Junmin n’était pas le genre d’étudiant à suivre tous les cours, encore moins ceux de sport. Il n’était pas mauvais élève, seulement il ne voyait pas l’utilité de suivre des cours ennuyeux et pour le moins inutile à son avenir. Du sport, il en faisait où il voulait, quand il voulait. Il n’avait pas besoin de le pratiquer à l’école, qui plus est en compagnie de personnes pour qui il ne porte aucune affection. Quoi de plus ennuyeux au monde que de passer du temps avec des personnes totalement inintéressantes ? Mais, une semaine plus tôt, il avait appris, en écoutant quelques conversations qui fusaient dans l’amphithéâtre, que la natation était au goût du jour, et qui plus est, que la classe dans laquelle se trouvait ce cher Ying était aussi de la partie. Alors, sans aucune hésitation, il s’y était rendu, n’oubliant pas de s’acheter un short de bain. Il savait nager, mais il n’était pas fréquent qu’il se rende à la piscine. Comme s’il avait le temps pour ça, après tout ? Un Ying, seulement vêtu d’un maillot de bain, mouillé de la tête aux pieds, les cheveux lui collant au visage et des gouttes dégoulinant sur sa  peau douce… Junmin s’en retrouvait excité et frustré. Il avait entendu ce jour depuis une semaine. Et maintenant qu’il y était, il n’avait pas pu détacher son regard du chinois. Il se mordait la lèvre d’impatience, vivement que ce cours en finisse car il n’en pouvait plus. Il n’en avait que faire de la natation, tout ce qu’il voulait c’était piéger le petit Ying à la fin du cours, une fois que tout le monde serait parti, et se retrouver enfin seul avec lui. Il en salivait d’avance.

Et heureusement pour lui, la fin arriva bien vite. Les étudiants étaient heureux d’enfin sortir de l’eau qui les rendaient tout ramollos. Tous se ruaient vers les vestiaires. Junmin prit son temps et lorsqu’il arrivait au niveau du large et petit couloir menant aux douches et aux vestiaires, il se posa contre le mur, attendant qu’enfin la classe de Ying arrive à sa hauteur. Il trépignait d’impatience. Enfin, il vit quelques élèves qu’il avait aperçu traîner autour de Ying arriver, et lorsqu’enfin celui apparu dans son champ de vision, Junmin se décolla du mur, se dirigeant vers lui, le bloquant le passage. Il n’avait pas mesuré l’impact, et Ying venait de se cogner contre le torse de Junmin. Mais Junmin resta stoïque et avança même d’un pas, forçant le chinois à reculer un peu. Il jeta un coup d’œil derrière lui pour s’assurer qu’ils étaient tous dans les vestiaires, puis il saisit le poignet de Ying, le tirant vers le bord du bassin. Il s’arrêta juste avant de rentrer dans l’eau, et se retourna vers le plus petit, un sourire en coin. Il pencha sa tête vers lui. « C’est un de mes fantasmes de le faire dans l’eau, dans une piscine, alors que les autres peuvent nous surprendre. » murmura-t-il contre son oreille, la léchant au passage.

En règle général, Ying n'aimait pas les cours en commun. Il considérait que mélanger les classes n'étaient pas forcément bon pour l'apprentissage. Certains élèves ont des méthodes parfois rustre pour apprendre et d'autre ne sont pas assez bon élève, ne se concentre pas et prennent tout ça pour un jeu. Sa classe, Ying la considérai comme studieuse et il avait peur que la classe avec laquelle il allait se retrouver ne le serait pas assez et déconcentrerait tout le monde. Oui, même un cours de natation se doit d'être apprit rigoureusement, c'était son point de vue. Mais quand on se rend compte qu'il y a dans cette classe l'homme pour qui on est éperdument amoureux ça, c'est la catastrophe. Ying évita au maximum son regard, parce qu'il savait que le regarder en simple short de bain lui provoquerait des sensations qu'il ne désirait pas montrer à tout le monde. Il ne l'observa donc à aucun moment ou peut-être un peu, quand ce dernier était occupé dans la piscine. Mon dieu, qu'il est beau...

Mais Ying n'avait pas non plus oublié leur dernier échange de texto. Le royal s'amusait à foutre le bordel partout, et il avait sonné dans leur relation en échangeant des propos qui étaient, pour le moins, assez ambiguë. Comme la relation que le chinois avait avec un lycéen et comme la relation que Junmin avait avec une fille. Une autre cette fois. Pourquoi se battrait-il pour cette fille avec un autre garçon si ça n'était pas sentimental ? Si Junmin osait poser ses mains sur quelqu'un d'autre que lui, pour sûr que Ying le tuerait cette fois-ci. La fin du court arriva. Ying discutait encore avec quelques uns de ses camarades avant de se diriger vers les vestiaires mais avant même d'avoir pu passer le petit couloir, il se fit arrêter très vite. Il était rentré de plein fouet dans un corps, et quand il releva la tête, son cœur rata un battement. Junmin. Il recula, bien qu'il évaluait un possible échappatoire. Il était seul avec lui et il savait pertinemment que, s'ils se trouvaient seuls, il y aurait plus que de simple propos échangés. Bien entendu que ça ne l'aurait pas dérangé mais là... avec tout ce que Junmin lui avait dit, il ne pouvait pas faire comme si de rien n'était. Comment Junmin y parvenait-il, lui ? Il frémit, ferma un court instant les yeux et sentit une bouffée de chaleur l'envahir sous ses mots... Il aurait pu s'abandonner si seulement il le pouvait. Il posa ses mains sur le torse du plus jeune et, de façon inattendu, le poussa brutalement vers l'arrière, le faisant chuter dans la piscine. Son regard n'avait plus rien de désireux ou d'envieux, il était en colère. Il attendit que Junmin remonte à la surface avant de se justifier.

« Tu te moques de moi, hein ? » Sa voix était sèche, froide. Il s'accroupit sur le bord de la piscine et fixa le regard de Junmin sans ciller. « Comment tu fais pour faire comme si de rien n'était à chaque fois ? Tu as cette facilité que je n'ai pas Junmin. » Et alors que le plus jeune venait de prendre appuis sur le rebord de la piscine pour se hisser, Ying le poussa à nouveau, le renvoyant dans la piscine. Cette fois, Junmin ne pourra pas fuir et, qui plus est, Ying l'avait complètement prisonnier à lui, il ne le laisserait pas filer ni tenter quoi que ce soit pour l'empêcher d'avoir ses réponses. Junmin, pour une fois, était en position de faiblesse et devra faire avec. Ying avait l'intention d'avoir une vraie et bonne discutions avec lui. Et cette fois, il ne plierait pas !

À vrai dire, Junmin se trouvait complétement con dans cette situation, à lui parler d’un de ses fantasmes et de lui faire une proposition osée. C’était à croire qu’il n’y avait décidément que le corps du chinois qui l’intéressait. Mais Junmin était un lâche, il s’était réfugié derrière cette fausse vérité pour approcher de nouveau Ying sans mettre sur le tapis un sujet qui fâche. il n’avait pas oublié leur dernière conversation. Comment l’oublier alors que Junmin s’était clairement caractérisé comme un jaloux et que Ying l’avait traité de connard. Et mine de rien, Junmin s’était senti légèrement blessé par ses propos. Mais il était un connard égoïste, il le savait, alors pourquoi ça faisait mal lorsque c’était Ying qui lui balançait cette vérité en pleine face ?

Junmin haussa les sourcils lorsqu’il sentit les fines et douces mains du chinois se poser sur son torse. Il allait réellement accepter ? Devenait-il de plus en plus facile ? Ce n’était pas son genre de se laisser aller de cette manière, même s’il savait que le chinois ne lui résistait pas longtemps. Mais quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il sentit le sol se dérober sous lui et l’eau tiède du bassin entrer en contact direct avec sa peau. Il n’eut même pas le temps d’arrêter sa respiration, ou de fermer les yeux, trop surpris par le geste brusque de Ying. Il battit des bras et des jambes, remontant à la surface le plus vite possible. Il s’appuya contre le bord du bassin et toussa, recrachant l’eau qu’il avait avalé. « Mais t’es complétement malade ! J’aurai pu me noyer. » Sa voix aurait fait tremblé les murs si elle n’était pas cassée par la quantité de chlore que Junmin venait d’avaler. Il toussa à nouveau, et inspira une grande bouffée d’air, essayant de se calmer. Appuyé sur ses avant-bras, il était désormais à la même hauteur que Ying qui s’était accroupi. On pouvait lire dans son regard la colère de s’être fait repoussé, surtout de cette manière, et la surprise face à son initiative. Mais dans le fond, Junmin aimait lorsque le chinois prenait les devants comme ça, même lorsque cela incluait repousser Junmin et le faire tomber à l’eau, le noyant presque. Il secoua sa tête, il devait vraiment arrêter de penser à ça dans un moment pareil, il était supposé être énervé.

Il haussa un sourcil à la remarque du plus âgé. De quelle facilité parlait-il ? Parce qu’il croyait que c’était facile, de ne pas comprendre ce qui nous arrive, d’agir différemment de ce que l’on avait prévu, de ne pas agir correctement avec une certaine personne sans raison apparente ? Parce qu’il croyait que c’était facile de désirer une personne sans en comprendre la raison, sans vouloir en comprendre la raison, au point d’être possessif jusqu’à ce qu’on étouffe l’autre ? Junmin n’aimait pas cette position d’infériorité, il se hissa ses bras pour sortir de l’eau. Mais c’était sans compter sur Ying qui le repoussa dans l’eau. Ok, Junmin ne trouvait plus ça très sexy, qu’il prenne les devants. Ça en devenait chiant, Junmin était piégé, il ne pouvait rien faire. Il souffla, regardant d’un regard mauvais le chinois au bord de la piscine. Il s’avança doucement, posant ses mains sur le rebord pour ne pas rester en équilibre dans l’eau pendant une éternité ou il risquerait d’avoir une crampe et de se noyer. Et ce n’était pas Ying avec ses muscles inexistants qui allait le sauver. « Quoi ? Ça te dérange ? » Junmin ne savait pas quoi dire. Que pouvait-il lui dire après tout ? « Et j’ai l’air de me moquer de toi ? »

Ying rêvait de Junmin jour et nuit. Il pensait sans cesse à lui que ça soit simplement de son visage comme de son corps. Il avait ce garçon dans la tête, dans le cœur, et rien ni personne ne pouvait faire autrement, c'était comme ça. Mais est-ce que ça lui donnait le droit de penser des choses mal de lui ? Comment Junmin pouvait-il penser que Suhwan et lui se rejoignait le soir pour coucher ensemble ? Bon, d'accord, un garçon entrant dans la chambre d'un autre en pleine nuit, discrètement, ça fait vraiment louche mais c'était en toute innocence. Voilà le problème des jeunes actuels, ils pensent toujours au sexe et ne peuvent même pas s'imaginer à une amitié. Tout de suite, ils se faisaient des films érotiques. Suhwan savait déjà que Ying avait le cœur pris, parce qu'il lui en avait parlé, et non Ying n'avait couché avec personne d'autre que Junmin. Il ne pourrait même pas avoir l'idée de le faire avec quelqu'un d'autre. « Arrête de faire l'ignorant. C'était quoi ça, l'autre fois ? Le fait que tu me prennent pour un mec facile. Parce que tu couches avec la première fille venue, t'imagine que je fais pareil ? » Et bam, ça c'est fait. Au moins, c'était une vérité qu'il n'aurait plus à lui lancer. Mais d'un côté, Ying ressortait la jalousie qui l'avait tenaillé il fut un temps. Jalousie qui perdurait malgré tout.

