TENUE † Je venais d’envoyer le dernier message à Eden. J’avais beau regarder mon téléphone, je savais qu’il ne répondrait pas, il me l’avait dit. Mais aussi, et sûrement parce que je mets des cœurs. Je trouvais ça trop mignon. Il faut dire que ces deux mois passés avec lui on était assez intenses, magiques ? Amusants… Je ne pourrais pas le nier, si on me demandait si j’avais été heureuse. La réponse était oui. Pour une fois, j’avais vraiment été heureuse. Il savait me faire rire, et me faire oublier pas mal de chose. Je ne pouvais pas nier non plus, que mon téléphone était rempli de photo de lui, ou de nous deux parfois. C’est stupide, je ne sais pas, mais j’ai l’impression de m’être rapproché de lui. Trop même. Surtout quand je regarde certaines photos. Les pensées que j’ai pour lui, ne sont pas normales. C’est un gosse. Il est lycéen, alors peut-être que je m’emballe car je n’ai plus eu ce genre de relation ? Je ne sais pas, mais ça me fait autant peur que plaisir. Eden est un garçon gentil, c’est sûrement pour ça. Soupirant, je rangeais mes affaires avant de partir en direction de notre lieu de rendez-vous. J’étais bien contente qu’il accepte cette petite session. Même si ça ne serait pas très dur pour lui. Je ne voulais pas le blesser bien au contraire. Soupirant, je finis par arriver, la première. M’asseyant sur un banc, je regardais le téléphone, en jouant à un des nombreux jeux que j’avais installé avant de regarder, de temps en temps, pour voir s’il n’arrivait pas. Plus je l’attendais et plus je me disais que j’étais stupide. Je l’attendais un peu trop. Rangeant mon téléphone, agacée, je finis par le voir au loin. Un sourire aux lèvres, je me levais avant de lui sourire un peu plus une fois à mon niveau. « C’est que tu as presque changé depuis ces quelques jours. » Je le taquinais avant de le regarder de haut en bas. C’est indéniable, je le trouve beau. « Alors ? La reprise des cours ? Pas trop dur ? »

TENUE † « Eden ?  » Je relève la tête de mon portable. « Pardon. » Dis-je en rangeant mon téléphone dans ma poche puis me redresse sur ma chaise. «  Qu’est ce qu’il te fait sourire comme ça ? » Je fronce légèrement les sourcils avec un petit sourire interrogateur, surpris par son observation. « J’ai souri ?  » Mon camarade hocha plusieurs fois de la tête. Ah. Je ne l’avais pas remarqué. J’esquive la question en reparlant du sujet qu’on avait commencé juste avant que Sensei ne m’ait envoyé un message. Heureusement, mon changement de sujet se fait sans encombre. Notre discussion se termine officiellement avec l’arrivée du professeur de maths. Mon ami rejoint sa place, c’est-à-dire, une place derrière moi. Les autres élèves font de même et le cours commence. Mon livre est ouvert mais je n’écoute qu’à moitié ce que dit le prof. Je repense à la question de mon ami puis aux messages de Sensei. Je n’ai jamais eu ce genre d’amitié avec une adulte. Surement parce qu’elle n’est pas une adulte comme les autres. Il n’y avait qu’à voir sur comment elle écrivait des sms pour le savoir. Elle est si… expressive. « Eden-kun ?  » La voix du professeur me tire de mes pensées. J’ai une soudaine impression de déjà-vu mais je garde mon calme puis me lève de ma table. Je me dirige vers le tableau pour lire rapidement l’équation et la résous sous les yeux ébahis de mes camarades. […]

Fin des cours, je range rapidement mes affaires pour pouvoir passer rapidement au dortoir. Je ne pouvais faire du sport avec mon uniforme. Après tout, Sensei m’avait gentiment recommandé de me changer pour être à l’aise. Changé, je pouvais enfin aller rejoindre Sensei à Ota. Car comme je l’avais deviné, elle est arrivée avant moi. J’ai du prendre un peu de retard à cause de mon passage au dortoir mais elle n’avait pas l’air d’être en colère contre moi. Au contraire. Je lui souris lorsque j’arrive devant elle. Je souffle légèrement du nez à sa plaisanterie. « Et vous, vous êtes toujours autant en forme.   » Même après une journée de travail, elle a l’air de débordé d’énergie. « Non non. Vous savez, les études ne me posent pas réellement de problèmes, ne vous inquiétez pas.  » Je travaille assez fréquemment pour pouvoir garder le niveau. « Vous allez m’apprendre à faire quoi aujourd’hui ?   » Le ton de ma voix trahit mon enthousiasme.

