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TENUE ••• Installé sur le tracteur à faire le tour du terrain, mes bras autours de la taille à Ying Tao et le chiot calé confortablement contre moi, je me sentais si bien que j'en oubliais le temps passer. Jusqu'à ce changement de paysage, d'air, de décor. De l'auberge, nous avons atterri en plein centre ville, avec ces voitures, ces haut-building, les gens qui passent mais ne font attention à rien et... Dewei. Du moment où je me suis souvenu d'un détail et de son nom, tout à changé pour passer du rêve au cauchemar. Mon subconscient ne voulant pas de tout ça m'a de suite ramené à la réalité, sortant précipitamment et sûrement pas de la bonne façon de mon sommeil. L'esprit embué, alarmé, je me suis redressé sur ma chaise sans savoir où regarder. C'est seulement deux secondes après que j'ai senti les larmes couler de mes paupières, traçant un sillon sur mes joues pâles. Même assis, je ressentais une sensation de mal être, comme si la chaise tournait doucement sur elle-même. J'ai voulu me relever, mais dès que j'ai forcé sur mes jambes, je suis retombé cul dessus. Mon rêve m'avait fortement secoué, mais maintenant que mes yeux sont bien ouverts, je ressens ce besoin de partir, de fuir, de retourner dans ma campagne... Sauf que je ne peux pas. D'ailleurs, je ne me souviens pas de ce que je faisais avant de m'assoupir, jetant un coup d'oeil sur mon bureau. De la paperasse ? Je devais trier des papiers, sûrement. J'en sais rien. Je me demande même ce que je fous ici à perdre mon temps dans cette entreprise. Ce n'est pas ma place, je ne me sens pas bien entre ces murs, dans cette ville... J'étouffe. Rien que penser ce mot, je sens ma respiration se bloquer, perdant de plus en plus mes moyens. Je veux rentrer chez moi, revoir mes parents, mon auberge, mon terrain, mes animaux... Inconsciemment, les larmes sont revenus mouiller mon visage, dans un silence rompu par mes sanglots. Une chance pour moi, je suis seul dans cette pièce, apparemment relégué pour les stagiaires. Seul, mais jusqu'à quand ?

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TENUE ••• Assis à mon bureau, je revoyais la dernière réunion qui s’était déroulé en début de mâtiner, ce fut une longue discussion dont je devais m’encombrer pour la signature du contrat, et j’avais réussi mon affaire, les bénéfices sur l’entreprise seraient bientôt visibles et tout le monde allait devoir mettre les bouchés doubles pour que la concurrence ne tente pas de retournement de situation sur notre affaire, c’était bien le genre de chose qui m’insupporter, une fois on m’avait volé mon projet, pas deux. J’avais les yeux et les oreilles partout ici, faut pas croire que c’est simple d’être le patron il y a plus à gérer que simplement gérer des réunions et signer des papiers. Dans tous les cas je voulais finir tout ça avant la pause déjeuner, même si j’étais habitué à la sauter pour le travail, j’avais faim ce matin, en réalité j’avais faim tous les matins depuis mon retour, comme si mon corps avait été habitué à avaler de la nourriture au réveil. Et lorsque je ne mange pas c’était la pause de midi qui se voyait réclamé, comme aujourd’hui. Appelant le stagiaire qui bosse ici depuis quelques jours, je ne le vois pas arriver, retentant encore une fois, toujours aucun stagiaire en vue. Je voulais demander de commander le repas, mais finalement je me lève en sortant de mon bureau pour partir à sa recherche, trouvant étrange son manque de réactivité, chose dont il n’a pas fait preuve ses derniers jours. Entrant dans la pièce, je l’aperçois. « Ah, je me demande où vous étiez, je vous ai appelé... » Je m’arrête en voyant qu’il pleure. Je ne suis pas habitué à voir des gens pleurer et je suis encore moins doué pour les réconforter, très maladroit face a la faiblesse. « Qu’est-ce qui vous arrive ? » Demandais-je simplement, s’il a besoin d’un jour, je suis prêt à le libérer plus tôt.

