout aussi agréable que toi j’imagine. Gambatte à toi aussi ! » Lança-t-elle en voyant l’aubergiste arrivée, agitant la main elle pivota sur ses talons pour s’accroupir et arracher les mauvaises herbes tout en faisant sa petite récolte.

« Ethaaan… » fit-elle d’une très petite voix en levant la tête lorsqu’il s’arrêta à côté d’elle, d’elle accroupie. Prenant un air pitoyable, cherchant la compassion de son fiancé, elle fit papillonner ses longs cils tandis qu’elle gonflait ses joues ou du moins, avalait les fraises qu’elle goûtait pour la énième fois. Si lui avait bien sué en travaillant, au point d’en retirer son haut, c’était loin le cas d’Uriyel qui s’était bien empiffrée. Elle lui montra le panier à moitié rempli de fraise, alors qu’il lui restait encore une ligne à faire sur trois. Elle était supposée remplir cinq paniers, mais seuls trois l’étaient et le quatrième en était encore loin. « Tu crois qu’elle va le remarquer ? » Si jusqu’à présent, elle s’amusait d’observer les interactions de son fiancé avec la vieille aubergiste, pour autant elle ne voulait pas que le contraire s’appliquer. Se lever, elle attrapa une fraise, soigneusement nettoyé, et la bourra dans la bouche de partenaire. « Te voilà complice à présent ! », il suffisait qu’il ouvre la bouche de nouveau pour qu’elle lui en rajoute une nouvelle.  

Tenue ★ Même si ça ne l'enchantait pas, Ethan se tua à la tâche. Soulever de gros sacs puis des planches, ça ne l'enchantait pas vraiment mais il obéissait aux ordres de l'aubergiste qui surveillait son travail. Au bout d'un moment néanmoins, elle l'abandonna en lui annonçant qu'il fallait qu'elle commence à préparer à manger. Il pouvait enfin souffler. Il retira son t-shirt pour éponger la transpiration et se dirigea en même temps vers Uriyel pour pester, ce qu'il faisait de mieux. Il baissa ensuite les yeux pour observer les paniers qui avaient été confiés à sa fiancée et ne put s'empêcher de sourire en remarquant qu'ils n'étaient pas remplis comme ils le devraient. Un sourire amusé qu'il ne parvenait pas à masquer ou à annuler. Il pouffa même de rire. « C'est même sur. Pour une fois, c'est à toi qu'elle va tirer les oreilles. » Quel plaisir de se moquer d'elle. Comme pour rajouter une couche, il lui balança son t-shirt humide au visage sans s'arrêter de rire. Uriyel profita même de cette faille pour lui enfoncer une fraise dans la bouche. Les joues gonflées, il savoura le fruit et s'essuya les lèvres avec le dos de sa main. « Non, j'ai travaillé dur moi ! » Il appuya sur le moi et se désigna avec son index avant d'ouvrir à nouveau la bouche pour accueillir une nouvelle fraise. Il étouffa un rire, la bouche pleine, alors qu'il entendait l'aubergiste les appeler. « Allez viens, montre-lui que tu m'aimes. » Il ramassa son t-shirt et passa son bras autour des épaules d'Uriyel pour l'attirer contre son torse humide. Comme d'habitude, Ethan passait d'un extrême à l'autre. Désormais d'humeur taquin, surtout dans l'espoir d'emmerder sa fiancée et de l'embarraser en fait, il la serra un peu plus fort.

Tenue ★ Se mordillant l’intérieur de la joue pour ne pas rire, tellement son fiancé était enthousiasmé à l’idée qu’elle puisse se faire tirer les oreillers par l’aubergiste, Uriyel fronça les sourcils pour montrer un semblant d’inquiétude à la perspective de se faire réprimer. Elle n’eut le temps de répliquer ou de lui balancer sa mini-tirade pour tenter de chercher sa compassion et qui sait, sa protection, qu’il lui balança son tee-shirt au visage. Émettant un grognement rauque, elle l’attaqua à coup de fraises, après tout, ce dernier semblait aimer ce fruit conique à chair rouge. « Oooh, c’est vrai ? Je suis fière de toi » fit-elle sur un ton moqueur et amusé, avant de lui faire manger des fraises à la chaîne. Son seul regret était de ne pas l’avoir vu à l’œuvre car c’était le genre de scène typiquement improbable, la vieille dame avait un sacré coup de baguette pour pouvoir diriger Ethan de la sorte, sans qu’il puisse lui balancer ses piques ou son haut. Mine de rien, elle sursauta en entendant s’élever la voix de l’aubergiste, elle était vraiment dans la panade, surtout avec un partenaire près à la balancer. « Pourquoi je devrais… » Surprise, elle lâcha le panier de fraise qu’elle tenait et se figea. Parce qu’il était imprévisible, elle s’était amusée à voir jusqu’où elle pouvait aller vers lui sans qu’il ne la rejette brutalement, mais jamais elle n’avait envisagé la possibilité que ce soit lui, qui vienne soudainement à elle. Souffle coupée, elle se raidit davantage lorsqu’il la serra encore plus. Il s’amusait à ses dépens sans chercher à savoir ce qu’elle pouvait ressentir, et généralement, elle était impassible mais là, c’était clairement différent. « Mais t’es tout collant ! » s’exclama-t-elle sans crier non plus, grimaçant en commençant à s’agiter pour se défaire de cette soudaine emprise, mais il était têtue et elle, elle ne savait pas où poser ses mains pour le repousser. « Pourquoi moi ? C’toi qui devrait être content de me retrouver après avoir si durement travaillé » elle haussa ses fines épaules, ne sachant toujours pas où poser son regard. Se hissant sur la pointe des pieds, elle lui embrassa la joue. « Maintenant, j’ai quoi en échange ? »