TENUE † J’attendais tranquillement Eden, en sachant qu’il n’allait pas tarder à arriver. J’étais en avance donc je ne me faisais pas de souci, pour autant, quand je le vis au loin arriver, un sourire égaya mon visage. Faut croire, qu’il me met de bonne humeur. C’est drôle, mais je me sens bien plus proche de lui après ces deux mois passés ensemble. On aurait pu, faire ça chacun de notre côté, mais en étant sur la même île, autant en profiter. Et c’est ce qu’on avait fait. « Et vous, vous êtes toujours autant en forme. » « Il faut. Vieille mais active. » Je lui tirais la langue amusée. En tout cas, j’étais contente de voir qu’il s’en sortait bien avec les cours. Je ne m’inquiétais pas de ce sujet-là au final, même si je ne pouvais pas m’empêcher de le faire. Et ce qui était bizarre c’est que j’en vienne vraiment à m’intéresser à sa vie, à sa vie de lycéen… Lycéen oui. C’est ce qu’il est, et je devrais peut-être arrêter de penser à ce genre de chose. Parce que je suis une sensei. « Vous allez m’apprendre à faire quoi aujourd’hui ? » Je m’étirais avant de secouer mes jambes. « On va d’abord s’entrainer. Et pour ça, on va faire 2 fois le tour du parc en courant. Puis on fera des étirements. » Interdiction de faire du Parkour sans être échauffé, je ne voulais pas qu’il se blesse. « Oui, je sais c’est le plus chiant l’entrainement. Mais je n’ai pas envie que tu te blesses. Même si jouer l’infirmière ne me déplairait pas. » Je souris doucement avant de me demander si cette phrase n’était pas déplacée. Non parce que, mon côté pervers là, il imagine tout autre chose. Secouant la tête je tapotais doucement son dos, avant de lui faire signe de la tête de me suivre. Sans attendre, je me mis à courir pour m’échauffer.

TENUE † Vieille ? Je n’avais pas l’impression d’avoir une vieille en face de moi. Même lorsque je lui parlais par texto, elle avait rien d’avoir un comportement de vieux. S’il n’y avait pas que le « sensei » en haut de la discussion, je ne pense pas qu’on pourrait deviner que je parlais avec une personne plus âgée que moi. Quoi que, elle avait tendance à s’inquiéter de tout. Ça devrait être son côté pédagogue qui refaisait surface ou sa nature curieuse. Ou encore les deux. Personnellement, je me pencherai plus sur la deuxième option. La séance commence donc par des échauffements, ce qui me parait assez logique, même si j’avais tendance à les oublier. «  Ok !  » Je m’échauffe efficacement les chevilles en les tournant une à une. Je laisse ma tête tomber de droite à gauche. «  Mais vous êtes une infirmière. Vous ne faites pas que jouer.  » Dis-je humoristiquement avec un sourire. Cependant, je ne compte pas me blesser pour autant. Donc hors de question de négliger cette partie. Elle se mit à courir et je réagis rapidement en faisant la même chose pour ne pas me faire distancer. Je cours à ses côtés tout en gardant le silence. J’aime bien courir donc cet échauffement ne me déplait pas. Arrivés à la moitié du tour, je mets une tape amicale dans le dos de sensei et me mets à accélérer pour la dépasser. Après tout, qui a dit qu’un échauffement ne pouvait pas être drole ? Et puis, ce n’est pas comme si cette accélération allait me prendre tout mon souffle. Mais je décide de ralentir exprès pour lui donner une « chance » de me rattraper. Je trottine sur place, avec un sourire amusé tout en la regardant s’approcher de moi. C’était ma façon à moi de la taquiner. Sensei est très sportive mais j’ai la force de la jeunesse en plus.