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TENUE ••• Ce cauchemar m'a tellement retourné que je ne sais même plus où je suis et ce que je faisais avant de m'assoupir, ni comment j'ai pu m'endormir sur ce bureau... Je suis perdu, bouleversé, à la limite de paniquer alors que je sens déjà les larmes couler sur mon visage pâle. J'ai l'impression de ne pas être à ma place, de devoir rentrer chez moi avant qu'il ne soit trop tard et en même temps, je n'ai pas envie d'abandonner si facilement. ça me tue d'être là pour un garçon qui ne se souvient même plus de moi. ça me détruit à petit feu cette ville. Attristé et seul, je laisse éclater ma détresse et mes sanglots, croyant que ce flot d'amertume et de malaise passerait avant que je retourne bosser. Prendre sur moi, c'est ce que je fais depuis des jours et je pensais m'en sortir facilement. Du moins, pendant les heures où je n'étais pas enfermé dans une chambre, sans aucun témoin pour me voir ou m'entendre pleurer. J'étais loin de me douter que mon supérieur et ancien ami me cherche ou m'appel. Assourdit par mes faibles plaintes, je n'entends même pas sa voix, ni rien d'autre que moi-même. C'est seulement quand il entre dans la pièce pour me parler que je peux percevoir sa présence et sursauter, toujours les larmes aux yeux. Mince, quelle galère. Alarmé, je tente d'essuyer rapidement mon visage et mes yeux, mon souffle agité. « Tout va bien, excusez moi. » Dis-je, tentant de reprendre ma respiration. « Ce n'est rien. » Repris-je, plus calmement mais les yeux et le nez toujours rouge. Le fait que me vouvoie me donne toujours une impression bizarre, mais je ne peux pas lui dire que nous étions amis avant qu'il retrouve sa mémoire. « Vous me cherchiez ? » Sinon il ne serait pas venu jusque là.

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TENUE ••• Que ce soit au boulot ou dans ma vie privée j’ai toujours été quelqu’un de sérieux, je ne montre pas mes faiblesses et je n’aime pas être confronté à des situations que je ne maitrise pas. Malgré mon âge et ma jeunesse je suis un homme d'affaires jusqu’à l’os et cela peut souvent se ressentir quand je conclus des contrats avec d’autres entreprises ou particulier. Les gens ont tendance à me voir comme une proie facile parce que je semble justement à peine sorti de l’adolescence, mettant mon rang sur l’héritage plus que sur les compétences. Je dois sans cesse faire mes preuves, mais c’est aussi excitant de se battre dans cette jungle, j’ai l’habitude depuis ma plus tendre enfance et ça ne m’a jamais fait peur. La concurrence je la surpasse, quant à ceux qui doute je les bluffe au point où ils ne penseront jamais à aller voir ailleurs. Voilà comment je gère et garde une main directive sur tout ce qui se passe dans mon entreprise, cependant quand je vois le stagiaire pleurer je perds intérieurement mes repères. Je parais toujours calme et sérieux, mais la faiblesse des gens est une chose qui « m’effraie » car je suis incapable de la comprendre ou de me montrer compatissant, bien que cela ne me laisse pas indifférent, je ne suis pas sans cœur, juste que ça m’a surpris. Il a beau essuyer son visage ses larmes l’ont déjà marqué. « Ça a l’air de tout sauf d’aller bien. » J’ai beau ne pas être doué je n’aime pas faire comme si je ne voyais rien, c’est un manque de respect à mes yeux et bien que je sois d’un tempérament parfois « hautain » sur certaines choses, j’ai toujours un regard attentif sur mes employés. « Je voulais que vous commandiez le repas. » Ce pour quoi je le cherche. « Vous devriez rentrer chez vous. » S’il ne va pas bien, sauf que je me contente de dire l’essentiel.