S'il se moquait de lui ? Ça en avait tout l'air. Lui parler de fantasme, croire qu'il pourrait à nouveau écarter les cuisses sans faire allusion à leur dernière conversation. Est-ce que Junmin était un lâche qui préférait parler derrière l'écran de son portable plutôt qu'en face ? Il se mordit la lèvre inférieure, posant ses doigts sur les cheveux de Junmin, les lui caressant. « Je ne laisse vraiment personne d'autre me toucher. C'est dingue que tu ne veuilles pas le comprendre. Le fait que tu sois le seul à me faire de l'effet. A m'exciter. A m'attirer. » Ses doigts s'agrippèrent à ses cheveux, son regard glissant dans le sien. « Faut juste que t'arrête avec toutes ses filles, ou je vais vraiment finir par être trop jaloux. » Au moins, il lui avouait qu'il ne supportait pas tout ces ont-dits. Parce qu'il espérait que Junmin le rassurerait et lui dise qu'il était le seul pour lui également. Mais il pouvait rêver, non ? Il pouvait aisément se brosser quand à une telle révélation. Déjà qu'il avait mit du temps pour lui dire qu'il était sien, alors espérer qu'il se dévoile serait un peu trop demandé. Ying se redressa, cessant tout contact avec Junmin. Il était bien décidé à lui montrer toute sa détermination, à lui montrer qu'il pouvait aussi lui tenir tête et ne pas se traîner à ses pieds. « Actuellement, je suis pas d'humeur à me taper un lapin qui gratte à tout les râteliers et qui ose croire que je suis aussi dégoûtant que lui pour faire la même chose. » Autant dire que ce n'était pas particulièrement facile de le regarder fixement, sans laisser transparaître sa douleur, et de lui dire ces mots. Il pourrait bien se taper ce lapin n'importe quand, mais il fallait qu'il lui fasse comprendre qu'il n'était pas son jouet. Qu'il ne l'était plus du moins. Qu'il était à présent à lui et qu'il faudrait qu'il s'y fasse.

Il prit une profonde inspiration et sans laisser le temps à Junmin de parler, il continua. «J'en ai marre, Junmin. J'ai plus envie de jouer. Ça fait un moment que j'ai arrêté ça. » On pourrait croire qu'il était en train de dire à Junmin que c'était fini. Qu'il ne voulait plus de lui, hors c'était pas ce sens là dont Ying parlait. Il était juste en train de dire qu'il en voulait plus. Qu'il ne voulait plus jouer mais officialiser ça. Être réellement un couple. Comme s'il ne pouvait plus attendre un jour de plus. Être réellement à lui et le faire savoir à n'importe quelle pimbêche qui approcherait son coréen. Pouvoir dire qu'ils vivent une relation amoureuse... Ça c'était le vraie fantasme de Ying. Mais voilà, peut-être que Ying voulait que tout aille trop rapidement peut-être.

Junmin s’était bien voilé la face. Il s’attendait à quoi, après tout ? Ying qui se jette dans ses bras ? Au vu de leur dernière conversation, Junmin se doutait qu’une sorte de froid s’était installé entre eux. Mais pour lui, cela ne représentait rien. Du moins, cela ne gênait en rien leurs rapports intimes. Pourquoi une jalousie mal placée et une possessivité un peu trop prononcée viendrait gâcher ces moments ? Junmin était vraiment con et aveugle. Et il s’en rendait compte, maintenant que Ying lui balançait ses quatre vérités en pleine face. Il ne s’y était pas attendu, à celle-là. Il savait maintenant, ce que ça faisait de se prendre une claque aussi fort qu’un coup de poignard en plein cœur. Junmin se mordait la lèvre, se la rongeant jusqu’au sang. Il n’osait pas vraiment regarder Ying, il se sentait honteux. Depuis quand les paroles du chinois l’affectaient autant ? Il ne savait pas, il ne savait plus. Il avait arrêté de réfléchir quant à leur relation quelque peu ambiguë, il avait pris tout cela pour acquis, il avait pris Ying pour acquis. Il releva le regard pour l’ancrer dans celui du chinois lorsque celui-ci vint caresser ses cheveux. Ce geste doux contrastait tellement avec la situation, la crise de nerfs que Ying était en train de lui faire. Il ressentit un violent frisson le prendre dans le bas du dos au toucher du plus âgé et à ses paroles. Qu’il ne s’étonne pas après qu’il ait tout le temps envie de coucher avec lui s’il lui sort des trucs comme ça. Et Junmin se rendit compte d’une chose. Il avait été bien trop aveugle pour la voir auparavant, trop aveuglé par son passé, trop aveuglé par son égoïsme. Mais jamais il ne l’avouerait à Ying, du moins, pas maintenant. Pas après. Il ne lui avouerait qu’en dernier recours, le jour où il se devra vraiment d’être sincère avec lui.

« Faut juste que t'arrête avec toutes ces filles, ou je vais vraiment finir par être trop jaloux. » Junmin haussa les sourcils. Toutes les filles ? Jaloux ? Il ne put empêcher un sourire d’apparaître sur ses lèvres. Alors, comme ça, son petit Ying était jaloux des filles qu’il fréquentait ? Intéressant. « Que j’arrête quoi avec ces filles ? Que j’arrête de leur parler, c’est ça que tu veux ? » Son sourire ne le lâchait plus, Ying s’était véritablement attaché à lui. Et cette pensée, qui normalement aurait dû l’effrayer, ne faisait qu’agrandir son sourire. Mais il se fana bien vite lorsque Ying s’éloigna de lui, lâchant ses cheveux. Junmin se haussa sur ses bras, sans pour autant sortir de la piscine. Il ne voulait pas encore reprendre les dessus sur cette conversation, Ying osait enfin se rebeller, dire les choses clairement telles qu’elles étaient. Et même si elles blessaient parfois Junmin, il avait envie de les entendre. Il n’était pourtant pas du genre à se préoccuper de ses partenaires de sexe. Mais Ying était bien plus que ça, Ying était spécial. « J’ai arrêté de… » Junmin ne finit pas sa phrase et toussota, tournant la tête sur le côté, s’insultant mentalement de ce qu’il s’apprêtait à dire. Il ne voulait pas se montrer faible face à Ying. Et lui dire qu’il avait arrêté de coucher à droite et à gauche parce que Ying était ancré dans son esprit, jour et nuit, c’était clairement un signe de faiblesse. C’était lui le dominant dans l’histoire, non ? C’était lui qui avait une forte emprise sur le chinois, et non l’inverse. Il ne voulait pas que ça s’arrête, et qu’il sache qu’il était totalement dépendant à Ying. Peut-être que ça aurait été mieux ainsi, qu’il sache à quel point il est précieux à ses yeux. Mais Junmin était têtu et égoïste. Il s’en fichait de savoir ce que l’autre désirait, il s’en fichait de savoir si ce qu’il faisait le détruisait. Du moins, il voulait se persuader qu’il s’en fichait.

Dire que l’esprit de Junmin était totalement brouillé en ce moment là ne serait qu’un euphémisme. Il pensait quelque chose, pour au final affirmer le contraire. Il savait quelque chose du plus profond de son être, pour se persuader quelques secondes plus tard que c’était faux. Il était en total contradiction avec soi-même. Être ou ne pas être ? Depuis plus d’un an, Junmin avait vécu de manière froide, se voulant insensible au monde extérieur, ne s’attachant à personne d’autre. Il ne voulait pas trahir son meilleur ami, il ne voulait pas souffrir à nouveau de la perte d’un être cher. Égoïste ? Sûrement. Mais Junmin n’avait jamais été égoïste auparavant, et maintenant il y avait pris goût. À ne plus s’attacher à des personnes, à être totalement indépendant. Et il avait fallu qu’il entre dans sa vie, qu’il vienne tout gâcher avec son petit air innocent de sainte nitouche. Depuis, l’ancienne personnalité de Junmin se battait avec le mur qu’il s’était construit après la mort de son meilleur ami. Et il ne cessait de se perdre entre les deux.

« Tu crois vraiment que j’irai foutre ma queue aussi souvent dans quelque chose que je considère de dégoutant ? » La classe incarnée, Oh Junmin, t’aurais pas pu trouver mieux comme tournure de phrase ? Mais les paroles de Ying commençaient à le mettre à cran, et son incompréhension face à ses sentiments, à ses émotions l’énervait au plus haut point. Il avait à peine eu le temps de finir sa phrase que Ying s’était déjà remis à parler. « J'en ai marre, Junmin. J'ai plus envie de jouer. Ça fait un moment que j'ai arrêté ça. » Et la colère grandissante de Junmin se transforma en surprise le temps d’un moment. Il ne comprenait véritablement plus rien. Tant pis. Il était fatigué de tout ça. D’un coup, il poussa sur ses bras et s’éleva hors de l’eau, reposant ses pieds sur le bord de la piscine. L’eau dégoulinait de son corps et ses poils s’hérissaient au contact de l’air froid, mais il s’en fichait. « Attend, tu veux dire quoi par là ? » Il avança d’un pas. « Tu veux arrêter, partir ? Quoi, je te dégoute ? » Encore un pas. « Et j’ai mon mot à dire là-dedans au moins ? » Encore un pas. Il se rapprochait de plus en plus de Ying. « Tu crois que je vais te laisser partir si facilement ? Tu crois que je m’acharnerais sur quelqu’un qui– est un aussi bon coup ? » Bravo. De mieux en mieux Junmin. S’il avait pu, sans paraître trop con, et s’il n’avait pas eu cette fierté, il se serait foutu une claque. Et pas qu’une seule, d’ailleurs.