TENUE † « Mais vous êtes une infirmière. Vous ne faites pas que jouer. » Je le regardais avant de sentir une espèce de boule dans le ventre et une chaleur envahir tout mon corps. J’ai tellement honte. Eden est trop mignon et pur pour avoir compris le double sens de ma phrase. Jouer l’infirmière n’avait rien de bien mignon dans ma tête, bien au contraire. C’était plus un aspect sensuel voire sexuel qui se trouvait dans ma tête. Et rien que d’y penser, ça me mettait mal à l’aise toute seule. Il fallait que j’arrête tout ça… Il le fallait avant que ça n’aille bien trop loin. Je ne devais pas dépasser la ligne. C’était une élève, qui plus est mineur, et lycéen… Gonflant mes joues, je me mis à courir plus vite. « Je te ferai des piqûres sans aucune douceur, tu verras. » Je le narguais avant de changer mon esprit. Sentant alors une tape dans mon dos, je le regardais, avant de le voir partir bien plus vite. Ah… Les jeunes. Ou les hommes je ne sais pas trop. « YAH ! » Dis-je simplement sans pour autant accélérer je n’avais pas envie de m’essouffler tout de suite. Le voyant ralentir, j’en profitais pour accélérer et le rattraper. « T’as pas honte de me narguer comme ça ? Tu verras quand on fera du parkour. Tu feras moins le malin petit homme. » Je lui tirais la langue avant de finir par m’arrêter de courir. M’étirant, je me penchais en arrière et en avant, pour finir par tourner mes chevilles et mes poignets. « On va vraiment débuter de façon simple. En plus tu as de grandes jambes, donc ça peut-être un avantage pour toi. » Je me plaçais à côté de lui, collant mon corps contre le sien avant de ruminer. « Je suis vraiment petite… » Je lui donnais un coup de hanche avant de lui faire signe de me regarder. Un banc se trouver devant nous. Le dossier de celui-ci face à nous. Je me mis à courir avant de sauter sur le bord du dossier pour finir par sauter rapidement de l’autre côté sur le sol. « Ca peut paraître enfantin mais c’est la base. Apprendre à sauter sur les obstacles bas. Banc, rambarde, petit muret et j’en passe. » J’attendais qu’il fasse à son tour ce que je venais de faire.

TENUE †« Ouh, j’ai peur.  » dis-je en rigolant face à sa menace avant de continuer de courir. Avant de faire de finir le dernier tour, j’accélère la cadence pour la dépasser. Mais en voyant qu’elle n’accélère pas, je ralentis pour diminuer la distance entre nous. Je reprends un rythme plus cadencé et elle me rejoint. « Petit homme ?   » C’est la seule chose que je retiens de ce qu’elle vient de dire. Elle est bien la seule à m’appeler comme ça, tout en sachant qu’elle est bien plus petite que moi en taille. Je m’arrête puis reproduis les mêmes gestes qu’elle. Lorsqu’elle parle de mes jambes, je baisse du regard pour les regarder, comme pour vérifier ses dires. Je hoche de la tête. « Oui, vous l’êtes.  » C’est la vérité. Mais j’ai eu droit à un coup de hanche en guise de réponse, ce qui me fait sourire, ne me sentant absolument pas coupable. Elle me fait une première démonstration en sautant le banc face à nous. « Sensei, c’est vraiment enfantin. Tous les garçons font ça. » Ou les enfants en général, filles y comprises. Je prends un peu d’élan pour sauter le banc et atterrir de l’autre côté. « Vous voyez, facile ! Je sais que vous ne voulez pas me blesser, mais je ne suis pas fait en sucre.  » C’est parce que je m’entends bien avec Sensei que je peux me permettre de lui parler franchement. Ça aurait été un simple professeur, j’aurai suivi les étapes sans broncher mais surtout sans intérêt. Voulant lui prouver ce que je venais de dire, je saute une deuxième puis troisième et une quatrième fois le banc. En même temps, j’avais l’habitude de sauter des barrières ou des haies pour fuir les policiers lorsqu’il y avait des patrouilles au moment où je travaillais. Je me retourne vers Sensei. « Prochaine étape ? » demandai-je en penchant légèrement la tête, avec un sourire.