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TENUE ••• Un garçon comme Dewei, qui a sûrement toujours vécu dans ce genre d'univers, ne peut pas me comprendre. La ville, les affaires, les gens, tout cela m'échappe et j'ai l'impression d'être qu'un grain de poussière dans une étendue de saleté. C'est frustrant, imperceptible et j'en perds doucement ma motivation. Dewei ne se souviendra pas de moi, ni de ces mois passés ensemble et son meilleur ami est toujours une menace potentielle pour moi. Sécher mes larmes est une action difficile, surtout devant mon supérieur. Je ne voulais pas pleurer à la base, ni montrer une telle faiblesse, mais ce n'est pas évident de se convaincre et d'agir. Les larmes ne disparaîtront pas vraiment, même en essuyant encore et encore mon visage. Dewei me contre-dit quand je tente de le rassurer et cela me tord doucement l'estomac. Il l'a remarqué si facilement, ça me déconcerte. Reniflant discrètement, je me retiens d'ouvrir les vannes à nouveau, clignant plusieurs fois des yeux. Dewei parle de repas et le simple fait qu'il est voulu me donner une tâche à accomplir m'occupe l'esprit. « Le repas ? Je peux aller le chercher. » Fis-je, dans l'espoir qu'il oublie ce qu'il a vu et me donne toujours quelque chose à faire. Sauf qu'avec sa dernière phrase, j'ai l'impression qu'il me vire. Rentrer chez moi ? C'est trop loin. « Je suis désolé de vous laissez cette mauvaise impression, je vais bien. » Si je n'insiste pas là-dessus, il va vraiment croire que je ne me plais pas dans son entreprise. « J'habite trop loin pour rentrer chez moi. » Que ce soit pour quelques jours ou définitivement, je ne veux pas avoir fait autant d'effort pour rien. « Ce ne serait pas si compliqué si tu n'avais pas oublié. » Dis-je d'une voix tellement basse qu'il n'a pas dû entendre, et tant mieux. « Vous voulez commander à manger ? » Repris-je d'une voix plus assurée et forte.

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TENUE ••• Je ne suis clairement pas habitué à voir des personnes se montrer faible devant moi, fréquentant plutôt des gens fiers qui se refuserait à verser une larme même si cela pouvait les sauver de la faillite ou faire avancer un contrat. Alors le fait de tomber sur ce stagiaire semblant blessé par quelque chose d’assez fort pour le mettre dans cet état, je ne peux même pas imaginer ce que ça fait, ni pourquoi d’ailleurs. Faut dire que je ne comprends pas ses sentiments là, je suis un roc, mon cœur est peut-être chaud, mais il reste insensible sur beaucoup de situations qui me dépassent. Je lui réponds que je le cherchais pour le repas, ça me semble évident vu l’heure qu’il est. Il annonce qu’il peut s’en occuper, tandis que je préfère le renvoyer chez lui, il doit comprendre que d’un côté je ne peux pas garder des personnes dominer par leurs sentiments dans mon entreprise, il peut se reposer et revenir quand ça ira mieux, c’était là mon intention. Je le regarde puis soupirer en hochant la tête, s’il insiste je vais lui laisser une seconde chance. « Bien, mais si je vous revois dans cet état il n’y aura pas de discussion. » Je peux être ferme aussi quand on ne gère pas la situation. Je l’entends chuchoter, mais ne comprends rien à ce qu’il a dit. « Assumez vos paroles. » Lorsqu’on murmure devant quelqu’un je trouve que c’est un énorme manque de respect. Mais soit, je passe outre pour cette fois. « En effet, je vous laisse vous en charger. » J’ai encore une réunion cette après-midi donc je ne dispose pas d’énormément de temps pour déjeuner, faut dire que les rendez-vous s’enchainent dans ce métier, heureusement j’aime prendre des journées complètes pour pouvoir me libérer à d'autres moments, je gère parfaitement mon temps et en tant que directeur je ne suis pas non plus prisonnier de mon bureau, j’aime simplement faire du bon boulot.

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TENUE ••• Je n'ai pas vu le temps passer à cause de ma « sieste » et du fait d'être désorienté après ce cauchemar... Faut dire que je dors plutôt mal depuis que je suis ici, à Tokyo. Dormir dans une chambre ou un appartement aux murs fins, avec la ville qui s'anime tout autour à n'importe quelle heure de la nuit, ça rend dingue. Du coup, je n'ai pas pu résister à l'appel de la fatigue, ni prévoir le mauvais rêve. Dewei réagit comme un patron, un bon employeur qui pense autant à ses employés qu'à son entreprise. Je ne dois vraiment pas être beau à voir pour qu'il pense me renvoyer « chez moi », mais franchement ... Je n'ai pas de chez moi dans cette ville, alors autant rester ici. Est-ce une menace ? J'aurai voulu lui demander, comme si c'était mon ami, mais j'ai dû me retenir de justesse. « Très bien. » Approuvais-je simplement. C'est ce que je fais depuis des jours, approuver simplement. C'est chiant, surtout quand je me souviens de nos moments passés ensemble. Assumer mes paroles ? Ah, il m'a entendu marmonner. « Désolé. » Je ne voulais pas qu'il pense cela de moi. « Je disais que ça n'aurait pas été si compliqué si je n'avais pas oublié ... Mon réveil.. Ce matin. » N'importe quoi, c'est absurde. Moi même je n'arrive à me convaincre d'un tel mensonge, tellement c'est bidon. Donc, je me charge du repas. J'aurai préféré sortir manger avec lui, mais je ne crois pas que nous soyons au même niveau dans cet univers-là. « Que voulez-vous manger ? Je vais le chercher là-bas ou je le fais livrer directement à votre bureau ? » Je suppose que je pourrais aussi me prendre à manger. De toute façon en étant stagiaire, je suis obligé d'avoir un quota d'heure et de jour de congé à respecté. Du coup, j'ai droit à une pause repas pour le midi, même si je ne vois pas où manger tout seul.