Tenue ★ Imprévisible. Oui, c'était sans doute le bon mot pour décrire Ethan Beckford. On ne pouvait jamais lire dans son esprit ou prévoir ses actions à l'avance. Il passait constamment d'un extrême à l'autre. C'était sans doute pour ça que tout le monde ignorait comment se comporter avec lui. Sa mauvaise humeur matinale passée, débridé par l'air de la campagne, il choisit de taquiner Uriyel. Leur séjour ici renforçait de manière considérable leur lien et Ethan ne pensait plus à ce mur qu'il avait construis pour la tenir éloignée. Il éclata de rire en l'entendant râler puis en la voyant se débattre. Il trouvait ça mignon. Mais pour l'empêcher de lui échapper, il passa son deuxième bras autour de ses épaules. Elle était totalement prise au piège, encerclée même par le Beckford. « Justement, c'est ton rôle de soulager ton futur époux qui a travaillé siii dur. » Ce qu'il n'avait néanmoins pas prévu, c'était que la brune réussisse à le désarmer. Lorsqu'il sentit ses lèvres sur sa joue, il se figea un peu, les yeux grands ouverts. Tel est pris qui croyait prendre. Uriyel le surprenait à chaque fois. Comment faisait-elle ? Quand il pensait réussir à tout contrôler, elle lui prouvait le contraire. Et oui, peut être bien que son cœur avait raté un battement, ou même plusieurs, à ce moment là. Il éprouva même une certaine difficulté à avaler sa salive. Il baissa doucement la tête jusqu'à croiser son regard. Il ne dénoua pas ses bras d'autour de sa nuque et choisit de prendre ça comme un défi. Il se pencha un peu pour déposer un baiser sur le bout de son nez puis recula à nouveau son visage. « Ça te va ? » Peut être qu'il cherchait à la tester ? C'était la seule explication logique à son comportement. Et dans un sens, c'était le cas. Il voulait voir comment elle réagissait face à lui, face à une telle proximité. Est-ce que ça la dérangeait ? Avait-elle envie de le repousser ? Il s'attendait à ce qu'elle prenne la fuite en fait. Parce qu'il avait toujours autant de mal à comprendre qu'une fille comme elle perde son temps avec un type comme lui.

Tenue ★ Naïvement, elle pensait que cela aurait suffi pour l’embarrasser suffisamment pour qu’il arrête, mais elle ne s’attendait pas à ce qu’il renchérisse. Jusqu’à présent, ça le figeait. Uriyel réalisait qu’elle l’avait sous-estimé, lui et cette humeur taquine qui lui collait soudainement à la peau. Fronçant davantage les sourcils comme pour tenter de le contrôler afin de ne pas laisser transparaître son trouble, elle le scrute avec incrédulité alors qu’un sourire en coin s’étirait sur ses lèvres. Amusée par la situation, sans savoir comment réagir néanmoins. Pensait-il réellement la désarçonner ? Il l’avait déjà fait, et brillement. Non pas par ce geste déconcertant et cette proximité presque dérangeante dans la mesure où elle ne s’était jamais retrouvé dans un tel face à face avec lui, mais surtout la spontanéité qui se cachait derrière ce soudain baiser. Lui qui s’amusait à tenter de la manipuler pour l’ébranler, et espérer la faire fuir, la désarmait par l’absence de calcul. Entrouvrant les lèvres à deux reprises pour ensuite les refermer, elle soupira « Pourquoi tu me copies ? Tricheur ! » Sa voix est forte, pour mieux dissimuler sa gêne grandissante. Elle lui avait embrassé la joue et il lui répond en faisant de même mais sur le bout du nez. Pas grand-chose en soi, mais il y avait quelque chose qui changeait entre eux. La brune ne saurait pas dire quoi exactement, ou si c’était simplement le fruit de son imagination un peu fleur bleue car l’air de la campagne la rendrait plus… insensée ? Mais dans tous les cas, elle avait de plus en plus de mal à rester aussi impassible qu’auparavant. Surtout quand il agissait de la sorte, quand la proximité ne se réduisait à presque rien. Il la piquait, mais pas avec les mots. « Ça m’va absolument pas ! » Elle finit par lui pincer le nez en le coinçant entre le pouce et l’index, pour ensuite le lui tirer un peu. Une façon à elle de s’extirper de cette ambiance bizarre et inhabituelle. « Il n’y a que toi qui réclame ça en échange de ton travail » se désola-t-elle en secouant la tête. « Aide-moi plutôt à finir de ramasser tout ça », elle se retenait de lui dire : sois-sage et aide-moi. Pour mettre fin à ce jeu, elle lui tapota doucement le dos de sa main, pour lui dire de la lâcher.

