Old friends die on you, and they're irreplaceable. You become dependent. Δ Lionel Blue
tenue (+) Il lui fallait le dernier book. Pas celui d’Elie Saab pour une fois, non, celui de Fendi. Sa mère lui avait envoyé un message dans la nuit, décalage horaire oblige, pour la prévenir que le nouveau book de la dernière collection Fendi n’allait pas tarder à sortir et qu’elle risquait d’être surprise. Sa mère avait ce don pour laisser un peu de suspens, pour que Merry découvre les choses par elle-même. Elle était prête à parier que sa mère était créditée à la fin pour plus de créations que d’habitude, au moins. Mais soit, elle n’allait pas manquer la sortie ! Plutôt que d’attendre la date donnée par sa mère, elle allait aller le commander, pour être certaine de le recevoir et ne pas faire face à une éventuelle rupture de stock. C’est donc avec impatiente qu’elle attendait la fin des cours pour pouvoir se rendre dans une petite librairie qu’elle avait repéré le matin sur google maps pour commander ce nouveau book. Lorsque la dernière sonnerie de la journée retentie enfin, elle s’éclipse assez rapidement pour éviter de croiser qui que ce soit et filer tranquillement vers la librairie. Une fois le portail de l’établissement passé, elle enfonce ses écouteurs dans ses oreilles, profitant du chemin pour écouter quelques chansons et checker les dernières mises à jour des grands couturiers. Elle en profite également pour aller chercher les références du book qu’elle doit commander sur sa boite mail puisque sa gentille maman les lui a envoyés. Après la prise de deux bus différents, elle arrive enfin devant la librairie indiquée sur sa carte. Enfin. Elle pousse la porte, trouvant immédiatement l’ambiance accueillante et chaleureuse. Des meubles type bibliothèques partout, des livres de toute taille rangés dans un ordre qu’elle ne comprend pas, étant peu habituée à ce genre de lieu. Ses yeux promènent sur les tranches, lisant les titres en japonais, anglais, parfois d’autres langues inconnues de la demoiselle. Qu’importe, elle est là pour commander son book ! Elle parcourt les quelques mètres qui la sépare du comptoir pour y trouver un homme le nez plongé dans son bouquin.
merry ▬ euh, bonjour ? J’aimerais commander un livre si c’est possible ?
Oui, en fait, d’habitude, elle fait ça en ligne, mais la dernière fois, à cause des frais de ports bien trop élevés et la longueur de la livraison, elle a décidé de changer de méthode et d’en tenter une nouvelle.
Il n'a fait que de penser à ce livre tout la journée. Impossible de se concentrer en cours. Il a même reçu un rappel à l'ordre de la part de son professeur de mathématiques. Il n'y peut rien. le roman qu'il lit à la librairie l'obsède. Il est quasiment à la fin et il aimerait découvrir au plus vite ce qui va s'y passer. Mais il a également promis à son patron de ne pas emporter ses lectures. Il répète qu'il a peur que Joshua ne fasse que ça et qu'il devrait profiter de sa vie d'étudiant au lieu de dévorer toutes ses histoires. Ce n'est pas sa faute, il n'a rien demandé d'abord. Comment veux-tu qu'il réagisse lorsqu'on lui met ce genre d'histoire devant les yeux. C'est une passion comme une autre. Il préfère ça que de mettre les pieds en boîte de nuit ou de passer sa soirée au téléphone. Ah d'ailleurs, il doit absolument appeler sa mère ce soir. C'est son anniversaire dans deux semaines et il aimerait réussir à lui extorquer des informations sur ce qui lui fera plaisir. Le temps qu'il l'achète et qu'il l'envoie à New-York, le paquet devrait arriver dans le jour même. Joshua sourit à cette pensée. Il espère que ses parents vivent confortablement. Depuis qu'il a déménagé à Tokyo et commencer les cours, il les soupçonne de s'inquiéter. Ça lui fait plaisir mais il a tellement l'habitude qu'on le laisse dans le silence le plus complet que c'est également déconcertant. L'important, c'est qu'il a trouvé ce job pour s'occuper l'esprit et payer ses factures. C'est l’idéal. Il n'a pas vraiment à faire quoi que ce soit. Il répond à quelques questions mais en général, les gens n'osent pas l'interrompre. Il a tendance à afficher un visage déconcertant lorsqu'il lit. Ce soir, il espère juste qu'on ne le dérangera pas longtemps. Il s'est promis de finir le tome 2 et de commencer le 3 qui l'attend bien sagement sous le comptoir.