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TENUE ••• Je n’arrive pas à comprendre les personnes qui baissent leur garde ainsi au point de pleurer et de paraître vulnérable a souhait. Je suppose que j’ai un mental bien trop solide pour me retrouver dans ce genre de situation, seulement il est impossible que je cautionne ce genre de comportement à répétition, c’est déjà bien suffisant d’y avoir été confronté aujourd’hui, je ne suis pas doué pour ces-choses-là et accessoirement, cela me déplaît. Je ne le connais pas, mais le voir dans cet état m’a laissé un gout amer de ce fait je n’accepterai pas que cela se reproduisait et le met immédiatement en garde. À son murmure c’est une autre remarque que je laisse s’imposer, faisant comprendre que ça aussi, cela me déplaît. Il y a un respect à respecter, penser est une chose, chuchoter, murmurer devant une personne en est une autre. À ses excuses je ne dis rien, à son explication encore moins, je ne comprends pas ce qu’il raconte, mais soit. Je préfère encore revenir au repas et le laisser s’occuper de commander les menus. « Il y a un restaurant en bas de la rue, un plat du jour me suffira. » Je déteste les fastfoods, je ne mange en aucun cas tout ce qui est qualifié de « malbouffe » j’ai une alimentation très seine, donc autant évité les petites enseignes avec moi. « Allez le chercher, ça vous permettra de prendre l’air. » Il en a besoin je suppose. « J’attendrais dans mon bureau, vous n’avez qu’à prendre un repas en plus pour vous, les autres employés ont déjà pris leurs pauses. » Je ne suis pas coupé des gens, je peux manger avec lui s’il le souhaite, nous sommes tous les deux humains et bien que j’ai un statut supérieur dans la « société », je sais aussi me montrer simple, ce qui fait souvent contraste avec cette arrogance furtive et mes pensées hautaines.

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TENUE ••• Ce Dewei-là est beaucoup plus différent du Dewei que j'ai connu à l'auberge. Il n'a pas ce sourire chaleureux sur les lèvres, ni cette lueur qui pétille dans les yeux, il n'est pas curieux à souhait, ni délicat. Ce Dewei est froid, parfois intransigeant et plus je cherche à m'en approcher, plus il devient intouchable. Je commence à croire que c'était une erreur de partir de chez moi pour suivre une personne qui m'a complètement oublié et qui aujourd'hui me néglige. Des fois, je me dis que j'agis comme un idiot. Il aurait reprit sa vie sans encombre et moi la mienne ... Pourquoi l'avoir poursuivi à Tokyo ? Je me le demande de plus en plus. Parlant du repas, je le questionne davantage dessus pour m'en occuper, trouvant dans cette requête un moyen de le fuir quelques minutes. Un plat du jour au restaurant du coin, c'est plutôt banal pour un homme de son rang. « D'accord. » Répondis-je, pour qu'il sache que j'ai compris. J'ai toujours eu l'habitude de manger sainement grâce à la cuisine de mes parents ou du personnel de l'auberge, donc je n'aurai pas pensé à lui acheter un menu de fastfood. Prendre l'air, quelle magnifique idée. « Merci. » Soufflais-je, avant de m'incliner respectueusement devant lui. J'en profite pour quitter la pièce en premier, filant de l'entreprise jusqu'au fameux restaurant où je demande deux plats du jour. Sauf que, j'ignore si je dois le commander à son nom ... Du coup, je règle de ma poche et récupère les sachets que je ramène quelques minutes plus tard à son bureau. Tapant à la porte de celui-ci, j'entre en percevant le son de sa voix. « Le plat du jour, monsieur. » Je dépose les sachets sur son bureau, ne sachant si je dois rester avec lui ou repartir.