Tenue ★ Ethan jouait depuis toujours. Déjà enfant, personne ne résistait à ses caprices. Les gouvernantes craquaient toutes pour sa bouille. Il lui suffisait de claquer des doigts. Il s'était donc très tôt rendu compte de ce pouvoir qu'il possédait sur les autres, sur les femmes en particulier. Ça l'amusait de tirer les ficelles, de les piéger et de les malmener. Mais encore une fois avec Uriyel, c'était différent. Parce qu'il ne parvenait jamais à prévoir ses réactions et sans doute aussi parce qu'il pensait encore qu'elle le détestait. Il ne voyait pas pourquoi elle ressentirait autre chose à son égard. Il la privait d'un si beau rêve, du mariage de princesse fantasmé par les demoiselles de son genre. Sauf qu'à aucun moment depuis le début de cette union arrangée, elle n'avait montré un signe de dégoût ou de rancœur avec lui. Cela le perturbait toujours. Surtout lorsqu'elle le prenait de court ainsi. Lui-même commençait à s'y perdre. Il oubliait de se défendre. Il l'invitait presque à franchir les limites qu'il avait pourtant pris grand soin d'appliquer. Même s'il n'en revenait pas, s'il ne comprenait ce qui le poussait à agir de la sorte, il essayait d'en profiter. Ce n'était pas désagréable. Bien au contraire. Il fronça les sourcils alors qu'elle lui pinçait le nez et secoua la tête pour tenter de se défaire. « T'es jamais contente, putain. » On ne pouvait pas totalement chasser le naturel. Néanmoins, lorsqu'elle le délivra, il ne retira pas sa main comme elle semblait le souhaitait. Il préserva le contact visuel entre eux. Un éclair de malice brillait d'ailleurs dans ses yeux. Ça ne lui convenait pas ? À trop le provoquer, elle risquait de se brûler. Ses doigts encerclèrent la nuque d'Uriyel au milieu de sa chevelure brune et il l'attira vers lui alors qu'il se penchait pour être à sa hauteur. Leurs lèvres s'entrechoquèrent l'espace de quelques secondes à peine. Ethan la relâcha rapidement. Autant choqué qu'elle par son propre élan, mais pas moins amusé. Il se baissa pour ramasser son t-shirt et le renfila. « Termine toute seule, je vais prendre une douche. » Déclara-t-il l'air de rien. Il abandonna Uriyel et disparut de son champ de vision pour effectivement se rafraîchir non sans garder son sourire scotché à sa bouche. Ne songeant pas encore à la gêne qui risquait de naître entre eux pour le reste de leur séjour.

Tenue ★ Depuis le début de cette relation, Uriyel comment à avoir l’habitude de le voir approcher avec cette envie de la tourmenter, de la malmener afin de voir jusqu’où elle finirait par céder, et peut-être partir. Lorsqu’il arrivait, c’était même avec une certaine pointe d’impatience qu’elle attendait de voir ce qu’il lui avait préparé. Ce drôle de jeu s’était installé entre eux, sans qu’ils en donnent explicitement les règles, mais plus ils passaient de temps ensemble, et plus elle réalisait qu’elle perdait la main. Il continuait de la surprendre mais de façon plus inattendue à ce qu’elle avait été habitué. Elle ne savait pas s’il en était conscience lui-même, car elle, elle avait dû mal à garder ce masque d’indifférence. « J’ai eu un excellent professeur en la matière » rétorqua-t-elle en le désignant du menton, un sourire des plus narquois étirant ses lèvres. Pour autant, elle n’aimait pas ces petites lueurs rieuses qui s’étaient allumés dans son regard, c’était mauvais signe. Alors, elle tapotait continuait à lui tapoter le dos de la main avec une certaine impatience. « Yaah ! » bafouilla-t-elle enfin en le dévisageant, le visage s’empourprant de la même couleur que les fraises qu’elle était supposée cueillir. Ce n’est qu’une fois le monsieur partit qu’elle commença à s’agiter, à jurer et finir accroupi, la tête entre ses mains. Elle resta ainsi pendant au moins cinq minutes, avant de continuer son travail, le geste devait mécanique et son esprit hors de son corps.