Il salue son patron en entrant dans la librairie et fonce à l'arrière pour se changer. Il revêtit le polo, épingle le tag avec son prénom sur celui-ci et ferme précipitamment son casier. Il trépigne d'impatience. Bien entendu, ce n'est pas quelque chose qu'il montre mais les gens qui le connaissent bien pourraient s'apercevoir que ses pas sont plus précipités et que son regard n'est pas fixe. Il est enfin assis. Le magasin à l'air calme. Tant mieux. Il décroche un sourire en s'empara du livre. D'un air béat, il l'ouvre précipitamment à la page 347 et se plonge dans le monde dystopique de Lucas Wilson. Attentif aux moindres mots, il ne remarque pas qu'une jeune fille entre et se promène, un peu perdue, dans les allés. Son patron est dans la réserve et n'est donc pas disponible pour aller à sa rencontre. Mais cela, il ne le sait pas, il ne s'aperçoit même pas qu'elle se dirige vers lui. Après une première tentative, elle réitère sa question et Joshua en manque de faire tomber le livre. Son cœur bat la chamade. Pour qui elle se prend, elle a fallu provoquer un accident. Joshua est bien décidé à s'en débarrasser rapidement. Il se racle la gorge et rencontre un visage bien trop familier. Merry? Mais. Il doit rêver, ce n'est pas possible. Elle ne peut pas se trouver devant lui. Aux dernières nouvelles, elle l'a lâché en sachant pertinemment qu'il ne ferait pas le premier pas. Il n'est pas bon pour rester en contact avec ses ... amies (?) et elle lui avait promis. Peu importe. Elle l'a probablement oublié. Le mieux est de faire comme s'il ne l'a connaissait pas. A près tout, c'est ce qu'ils sont à présent. Des étrangers.
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tenue (+) Le vendeur était bien trop occupé pour l’entendre visiblement. Meredith se demandait quel genre de livre il pouvait bien lire pour avoir le nez collé à la page ouverte. La demoiselle n’a jamais réussi à comprendre qu’on puisse toujours être accroc aux livres physiques quand maintenant la technologie mettait à disposition des versions numériques, beaucoup plus faciles à emporter qu’un bon vieux livre de 800 pages. Après, elle n’a jamais vraiment été une très grosse lectrice non plus. Le strict minimum comme disait sa mère. Les livres obligatoires pour l’école, ceux que toute personne cultivée se doit d’avoir lue, les grands classiques. Mais une lecture vraiment personnelle, rarement. Elle avait essayé, plus jeune, mais elle a besoin de bouger, de se dépenser, de libérer ses idées, pas de supporter celles des autres ni de les lire. Donc non, elle n’avait pas de grande bibliothèque pleine de bouquins de tous âges. La seule bibliothèque dont elle disposait était partiellement pleine de book de grands couturiers ou de souvenirs de défilés, programmes, invitations et autres trucs du genre. Les livres étaient un mystère pour elle, tout comme les CDs musicaux.
Et pourtant, quand elle posait les yeux sur tous ces livres autour d’elle, elle n’avait pas l’impression que la fin des livres était proche. Qu’importe, tout ce qui compte pour elle c’est de commander son book avant de filer au dortoir pour travailler. Peut-être sortira-t-elle manger en ville pour une fois, plutôt que de se préparer à manger. Oui, elle fera ça, elle sortira manger, elle ne se l’est pas accordé depuis longtemps. Devant l’absence de réponse du vendeur, elle réitère sa question, haussant le ton cette fois. Elle observe le jeune homme sursauter, manquant de faire tomber son livre au sol. Mince alors, elle aurait dû le faire plus délicatement. Attendez, en fait non, elle l’a fait comme il fallait, aux dernières nouvelles s’il bosse, il n’est pas censé lire non ? Qu’importe, elle attend qu’il réponde à sa question, pas pressée après tout. Il relève enfin la tête et le cœur de Merry loupe un battement. Pourquoi les traits de l’homme en face d’elle lui semblent si familiers. Ses yeux descendent vers le tag comportant le prénom de vendeur. Une part d’elle espère que ce doute est infondé mais à l’instant où elle le lit, elle se retrouve perdue. Comment ? Pourquoi ? Il est censé être à New York non ? Quand est-ce qu’il est arrivé au Japon ? Pourquoi ne l’a-t-il pas prévenu ? Oh peut-être parce que cela fait plus d’un an qu’elle a arrêté de le contacter ? Peut-être oui. Perdue dans ses questions, elle en oublie d’écouter ce qu’il lui dit.