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TENUE ••• Je ne peux clairement pas imaginer que je suis la raison de ses tourments, j’ai totalement oublié tout ce que j’ai vécu durant huit mois, jamais je ne penserais que j’ai passé ce temps avec ce stagiaire, ça ne me viendrait jamais à l’esprit et c’est bien normal, tous deux semblons tellement différents. Ses larmes sont une faiblesse que je ne me permettrais jamais d’afficher, plutôt mourir que me montrer vulnérable, dans la cage au lion je ne me laisse jamais bouffer, je dompte, domine et affronte peur et épreuves pour en sortir plus fort. J’ai grandi dans cet univers et cette personnalité imperturbable, ce comportement intransigeant c’est ce que je suis vraiment. Je l’envoie donc chercher à manger au restaurant du coin, c’est un enseigne plutôt connu dans les environs et les menues sont sains et varié, ça me suffit amplement, surtout quand je mange au boulot, je n’ai pas le temps de sortir faire le difficile dans un restaurant cinq étoiles. Du moment où ce n’est pas de la malbouffe je ne suis pas difficile. Le laissant prendre l’air par la même occasion je retourne dans mon bureau sans rien ajouter de plus, attendant qu’il arrive en fumant une cigarette à la fenêtre. Les minutes passent et finalement il est déjà de retour, ce fut rapide, je n’ai pas précisé de le mettre sur la note de l’entreprise, pensant qu’il aurait deviné ce détail, je n’aime pas me faire acheter à manger, sauf que s’il ne me le dit pas je ne peux pas le deviner. Regardant les deux sachets, je m’assoie sur mon siège après avoir écrasé le mégot. D’un geste de la main je l’invite à prendre place en face. « Installez-vous. » Nous sommes les seuls à manger, autant qu’il reste là.  « Vous vous faites à l’entreprise sinon ? » Autant le questionner vu qu’il n’a aucune expérience dans le domaine. Ouvrant le boitier, j’attrape les baguettes pour gouter le premier, je ne suis généralement pas déçu de ce qu’il propose et aujourd’hui encore j’apprécie les ingrédients proposés. « Vous venez de la campagne c’est ça, si je me souviens bien. » On en a parlé le premier jour, j’ai une bonne mémoire, même si avec tout ce que je dois gérer quelques détails peut encore m’échapper. « Je ne vous ai pas demandé pourquoi vous avez décidé de venir en ville, envie de changement ? » Je profite de ce moment pour tenter d’en savoir plus, j’aime connaitre mes employés et même simplement discuter, tant que ça reste de sujets utiles et distrayantes.

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TENUE ••• La différence entre lui et moi, c'est que je ne suis pas un fauve, mais plutôt un cerf. Observateur, calme et sensible aux choses qui m'entourent. Je ne montre pas les crocs, ne sors pas les griffes et ne grogne pas sur le premier qui tente de m'attaquer. Je ne peux dissimuler mes larmes quand on me surprend sur le fait, ni cacher ma peine ou mon désarroi quand ça va mal. Dewei m'a vu dans un moment délicat et à part m'excuser, je ne peux rien faire d'autre. Il est là, face à moi et c'est tant pis. Ayant rapidement discuté, Dewei m'envoie chercher le repas à un restaurant en coin de rue, me disant ainsi de prendre un peu l'air. Je ne sais comment le prendre, mais ne m'attarde pas dans cette pièce, filant donc commander de quoi manger à l'enseigne qu'il m'a indiqué. Sauf que j'ignore si je dois payer ou s'il a un compte, du coup je me débrouille comme je peux, sans paraître prétentieux ou quoi. Les sachets en main, je fais le chemin inverse et reviens à l'entreprise, ramener les menus dans le bureau de mon patron. à son invitation, je m'installe sur le siège face au bureau, silencieux. Sa question me surprend, je ne m'attendais surtout pas à l'entendre. « Oui, ça va. » Répondis-je, simplement comme à chaque fois que je réponds à ses interrogations. Une réponse courte et brève. Prenant ma part dans l'autre sachet, je regarde les plats proposés en cassant mes baguettes. « Oui, mes parents tiennent une auberge. » Précisais-je, sans me douter que cela pourrait être un détail important, mais aussi très dangereux. Piochant dans la boîte, je trouve ce morceau appétissant et succulent. « On peut dire ça. J'ai toujours vécu à la campagne ou dans un village du coin, la ville est une sorte de rêve pour un gamin dans mon genre. » Je me désigne de gamin, pour appuyé le fait que je voulais venir à Tokyo depuis quelques temps déjà. Pourtant, la vie en pleine capitale est difficile, voir invivable quand on n'est pas habitué. « Vous avez toujours vécu ici ? » Demandais-je, picorant à nouveau dans mon repas. Le temps qu'il réponde, je mange plusieurs bouchées, d'un air calme. « J'ai beaucoup de mal à me faire à la ville, c'est bruyant et ça manque de verdure. » Fis-je, en riant doucement. Rien à voir avec mon petit coin de paradis à l'auberge, proche de la forêt et d'un lac, avec une ferme, un potager ou des terrains où cultiver tout et n'importe quoi.