Quand elle eut terminé, Uriyel ramassa les paniers pour les tendre à l’aubergiste qui lui donna une nouvelle tâche, dresser la table dans la petite cour pour le déjeuner. Si elle accueillit la proposition avec un sourire, celui-ci se fit la malle quand elle se posta devant la chambre qu’elle partageait avec son fiancé. « On mange Ethan, dépêche-toi de sortir » dit-elle d’une voix faible après avoir toqué trois fois, avant de filer vers la cour. Jusqu’à présent, elle ne s’était jamais sentie… aussi embarrassée.

Tenue ★ Une envie ? Une pulsion ? Il ne savait plus trop. Sur le coup, il l'avait fait pour la provoquer. Il essayait régulièrement de la pousser à bout. Il testait ses limites. D'habitude, il se contentait de passer ses nerfs sur elle. Il se montrait exécrable au possible. Mais de plus en plus souvent, il s'amusait autrement. Et à chaque fois, elle le surprenait. Il attendait qu'elle s'énerve, qu'elle s'en aille ou qu'elle claque la porte, mais plutôt que de prendre ses distances, elle saisissait ces occasions pour s'approcher de lui. De petits pas sans même qu'il s'en rende compte. Cela l'embêtait. Cela lui plaisait aussi. Les coups à la porte le ramenèrent sur terre. Il sortit de là et se sécha assez rapidement pour ensuite enfiler des vêtements propres. Un jean et un t-shirt blanc en l’occurrence. Il ne s'habillait jamais si simplement mais à la campagne il n'avait pas besoin de faire un défilé de mode. Il la retrouva dans la cour à dresser la table. Elle semblait éviter soigneusement de le regarder ce qu'il ne put s'empêcher de trouver mignon. Une seconde. Mignon ? N'importe quoi. Elle n'était pas mignonne. Elle était énervante. Ah, l'air d'ici lui renversait le cerveau. « Tu as besoin d'aide ? » Demanda-t-il finalement. Elle n'allait tout de même pas continuer à l'ignorer. Il s'approcha pour l'aider à répartir la vaisselle autour de la table. Il avait les cheveux encore mouillés et la légère brise le fit frissonner. Pour le moment encore seuls, il choisit d'en profiter pour encore l'embêter. « Tu es fâché ? » Il espérait qu'elle comprendrait qu'il parlait du baiser qu'il lui avait plus ou moins volé. Enfin, il était certain qu'elle saisirait l'allusion en fait. Le sourire qui planait sur son visage montrait à quel point il était fier de son coup. Il se glissa même derrière elle, posa son menton sur son épaule, prêt à toujours plus repousser les limites. « Cela ne t'a pas plu ? » Il ne savait pas ce qu'il attendait comme réponse ou réaction de sa part. Il était juste satisfait d'avoir le contrôle de la situation. Du moins, il le pensait.

Tenue ★ Plissant le nez, Uriyel ressassait en boucle la scène sans pouvoir se la sortir de l’esprit. Elle se maudissait de s’être comportée ainsi, d’avoir réagi de la sorte. Ce qui la gênait vraiment entre le baiser ou le comportement d’Ethan ? Elle n’en savait fichtrement rien, mais il arrivait à la charge et ce, à son plus grand désespoir. « Je pensais que tu allais m’aider » murmura-t-elle aussitôt lorsqu’elle sentit ce dernier poser son menton sur son épaule, n’osant pas tourner le visage au risque de s’embarrasser de nouveau. Pour autant, elle fit hausser ses épaules à plusieurs reprises pour l’ennuyer, le taquiner Du moins, au final, c’était elle qui était embêtée bien plus qu’elle pouvait l’agacer. Il se jouait d’elle et elle n’avait pas encore trouvé le moyen de se débarrasser de lui, outre la présence salvatrice de l’aubergiste. Elle se maudissait, d’avoir laissé une porte aussi grande ouverte pour qu’il puisse à présent la tourmenter un peu plus. « Cela te préoccupe tant que cela ? Je ne te savais pas sensible pour ce genre de chose. Serais-tu un peu fleur bleue dans l’âme ? » Uriyel lui retournait cette facette sur laquelle ce dernier aimait insister. Pourtant, jusqu’à présent, elle s’était appliquée à ne rien laisser transparaître de ses attentes, du moins, de lui laisser entrevoir ses idéales de romance. Lui donnant un coup de coude au niveau de l’estomac, elle pivotait sur ses talons pour s’extirper de sa petite emprise et elle se tatait chercher d’autres couverts, encore fallait-il qu’il y en ait. « Oba-saan, veux-tu encore de l’aide ? » s’empressa-t-elle de demander, alors qu’elle l’apercevait à peine. Cette dame ? Un anti-Ethan, cent pourcent certifié. Après le déjeuner, une voiture les attendrait certainement pour les emmener à la capitale. Elle devait faire de patience encore un moment. Juste un petit peu plus, histoire de ne pas se ridiculiser.