Ying était heureux de la jalousie de Junmin. Il appréciait que Junmin soit aussi attentif au moindre geste du chinois envers quelqu'un d'autre, ça lui prouvait que, peut-être, il tenait à lui plus que pour un coup d'un soir. Mais quand Junmin osait prétendre que Ying était un garçon facile qui pouvait s'offrir à n'importe qui, ça ne sonnait plus comme de la jalousie mais comme une insulte. Autant dire que ça, Ying l'avait mal pris. Comment Junmin pouvait-il douter de lui ? Certes, leur rencontre c'était faite dans un soir particulier où ils avaient couché ensemble sans vraiment se connaître. Mais depuis, Ying c'était complètement offert à lui et ne s'offrait qu'à lui, quand il le voulait, quand il le désirait. Il se considérait comme sien depuis cette nuit-là, comme si le coup de foudre avait opéré depuis cet instant. Alors lui, si fidèle, comment Junmin osait en penser autrement ? Après tout, ce n'est pas lui qui était allé voir Ellen, une autre fille avec qui il s'était envoyé en l'air et pour qui il avait eu des sentiments amoureux ? Qu'en était-il advenu de cette relation d'ailleurs ? L'avait-il vraiment oublié ? Alors oui, Ying avait vraiment une raison d'être jaloux mais pas l'inverse. L'infidèle, ce n'était pas lui. Bon, en même temps, il n'avait pas de raison d'être fidèle, après tout, ils n'étaient pas un couple. Le chinois planta son regard dans celui du coréen. Le mieux était qu'il oublie toutes les filles qu'il fréquentait, peut-être que de cette manière, il pourrait n'être qu'à lui et finirait par tomber amoureux ? Ying pouvait être si crédule parfois...

« Pourquoi pas ? T'arrête de leur parler, t'arrête même de les regarder. » Voilà ce que voulait vraiment Ying. S'il l'avait pu, il aurait carrément enfermé Junmin dans une cage doré pour le garder rien que pour lui. Peut-être abusait-il un peu trop des bonnes choses ? Il se leva et s'éloigna un bref instant. Il devait cesser de le toucher ou de le regarder, au moins pour essayer d'être crédible dans sa colère. Sinon, il finirait par lui sauter dessus rien que pour l'embrasser. Non, il ne devait pas abandonner, il ne pouvait pas tout simplement parce qu'il le regretterait s'il ne bougeait pas le petit doigt. Peu importe où il comptait se fourrer à nouveau, il n'avait plus intérêt à le faire sinon... sinon quoi ? Est-ce qu'il pensait vraiment que ça allait arranger quelque chose ? Ying pensait-il vraiment qu'empêcher Junmin de faire quoi que ce soit allait changer quoi que ce soit pour lui ? Il n'en avait sûrement que faire de ce que voulait ou non Ying, pourvu qu'il soit libre de ses mouvements. Junmin n'était pas du genre à se laisser enfermer, non ? Ying se tourna vers lui, l'observant sortir de l'eau. Peut-être n'avait-il pas vraiment tout bien compris. Peut-être devrait-il se justifier ? Non... ça ne servait à rien. Un pas en arrière. Deux. Trois. Il fit autant de pas vers l'arrière que possible juste pour ne pas être collé à lui. Jusqu'à ce qu'il soutienne son regard.

« J'en ai assez de n'être qu'un bon coup, tu comprends ? » Il posa ses mains sur le torse de Junmin et le poussa doucement au moins pour qu'il cesse de vouloir venir le coller. C'est la deuxième fois qu'il le repoussait, c'était un exploit. « Toi aussi t'es un très bon coup. Le seul que je connaisse. Mais tu vois, Junmin, je me suis lassé. » Lassé du fait de n'être réellement qu'un coup d'un soir et pas un coup de foudre comme lui l'était pour lui. « Et quand on se lasse, il suffit de changer, non ? » Changer de comportement, changer de sentiments. Officialiser tout ça. Voilà les vraies traductions à ces paroles bien qu'on pouvait les interpréter vraiment différemment. Et il était fort probable que Junmin les interprète de la mauvaise façon. « Junmin, je met un terme à notre jeu à partir de maintenant. » Voilà, c'était fini de jouer. Ying souhaitait rentrer dans la court des grands. Être pour lui plus qu'une simple occasion de baiser. Il voulait juste signifier plus de choses pour lui. Il entrouvrit les lèvres comme pour parler mais aucun son n'en sortie. Une boule dans l'estomac l'empêchait de prononcer la phrase qu'il désirait lui balancer depuis tellement longtemps. Il suffisait juste de lui dire qu'il était amoureux de lui. Se déclarer et ça serait fait, il cesserait vraiment de souffrir et il aurait le fin mot de l'histoire, même s'il se prenait une méchante veste. Mais voilà, sans savoir pourquoi, malgré qu'il ai répété à de nombreuses reprises cette phrase, il n'arrivait pas à la lui dire. Il n'arrivait pas à se déclarer, il n'arrivait pas à lui avouer. 'S'il te plaît, sors avec moi, ne sois plus jaloux si je te donne mon coeur' même ça il n'y arrive pas. Il referma la bouche, détournant le regard, mal à l'aise, les joues rouges. Honte. Gêne. Peur. Même ses mains tremblaient légèrement.

Junmin rigola, toisant Ying du regard. Le voir aussi jaloux, aussi possessif envers lui l’excitait et l’énervait en même temps. Il ne savait pas quoi choisir entre ces deux émotions. Parfois, Ying dépassait réellement les bornes, il était persuadé qu’il se faisait des films alors qu’il n’y avait rien de plus que de l’amitié entre lui et ces filles. Et encore, il n’était réellement qu’ami avec Amy. Il ne voyait même pas de quelle autre fille Ying faisait référence. « Quoi, tu comptes me séquestrer si je leur parle encore, si je les regarde encore ? » Il secoua la tête, un rire ironique  et quelque peu moqueur, passant encore la barrière de ses lèvres. « Tu te rends compte de ce que t’es en train de dire ? » Junmin sentit ses poils s’hérisser sur son épiderme et une chaleur l’envahir lorsqu’il s’imagina Ying en badass, le gardant prisonnier dans un endroit sombre, lui– Il se mordit la langue, pour éviter de penser à de telles choses comme ça. Mais il faut dire que l’image d’un Ying complétement fou de Junmin, à la limite du maladif, le gardant prisonnier pour son plaisir, ne le rendait pas indifférent. « Toutes ces filles. » Il soupira. « Je ne vois même pas de qui tu parles. » Et c’était vrai, Ying en faisait une telle histoire que Junmin avait l’impression qu’il le faisait passer pour un coureur de jupon, un mec qui aime jouer de sa popularité auprès des filles. Et c’était faux. Junmin avait du mal à supporter la plupart des filles de l’université, sans même les connaître personnellement.

Junmin était sorti de l’eau, se retrouvant face à face à Ying, qui reculait au fur et à mesure que Junmin avançait vers lui. Mais les pas de Junmin étaient plus grands, plus sûr que ceux du plus âgé. Et les paroles sortaient de sa bouche sans qu’il ne puisse les stopper. Pourquoi fallait-il qu’il cache la vérité, encore et toujours ? Il n’était qu’un lâche qui n’osait pas affronter la vérité en face, après tout. Il voulait jouer au fort, mais il fuyait devant l’évidence. Lâcheté ? Peur ? Sûrement. Junmin était effrayé d’ouvrir son cœur. Mais trop de choses lui faisaient inconsciemment peur qu’il ne parvenait pas à les combattre, à les surpasser. Alors, il s’enfonçait dans ces paroles qu’il regrettait un peu, ces paroles qui devaient sûrement blesser le jeune homme en face de lui. Peut-être qu’un jour, il arriverait à être complétement honnête, comme il l’était avec Juno, sans cacher ses plus profonds sentiments.

Au contact des mains frêles de Ying sur son torse nu et encore dégoulinant de gouttes d’eau, il se sentit frémir. Peu importe le contact avec le chinois, cela l’électrifiait de plus en plus. Il attrapa ses poignets dans ses mains, non sans pour autant enlever la prise qu’il avait sur son torse. Il le tenait juste, un peu comme un moyen de s’assurer qu’il ne partirait pas. Junmin fronça les sourcils, il ne comprenait pas les paroles de Ying, il ne comprenait pas où il venait en venir. Il était lassé ? Il voulait changer ? Changer quoi ? Changer de partenaire de sexe, c’était ça ? Junmin sentait la colère mélangée à une pointe de douleur grandir dans sa poitrine. Elle devenait de plus en plus compressée et il sentait sa respiration se faire quelque peu difficile. Ses traits étaient tendus, et sa prise se faisait plus ferme sur les poignets de Ying. Sa dernière phrase eut l’effet d’un coup de poignard. Junmin se sentit vaciller avant de se reprendre. Il regardait Ying qui avait instinctivement détourné le regard. Junmin se mordit la lèvre. Il ne savait pas comment réagir. S’énerver ? Non, il était un peu trop sur le cul pour ça. Il lâcha les poignets de Ying, laissant retomber ses bras le long du corps, ballants. « Fini ? » Sa voix n’avait été qu’un murmure, mais il savait que Ying l’avait entendu. Il fit un pas en arrière, toujours le regard fixé vers le visage de Ying. « T’es sérieux ? » Sa voix était neutre, un murmure. Mais on pouvait sentir une pointe de tristesse, de surprise. « T’as pas le droit. »[/color] Junmin fit encore un pas en arrière. Maintenant, c’était lui qui reculait. « T’entend ? T’as pas le droit de partir et de… » Il fit encore un pas en arrière. « Me laisser seul. » Encore un pas en arrière. « Tu peux pas partir, tu m’aimes, tu peux pas partir, ça sera trop dur pour toi, tu dois rester avec moi. » Junmin savait depuis quelques temps que Ying éprouvait plus qu’une attraction physique pour lui, mais le dire à voix haute… Junmin avait senti son cœur s’accélérer, et ça l’avait effrayé, si bien qu’il avait encore reculé, tombant de dos dans la piscine. D’abord surpris d’être submergé d’eau, il battit bien vite des bras, remontant à la surface, reprenant une respiration correcte, crachant l’eau qui s’était infiltré dans sa gorge et ses poumons.

Ying ne savait plus comment réagir. Quelle attitude adopter ou à éviter. Il se sentait démunie face à lui. Junmin réussissait toujours, en une fraction de seconde à lui faire plaisir ou à le blesser. C'était un talent dans lequel il excellait ça, Ying, ne pouvait pas lui reprocher. Les doutes ne cessaient de s'accumuler. Comment parviendrait-il à se sortir de cet enfer ? Le voulait-il seulement ? Il était devenu accro à tout ça et il s'en rendait compte. Il se rendait compte qu'il était devenu accro à cette douleur et c'est peut-être le cas de Junmin ? Aussi, ils ne cessaient de toujours se chercher, de voir les preuves à leur infidélités même s'il n'y en avait pas forcément. Il y avait toujours un petit quelque chose qu'ils se lançaient à la figure dans l'espoir de faire du mal à l'autre sans vraiment le vouloir de prime abord mais dans l'histoire d'attirer l'attention. C'était de ça dont était accro Ying ; essayer d'avoir toute l'attention de Junmin, espéré qu'il l'enferme lui aussi dans une cage dorée.