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TENUE ••• Une fois qu’il revient je l’invite à s’asseoir à mon bureau, j’ai beau être le patron ça m’arrive de passer du temps avec mes employés sans tenir compte du « rang ». Je profite de ce moment pour le questionner, demandant comment il se sent ici, l’entreprise est grande et il est encore nouveau donc je suppose qu’il y a un temps d’adaptation qu’il faut prévoir avant de réellement se sentir à sa place. Une auberge ? « Je me suis réveillé dans une auberge. » Je ne sais pas pourquoi je dis ça, mais tout le monde sait que j’ai été « absent » durant huit mois, ce n’est pas comme si je cache ce détail, je trouve juste que c’est un détail qui est intéressant, si je voulais vraiment des réponses je pourrais y retourner, mais au final je n’ai aucun souvenir et je ne peux pas vivre dans le passé, même si parfois ça m’intrigue encore. « Un rêve ? Je suppose que c’est le cas de tous ceux qui n’y ont jamais vécu. » Je suis habitué à cette ambiance, mais je peux imaginer qu’a la campagne les choses sont différentes, je rêve parfois de cette verdure ou de ses animaux, je ne sais pas pourquoi, mais je sens que c’est agréable alors que je combat chaque jour ici. « Non, j’ai grandi à Pékin. » Continuant de manger mon repas, je ne m’attarde pas sur les détails, de toute façon que ce soit une ville ou l’autre, les choses ne sont pas bien différentes, le milieu reste le même. « Pourquoi vous restez alors ? » S'il ne s’y fait pas il devrait simplement rentrer chez lui et vivre là où il se sent le mieux, je ne comprends pas vraiment pourquoi tout quitté quand on a un endroit où se sentir chez soi.

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TENUE ••• Cette entreprise est plutôt petite comparée à l'immensité de la ville, mais c'est vrai que c'est suffisamment grand pour avoir besoin d'un temps d'adaptation que j'ai un peu de mal à obtenir malgré les journées passées ici, quand je ne suis pas à l'école pour étudier ou à la boutique pour vendre des fleurs. Parler de l'auberge est sûrement la dernière chose à faire avec Dewei, mais qui sait ... ça pourrait lui rappeler des trucs. « Quelle étrange coïncidence. » Seulement pour lui, mais pas pour moi. Dewei pourrait en apprendre beaucoup s'il retournait à l'auberge, mais il n'a jamais eu cette pensée, ni l'intérêt de le faire. Ce qui n'est pas mon cas, puisque je suis venu jusque là. C'est vrai, les gens qui ne vivent pas à Tokyo ne peuvent pas savoir comment est la vie ici, la cadence fatigante, l'odeur âcre de la pollution, le peu d'espace libre où poser le pied, l'air parfois irrespirable. Ce sont des choses que je n'ai jamais connu avant de venir vivre en ville. « Ce n'est pas votre cas ? » Demandais-je, me doutant bien qu'il ne vit pas un rêve tous les jours. Pékin ? J'aurai dû m'en douter avec son nom, mais la chine est grande. « Je suis né à Dongguan. Nous sommes presque voisins. » Même si je vivais proche de Hong-Kong, au sud de la chine, alors qu'il vivait au nord. Pourquoi ? Je fais mine de réfléchir, ne sachant pas vraiment quoi répondre. Je dois mentir, c'est vrai... Mais jusqu'à où ? « Je ne pourrais éternellement rester vivre à la campagne. » D'un point de vue professionnel, il n'y a rien là-bas, si ce n'est l'auberge. Je pourrais reprendre le boulot de mes parents, perdurer la tradition mais ce ne sera pas demain la veille. En attendant, je dois avoir une vie, de quoi faire de mon côté. Je veux voyager, voir du monde, découvrir de nouvelles choses. Je ne veux pas seulement rester bloqué dans ma campagne, loin de tout.