Tenue ★ « T'aider ? Sûrement pas. » Il se délectait plutôt de la sentir peut être encore un peu mal à l'aise grâce à son geste déplacé. En même temps, lui aussi se demandait ce qui lui était passé par la tête pour agir ainsi. Mais plus habitué qu'elle à cacher ses émotions, il parvenait à donner l'impression d'être parfaitement calme et nullement perturbé par tout ça. Lorsqu'elle haussa les épaules, sans doute pour se débarrasser de lui, Ethan grogna et contre-attaqua en passant ses bras autour de celles-ci pour l'empêcher de les bouger encore. Il siffla à sa remarque et leva même les yeux au ciel. « Moi ? Tu es la véritable hopeless romantic. Et tu le sais. » Il souffla les derniers petits mots à son oreille avant de faire semblant de se tordre suite à son coup de coude. Mais maintenant qu'il l'avait libéré et qu'elle ne lui portait plus d'attention, il se permit de sourire un peu. Toujours autant amusé par ce bout de femme. Néanmoins, son sourire s'effaça dès que l'aubergiste fit son arrivée. « Oh non mon enfant, j'ai presque fini. » Lâcha-t-elle en déposant le dernier plat sur la table. Elle s'essuya les mains sur sa robe puis pointa de son menton l'héritier. « Il râle beaucoup mais il est plus docile qu'il le pense. C'est comme ça à la maison aussi ? » A ce moment là, Ethan était en train de boire le verre d'eau qu'il venait de se servir et il recracha tout en entendant l'adjectif que la vieille femme avait employé pour le décrire. « Enfin, si vous voulez, je vous donnerai quelques petits tuyaux pour le dompter. Les hommes fougueux ça m'connait. Et si vous voulez mon avis, ce sont les plus passionnés en amour. Quand un homme comme ça vous aime ma p'tite, c'est pour de vrai. » Elle tapota sur l'épaule d'Ethan qui à présent écarquillait les yeux. Il fit signe à Uriyel que cette bonne femme était totalement folle avant d'aller s'installer à la table. Il laissa de la place à ses côtés pour Uriyel et il secoua la tête encore choqué par les propos de la vieille. « Elle raconte n'importe quoi. Moi ? Passionné ? Aucune chance. » Marmonnait-il dans sa barbe tout en servant sa fiancée.

Tenue ★Maintenant qu’il avait réussi à troubler la surface plane de ses sentiments, l’équation lui semblait limpide. Pour l’ennuyer davantage et la faire réagir, il lui suffisait de profiter de son malaise grandissant. Parce que c’était la première fois qu’il réagissait ainsi, Uriyel ne parvenait pas à garder cette expression presque figée qu’elle lui offrait. Soudainement, elle se méfiait davantage de lui, lui qui la faisait paniquer, quand bien même elle tentait de faire semblant que ce n’était pas le cas. Mais l’animal était fourbe et avait très bien su voir au travers des instants où elle vacillait. La brune ne sut retenir un frisson lorsqu’il lui murmura à l’oreille, planquant même sa main contre son oreille, mais elle trouva vite le refuge auprès de la vieille dame. « Je n’ai pas votre expérience en la matière » se contenta-t-elle de dire, gênée par la question de l’aubergiste, bien que sa gêne disparu une fraction de seconde en voyant Ethan recracher ce qu’il venait de boire. « Il donne du travail », attrapant des mouchoirs, elle les tendit à son fiancé sans pour autant rester à ses côtés, préférant suivre son ainée comme son ombre. Parce que cette dame avait un pouvoir impressionnant sur le jeune homme qui devenait mystérieusement aphone, Uriyel eut un rire en le voyant gesticuler, saisissant parfaitement le message qu’il voulait lui passer. S’installant à côté de leur hôte, en quelque sorte, elle ne rechigna pas lorsque Ethan-ol se mit à côté d’elle. Pouffant légèrement de rire, elle lui donna un léger coup de coude. « Elle peut t’entendre, ba-ka » dit-elle sans émettre un son, avant de se tourner vers la vielle dame « je dirais plutôt qu’ils sont les plus immatures. » À son tour, elle servit à cette dernière, un bol de riz bien fumant, avant de servir son immature de fiancé.