merry ▬ je… euh…
Elle était venue pour quoi à la base ? Acheter un livre ? Elle, acheter un livre ? Non non, c’est pas ça. Ah oui, le book Fendi. Commander. Une commande. C’est ça. Wouah. Où est-ce qu’elle est ? Ah oui, librairie, un endroit où on vient acheter des livres et en commander, accessoirement. Reprends-toi petite.
merry ▬ un livre. commander… un livre.. ?
Elle ne sait plus ce qu’il faut qu’elle fasse, ni ce qu’elle commande. Un éclair de lucidité et elle se souvient que la référence se trouve dans sa boite mail, sur son téléphone. Elle pose son sac sur le petit comptoir à la recherche de son portable, retournant complètement l’intérieur. Foutu sac de fille sans fond. Finalement elle l’extirpe de là, le brandissant comme un trophée avant qu’il ne tombe royalement et magnifiquement par terre, aux pieds de Joshua.
merry ▬ nooooooooon.
Elle s’écrase contre le comptoir, priant pour que son téléphone ne soit pas mort. Tout sauf ça. En tombant, l'écran de son portable s'est allumé. Ses yeux se posent sur son fond d’écran de verrouillage, une photo d’elle et Joshua, lors d’une de leur dernière sortie au parc d’attraction avant que Merry ne quitte la big apple. Elle avait bien essayé de changer son fond mais non, elle ne pouvait pas s’y résoudre.
Joshua n'est pas du genre timide. Malgré son introversion, il a un franc parler qui frôle l’indécence. Il ne risque pas de perdre la face face à Merry mais la voir après toutes ses années lui fait légèrement froncer les sourcils. Il ne blesse jamais les gens volontairement mais sa solution est la plus adéquate à la situation. A quoi bon faire semblant, malgré son attachement, il a tout même la sensation d'avoir été trahi. Il sait que Merry n'est pas quelqu'un de mauvais. Sa soudaine précipitation et son air perdue lui indique rapidement qu'elle l'a reconnu. Elle semble ne pas savoir comment réagir et cela ne l'étonne pas, elle a toujours été quelqu'un qui réagit au quart de tour. Que ce soit dans la tristesse ou dans la joie, Merry est une personne pleine de vie. C'est ce qui l'avait impressionner à l'époque. Et en cinq secondes, il peut s'apercevoir que rien n'a changer.
joshua ▬ euh, mademoiselle ?
Elle bafouille quelque chose à propos d'un livre mais Joshua ne peut rien faire avant qu'elle reprenne ses esprits. A vrai dire, il n'a vraiment envie d'intervenir et de mettre la situation au clair. Régler les quiproquos n'est pas quelque chose qu'il fait régulièrement. Peut-être qu'il est lâche. Peut-être qu'il se protège de trop. Mais on l'a tellement trainer dans la poussière qu'il est devenu sensible aux disputes, aux cris et aux larmes. Malgré son côté stoïque, il ne peut pas effacer les cicatrices du passé. C'est avec un grand soupir qu'il décide tout de même de venir en aide à Merry. Il lui doit bien ça, de toute manière il sait que s'il se comporte mal, tout ça lui retombera dessus. Il n'a pas envie qu'elle s'énerve. Elle a le coup de poing facile. Malheureusement, avant qu'il ne puisse faire quoi que ce soit, elle brandit un objet à quelques centimètres de ses yeux et le fait brusquement tomber. La jeune femme s'insurge avant lui et s'écrase littéralement sur le comptoir. Choqué et un peu outré, il recule de quelques pas. Non mais. Il sait que Merry est quelqu'un d'impulsif mais elle pourrait au moins la décence de ne pas faire ça dans un endroit public. Étrangement, avec quelques secondes de choc, son étrange témérité le fait sourire intérieurement. Encore une fois, il peut s'apercevoir qu'elle n'a pas changé. Toujours muet, il se baisse pour s'emparer du portable. Oh, dans la chute, celui-ci s'est allumé. Sans ses lunettes, il ne peut rien distinguer mais lorsqu'il attrape enfin l'objet ... il fait face à quelque chose qu'il ne peut pas le laisser de marbre. Elle a garder une photo d'eux en fond d'écran. Malgré ces longs mois de silence, il est resté omniprésent et il ne sait absolument pas comment réagir face à cette constatation. En se relevant, il se racle la gorge, embarrassé. Que faire. Il devrait probablement la laisser parler. Lui donner des explications. Elle ne risque pas de partir sans rien dire, si ?
joshua ▬ je ... il est pas cassé.