TENUE † « Petit homme ? » Je souris doucement en le voyant réagir à ce petit surnom. Je le regardais avant d’hocher la tête. « T’auras beau dire tu es un petit homme. Je suis plus âgée que toi. » Je lui tirais la langue pour le narguer. Certes c’est sûr qu’il est plus grand en taille. Beaucoup trop grand même… Mais tant mieux pour lui dans un sens, parce que beaucoup d’hommes complexaient sur leur taille… Moi-même face à lui j’en venais à complexer. J’étais petite pour une fille. Bon, ça va, je ne suis pas en dessous des soixante centimètre… Mais… Pas loin non plus. C’est déprimant. Il me dépasse bien largement d’une tête le petit monstre là. « Oui, vous l’êtes. » « Tsss. Arrête de grandir, bientôt j’aurai un torticolis pour te regarder. » Je lui donnais un petit coup de hanche, avant de lui montrer le premier exercice. Le plus simple de tous. C’était la base. Mais en voyant sa réaction, une grimace se logea sur mon visage. Il me narguait vraiment en plus. D’ailleurs, il fit le saut sans aucun souci. Les gosses de nos jours. « Vous voyez, facile ! Je sais que vous ne voulez pas me blesser, mais je ne suis pas fait en sucre. » « Si, tu es en sucre pour moi. Je n’ai pas envie que tu te blesses par ma faute. » Et j’étais sincère. Parce que ça m’ennuierait vraiment qu’il puisse se faire mal à cause de moi. Et en plus de ça il me narguait en effectuant le saut à plusieurs reprises. Une fois qu’il eut fini je me mordis les lèvres en le regardant longuement. « Dis-donc toi… Tu ne serais pas en train de me narguer ? » Je pinçais sa joue l’air de rien avant de le lâcher et partir un peu plus loin. « Bon, puisque c’est trop facile pour toi. Allons faire quelque chose de plus complexe. » Au loin se trouvait un petit local. Sûrement pour ranger les outils que les jardiniers utilisaient pour entretenir le parc. Ou que sais-je. Assez haut, je montais sur le toit en deux trois mouvements avant de m’assoir les jambes dans le vide. « Rejoins-moi. Voyons comment tu montes un mur. »

TENUE †« Ça se voit. » Dis-je avec un sourire taquin. Je n’avais pas remarqué à quel point j’étais à l’aise avec Sensei. Je me permettais de la narguer ou l’embêter sans me poser de question. Quand ce n’est pas sur son âge, c’est sur sa taille. En fait, c’est rare que j’utilise mes qualités physiques en guise de plaisanterie. J’avais tendance à ne pas aimer mes traits parce qu’ils me rendaient un peu trop inaccessible mais là, je me surprends à les utiliser pour la tourner en bourrique. Après un petit coup de hanche donné par Sensei pour me sortir de mes pensées, elle me montre le premier exercice, que je juge un peu trop facile, malgré tout le respect que je lui dois. Sa grimace m’arrache un rire. « Je ne me blesserais pas Sensei. Et puis, dans le pire des cas, vous êtes là non ? Qu’est ce qu’il peut m’arriver à vos côtés ?  » A nouveau, je viens la narguer en répétant cette exercice, lui montrant à quel point c’est enfantin pour moi. « Aiiie, aieee ! » Je me masse la joue tout en la regardant s’éloigner doucement de moi. En un rien de temps, elle se trouvait déjà sur une petite cabane. C’était très élégant. Elle était très agile et classe. Cette démonstration me rappelle celle de Jae Hyun, où j’avais été bouche bée devant sa performance. J’avoue qu’elle a monté la barre assez haut, mais ça ne m’arrêtera pas. Je levais la tête. « Je préfère ça. » J’avais repéré les points où elle avait pris appuie mais je ne pense pas que ce serait possible pour moi de le faire de la même manière. Je m’approche du local pour aller toucher la matière. Je ne voulais pas être surpris au moment de la montée. Je prends du recul, fais quelques mouvements de rotation de bras puis cours vers le local. Arrivé à une certaine distance, je prends appuie sur ma jambe et me hisse vers le haut en appuyant plusieurs fois sur le mur. J’attrape le haut du mur avec mes mains puis me soulève pour m’assoir à côté de Sensei. « Alors ?  » Je tourne la tête vers elle avec un sourire.