« Non... » Non il ne le séquestrerait pas, il ferait pire que ça. Il ferait du mal à tout ceux et celles qui auront osé l'approcher. Ying s'était même imaginé faire du mal à Amy. Comme il en avait fait à Ellen. Jamais il n'avait eu autant de pensées noires. Il voulait que tout le monde comprenne sa douleur mais il agissait toujours avec de mauvais actes. Bien sûr que Junmin plaisait et pas seulement qu'à lui. Il avait conscience que son physique avantageux pouvait plaire aux filles. La preuve, pendant ce cours, une des filles de sa classe lui avait dit « il est vraiment beau » quand ce fut le tour du coréen de montrer la pratique au professeur. Il avait d'ailleurs faillit la jeter à l'eau rien que pour avoir dit ça mais il s'était retenu, préférant se concentrer sur ses pieds afin de ne pas le regarder. Il ne devait pas poser son regard une seule fois sur lui, il devait l'éviter, point. Mais ça ne s'était pas passé comme ça. Il était coincé avec lui, tout seul, et plutôt que de se sauter dessus, d'accepter sa proposition et de s'offrir à lui, il s'était recouvert de son armure. Il avait prit le choix de lui faire ravaler ses paroles lancées par texto.

Junmin reculait. Tout ce qu'il pouvait dire était vrai. Ying ne pourrait jamais le laisser. Il ne pourrait jamais cesser de l'aimer. Mais il n'ouvrit pas la bouche pour le lui dire. Toute fois, il s'avança rapidement au bord de la piscine quand Junmin y chuta, son cœur battant la chamade. Quoi ? Junmin aurait pu se faire mal, on sait jamais... mais quand ce dernier sortit la tête de l'eau, sa peur s'envola pour laisser place à la colère. Pourquoi Ying devrait-il l'aimer sans avoir le droit de partir et Junmin non ? Il s'agenouilla pour être pratiquement à sa hauteur et se pencha légèrement vers lui. « Et si c'était vrai ? Si tous les soirs, il me rejoignait. Si tous les soirs il se glissait dans mon lit... Si Suhwan m'avait touché jusqu'au plaisir et si moi-même je l'avais touché... ça te ferait quoi ? » Accro à cette douleur, je l'avais bien dit. Ying fixa le regard de Junmin, dans l'espoir d'y voir cette douleur. Dans l'espoir qu'il daigne enfin lâcher l'ombre d'un sentiment à son égard... C'était ça le réel problème. Ying cherchait à savoir tellement trop de chose à la fois que ça ne pourrait qu'occulter ce qu'il pourrait vraiment y voir. Un soupir passa la barrière de ses lèvres et il se redressa légèrement, restant toute fois à genoux sur le bord de la piscine. Sa peau se couvrit légèrement de granule, il avait un peu froid maintenant. Ou peut-être était-ce Junmin qui lui faisait cet effet. Ou alors il couvait quelque chose. Peut-on tomber malade d'un chagrin d'amour ? Lui qui, depuis quelques jours, semblait déprimé à l'idée que Junmin puisse encore être proche d'une fille ? Après tout, c'est ce que les rumeurs du blog racontait. Et généralement, ils ne se trompaient pas vraiment. Même s'il ne se passaient pas ce que le blog racontait, il connaissait forcément cette Amy quand même. Et même si elle n'était qu'une amie, Ying ne pouvait s'empêcher d'être jaloux. Il ne pouvait s'empêcher de vouloir Junmin en exclusivité. C'était peut-être égoïste...

Oui, Junmin aimait jouer. Enfin, il n’aimait jouer qu’avec Ying. Il aimait observer chacun de ses réactions, chacun de ses mouvements alors que Junmin jouait avec lui. Il aimait le savoir jaloux, et faire tout pour qu’il le soit encore plus. Il aimait le voir souffrir autant qu’il souffrait sans en comprendre la raison. Il souffrait, et c’était la faute de Ying. Son ventre se tordait, son cœur s’accélérait, et il détestait ces sensations. Il ne devrait jamais les ressentir, et pourtant elles étaient bien présentes. Elles vibraient dans son corps, dans son âme et dans son esprit, ne s’arrêtant jamais, malgré les supplications silencieuses de Junmin. Alors, pour se soulager, il jouait avec le cœur du plus âgé, le regardant souffrir devant ses yeux. C’était un mal pour un bien. Ou un mal pour un autre mal. Pourquoi avait-il cette soudaine envie de le prendre dans ses bras, de revoir ce sourire si magnifique sur ses douces lèvres, au lieu de cette moue qui le rend extrêmement mignon et qui paraît pourtant si triste ? Jouait-il réellement ? Ou tout ceci n’était qu’un jeu de lâcheté dans lequel il n’avait aucunement la force de faire face à ce qui l’habitait, les sentiments grandissant qu’il éprouvait à l’égard de son ainé ? Il avait aimé. Deux fois. L’un était parti, loin au pays des anges, l’autre était partie également, loin. Et Junmin avait souffert de leurs absences, qu’il sentait encore peser sur son cœur lourd. Il avait souffert de ne pouvoir entendre encore leurs voix murmurer son prénom, l’appeler dans le noir, lui montrant la lumière au bout du tunnel. Il avait souffert de plus pouvoir les blottir dans ses bras forts pour les réconforter, profitant par la même occasion de leurs chaleurs si douces. Il avait souffert, et il n’était vraiment pas prêt à revivre cette expérience. Alors, était-ce pour cela qu’il jouait, qu’il se cachait derrière ces paroles dures, qu’il n’avouait rien à Ying alors que ce serait le plus mieux à faire ?

Et malheureusement, Ying avait prononcé les mots. Ces mots qui vous font tellement peur, tellement souffrir, que vous avez l’impression que le monde s’écroule sous vos pieds. Ces mots qui vous empêchent même de vous mettre en colère tellement vous êtes perdus. Si tout ceci n’était qu’un jeu, si tout ceci n’était que pour s’amuser, que des faux-semblants, pourquoi Junmin avait aussi mal au cœur ? Alors lui aussi allait le laisser seul, partir, rejoindre les autres qui l’avaient abandonné dans sa vie ? Il savait bien qu’il n’était pas l’ami, le meilleur-ami, le sexfriend ou le petit-ami idéal, mais il avait seulement espéré que lui, Hui Ying, ne fasse pas comme les autres, qu’il ne s’éloigne pas de lui. Il était celui qui le guidait vers la lumière tout en l’enfonçant vers les ténèbres. Il était le poignard qui l’achevait et la main qui le guérissait. Il était sa bouffée d’oxygène et la prise autour de son cou l’empêchant de vivre. Et alors que Junmin était submergé par l’eau, lui brûlant les poumons au passage, l’évidence même apparut devant ses yeux. Et elle faisait tellement mal. Ce n’était rien comparé au fait de se noyer, de ne pas pouvoir respirer à cause de l’eau chlorée s’infiltrant dans ses poumons. Il aurait en finir ici, noyé dans les eaux claires de la piscine de l’université, pour ne pas sentir à nouveau son cœur se fendre en milles morceaux, se réduisant en cendres à l’entende des paroles de Ying. Comment de simples mots qui quelques mois auparavant n’avaient aucune importance, l’affectaient maintenant au plus profond de son être ? Comment le chinois s’était retrouvé à avoir une telle emprise sur Junmin qu’il se détestait d’être aussi faible ?

Tout en toussant, Junmin s’était lentement rapproché du bord, posant ses mains sur le rebord, les bras tendus devant lui. Il n’osait pas s’approcher plus, il osait à peine lever le regard vers Ying. Il voulait se boucher les oreilles pour ne plus avoir à entendre ses paroles douloureuses. Il voulait se redresser, sortir de l’eau, et le plaquer contre le sol. Il voulait l’empêcher de parler. Ses paroles faisaient beaucoup trop mal. Il voulait le frapper, le faire taire, l’embrasser, le griffer, lui faire mal comme lui avait mal. Mais il ne fit rien, si ce n’était refermé sa prise sur le bord de la piscine, crispant ses doigts jusqu’à ce que le sang ne puisse plus passer. Ses phalanges étaient blanches, les veines de ses bras ressortaient tellement ses muscles étaient contractés. Il se mordait la lèvre, s’empêchant d’hurler dans le bâtiment son mal-être, la douleur qui le rongeait de l’intérieur ? Pourquoi cela faisait aussi mal ? Avait-il seulement le droit d’avoir mal, alors qu’il était parfaitement conscient qu’il avait fait subir cela à Ying déjà plusieurs fois par le passé ? Mais Ying n’était pas censé l’aimer, il n’avait jamais été question qu’il l’aime, ni que Junmin l’aime en retour. Ce n’était pas écrit dans les livres, ce n’était pas supposé se passer comme ça. Mais nous sommes les seuls maîtres de notre destin, dit-on. Alors, c’était de leurs fautes, uniquement de leurs fautes si les sentiments avaient pris le dessus parmi les résolutions de ne pas s’aimer.

Un silence planait dans la piscine, seul le bruit de l’eau frappant doucement contre la paroi se faisait entendre. Junmin retenait sa respiration, il s’empêchait de faire quelque chose de stupide mais qui réglerait sûrement ce problème, toute cette souffrance ressentie des deux côtés. Au lieu de ça, il sortit de l’eau doucement, ne se pressant pas. Il s’était lui aussi accroupi sur le bord, et son corps n’était plus qu’à quelques centimètres de celui de Ying. Et alors, dans un brusque élan, il le plaqua au sol, attrapant ses poignets et les plaçant au dessus de sa tête. Il était à quatre pattes au dessus de lui, le surplombant. Son regard était ancré dans celui de Ying. Un regard indéchiffrable. Il se demandait ce que le chinois voyait dans ses yeux à ce moment. Voyait-il à quel point il avait mal, à quel point il souffrait, à quel point il était lâche, à quel point il aimait le chinois ? « Tais toi. » Ce n’était qu’un murmure. « Tais toi. » Deux simples mots prononcés du bout des lèvres. « C’est faux. » Avait-il l’air désespéré ? « Ce n’est que des mensonges. » Sûrement. Après tout, c’était ce qu’il était. Désespéré, lâche, ignoble, amoureux. Il rapprocha sa tête de celle de Ying, leurs visages n’étant qu’à quelques centimètres l’un de l’autre. « C’est ça ? » Sa prise sur les poignets de Ying se fit plus douce, comme une caresse. « Ce qu’on ressent ? Ce que tu ressens ? La jalousie ? » Un débutant. Junmin était un pur débutant en relation humaine, en sentiments humains. Encore plus quand cela se rapportait à l’amour. Il n’avait jamais compris d’où venait toute cette joie, ce bonheur, cette douleur, cette peine. « Pourquoi ça fait aussi mal ? J’ai l’impression de suffoquer quand je pense que quelqu’un d’autre a pu t’avoir, te toucher, alors que je suis le seul qui ait le droit de le faire. Je suis le seul, pas vrai ? » Sa voix s’était radoucie, presque suppliante ? Ce n’était plus le Junmin que tout le monde connaissait, que Ying connaissait. C’était un Junmin encore tout innocent, qui ne connaissait rien de la vie et qui avait besoin qu’on lui apprenne.