Mon dieu, Joshua, tu pouvais pas faire mieux. Non. Elle arrive à retourner la situation avec une simple photographie. Ça ne va pas se passer comme ça. Après tout, il n'a rien à se reprocher. Et par dessus tout, il n'a pas envie que cela se reproduise. Merry à sa vie, probablement bien remplie puisqu'elle n'a pas daigner l'appeler ou lui écrire. Elle a peut-être quelqu'un. Certainement. Sûrement. Une fille comme ça, ça ne peut pas aller avec un garçon comme lui. Il est aigri et ... rancunier.
joshua ▬ ton petit ami doit être quelqu'un de tolérant. pour accepter une chose pareille.
Rah mais. Qu'est-ce qu'il raconte. Il n'arrive pas à croire qu'il a laissé ses souvenirs et ses émotions prendre le dessus. Quel bon à rien. Il déglutit, redoutant la réaction de la jeune femme et espérant pouvoir s'échapper de ce pétrin. Au même moment, il aperçoit son patron émerger de la réserve et il ferme les yeux pendant un instant, priant pour que celui-ci vienne à sa rescousse.
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tenue (+) Elle a peut-être, en effet, manqué de crever un œil à Joshua en brandissant son téléphone tel un trophée durement gagné, mais il était encore en vie et avec ses deux yeux, alors que son téléphone était au sol, après une chute d’au moins deux mètres. Est-il encore en vie seulement ? Son fond d’écran est visible, une photo d’eux, au parc d’attraction, encore deux ans après, elle n’en a pas changé. Même si elle ne prend plus de ses nouvelles, ce n’est pas pour autant qu’elle l’a oublié. Parfois, elle retombe même sur des vidéos qu’ils avaient fait ensemble lors des soirées de leurs parents ou lors de leurs sorties, des vidéos où ils rigolent tous les deux, des vidéos où ils mangent une glace dans central park, des vidéos de tout et n’importe quoi. Oui, Merry est le style de personne à filmer tout et n’importe quoi, et si elle ne filme pas, elle prend beaucoup de photos. Il est toujours bon de se souvenirs de nos meilleurs moments. Alors quand elle fait du tri sur son téléphone, elle retombe sur ça et elle se surprend à vouloir le recontacter. Sauf qu’après presque deux ans, c’est délicat. Elle s’imaginait mal lui envoyer un sms du style « hello hello, comment ça va depuis la dernière fois ? » ç’aurait été un peu mal venu non ? Du coup, elle ne l’a jamais fait, alors qu’elle aurait vraiment voulu.
Finalement, il ramasse son portable. Elle essaie de comprendre ce qu’il peut se passer dans sa tête à lui. Est-ce qu’il prend ça mal ? Est-ce qu’il prend ça bien ? Est-ce qu’il lui en veut ? Il lui en veut surement, parce que sinon il ne lui parlerait pas de cette manière, non ? En même temps, à sa place, elle lui en voudrait d’avoir été silencieux aussi longtemps. Mais comment aborder le sujet avec lui, là, maintenant, sur ce qui semble être son lieu de travail ? D’ailleurs qu’est-ce qu’il fait au Japon d’abord. Il lui tend son portable, lui disant qu’il n’est pas cassé. Ouf, elle n’aura pas perdue ses photos et vidéos. Ouf. Et puis elle l’entend dire un mot qu’elle n’aurait jamais cru entendre pour elle. Petit copain ? Quel petit copain ? Qui ça en fait ? Depuis quand ? Elle n’était même pas au courant qu’elle avait un copain ? Alors c’est ça, il feint l’ignorance. Il fait comme s’il ne la reconnaissait pas, il fait comme s’il ne s’était pas reconnu sur la photo de fond d’écran, c’est donc ça.
merry ▬ petit… copain ? accepter quoi ?