TENUE † « Ça se voit. » Je le regardais avant de rire. Il avait du répondant le petit. Il était de plus en plus à l’aise avec moi. Ce n’était pas pour me déplaire. Bien au contraire, j’aimais bien cette proximité qui s’était installée entre nous. En tout cas, il n’arrêtait pas de me narguer, et plus il le faisait, plus je me sentais comme apaisée et heureuse en sa compagnie. C’est bizarre quand même comme sensation, mais ce n’est pas déplaisant pour autant non plus. « Je ne me blesserais pas Sensei. Et puis, dans le pire des cas, vous êtes là non ? Qu’est ce qu’il peut m’arriver à vos côtés ? » « Qui sait. Je peux empirer ton état. Tu ne devrais pas me faire autant confiance. »[/color] Je lui tirais la langue amusée, avant de lui tirer la joue. Ses gémissements me firent rire. Il était tellement mignon comme ça. Mais bon, puisqu’il trouve ça trop facile, je le fais venir vers une petite cabane, pour monter le niveau, on va voir s’il rigole toujours autant. C’est du gâteau pour moi. Je monte en deux trois mouvements. Assise sur le bord, les pieds dans le vide, j’attends qu’il me rejoigne à son tour. Amusée, je le regarde prendre son élan et monter. Je me retiens de rire, parce que la façon dont il le fait, est assez risible quand même. « Alors ? » Je le regardais avant de finir par rire franchement. « T’es trop mignon, je te jure. » Dis-je en tapotant sa cuisse. « Hum… Imagine un hippopotame qui monte un mur. C’était la même vision. » je le narguais encore et toujours avant de tousser pour éclaircir ma gorge. Je posais mes mains sur le béton derrière moi, avant de balancer doucement mes jambes. « C’était pas mal. Mais on voit que tu forces, ça alourdit ton corps et tes mouvements en fait. Mais c’est normal, au début je ne valais pas mieux. » Je le regardais, fixant beaucoup plus sa nuque pâle et son cou qu’autre chose. « Maintenant j’ai aucune limite. Paraît qu’il faut pas trop avoir confiance, mais ça ne me dérange pas. Si je dois tomber et mourir c’est que c’était mon destin. »

TENUE †Malgré ce qu’elle dit, il est trop tard. Je lui fais confiance. Surement même un peu trop à mon gout mais c’est comme ça. Je n’ai pas peur de me blesser puisque je sais qu’elle sera là pour soigner mes blessures physiques. Dans quelques années, quand je serai médecin je pourrai savoir quel soin appliqué mais pour le moment, je m’en remets à elle. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle me tire sur la joue. Je gémis en guise de plainte mais ça l’a fait plus rire qu’autre chose. Je lui fais une petite grimace pour dissuader de recommencer. Sensei monte sur le local en un rien de temps. C’était gracieux et classe. Est-ce que j’arriverai à avoir ce niveau ? Peut être. Mais pour l’avoir, faut déjà que je commence à grimper pour la rejoindre. Ce que je fais après quelques minutes d’attente. Bien évidemment, je ne suis pas aussi doué qu’elle mais je suis tout de même arrivé à m’asseoir à côté d’elle. Je lui demande son avis mais elle rit à la place. Mignon ? Je fronce légèrement les sourcils. «  Ce n’était pas le genre de compliment que je voulais entendre.  » Comment on peut être mignon quand on essaye de faire une action classe ? «  Un hippopotame ?!  » Je fais une moue. Réellement ?! Un hippopotame ? «  Ne vous moquez pas ! » Je pousse son épaule avec la mienne pour la faire arrêter. Les explications plus sérieuses arrivent et je les écoute attentivement. «  Comment je devrais faire pour moins forcer ? » Si je ne me force pas, je pourrai pas me hisser vers le haut. Je réfléchis sérieusement à la question en levant la tête. Peut être qu’avec plus d’entrainement je comprendrai le truc ? Je tourne la tête vers Sensei. «  Je ne suis pas du même avis. » Je fixe le ciel. «  Vous donnez l’impression que tout est déjà tracé. Ce qu’il fallait dire c’est que vous ferez tout pour ne pas tomber et mourir. N’êtes vous pas d’accord ? » Mon regard se pose sur Sensei, petit sourire à mes lèvres.