Tenue ★ Ethan n'en revenait pas. Il écoutait déblatérer l'aubergiste avec l'air profondément choqué. Il en avait même manqué de s'étouffer. Il accepta sans rechigner l'aide de sa fiancée qu'il aimait pourtant maltraiter et essuya sa bouche avant d'éponger un peu le haut de son t-shirt. Ruminant dans sa barbe des paroles incompréhensibles, il s'installa à côté d'Uriyel. Il la foudroya du regard quand elle le traita d'idiot et lui pinça le bras. « Fais gaffe ou je change les serrures. » Une menace qu'il siffla entre ses dents pour que l'aubergiste ne l'entende pas mais surtout qu'il ne risquait pas d'exécuter. D'abord parce que son père lui tomberait dessus. Ensuite parce que, malgré tout, il appréciait sa présence. Il se sentait moins seul depuis qu'elle avait emménagé. « Immature ? » S'offusqua Ethan. « Mais tu t'es vue ? » Il ouvrit la bouche près à continuer sur sa lancée mais l'aubergiste s'était levée pour réussir à lui asséner un coup derrière la tête. Aussitôt, il se mit à se masser en fronçant les sourcils. « C'est pas une façon de parler de sa fiancée ça, jeune homme ! Quelle ingratitude. » Il leva à nouveau les yeux au ciel. Lui ? Ingrat ? Alors qu'il l'accueillait chez elle sans même rien lui demander en échange ? Il poussa un long soupir et choisit de manger en silence son repas. Non sans galérer un peu avec les baguettes. Décidément, il ne s'y ferait jamais. Il risqua malgré tout un regard vers Uriyel, qui devait jubilait au fond d'elle, et remarqua alors deux petites grains de riz collés au-dessus de ses lèvres. Il passa son doigt dessus pour les faire tomber puis recommença à manger l'air de rien. « Vivement qu'on rentre. » Murmura-t-il. Il n'en pouvait plus de l'air de la compagne.

Tenue ★ Se mordillant l’intérieure des joues pour s’abstenir de rire, Uriyel ne pouvait en revanche s’empêcher d’applaudir intérieure la vieille aubergiste qui à chaque fois ne manquait pas de désarçonner avec classe  son fiancé. Le pouvoir de cette dame lui paraissait presque surnaturel qu’elle compatissait presque un peu pour celui qui en était malheureusement la victime attitrée. « Il est juste maladroit, il a tendance… à parler sans réfléchir » répondit-elle, comme pour le justifier. Pour autant, la vieille ne s’acharnait pas sans raison sur Ethan, et la conversation dévia sur les petites choses du quotidiens. Du moins, la brune ne faisait qu’écouter la vieille dame qui ne manquait pas d’anecdote pour lui raconter ses journées. Néanmoins, il fut difficile de garder sa concentration lorsque son imprévisible fiancé décida de la surprendre de nouveau. « Merci » bafouilla-t-elle en détournant son visage pour cacher sa gêne et timidité que trahissaient ses joues qui s’empourprèrent joliment. « Tout juste lorsque je commence à m’y plaire » souffla-t-elle avec une certaine moue,  avant de baisser la tête pour se concentrer sur son bol de riz, cachant à peine son sourire amusé. Pas un seul instant elle ne s’imaginait réellement revenir ici avec lui, certainement parce que la prochaine fois, il ne se laisserait pas aussi facilement duper par son paternel. Malgré tout, l’idée de revenir passer un séjour à la campagne ne lui déplaisait pas. Le voyant galérer avec ses baguettes, elle fit en sorte d’avoir un faux mouvement pour faire tomber les baguettes qu’il tenait avant de lui tendre une cuillère et imiter Ethan, faisant comme si de rien n’était jusqu’à la fin du repas.