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TENUE ••• Il ne semble pas surpris par ma phrase pourtant pas très détaillée, étant nouveau ici je ne suis pas certain qu’il soit au courant pour mon « histoire » mais les gens parlent, donc j’imagine que les personnes dans l’entreprise lui ont mis la puce à l’oreille en lui racontant. « En effet. » La ville donne du rêve à ceux qui n’y vive pas, je peux le comprendre, mais même si je suis content d’y habiter je ne vois pas cela comme un rêve. « Non, pas vraiment. » En quoi cela pourrait l’être, je ne pense pas avoir un jour vécut dans un endroit qui me fasse ce genre d’effet où me donnent ces sentiments. Je transmets quelques infos sur moi, comme la ville où je suis né et ai grandi, même Pékin ne me manque pas tellement, au final je suis entièrement ancré sur le professionnel sans tenir compte de mes besoins ou désirs dans le privé. « Presque » au moins nous venons tous les deux d’ailleurs. Je suis curieux de savoir pourquoi il ne repart pas s’il ne se sent pas à sa place ici, parfois on tente des choses en se rendant compte que finalement ça ne nous correspond pas, je ne pense pas qu’il soit obligé de subir cette situation s'il ne s’y fait pas. « Pourquoi ça ? » Je trouve que c’est bien la campagne, je n’y ai pas vécu et c’est vrai que je suis habitué à cette vie bruyante, entouré de gens, de centre commercial, de pollution et tout ce que comporte un habitat dans ce genre d’endroit, Tokyo n’est pas non plus la ville la moins animée ni habité, donnant réellement l’impression d’être en permanence en surnombre. « Il y a des points positifs à ne pas vivre en ville. » Et inversement. « Enfin, espérons que vous arriverez rapidement à vous sentir bien ici. » S’il tient à rester et se faire une place, autant l’encourager.

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TENUE ••• Même si je ne connaissais pas l'histoire, aurais-je vraiment le droit de l'interroger ? Dans cette entreprise, Dewei est mon patron et je ne suis que son stagiaire. Je me vois mal le questionner sur le fait qu'il se soit réveiller dans une auberge, surtout que je connais mieux cette histoire que n'importe qui dans ce bâtiment haut jusqu'au ciel. Vivre en ville est une bonne opportunité, c'est là où se trouve le travail, le meilleur moyen d'étudier, d'avoir tout à portée de main. Petit, j'enviais les jeunes venant de la ville ou ceux qui partaient du village pour les hauts buildings de Tokyo, mais maintenant que je peux avoir la chance d'y vivre, je trouve cela tellement bruyant, suffoquant et trop plein de monde. Il n'aime pas la ville ? Pourquoi ? Je voudrais lui demander, faire mon curieux, mais je sens que je n'ai pas encore ce lien avec lui pour me permettre une telle chose. Du coup, j'hoche simplement la tête. Quand il dit venir de Pékin, je ne peux m'empêcher de donner le nom de la ville où je suis né, dans le même pays que lui. Nous sommes tous les deux Chinois, et pourtant nous vivons au Japon. « Vous allez sûrement me trouver bête, mais il n'y a pas meilleur endroit que la ville pour avoir du boulot. Tout est à portée de main ici, pas besoin de faire des kilomètres pour être satisfait. » Je dis ça parce qu'il faut faire de la route entre l'auberge et le village d'où je viens, seulement pour faire des courses au marché ou voir un médecin. Il n'y a pas de restaurant, pas de karaoké, rien pour s'amuser. « Comme lesquels ? » Je suis curieux de savoir les points positifs à ne pas vivre ici. « Je l'espère aussi, merci. » Malgré tout, Dewei reste compréhensif et je lui en suis reconnaissant. « Si jamais vous cherchez un endroit pour vos vacances, dites-le moi. Je suis sûr que mes parents seraient content d'avoir un nouveau client. » Même si ce serait dangereux de l'emmener à l'auberge après ce qu'il a vécu et oublié. Si cela peut l'aider à se souvenir, ce ne serait peut-être pas plus mal, en fin de compte. En attendant, je commence à manger mon plat, tranquillement.