TENUE † « Ce n’était pas le genre de compliment que je voulais entendre. » Je le regardais, totalement amusée de voir qu’il voulait autre chose comme compliment. Il était bien mignon à réagir de la sorte en fait. Et c’est bien pour ça que je veux bien continuer à le taquiner. C’était peut-être son côté jeune ? Je n’en sais trop rien, mais j’aime ça. « Un hippopotame ? Ne vous moquez pas ! » Je le sentis me donner un coup d’épaule, alors que je riais franchement. « Comment je devrais faire pour moins forcer ? » « C’est une question d’habitude mon petit hippopotame. Plus tu t’entraineras et plus tes mouvements seront fluides. » Plus facile à dire qu’à faire, ça c’est clair. Mais c’est comme ça qu’on y arrive. Me penchant vers lui, je lui volais un baiser sur la joue avant de sourire. « Parce que ta réaction était trop mignonne. J’avais envie. »[/color] Ajoutai-je en lui tirant la langue. Pour autant, en quelques secondes, l’ambiance changeait du tout au tout. Je lui confiais, sans grand mal, que la peur du vide ne me faisait rien. Si je devais tomber un jour, alors je tomberai, ça sera mon destin. Ça ne me dérange pas tant que ça au final. [color#36b39c]« Je ne suis pas du même avis. Vous donnez l’impression que tout est déjà tracé. Ce qu’il fallait dire c’est que vous ferez tout pour ne pas tomber et mourir. N’êtes vous pas d’accord ? »[/color] Je le fixais, longuement, alors que mon cœur, s’emballait à une puissance, que je ne saurais expliquer. Il se trompait. Il se trompait lourdement sur moi. Mais ça, il ne pouvait pas le savoir. Finissant par rompre le contact visuel, je souriais avant de me relever. « Pourquoi devrais-je éviter de tomber ? Tu as peur de mourir ? Pas moi. » Debout face au vide, je finis par me tourner dos à celui-ci, les pieds, près du bord. « Si je tombe de cette hauteur, tu crois que je vais mourir ? » Je le fixais avant de me pencher dangereusement en arrière.

TENUE †C’est la première fois qu’on me traite d’hippopotame. En fait, je vois mal cet animal sauter. Etait ce si nul que ça ? Non, je suis sur qu’elle se moque de moi alors je lui donne un petit coup d’épaule en guise de « revanche ».  « Moué. Si je suis un hippopotame, vous êtes une chèvre. » Pourquoi un chèvre ? Parce que j’avais vu une vidéo de chèvre faisant du « parkour ». Ça m’avait bien fait rire. J’étais prêt à montrer la vidéo à Sensei mais elle dépose un bisou sur ma joue. Je me décale légèrement mais c’était trop tard. Je reste immobile tout en la fixant un court instant. Je mets ma main sur la joue, avec un air grognon. « C’est quoi cette excuse ? » dis-je sous un ton plaintif. Ça va encore car ce n’était qu’un bisou sur la joue. Je ne suis pas si agacé que je ne le montre. En y repensant, à part ma mère, personne n’a exercé ce genre de contact physique avec moi. Elle doit vraiment me prendre pour un gamin pour faire ce que ferait ma mère. D’après ce que j’entends, elle n’aurait pas peur de tomber, ni de mourir. Je lui expose ce que je pense. Elle me regarde longuement. Est-ce que j’ai dit quelque chose de travers ? Je soutiens son regard, attendant qu’elle me dise quelque chose. Elle finit par se lever. Je lève la tête pour ne pas la perdre de vue. Mes battements de cœur s’accélèrent quand elle joue la funambule au dessus du vide. Je me relève immédiatement en mettant mes mains devant, comme pour la calmer. Je la regarde sous un air inquiet. Elle continue de se balancer dangereusement au dessus du vide. « D’accord, j’ai compris que vous n’avez pas peur de tomber… Ni de mourir. » Commençant à stresser, je passe la main dans mes cheveux. J’essaye de garder mon calme. « Mais ne pas avoir peur de la mort ne signifie pas négliger le prix de sa vie.  » J’ai l’impression de raconter n’importe quoi, mais je continue. « Votre vie est précieuse. Et même si vous êtes immortelle, ne me faites pas de pareille frayeur. » Je tends ma main vers elle. Bref, ce que je voulais dire, c’est que même si elle ne craignait pas la mort, moi, j’ai peur qu’elle meurt.