Tenue ★ Ce simple geste envers sa fiancée semblait si naturel. Il n'était pas forcé. Encore moins calculé. Comme si son corps avait décidé seul. Il lui accordait peut être plus d'attention qu'il ne le croyait, plus qu'il ne pouvait l'assumer. Et à la voir rougir, il se mit même à sourire. Il se surprit à la trouver mignonne, encore une fois. Puis tenta de se concentrer au mieux pour réussir à manier ses baguettes. Si Uriyel devait apprécier cet endroit ce n'était clairement pas son cas. La ville lui manquait. Le boulot lui manquait aussi. Quand il travaillait il n'avait pas besoin de réfléchir, il ne restait jamais très longtemps seul avec ses pensées alors qu'ici il sentait que le contrôle lui échappait. Elle aimait certainement aussi le fait que la vieille aubergiste passe son temps à s'acharner sur lui. Tout à coup, elle heurta ses mains. L'expression du visage de l'héritier changea pour montrer son agacement et il s'apprêtait d'ailleurs à lui reprocher son geste quand il la vit tendre une cuillère. Là, il leva un sourcil ne comprenant pas vraiment. Cela voulait-il dire qu'il avait remarqué qu'il peinait à tenir ses baguettes ? Il la gratifia d'un petit mouvement de tête pour la remercier avant de plonger sa cuillère dans son bol non sans sourire une nouvelle fois. Uriyel était décidément pleine de surprises. À la fin du repas, il s'étira et posa son regard sur elle. « Alors ? Qui cuisine le mieux ? L'aubergiste ou moi ? » Il avait pris soin de parler à voix basse pour que sa voisine de table ne l'entende pas. Elle avait plutôt intérêt à lui servir la réponse qu'il attendait sans quoi il risquait de se mettre à bouder, vraiment. Il aida à débarrasser tout en annonçant qu'une voiture allait bientôt venir les chercher puis il se leva et plaça sa main sur l'épaule de sa fiancée. « On va rassembler nos affaires, hm ? » Ils marchèrent ensemble jusqu'à leur modeste chambre et Ethan se mit aussitôt à ranger ses vêtements dans sa valise sans trop se préoccuper du reste.

Tenue ★ Soigneusement, la jeune femme évitait de croiser le regard de son fiancé. Visiblement moins embarrassée qu’auparavant, mais surtout désireuse de dissimuler tant soit peu, ses sentiments encore vacillants. Il les verrait, il comprendrait, car elle était mauvaise pour dissimuler surtout face à lui, lui qui le faisait mieux que quiconque. Pour autant, elle refusait de se montrer docile et silencieuse, cela la trahirait davantage. « Hmm. La question serait plutôt de savoir, es-tu prêt à accepter la vérité. » Elle lui décocha un sourire taquin, et avant même qu’il ne puisse répondre, elle se leva pour commencer à débarrasser la table, empilant les assiettes soigneusement avant de disparaître dans la cuisine. Uriyel ne comptait pas lui offrir aussi facilement la réponse qu’il désirait, qu’elle soit positive ou négative, elle imaginait déjà les réactions successive de son fiancé. À l’entente qu’une voiture viendrait les chercher, elle ne put s’empêcher de gonfler ses joues, la mine légèrement grisée. La compagne, elle s’y était d’une certaine façon attachée non pas le paysage, l’air frais, mais juste le fait d’être là, avec lui et cette aubergiste. Loin de tout, coupé de tout. « Je te suis dans ce cas » répondit-elle avec simplicité, faisant en sorte de traîner des pieds pour marcher derrière lui. De retour dans leur chambre, l’imitant aussitôt, elle rangea ses affaires. Ne s’étant pas vraiment éparpillée, elle plia rapidement ses vêtements et rangea ses affaires. « Les deux jours sont finalement passés vite et dire que tu jurais de ne pas pouvoir fermer l’œil de la nuit. Pfft. », un léger rire lui échappa, elle ferma rapidement sa valise. L’observant, elle fit un pas hésitant vers lui avant de lui tourner le dos. « Si tu n’as pas besoin d’aide, je t’attends à l’extérieur, d’accord ? »