Ça te ferais quoi ? … Plus aucune réponse. Ying trouva ce silence pesant. Rien n'est pire que de rester sans réponse. Rien n'est pire que de se rendre compte qu'on se sent vraiment seul. Il aurait préféré être au moins un peu rassuré, ou avoir une immense déception plutôt que d'être dans le néant. Il ne pouvait même pas s'imaginer quoi que ce soit. Rien. Seulement le silence. Son sang se glaçait dans ses veines comme s'il venait de voir un fantôme ou d'entendre une voix sortie de nul part. Une peur immense s'emparait de lui au point de l'empêcher de respirer. Seul l'écho de sa voix se faisait dans sa tête. Ça te ferais quoi ? Ça te ferais quoi ? Une question sans réponse, encore une fois. C'était, il semblerait, ce que Junmin savait faire le mieux. Ying n'avait plus conscience du temps ou des lieux. Il regardait l'eau sans même se rendre compte que c'était de l'eau. Junmin bougeait, sortait de la piscine sans même qu'il ne le voit, sans qu'il ne s'en rende compte. Il n'était plus maître de lui-même. Il avait tout oublié, tout occulté. Il ne souvenait plus de son nom, il ne se souvenait plus de rien. L'amnésie...

Un choc le renversa vers l'arrière et son dos heurta durement le sol. Ses yeux s'étaient écarquillés et son souffle s'était soudainement accéléré. Le son de la voix de Junmin lui parvenait mais il ne comprenait pas un traître mot de ce qu'il disait. Mais il le voyait. Il pouvait le sentir. Il pouvait presque palper de ses doigts la douleur qu'il lisait dans le regard du plus jeune. Une douleur inconnue jusque-là, inconnu par Junmin tout du moins. Jamais il n'avait remarqué ça. Pouvait-il le faire lui aussi ? Passé la surprise et le dur retour à la réalité, Ying se décontracta, ne faisant aucun geste pour le repousser ou se soustraire. Ses poings se desserrèrent et son regard se rempli d'empathie. Comme si lui-même était atteins par cette douleur, et c'était le cas. « Oui... elle est là et elle est réelle même si l'on essaie de s'en persuader du contraire... » Il l'avait déjà expliqué à Suhwan et il l'expliquait à nouveau à Junmin qui était comme devenu un étranger tant son comportement était différent de d'habitude. « On a l'impression d'avoir un objet planté dans le cœur et à chaque mot, cet objet vibre et nous fait mal encore plus. Imaginer des choses est plus douloureux que les faits. Si on sait ce que l'autre fait, on a mal mais moins que si l'on reste dans l'ignorance. On suffoque, on a plus d'air... J'ai plus d'air... » Ying glissa ses poignets dans la prise de Junmin et, ce dernier ne le tenant quasiment pas, il pu se défaire à moitié. En fait, il ne fit que glisser ses mains pour pouvoir entrecroiser ses doigts aux siens, restant dans cette position passive.

« Suhwan est le seul qui comprend ma douleur... Parce que lui aussi il est amoureux de quelqu'un et il en souffre. » Lui aussi. C'était un peu comme s'il s'était finalement déclaré. Un soupire passa la barrière de ses lèvres et il redressa légèrement la tête, assez pour que ses lèvres rencontrent les siennes dans un baiser chaste et court. Comme s'il avait dit tout ces mots pour lui-même, comme s'il n'avait pas eu conscience de lui avoir dis tout ça. Il reposa sa tête sur le sol et le fixa longuement. « T'as toujours été le seul Junmin. Le plus dur ce n'est pas que tu sois jaloux ou égoïste, en fait ça j'aime bien. Le plus dur c'est que tu en doutes. Je n'ai jamais eu l'idée ou même eu l'envie de laisser quelqu'un d'autre me toucher. » Il inclina la tête, évitant soigneusement son regard. Peut-être que ça pouvait passer, cette douleur. Peut-être qu'il n'avait pas envie que tout s'arrête. « Joue avec moi Junmin... Joue seulement avec moi et personne d'autre. » Une façon de lui ordonner d'être le seul pour lui. Le seul qu'il puisse toucher ou ne serais-ce même que frôler. Si peu de temps avant il lui disait que tout était arrêté, maintenant il voulait que ça reprenne. C'était à ne rien y comprendre. Comment pouvaient-ils s'entendre sur un point s'ils ne cessaient de changer de version à chaque fois ?

Alors que tout était calme, que tout semblait être redevenu silencieux, Ying se redressa, repoussant doucement Junmin, bien qu'il le gardait près de lui, encore à genoux au dessus de ses cuisses. Il porta soudainement son regard dans le sien comme s'il venait d'être frappé par une idée hors du commun, comme ayant eu une révélation. « Tu veux que je ne sois rien qu'à toi, pas vrai ? Que personne ne me touche ? Alors emmène-moi chez toi. Tu m'auras tout le temps sous les yeux de cette façon et en compensation de mes repas et de mes dépenses, je te ferais tes repas, ton ménage, tes courses et je réaliserais tous les fantasmes que tu veux. » C'était devenue une idée brillante à ses yeux. Ça lui permettrait de garder un œil sur Junmin. De pouvoir le séquestré sans vraiment que ça ne soit une séquestration. Il aurait, tout le temps, devant ses yeux, les faits et gestes de Junmin. Il pourrait savoir quand il sort, quand il rentre, ce qu'il fait, qui il reçoit. Maintenant ce n'était plus une idée mais une obligation qu'il fallait qu'il lui ordonne. S'il ne voulait pas, Ying s'inviterait. Quoi qu'il arrive, il vivra chez lui, point.

Toutes ces émotions, tout ces sentiments que Junmin ressentait ne lui étaient pas inconnus. Il croyait les avoir oublier, mais ils étaient simplement enfouis très profondément dans son cœur, caché pour ne plus jamais remonter à la surface. Il s’était promis de ne plus aimer à en mourir quelqu’un, mais il avait failli à cette promesse. Il n’avait pas réussi à garder ces sentiments au fond de lui. Ces traîtres. Au bout de deux ans, il fallait qu’ils réapparaissent maintenant, le montrant si faible aux yeux de Ying. Il était tel un enfant qui ne savait rien, perdu dans ce monde trop vaste pour lui. Junmin était perdu dans cette douleur qu’il ressentait. Il n’arrivait plus à placer un seul mot sur ce qu’il ressentait. Tout était bien trop confus. Tout se mélangeait dans sa tête. Était-ce un jeu entre eux ? Était-ce l’amour qui les reliait ? Ou tout ceci n’était qu’un rêve ? Un cauchemar ? Était-il seulement Junmin ? N’était-il pas quelqu’un qui regardait la scène de l’extérieur ? Il ne comprenait plus rien, il n’avait aucune idée de ce qu’il faisait ici, comment tout ceci, toute cette mascarade avec le chinois avait commencé. Elle n’aurait jamais du commencer, il n’aurait jamais du accepter qu’ils se revoient. Il savait dès le début que ce n’était pas une bonne idée, et pourtant il n’avait pas su dire non. Et voilà maintenant où ça les avait mené.

Le regard de Junmin était ancré dans celui de Ying, ne trouvant pas la force de s’en défaire. Il se noyait dans ses yeux alors que sa douce voix le berçait. Cette voix douce qui semblait vouloir le calmer, le rassurer. Junmin ne bougeait plus, il l’écoutait, comme s’il était la chose la plus importante au monde. Et à cet instant précis, il l’était. La seule chose qui avait de l’importance. Junmin fronça les sourcils, une lueur d’affolement passant dans son regard. « Pourquoi ? Tu suffoques ? À cause, de moi ? » Sa voix n’était qu’un murmure haché. Il ne savait plus ce qu’il disait, il ne savait plus rien. Son esprit n’était qu’un trou noir et son cœur n’était qu’un organe saignant à l’agonie. Junmin ne tilta pas lorsqu’il sentit les doigts de Ying venir se mêler aux siens, il le laissa même faire, serrant sa prise une fois leurs mains enlacées. Mais une question, un doute lui brûlait les lèvres alors que le prénom de Suhwan résonner encore dans la bouche du chinois. « Tu ne m’as pas dit si tout ceci était faux. Tu as menti, hein ? Tu t’es amusé à me faire du mal ? » La voix neutre et froide de Ying revenait, alors que son regard et ses gestes envers Ying étaient toujours emplis de douceur. « Ça t’amuse, de me voir souffrir ? » Junmin savait qu’il jouait au plus con, car Ying souffrait aussi par sa faute, mais il ne voulait pas le voir, pas pour l’instant. Cependant, il ne continua pas dans sa lancée, arrêté par les lèvres fines de Ying qui s’étaient déposées doucement sur les siennes durant un court laps de temps. Le baiser était resté en surface pendant une demi-seconde, et pourtant Junmin avait senti les battements de son cœur s’accélérer dans sa poitrine. La crise cardiaque n’était définitivement pas loin.

Un silence s’en suivit durant lequel ils ne firent que s’observer, se regarder, essayant de communiquer à travers leurs regards. « Ying… » Son prénom murmuré. Il ne savait pas pourquoi il l’avait appelé, une envie, un besoin, pour ne pas se noyer complétement dans son regard, pour se rattraper un court instant à la réalité du moment. « T’as toujours été le seul Junmin. » Encore un coup de poignard. Et pourtant, celui-ci faisait un bien fou. D’immenses frissons parcoururent le corps de Junmin, il n’avait jamais ressenti une telle sensation de bien-être. Rêvait-il ? Il ne voulait pas se réveiller. Il se contentait de regarder, encore et toujours les yeux de Ying, déviant par moment vers ses lèvres qui se mouvaient, formant des mots. Mais Junmin ne l’entendait pas, cette seule phrase retentissait dans son esprit, ne le laissant pas tranquille. Elle revenait, encore et encore, lui donnant un mal de tête. Comment une telle phrase pouvait lui faire autant d’effet, pouvait l’envoyer au paradis ? Ce n’était que de simples petits mots associés à son prénom, ce n’était rien. Ce n’était peut-être même pas la réalité. Ying avait sûrement inventé tout ça, et au moment venu, il partirait autre part, comme les autres s’étaient éloignés de lui alors qu’ils avaient prétendu ne pas pouvoir vivre sans Junmin.