TENUE † « Moué. Si je suis un hippopotame, vous êtes une chèvre. » J’arquais un sourcil, surpris de cette annonce. Une chèvre ? Bon… Pourquoi pas. C’est mignon en soit. Mais ça reste tout de même assez surprenant comme choix. « C’est mignon une chèvre. Les gens aiment les caresser, contrairement aux hippopotames. » Je lui tirais la langue avant d’imiter la chèvre. « D’ailleurs au moins je peux l’imiter… Contrairement à toi. » Faut y aller pour imiter un hippopotame. Mais il n’empêche qu’il est bien mignon, et c’est bien pour ça que je lui pinçais la joue. Il ne semblait pas aimer ce geste, mais moi si, alors il allait devoir faire avec. C’est comme ça. « C’est quoi cette excuse ? » « Fais gaffe je peux trouver pleiiiiins d’autres excuses. » Je fis mine de faire un rire un peu sadique, avant que la conversation ne change. En fait, c’était passé du rire, à la réalité. Je parlais sincèrement de ce que je pensais du vide, de la façon de mourir. Je n’avais pas peur. J’ai toujours eu des pulsions suicidaires depuis sa mort…Pour autant, je ne suis pas d’accord avec ce qu’il dit et c’est peut-être stupide, mais je finis par me lever et lui montre, réellement que je n’ai pas peur. Dos au vide, je peux sentir le vent faire virevolter mes cheveux. Je me sens comme bien. Est-ce que je peux mourir de cette hauteur ? Je ne pense pas. Un bras cassé ? Une jambe ? Qui sait, il faut sauter pour avoir la réponse. Il se relève immédiatement. Dans son regard, je lis la peur. « D’accord, j’ai compris que vous n’avez pas peur de tomber… Ni de mourir. » Je lui souriais doucement à cette phrase. « Mais ne pas avoir peur de la mort ne signifie pas négliger le prix de sa vie. » « Pourquoi ? N’est-on pas maître de notre propre vie ? » Demandai-je en me tenant sur une seule jambe, en laissant l’autre, pendre dans le vide. « Votre vie est précieuse. Et même si vous êtes immortelle, ne me faites pas de pareille frayeur. » Est-ce que ma vie est vraiment précieuse ? J’avais beau le fixer, je n’avais pas de réponse. Il était là, inquiet, à me tendre sa main pour que je l’attrape. Je mordillais ma langue en sentant mon cœur s’emballer. En fait, l’entendre me dire ce genre de chose me donnait du baume au cœur. Je me sentais comme importante ? Aimée ? Un truc dans le genre. Finissant par tendre la main, j’agrippais doucement la sienne avant de quitter le rebord et me mettre face à Eden. Appuyant mon front sur son épaule, je fermais les yeux, ma main elle, serrait toujours la sienne, l’autre se posait sur sa taille, pour s’agripper à son haut. « Ça restera notre secret ? »