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TENUE ••• Il a surement ses raisons pour être venue en ville, on a toujours le choix et il a fait le sien, je n’ai pas mon mot à dire sûr quoi que ce soit, je profite simplement de partager le déjeuner ensemble pour discuter sans arrière-pensée ou curiosité mal placée. Je suis le directeur et il est le stagiaire, ce genre de réunion n'est pas commun, mais je ne m’arrête pas à ça et ne juge pas forcément sur le rang qu’on a dans la société, bien que je sois tout de même exigé et n’ai pas un caractère facile, je suis celui qui affectionne les personnes se donnant dans leurs boulots et me sont rentable, seulement ce gars n’a rien à m’apporter, du moins il aide à l’entreprise, mais n’est pas un de mes employés, c’est pourquoi je reste leste sur notre relation et sur ce que j’ai pu voir plus tôt, cette faiblesse que je n’aurais pas permise aussi aisément à quelqu’un d’autre de plus haut placé. « C’est évident. » La campagne et la ville ne peuvent pas être comparées sur certain point, même si je pense que les deux ont leurs lots de pour et de contre. « Dois-je vraiment répondre ? » Je souris légèrement en m’adossant à mon siège. « La pollution ? La surpopulation ? Tout est plus cher, plus long. L’individualité ? » En campagne je suppose que dans un petit village tout le monde se connaît, en ville c’est différent, les gens ne font que se croiser sans que personne ne fasse attention à l’autre.  « Dois-je continuer ? » Après c’est ce que je peux remarquer, mais je suis habitué, j’ai toujours vécu en ville. Seulement ma mère est une adoratrice de la nature et à Pékin j’aimais m’isoler dans ses jardins, faire des arrangements de fleurs, toutes ses choses que je n’ai plus vraiment le temps de pratiquer aujourd’hui. Des vacances ? Je ne sais pas ce que c’est, disons que j’ai disparu bien assez longtemps malgré moi pour m’éloigner encore de l’entreprise. « J’y penserais. » Un jour qui sait. Maintenant il faut terminer le repas et se remettre au boulot, je vais être occupé cet après-midi.

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TENUE ••• Il est sûr que si on me donnait à choisir entre la ville et la campagne, je retournerai très certainement chez moi. La ville a beaucoup davantage, mais c'est un endroit qui ne fera pas mon bonheur dans le temps. C'est cruel, parce que la campagne m'apporte peu de boulot, mais la ville peu de réjouissance. Faudrait trouver un juste milieu, un endroit qui soit entre les deux. J'ai choisi de venir ici pour avoir des réponses à mes questions quant au départ précipité de Dewei, mais je ne peux pas l'avouer sur ce jour-là. Du coup, je parle des points positifs qui m'ont poussé à rejoindre Tokyo. Je suis curieux de savoir les points négatifs de Dewei sur la capitale, même si ça paraît plus qu'évident quand je l'écoute me donner les raisons une à une. Il n'a pas tord pour la pollution, j'ai failli étouffer les premiers jours. Quant à la surpopulation, c'est un problème difficile à gérer, je suppose. Entre étranger et résidents locaux, le mélange doit laisser peu de place. Plus cher, plus long. Il donne de bonne réponse que j'approuve d'un hochement de tête. Individualité ? Clignant plusieurs fois des yeux, je me demande ce qu'il veut dire par individualité. Le fait que ce soit chacun pour soi ? Que les gens ne se connaissent pas vraiment ou pas du tout ? Que ce soit trop grand pour revoir toujours les mêmes personnes ? « ça ira, merci. » ça me suffit déjà à comprendre son raisonnement, pas besoin de plus. Le sujet change et je prends le risque de l'inviter chez moi, à l'auberge. Mes parents le connaissent comme étant Ying Tao, les gens du village l'ont déjà vu aussi et je suppose que quelques clients aussi. Il pourrait revenir plus tard, peut-être se rappeler ou apprendre la vérité. « Je suis content d'avoir pu parler avec vous. » Fis-je, avant la fin de mon repas. ça fait une éternité que je n'ai pas parlé avec lui plus d'une ou deux minutes, ça me fait du bien mais en même temps, j'ai mal. Terminant mon plat, je réunis les affaires et attends qu'il termine à son tour pour ramasser et jeter à la poubelle. « J'espère avoir encore cette chance à l'avenir. » Même si c'est peu probable tant qu'il est mon patron et moi, son stagiaire. Puis, j'ignore jusqu'à quand je pourrais tenir ce rôle ou si les choses vont rester sous silence bien longtemps. Le seul truc que je veux, c'est que Dewei ne m'en veuille pas.