Et alors, le doute s’empara de Junmin. Il se réveillait peu à peu, revenant à la réalité. Tout lui revenait en mémoire, comment cette discussion avait commencé, comment toute cette histoire avait commencé, comment leur relation avait commencé. Il se rappelait de leurs nombreuses discussions tournant en disputes, il se rappelait de leurs prises de tête. Il prétendait l’aimer, et pourtant tout ce qu’ils faisaient, c’était se crier dessus. Était-ce ça l’amour ? Junmin ne s’en rappelait pas comme ça. Ce n’était pas de cette façon qu’il s’était comporté avec Juno. Il ferma les yeux. Il se rappelait la promesse. La promesse qu’il avait rompu. Il voulu s’éloigner de Ying, mettre les choses au clair. Rien ne pouvait être plus confus que son esprit. Puis le bourdonnement qu’était devenue la voix de Ying redevint clair, et Junmin fut encore plus confus. Mais comment aborder tout cela ? Comment résumer toutes ces choses, comment amorcer les sentiments pour savoir réellement ce qu’il fallait en tirer de cette situation ? Il se sentit pousser en arrière par Ying, se retrouvant presque assis sur ses cuisses, le chinois en face de lui. Il l’écouta parler, fronçant un peu plus les sourcils à ses paroles. Pourquoi devait-il l’embrouiller de cette manière ? Ne pouvait-il pas s’arrêter de parler, ou juste dire clairement ce qu’il voulait, comme tout le monde ? À croire qu’ils étaient aussi compliqués l’un que l’autre, aussi confus.

Junmin lâcha les mains de Ying et vint les poser sur ses épaules. Son regard était redevenu neutre, presque froid. Sa voix grondait, résonnant dans la piscine. « De un, tu arrêtes de raconter des conneries Ying. Tu te tais. Je veux plus t’entendre. Tout ce que tu as le droit de faire, maintenant, c’est de répondre à mes questions par une phrase. Et ne cherches pas plus à m’embrouiller. » Junmin n’avait pas être plus clair. Il voulait des réponses, et il les aurait. « Tu t’entend quand tu parles ? Tu me dis que c’est fini et cinq minutes plus tard, tu me dis- non, tu m’ordonnes de ne jouer qu’avec toi. Qu’est-ce qu’il va pas chez toi, hein ? » Il raffermi sa prise sur les épaules de Ying. « Qu’est-ce que je suis supposé penser de tout ça moi ? Tu crois pas que je suis suffisamment confus comme ça ? Je sais pas ce qu’il se passe dans mon esprit, dans mon cœur, je veux pas le savoir, parce que ça me fait peur et j’ai pas le droit ! » Junmin craquait. Il s’emportait, il n’arrivait plus à s’arrêter, c’était comme s’il devenait fou. Ses yeux étaient grand ouverts, sa voix se faisait de plus en plus forte. « J’ai pas le droit. J’ai promis. Et à cause de toi, toi et ton putain de corps, ton putain de sourire, ton putain de regard, tes putain de lèvres, j’ai rompu cette promesse. Tu es venu, telle une fleur, m’offrant ton corps. Encore, et encore. Pourquoi tu as du revenir, pourquoi tu as du insister ? Tu ne pouvais pas rester juste un coup d’un soir, comme les autres ? Ça nous aurait évité toutes ces souffrances. À moins que comme tu dis, tout ceci n’est qu’un jeu. Après tout, c’était un jeu au début, pas vrai ? On ne faisait que jouer, passer du bon temps. Mais on n’est pas censé souffrir quand on passe du bon temps ? En fait, je sais bien ce que je ressens. Mais je peux pas. Je devais pas ressentir tout ça, j’en avais pas le droit. C’est plus un jeu pour moi, Ying, et je viens seulement de m’en rendre compte. J’ai été un lâche de le cacher comme ça, pour ne pas avoir à faire face à mes démons. Et c’est à cause de toi, tout ça. Tu as tout chamboulé. À cause de toi, j’ai rompu ma promesse. La seule promesse que je me devais de respecter jusqu’à la fin de ma vie. Et je suis perdu. Dois-je continuer à la tenir, alors qu’elle a déjà été rompu ? Dois-je m’éloigner de toi ? De toute façon, que je reste près de toi, ou loin de toi, tout me fait souffrir. Pourquoi, pourquoi j’ai du tomber amoureux de toi Ying ? »

Ying s'était souvent imaginé vivre avec une fille, et pourquoi pas, avoir même des enfants. Il se voyait, plus tard, dans une grande maison avec sa petite famille et un chien. Le vrai cliché quoi. Puis il y avait eu ce dérapage. Cette nuit-là même où il ne s'était même pas imaginé faire ça avec un homme. Bien entendu qu'il avait, de nombreuses fois, eu un réel dégoût pour lui-même. Coucher avec un homme, c'est pitoyable et dégoûtant. Il s'était persuadé être attiré par les filles tout au long de sa vie mais jamais elles ne l'avaient attirées autant que le corps de Junmin l'avait fait. Une attraction immense contre laquelle il n'avait pas pu se battre. Il avait aimé, pire, il désirait que ça recommence. Aussi, bien entendu, la seconde fois qu'ils s'étaient croisés tout les deux, il l'avait cherché et ça avait recommencé et il avait de nouveau aimé. Puis les jours suivants, les semaines, les mois suivants, c'était le visage de Junmin qui lui revenait sans cesse. Son visage et son corps. Son toucher et les sensations frémissantes. Il n'avait pas pu faire autrement, il en redemanderait toujours. De plus, son cœur l'avait frappé. Ce dernier qui lui servait à rester en vie, le torturait chaque jour. Il aimait Junmin. Il se l'était avoué finalement mais il ne le lui avait pas pleinement dit. Il avait tenté de lui faire comprendre en rampant à ses pieds à chaque fois. Une seule personne connaissait totalement les sentiments de Ying à l'égard du coréen et c'était Suhwan, la personne qui était devenu son confident, son meilleur ami. Une personne pure et pour qui il pouvait avoir une confiance aveugle. Mais le concerné ne pouvait pas vraiment le savoir même s'il pouvait parfaitement le deviner et le comprendre au travers de ce que lui disait le chinois.

« Je suffoque parfois à cause de toi mais aussi à cause de moi. » Parce que rester sans réponse était une chose dont il avait du mal à s'habituer. Se torturer de la sorte n'était pas la meilleure solution mais comment pouvait-il faire autrement ? Il ne pouvait pas, pour la simple et bonne raison qu'il avait peur de le perdre. Et si se déclarer brisait tout ? Et si, être un couple, les séparait finalement ? Eux qui avait été habitué à leur jeu, pouvaient-ils changer leur routine si brusquement ? Pourquoi avait-il fallu que Ying tombe amoureux de lui ? « Je ne m'amuse pas, je cherche juste un échappatoire. Il est un ami. Un vrai ami, rien de plus. Je t'ai menti. On n'a jamais rien fait et nous ne pourrons jamais rien faire ensemble. » son regard était sincère. Dans leurs yeux, c'est comme s'ils arrivaient à lire tout ce qu'ils n'osaient pas se dire. La peur, la colère, la douleur, l'amour. Tout ça en même temps mais ils pouvaient le voir, le sentir, le comprendre. Et quand Junmin osait prononcer son prénom, c'était une vraie bouffée d'oxygène pour Ying qui en ferma les yeux de bonheur. Une bouffée d'adrénaline qui parsemait son corps de frisson et détendait ses muscles. C'était comme s'il s'était pris un bon rail de coke. Il planait littéralement. Quand il faisait ça, c'était un réel bien. Un plaisir intense dont il se délectait tant ils étaient rares.

Ying se redressa, dans l'espoir d'avoir une requête. Seulement, il n'avait pas été bien clair, comme d'habitude. Il ne cessait de toujours se contredire. Ne joue pas avec moi. Finalement joue avec moi. Laisse-moi. Ne m'abandonne jamais. Fais ce que tu veux. Ne regarde et ne touche que moi. Je te déteste. Je t'aime. C'était comme ça avec Ying. Quand il était en colère, blessé, il disait les choses d'une manière que l'on ne pouvait que mal interpréter et dès qu'il retombait dans ce cocon de douceur, il redevenait le masochiste et le niais de service. Alors oui, Junmin avait de quoi devenir fou. « Non... je... » Et Junmin reprenait, l'empêchant de véritablement lui répondre. En fait, il semblait vouloir parler, déballer toutes ces choses avant même d'avoir ses réponses. Peut-être pouvait-il y aller doucement, étape par étape ? Non, pas pour le moment à priori. Alors Ying l'écouta, son regard rivé dans le sien. Il enregistrait chaque mot dans sa tête pour être sûr de ne pas oublier une seule réponse, bien que certaine chose n'exigeait aucune réponse. Et il se figea. Pourquoi j'ai du tomber amoureux de toi, Ying ? Figé. Le temps également. Cette phrase, l'avait-il imaginé ? L'avait-il rêvé ? C'était si soudain qu'il ne l'espérait plus.

Une goutte tomba. Il n'était pourtant pas mouillé. Une deuxième tomba et une troisième dévala sa joue à une vitesse folle. Sans qu'il ne puisse les retenir ou les sentir, les perles salées quittaient ses yeux. Combien de temps avait-il fallu pour qu'enfin il les entende ? C'était vrai alors ? Junmin était amoureux de lui ? Ou il l'avait été et c'était son plus beau rêve qui s'était réalisé. « Ju..im... » ça voit s'était cassé entre les deux, éraillées par cette boule devenue imposante dans sa gorge. Mais il était choqué de l'avoir entendu. Les yeux ronds, il enroula ses bras autour du torse du plus jeune et plaqua son menton sur son épaule, le serrant contre lui, tremblant. Son torse se collait et se décollait du sien à un rythme rapide, sa respiration devenue saccadée. « Ne t'éloigne pas de moi. » sa voix était devenue supplique. « J'veux pas. J'sais pas comment... agir. Je sais pas comment faire. J'veux pas que tu partes alors je fais n'importe quoi. Je sais que je devrais pas. Tout ça n'était qu'un jeu, c'est vrai... Mais j'arrive pas à me mentir... je n'aime pas jouer, mais si je ne veux plus jouer, tu partiras, pas vrai ? Alors j'accepterai de jouer encore même si ça me fais mal. J'veux pas que tu joues avec quelqu'un d'autre, alors je fais comme tu voudras. C'est compliqué pour toi, mais ça l'est aussi pour moi. Tu penses être le seul à te poser toutes ces questions ? Moi aussi j'ai les même peurs, les même doutes. » Il se recula, ses joues plus humides mais sans avoir l'ombre d'une tristesse dans le regard. Il baissa la tête et parla d'une voix plus basse mais que Junmin pourrait parfaitement entendre. « S'il te plaît... Ne tiens pas cette promesse. » Ou alors Ying ferait tout son possible pour qu'il ne la tienne définitivement pas. Il releva son regard et, constatant qu'il allait parler, Ying l'interrompit « Tais-toi. » Bien que Junmin n'avait rien dit sur le coup, il faillit reprendre la parole, lui désobéissant, aussi, Ying le fit taire en posant ses lèvres sur les siennes. Il le ferait taire, il le ferait rompre avec cette promesse, peu importe combien de temps il devra l'embrasser. Il posa sa main sur la nuque de Junmin, le retenant pour ne pas qu'il se dérobe. Oui, c'était à son tour de violer ses lèvres et de l'empêcher de faire autrement.