Elle ne sait pas quoi dire. Elle ne comprend pas ce qu’il veut dire. Accepter qu’elle jette son portable au sol ? Non, ce serait stupide, il a bien compris qu’elle n’avait pas fait exprès. Accepter quoi alors ? Le fond d’écran ? Mais pourquoi ? Le bruit de la porte de la réserve fait sursauter la demoiselle alors qu’elle découvre ce qui est surement le patron de la librairie. Elle ouvre le mail sur son portable et le pose sur le comptoir, en face de Joshua.
merry ▬ j’aimerais commander ce book, il sort dans une ou deux semaines, c’est possible ?
Elle aimerait lui dire qu’elle est désolé, qu’elle aurait pas dû arrêter de lui envoyer des messages et de lui écrire mais elle ne sait pas comment, elle ne trouve pas les mots ni le courage de lui dire. Et le fait que le patron de Joshua soit sorti de la réserve la stresse, elle ne veut pas qu’il perde son boulot à cause d’elle.
Si Merry ne se trouvait pas si près de lui, il se sera probablement taper la tête contre le comptoir. Cette fille est irrécupérable. Après c'est lui qu'on accuse de ne pas écouter les autres. Quelle blague. Regardez là, elle n'a pas relevé ce qui devait être un reproche. Elle n'a aucun sens de ce qui est bien ou mal ? Ou fait-elle exprès ? Peut-être qu'elle joue dans son jeu et qu'il ne s'en ai pas aperçu. Non, elle n'aurait probablement pas fait chuter son portable si c'était le cas. Rah et puis mince, Joshua ne comprend rien aux filles de toute manière. Il a déjà du mal à interpréter ses propres paroles, c'est pas le moment d'analyser celles des autres. Dans tous les cas, la voir bafouiller le rassure. Il n'a pas à chercher d'excuses pour ce qu'il vient de dire. Faisons donc comme si de rien n'était. C'est la meilleure des solutions. Tout en reprenant ses esprits, il capte le regard de son patron. Celui-ci lui sourit d'un air interrogateur. Quoi ? Qu'est-ce qu'il veut ? Joshua ne sait plus trop si sa présence est rassurante. Il est capable de faire des commentaires désobligeants. Il l'observe s'avancer vers eux tandis que Merry pose son portable sur le comptoir. Elle est là pour commander un livre. Ce qui parait évident.
joshua ▬ en général, on ne prend pas de commande pour les nouveautés. il faudrait plutôt s'adresser aux espaces culturel des grandes chaînes de distribution.
Il se sentirai presque désolé de lui dire cela. Si elle s'était mieux renseigné, peut-être qu'ils ne se seraient jamais revu. Il se demande toujours pourquoi elle a gardé cette photographie en fond d'écran. Ce n'est pas son genre d'être mélancolique. Rah mais pourquoi il fait des spéculations à tout va. C'était pourtant si simple avant. Merry était la seule fille avec qui il n'avait pas à réfléchir. Avec qui, il pouvait être lui-même. Mal à l'aise, il se gratte la nuque et tente un sourire crispé.
patron ▬ le petit gars a raison. mais mademoiselle, on peut faire une exception pour vous.
joshua ▬ quoi ? n'importe quoi.
Joshua lève la tête au ciel en soupirant. C'est quoi ce cinéma ? Voilà qu'il recommence. Il a déjà essayé auparavant. A chaque fois que Joshua interagit avec une jeune femme, il se permet d'intervenir et d’envenimer la conversation. Le pire dans cette histoire, c'est qu'il ne sait pas qu'ils se connaissent déjà. Et très bien.
patron ▬ voyons, joshua, soit un peu plus polie avec la charmante demoiselle. elle a certainement besoin de ton aide. pour la peine, tu te chargera toi-même de la prévenir de l'arrivée de sa commande.
Il est fou. Il est complètement fou. Voilà, il a réussi à le mettre dans le pétrin et il peut rien dire. Merry les regarde comme deux abruties en reprenant le téléphone que lui tend son patron. Il a noté les références du book sur un post-it et Joshua sait pertinemment qu'il va devoir passer des coups de fils à droite à gauche pour le commander. Ils n'ont aucune relation avec la grande distribution. C'est une librairie qui vend des romans atypiques, des histoires oubliés, des registres et des manuscrits en tout genre. C'est le coin des artistes paumés ou oubliés. Il aime cette endroit et les clients réguliers le complimentent sans cesse. C'est une caverne d'Ali Baba, pas un magasin standardisé. Cette situation l'énerve sincèrement car il sait que Merry vient de rajouter des heures supplémentaires à son patron et qu'il n'a aucune envie de l'a contacter pour qu'elle revienne.
joshua ▬ c'est malin Merry. tu aurais pas pu te renseigner avant de rentrer dans la boutique ?!