Tenue ★« Bien sûr, puisque je la connais. Je sais que ma cuisine te plaît. » Prétentieux ? Un peu mais en même temps il ne se tenait probablement pas si loin que ça de la vérité. Rares étaient les personnes qui n'appréciaient pas les plats du jeune héritier surtout lorsqu'elles s'avéraient déjà assez chanceuses pour avoir le privilège d'y goûter. Après avoir vaguement aidé à débarrasser la table, ils s'éclipsèrent tous les deux afin de ranger leurs affaires en prévision de leur départ. En grand maniaque, Ethan prenait grand soin de bien plier ses vêtements et de tout organiser dans sa valise. Il redressa la tête vers Uriyel lorsqu'elle prit la parole et poussa un soupir en constatant qu'il avait curieusement bien dormi. « Mais ça ne me manquera pas, je suis pas fait pour la campagne. » Il avait besoin que ça bouge autour de lui. Il n'aimait pas laisser à son cerveau le temps de remuer ses pensées et souvenirs. Néanmoins, il fallait reconnaître que ça lui avait fait du bien. « Même si être loin de toute la pression n'était pas si mal. » Uriyel devinerait sans doute de quoi il parlait. Qu'il s'agisse de ses responsabilités auprès de l'entreprise familiale ou encore de celles qu'il avait envers la jeune femme et sa famille ainsi que tout ce qui entourait leur mariage. On attendait tellement d'eux. On aimait tant se dire qu'un tel couple ne pouvait rien donner, que la pauvre Uriyel n'avait pas de chance d'être tombé sur un bon à rien comme lui et encore d'autres âneries. Il boucla sa valise quelques secondes après elle. « C'est bon, j'arrive. » Il se leva et en passant devant elle il lui piqua sa valise. Geste naturel encore une fois et pourtant digne d'un gentleman. Mais Ethan n'agirait pas ainsi avec n'importe qui. Avant ce séjour qui les avait étrangement rapprochés il aurait encore été capable de la laisser se débrouiller. « Allons saluer l'aubergiste, elle ne risque pas de me manquer. » Ils rejoignirent ensemble la vieille femme et Ethan s'inclina poliment, respectueusement. La vieille femme leur répondit de la même manière non sans en profiter pour avoir le dernier mot. « Prenez soin de cette demoiselle jeune homme, vous ne la méritez pas mais elle vous fait le plus grand bien. » Ethan se mordit l'intérieur de la joue, piqué par les paroles de l'aubergiste qu'il savait trop proches de la réalité. Il hôcha sagement la tête alors qu'elle se penchait pour embrasser sur les deux joues sa fiancée. « Et vous jeune fille, n'abandonnez pas. » Elle tapa avec sa main sur le torse d'Ethan. « Sacré carapace mais pas infaillible. » Puis elle s'approcha de son oreille pour souffler des mots qu'Ethan parvint pourtant entendre et qui le firent lever les yeux au ciel. « Il vous aime beaucoup. Ça se voit à la façon dont il vous regarde. » N'importe quoi la vieille, songea l'héritier en décidant de prendre de l'avance et de se diriger directement vers la sortie pour aller attendre leur voiture dehors.

Tenue ★ L’assurance de son fiancé lui arracha un rire silencieux, Uriyel lui donna un léger coup de coude, une façon pour elle de lui demander de cesser avec ses bêtises. Elle ne comptait pas lui répondre et puis, elle pensait qu’il était plus judicieux de ne pas le paraphraser. Ranger leur affaire, plier leur valiser fut au final aussi rapide que leur arrivée en ces lieux. En dépit de l’inconfort de ces lieux quelque peu rustique, elle aimait les souvenirs qui y étaient attachés, encore vifs dans son esprit. Se levant aussitôt quand il sortit de la chambre qu’ils avaient partagées, le geste qu’il eut la rendit perplexe un instant. «Tu marches un peu trop vite, attend moi » dit-elle en foulant la distance qui s’allongeait entre eux, se glissant à la droite du jeune homme, un sourire amusé aux lèvres. Le remercier ? La jeune femme n’était pas certaine qu’il voulait entendre réellement ce genre de mot, son petit doigt le lui soufflait. Le dire le rendrait davantage mal à l’aise, alors elle se contentait de profiter de cet élan de galanterie de la part de Ethan. Lui non plus n’avait pas besoin d’illustrer ses mouvements pour qu’elle devine qu’elle avait étrangement droit à un traitement différent. Différent de ceux auxquels elle s’était habituée en sa présence. « Ah ? J’aurais aimé pouvoir l’inviter à Tokyo, passer nous voir », sa voix se faisait chagrine et son expression appuya sa déception. Uriyel trouvait fascinant le pouvoir qu’exerçait cette vieille femme sur son fiancé, chacun de ses mots semblaient piquer ce dernier qu’elle se demandait bien quel détail lui échappait encore. « Avoue que tu l’aimes bien, la preuve, tu vas incapable de lui répondre » profita-t-elle de lui souffler avant que la dame apparaisse. C’est avec un petit pincement au cœur et un sourire amusé qu’elle regarda l’aubergiste user de son pouvoir magique sur son fiancé soudainement muet. C’était magique, l’effet puissant qu’elle avait sur lui. « Je ne suis pas certaine de cela, mais une chose est sûre c’est qu’il devient… plus mignon. » Uriyel ne tenta même pas de regarder vers Ethan pour aussitôt se réfugier derrière la vieille dame, un sourire rieur accroché aux lèvres. « C’est limite inquiétant » chuchota-t-elle à l’oreille de la vieille dame avant de l’entourer de ses bras, l’enlacer. « Merci pour tout, et puis, n’hésitez pas à venir nous voir. Je crois qu’il vous aime plus que moi, il est toujours scotché à chaque fois qu’il vous voit. »