Junmin n’avait jamais su s’il finirait avec une femme ou un homme, s’il aurait des enfants, s’il serait marié, ou s’il vivrait le reste de ses jours en célibataire. Il ne s’était jamais réellement imaginé dans le futur accompagné d’une famille, d’une personne avec qui partager son amour. Toutes ces choses là, la vie conjugale, être en couple, il n’y avait jamais réellement pensé. Ce n’était pas pour lui. Alors, il flirtait à droite et à gauche, pendant un certain temps. Mais jamais il n’avait appliqué le mot couple aux quelques relations qu’il avait eu avec des hommes ou des femmes. Pour la plupart, c’était des sexfriend. Comme Ying. Mais ses relations avec les autres ne duraient jamais bien longtemps, trois mois tout au plus. Et pourtant, avec Ying, il avait l’impression que cela faisait une éternité qu’ils se côtoyaient. Junmin n’aurait jamais pensé qu’il puisse rester accroché à quelqu’un aussi longtemps, même seulement liés par les liens du sexe. Et au fil du temps, Junmin avait considéré le chinois comme étant sien. Il l’avait depuis si longtemps, il ne pouvait pas s’imaginer Ying avec quelqu’un d’autre que lui. C’était une évidence, lui et Ying. Même si ce n’était que pour du sexe. Alors quand le nom du petit lycéen avait mentionné, quand Ying avait supposé avoir des faits des choses avec lui, Junmin avait vu sa réalité s’effondrait. Et Dieu que ce n’était pas agréable. « Arrête de te contredire sans arrêt. Je suis supposé croire quoi ? Un coup tu me dis que c’est la vérité, un coup tu me dis que c’est un mensonge ? Je suis supposé croire lequel des deux, Ying ? » Junmin avait pourtant déjà la réponse dans le regard de Ying, cependant il était trop aveugle par sa douleur et sa jalousie pour la voir, pour comprendre à quel point Ying était sincère.

Si on avait dit à Junmin qu’il ferait une déclaration d’amour à un garçon, au bord de la piscine de l’université, il n’en aurait pas cru une miette. Il aurait rit, jusqu’à ne plus pouvoir respirer. Et pourtant, le voilà, assis sur le sol mouillé et glissant de la piscine universitaire, tenant Ying par les épaules, lui déclarant son amour. Il n’avait pas tenu. Il n’avait pas pu garder tout ce mélange d’émotions à l’intérieur de lui, le cachant du mieux qu’il pouvait par des actes qu’il regrettait dès l’instant qu’ils se produisaient. Il savait qu’il avait fait du mal à Ying, il savait qu’il en avait fait bien plus que celui-ci lui en faisait. Mais il n’avait pas pu s’arrêter. Voir le chinois à sa merci, le voir souffrir, le voir prendre du plaisir, le voir ressentir des sentiments immenses grâce à lui, c’était quelque chose dont Junmin ne voulait pas se passer. De cette manière, il avait concrètement l’impression d’être le seul pour Ying, d’être le plus important aux yeux du chinois, même si ce dernier ne cessait de lui répéter. Des paroles contre des gestes, le choix est vite fait, non ?

Cette dernière phrase, cette question, presqu’une supplication, Junmin ne l’avait pas prévu. Elle était sorti de sa bouche sans consentement, venant abattre un calme plat sur le bâtiment. Junmin n’osait plus bougé. Le fond de sa pensée était sorti de son esprit sans qu’il ne puisse rien faire pour l’arrêter, se dévoilant ainsi au grand jour, faible et à la merci de Ying. Il avait l’impression de perdre toutes ses barrières, toutes ses défenses. Il se mit à trembler, il avait peur. Peur de la suite, peur de la réaction de Ying. Il avait peur des répercutions. Et si le dire à voix haute avait rendu la chose plus réelle avant de l’ensevelir à jamais ? Si le dire à voix haute était tout ce que voulait Ying, afin de le mettre plus bas que terre, de le soumettre ? Si le dire à voix haute avait effacé ses sentiments ? Cependant, un reniflement le fit lever la tête, le sortant de ses doutes. Ying pleurait à chaudes larmes devant lui, essayant tant bien que mal de formuler correctement son prénom. Mais sa voix s’était cassé en deux, et il n’en avait pas fallu davantage à Junmin pour se réveiller. Il ne savait pas ce que signifiait ces pleurs, mais tout ce qu’il savait, c’était que « t’es moche Ying quand tu pleures. » Il avait affirmé cette phrase dans un murmure, passant en même ses pouces sur les joues du chinois, effaçant les perles d’eau salées qui coulaient en trombe sur son beau visage.

Junmin sentit soudainement un poids venir se coller contre lui, le serrant de toutes ses forces. Les cheveux de Ying venaient caresser sa joue, et Junmin ne put s’empêcher de plonger sa tête dans le cou du chinois pour sentir son odeur, sentir sa peau contre lui. Il déposa ses lèvres sur la fine peau de Ying. Junmin avait toujours ses bras le loin du corps, il ne savait pas quoi faire. Le réconforter, attendre qu’il se calme ? « Ne t’éloigne pas de moi. » Junmin ferma les yeux. Ce n’était vraiment pas ce qu’il avait en ce moment, s’éloigner du chinois. Alors, il passa ses bras autour de son corps frêle, et le serra un peu plus à lui. Alors qu’il l’écoutait parler, il pressa ses lèvres contre sa peau du cou, l’embrassant doucement. À chaque phrase prononcée par Ying, il l’embrassait à un endroit différent, toujours la tête enfouie dans son cou. Il essayait d’ancrer toutes les paroles, tous les mots de Ying dans son esprit pour ne jamais les oublier. À contre cœur, il se décolla du chinois lorsque celui-ci voulut reculer. Le regard de Junmin exprimait tellement de choses à la fois qu’on aurait pu croire qu’il était neutre, indéchiffrable. Il voulait encore serrer Ying dans ses bras, lui dire de ne plus pleurer, effacer ces larmes de son visage, l’embrasser, lui montrer à quel point il l’aimait, le repousser, le frapper, l’insulter pour le rendre si faible, s’insulter pour être si fragile face au chinois, le prendre à nouveau dans ses bras, s’excuser pour lui vouloir du mal. Il voulait faire tellement de choses, dire tellement de choses, et pourtant, il restait là, les bras toujours sur la taille du chinois, le regard neutre, sans faire un geste. « S’il te plaît… Ne tiens pas cette promesse. » Ce n’était qu’un murmure, comme une demande qu’il voulait silencieuse, comme une confidence. N’avait-il pas compris ? Junmin allait lui répondre, mais Ying enchaîna, lui ordonnant de ne rien dire. Et sans qu’il ne s’y attende, Ying vint déposer ses lèvres sur celle de Junmin, l’embrassant. Il se sentit pousser en avant, attirer encore plus vers le visage et les lèvres de Ying qui dévoraient les siennes. Il raffermit sa prise sur le corps du chinois, le serrant contre lui comme si leurs vies en dépendant. Il espérait faire passer toutes ses émotions à travers son baiser, tout l’amour et la haine qu’il pouvait ressentir.

Au bout d’un moment, Junmin coupa court au baiser, reprenant ses esprits et sa respiration. Et il n’attendit pas une seconde de plus avant de parler. Il ne voulait pas que Ying le coupe encore, l’empêchant de dire ce qu’il se devait de lui dire. Il était parti sur sa lancée, il ne pouvait pas s’arrêter comme cela en plein milieu. Car c’était le seul moment pour dire tout ce qu’il ressentait, ça serait trop tard s’il le reportait à un autre moment. « Tu n’as pas compris ? Que cette promesse, peu importe ce que je fasse, elle est déjà rompue. Je ne peux pas revenir en arrière. Depuis le moment où je… » Il s’arrêta. Il ne savait même pas comment il avait réussi à le dire une fois, mais il faudrait attendre quelques temps avant qu’il ne le dise une autre fois. Il posa ses mains sur les joues de Ying, ancra son regard dans le sien. « Tu… T’es la seule personne avec qui j’ai envie de jouer, Ying. Si on peut encore appeler ça un jeu ? » Il baissa la tête, se mordant la lèvre. Il regrettait sûrement plus tard de s’être montré aussi faible face à lui. « Je suis complétement perdu, Ying. J’ai jamais aimé quelqu’un aussi fort. Je sais même pas si c’est de l’amour ou de la haine. » Il leva de nouveau son regard vers le chinois, il en avait marre de jouer au lâche. Et ça commençait par le regarder lorsqu’il lui parlait. « Écoute. J’ai plus envie que ce soit un jeu. Parce que c’est plus que ça. Mais c’est quoi ? On est quoi ? J’ai jamais été en couple, alors je sais pas si je pourrais… » Il ne finit pas sa phrase, il se doutait que Ying avait compris où il voulait en venir. Il lâcha les joues du chinois, et se retourna, s’asseyant sur le rebord de la piscine, trempant ses pieds et ses mollets dans l’eau froide. Il laissa tomber sa tête en arrière, fermant les yeux. « Tu m’expliques pourquoi il faut que je sois aussi faible quand il s’agit de toi ? »

Quand on est enfant, on s'imagine tout un tas de chose. Quand on est adolescent, ses choses deviennent un peu plus réaliste mais l'on comprend très vite que ça ne sera peut-être pas chose facile. Quand on est adulte, on comprend que rien ne peut s’acquérir sans beaucoup de volonté, de motivation et de travail. Ying l'avait comprit, aussi bien par tout ce qui est matériel que tout ce qui concernait l'amour par exemple. Il avait arrêté de compter les jours, les semaines, mais il était persuadé que ça faisait longtemps qu'il l'aimait. Trop longtemps pour qu'il ne tienne un jour de plus. Imaginez combien il est douloureux d'aimer sans rien en retour. D'aimer quelqu'un aussi fort que l'oxygène en devient irrespirable quand il se trouve à vos côtés. D'aimer à en crever. Si on juge que le coup de foudre existe, Ying avait dû être foudroyé. L'amour n'est pas prévu pour que l'on souffre et pourtant, tout deux souffrait. L'amour n'est pas sensé faire mal, mais eux, il saignait abondamment sans parvenir à panser la blessure. Chacun d'eux finirait par devenir fou, si ça n'était pas déjà fait. « Tu devrais juste croire ce que mon cœur te hurle. Lui, il est sincère. » Et pour comprendre ce que son cœur lui criait, il n'avait qu'à regarder dans ses yeux. Il n'avait qu'à voir plus loin que le bout de son nez. Si Junmin prenait le temps de voir dans ses yeux tout ce que Ying ne disait pas, il y verrait encore bien plus. Beaucoup de richesse s'y cachait et il serait surpris de tout ce qu'il pourrait y lire. Ying était bien plus accroché à Junmin qu'il ne l'aurait pensé. Ying vouait un culte profond, il était complètement accro et tout ce qu'il pouvait faire ou penser, ne tournait qu'exclusivement autour de lui.