TENUE †Les chèvres sont « réputées » pour leurs acrobaties lorsqu’elles sautent. Quoi que, je n’ai pas besoin de lui montrer la vidéo pour me justifier car elle imite le bruit d’une chèvre. Je ne me suis jamais demandé qu’est ce que l’hippopotame faisait comme bruit et je n’ai pas eu le temps de le lui demander car elle dépose un petit bisou sur ma joue. Comme un enfant qui trouve ce geste embarrassant, je la gronde de cette initiative. « Je ne me laisserai pas faire. » Disais-je pour me défendre. Je n’aurai jamais pensé que la suite des événements tournerait ainsi. Je découvre un nouvel aspect de Sensei. C’est assez déstabilisant. Ses actions m’effrayent. Est-ce qu’elle compte réellement sauter dans le vide ? A cette hauteur, ce n’est pas la mort assurée mais elle risque de se faire bien mal. Je ne pouvais pas rester à ne rien faire. « Ce n’est pas une excuse. Avec ce genre de raisonnement, les gens feraient n’importe quoi. Que se soit faire mal à autrui ou à soi même !   » Il n’existe aucune loi qui interdit de se faire du mal mais n’est ce pas une action égoïste ? Tout est relié, en se faisant du mal, elle fera du mal à ses proches et sa famille. Et même si je ne suis qu’un de ses étudiants, sa chute ne me laissera pas indifférent. Sa jambe est au dessus du vide. Je sens de plus en plus l’angoisse monter en moi. Je lui tends la main en espérant qu’elle l’attrape, qu’elle s’éloigne de ce danger qu’est le vide. Mais plus que le vide, j’espérai qu’elle chasse ce genre de pensées de sa tête. Je me force un sourire pour l’inciter à s’approcher de moi. Heureusement, elle finit par attraper ma main. Je peux enfin respirer. Je soupire de soulagement et la laisse s’agripper à moi. J’ignore ce qui vient de se passer. Je n’ai pas l’impression que c’est réel, pourtant, ça l’est. Les battements rapides de mon cœur prouvent que je ne suis pas en train de rêver. J’avais plein de questions à lui poser mais ce n’était définitivement pas le moment. J’hésite un instant avant de lui tapoter doucement le dos. « D’accord.   » Disais-je dans un murmure.

TENUE † « Ce n’est pas une excuse. Avec ce genre de raisonnement, les gens feraient n’importe quoi. Que se soit faire mal à autrui ou à soi même ! » Il est vrai que j’ai des tendances un peu bizarres. Ce n’était pas nouveau. C’était là depuis des années, mais Eden n’était pas au courant. Plus je restais avec lui, plus je m’ouvrais… Je ne sais pas si c’était réellement bien ou pas, mais j’avais tendance à apprécier sa compagnie. Depuis quand ça ne m’était pas arrivée ? Je n’en sais trop rien. Parfois j’ai envie de tout lui raconter, parfois j’ai juste envie de profiter comme si mon passé n’existait pas. C’est stupide comme réaction, je le conçois bien. Je suis la première à critiquer la fille dans les films quand elle ne veut pas oublier son amour du passé. Mais c’est plus facile de critiquer que d’agir. LE vide m’attire depuis tant d’années. C’est tout aussi idiot. J’ai souvent pris des risques, certains s’étaient déjà posé des questions. Est-ce que j’avais vraiment pris toutes les sécurités possibles ? Ou est-ce que j’étais tombée exprès ? Parfois, le simple fait de chuter, de me blesser, amenait une sorte de bienêtre. Pourtant là, aujourd’hui, face au vide, une jambe prête à me faire tomber, je peux voir Eden. Inquiet. Sa main tendu, je ne tardais pas à le rejoindre avant de me blottir dans ses bras. La sensation de chaleur qui m’envahissait était tel que je me mis à le serrer plus fort. Je voulais que ça reste entre nous. Je ne voulais pas que ça se sache. Je savais que je pouvais lui faire confiance, mais je lui en fis par. Plus les secondes passaient et moins je voulais quitter ses bras. Ma tête enfouit dans son cou, j’inhalais son odeur, sans me lasser. En fait, il avait le chic pour m’apaiser. Si je pouvais je m’endormirai dans ses bras…