Jamais Ying n'aurait pu penser que Junmin lui dirait un jour. Ce n'était pas forcément un « je t'aime » mais c'était tout comme. Il avouait avoir des sentiments pour lui. Mieux ! Il lui avouait être amoureux de lui. Peut-être était-ce un rêve, finalement. Que tout ceci sortait de son imagination ? Il n'avait pas l'air d'avoir conscience de ce qui se passerait après ça, il souhaitait juste stopper le temps. Que tout se mette en suspens. Que le temps et même la terre cesse de tourner. Il voulait pouvoir rembobiner cet instant et se le repasser en boucle encore et encore. Il sentait à la fois son cœur se gonfler de plaisir et en même temps, il le sentait se déchirer. Pourquoi est-ce qu'il avait fallut qu'il attende aussi longtemps pour le lui dire ? Il y aurait eu beaucoup moins de mal si Junmin avait osé lui dire avant. Ils se seraient moins déchirés pendant tout ce temps. Alors pour ne pas que tout ceci se termine trop brutalement, il fallait que Ying le fasse taire. Qu'il l'empêche de dire quelque chose qui casserait tout. Parce qu'il faut avouer que, parfois, Junmin avait le don de tout casser. Et puis il ne voulait surtout pas qu'il lui dise qu'il tiendrait cette promesse. Ying ne désirait pas l'entendre dire qu'il cesserait de l'aimer ou quoi que ce soit. Alors il le faisait taire en l'embrassant. Et aussi parce qu'il avait trop attendu pour toucher à ses lèvres. Peut-être, qu'en fait, il profitait de cet instant pour l'embrasser, le toucher, peu importe ce qu'il pouvait faire il faisait le plein de cette énergie. Il voulait ses lèvres et il les avait eu, l'empêchant de se dérober. Mais finalement, Ying devint plus faible et Junmin réussit à le stopper pour parler. Et la peur entrava le corps du chinois dont le cœur se mit à tambouriner à vive allure. Mais il fut très vite rassuré. Finalement, si Junmin ne tenait pas cette promesse, alors ça ne pouvait lui être que bénéfique. S'il avait son amour et la liberté de pouvoir l'aimer autant qu'il le voulait, alors c'était bon. Il serait bien.

Son regard rivé dans le sien, il buvait ses paroles. Il sentait cette bouffée d'oxygène dans tout son corps, il se sentait revivre. Il ne fit rien pour l'interrompre cette fois, exigeant d'en entendre davantage. Qu'il se dévoile encore plus. Il savait que ça ne se passerait peut-être plu, il fallait donc qu'il en profite, qu'il enregistre chacun de ses mots dans un coin de son esprit et chaque trait de son visage si doux et si sévère à la fois. Junmin était un bel homme. C'est à cause de ça qu'il était tombé amoureux, à cause de sa beauté en prime abord. Puis sa façon de le toucher ou de l'embrasser que ça soit doux ou brutal. Une autre chose qui lui plaisait, c'était son caractère. Bien qu'il le blesse souvent, il aimait cette douleur parce que c'était lui qui la causait. Masochiste mais amoureux. Peut-être qu'ils ne seraient pas un couple comme les autres. D'ailleurs, il y avait de très fortes chances pour qu'ils ne soient jamais un couple comme les autres, mais ils s'aimaient encore plus fort. Il y avait cet amour incommensurable. Une façon de s'aimer étrange mais qui leur convenait au final. Personne ne les comprendrait.

Le silence était retombé et chacun des deux étaient de son côté, à réfléchir un peu à tout ce qui venait de se passer. Quand Junmin parla à nouveau, Ying ne pu s'empêcher de sourire. Il se faufila derrière lui et enroula ses bras autour de lui, calant sa joue contre la sienne. « Parce que je suis irrésistible ? » Un peu d'humour au moins pour calmer cet instant qui était passé de la colère à la nostalgie en peu de temps. Trop d'émotion aujourd'hui, il fallait décompressé. Personne n'était là pour les déranger, alors Ying pouvait se tenir un peu comme ça, contre lui, juste quelques minutes le temps de refaire le plein avant de devoir le lâcher et le laisser partir. Mais il savait qu'à présent, il pourrait le trouver plus facilement. Il poussa un profond soupire, fermant les yeux tout en gardant son torse plaqué contre son dos. « Il fait un peu frais pour... ton fanstasme... alors tu veux pas qu'on aille manger quelque chose, quelque part ? » Juste histoire que Ying puisse rester plus longtemps en sa compagnie. Parce qu'il savait que s'il ne faisait rien, Junmin essaierait de s'échapper, de fuir la situation. Autant le retenir comme il pouvait. Et peut-être que s'il restait ensemble jusqu'à la nuit tombée, Junmin lui proposerait peut-être de dormir chez lui ? Quel vile idée saugrenue mais bien pensée !

Depuis le début de cette histoire, Junmin n’avait fait que se retrancher dans ses croyances, dans les croyances de son père adoptif. Il n’avait fait que se cacher derrière ce qu’on lui avait appris, derrière cette barrière imperméable à tout sentiment qui s’était forgé avec le temps, suite à la mort de Juno. Accorder sa confiance était devenu quelque chose de très difficile pour Junmin, croire en quelqu’un était presque impossible à faire. Tout ce qu’il voyait était strictement ce qui l’arrangeait. Il ne voyait jamais plus loin que le bout de son nez. Il ne voyait même pas ce qu’il se passait dans son cœur. Et maintenant qu’il avait enfin osé ouvrir les yeux sur ses sentiments, il se rendait compte qu’il aurait du le faire plus tôt. Il n’aurait jamais pensé que se délivrer de ce qu’on ressent pouvait faire un bien fou. Il avait l’impression d’être libéré d’un poids, il se sentait bien plus léger. Peut-être qu’il aurait du s’en rendre compte avant, de ses sentiments pour Ying. Peut-être qu’il aurait du les lui dire avant, cela aurait évité bien des souffrances inutiles. Et pourtant, c’était ces souffrances, ces douleurs qui les avaient déchirés tous les deux, ces tensions palpables et dangereuses qui les avaient menés là où ils étaient maintenant, et qui faisaient d’eux ce qu’ils étaient dorénavant. Finalement, peut-être que ce n’était pas plus d’être faible face à Ying. Après tout, n’était-ce pas une preuve d’amour de se montrer tel qu’on est réellement à la personne qui fait battre notre cœur ? Et Junmin devenait de plus en plus épuisé de ne pas être lui à longueur de journée, de jouer au mec fort que rien n’atteint. Il ne savait même plus ce que cela faisait d’être soi-même, il ne savait même plus qui il était réellement.

Junmin sentit un violent frisson le parcourir lorsque Ying s’approcha de lui par derrière et entoura sa taille de ses fins bras. Il appuya sa tête sur l’épaule du chinois et la tourna vers sa joue, l’embrassant du bout des lèvres. Habituellement, être doux comme ça l’aurait écœuré, mais en ce moment, il en avait besoin. Il posa ses mains sur celles de Ying, et se reteint difficilement de les nouer ensemble. Il ne fallait pas pousser le bouchon trop loin non plus. Il laissa échapper en petit rire lorsque Ying plaisanta. Il avait le don de détendre l’atmosphère, et il le remercia intérieurement pour ça, car à vrai dire, il commençait à être gêné d’être aussi proche de lui, comme un couple. Heureusement qu’ils étaient seuls. Il lui mordit légèrement le cou en réponse. S’il savait à quel point il l’est, pensa Junmin. Ils restèrent ainsi pendant un certain temps, la tête de Junmin toujours tourné vers le cou de Ying, les yeux fermés, appréciant le compte et son odeur. Il était entièrement appuyé contre le corps du chinois, et entre ses bras, il se sentait en sécurité. Junmin avait beau être plus costaud que Ying, plus grand, le chinois dégageait un sentiment de confort immense. En l’entendant soupirer, Junmin ouvrit de nouveau les yeux, se redressant légèrement pour voir son visage, sans pour autant se décoller complétement de Ying. Un fin sourire vint orner ses lèvres et il prit le menton de Ying de ses doigts, le forçant à tourner la tête en sa direction. « On a tout notre temps pour réaliser mon fantasme. Et je suis sûre qu’on aurait plusieurs autres occasions. » Il déposa un chaste baiser sur ses lèvres avant de se relever, se libérant ainsi de l’emprise de Ying. Une fois debout dos au chinois, il se cogna plusieurs le front de la paume de sa main. Il était beaucoup trop niais, beaucoup trop doux, il ne se reconnaissait plus, et ça lui donnait envie de vomir. Il ne savait pas quoi répondre à la proposition de Ying. Oui, non ? D’un côté, il aurait aimé dire non. Il avait besoin de se retrouver seul, de remettre ses pensées en place. Mais d’un autre côté, il avait encore envie d’être avec le chinois, de passer du temps seulement avec lui, de l’avoir rien que pour lui encore un peu plus. Alors il se retourna juste assez pour que Ying puisse apercevoir son profil et il tendit sa main en sa direction, voulant l’aider à se relever. « C’est d’accord. » Il ne perdait rien, après tout. Il pourrait bien remettre ses heures de réflexion à plus tard. Pour le moment, il agirait comme son cœur lui indiquait de faire. « Traînes pas à t’habiller, tu vas attraper froid. » Sur ces dernières paroles, il tourna complètement le dos à Ying et se dirigea vers les vestiaires, se dépêchant de se changer. Lui aussi commençait à avoir froid, et il ne manquerait plus qu’il tombe malade. Et puis, pour tout avouer, il avait hâte de retrouver le chinois. Ah, dans quel pétrin s’était-il foutu avec ces sentiments ? Il devenait complétement dépendant de Ying.