Pause. Non. Il est grillé pour de bon, n'est-ce pas ?
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tenue (+) Il ne répond pas et elle n’a toujours pas saisi, accepter quoi ? Puis pourquoi son petit copain devrait refuser quelque chose ? Elle est quand même libre de faire ce qu’elle veut, copain ou pas copain dans sa vie, non mais. Finalement elle passe à autre chose, posant son portable avec les références du book sur le comptoir pour les lui présenter. Elle est venue pour commander à la base, elle ne va pas sortir de sa route initiale même si Joshua l’en a fortement écarté depuis qu’elle est entrée dans la boutique. Ils ne prennent pas les commandes ? Mais ? Il n’y avait rien écrit de tel sur google maps ? Elle n’a pas pensé à vérifier à vrai dire. Pour elle cela semblait évident qu’une libraire prenne les commandes de livres. Elle ne sait même pas qu’il existe différents types de librairie. Elle n’y connait rien, c’est pas son délire les livres, et puis d’habitude elle commande sur internet. Ça lui apprendra à vouloir faire ça dans une librairie pour faire travailler les petits commerces. Grand mal t’en prit ma chère. Mal à l’aise face à lui, elle ne sait plus quoi dire ni quoi faire. Plier bagage et repartir ? Tant pis pour le livre, elle demandera à sa mère de lui en faire parvenir un des USA ? Mais avant qu’elle n’ait eu le temps de reprendre son portable, le patron débarque, voulant faire une exception pour elle. Ils vont lui commander son book ? Visiblement Joshua n’a pas l’air vraiment d’accord avec ça. Evidemment, ça veut dire qu’elle devra repasser pour venir le chercher et sa réaction indique clairement à Merry qu’il ne veut pas la revoir. À quoi pouvait-elle s’attendre en même temps, il n’allait pas l’accueillir les bras grands ouverts en disant « Merry ça fait tellement longtemps tu m’as manqué », fallait pas se leurrer.
merry ▬ non vous embêtez-
Avant qu’elle n’ait pu finir sa phrase, le patron l’avait déjà coupé pour reprendre Joshua. Si elle n’avait pas eu plus de maitrise d’elle-même, elle aurait lâché un gros « oh. mon. dieu. » au milieu de la librairie mais non, elle sait encore se maitriser tout de même. Néanmoins, c’est ce qui lui était venu à l’esprit quand elle avait entendu ce que le patron avait dit. Ok, il allait clairement la détester maintenant.
merry ▬ non non c’est pas la peine je vais me débrouiller autrement, c’est pas grave.
Mais trop tard, le patron a l’air décidé et elle ne peut plus rien y faire. Il doit avoir envie de la tuer dans sa tête, peut-être l’a-t-il même déjà tué cent fois en l’espace de quelques minutes. Pourquoi est-ce qu’elle se met toujours dans des galères impossibles comme ça ? Elle regarde le patron repartir dans l’arrière-boutique et se retrouve face à Joshua, encore une fois perdue. Que dire ? Comment s’excuse ? Autant pour les deux dernières années que pour le book ? Elle ne sait plus, elle ne sait plus rien du tout. Et finalement c’est lui qui reprend la parole. Merry. Il l’a appelé par son surnom. Sortez les trompettes, le carnaval de Rio c’est maintenant.
merry ▬ écoute je suis désolé, j’aurais dû me renseigner et appeler avant. Bien avant. J’aurais jamais imaginé qu’il existe des librairies qui ne passent pas de commandes ou je ne sais quoi, tu sais bien que j’y connais rien. Et j’pensais qu’on était au-dessus de tout ça, plus fort que ça.
Mélangé, son esprit est mélangé, elle n’arrive plus à donner de cohésion à ce qu’elle raconte. Elle a tellement de choses à lui dire, des excuses, beaucoup d’excuses, des explications aussi, mais tout s’embrouille et ressemble à une ville après un ouragan. Chaotique.
La situation commence à mal tourné. Joshua lâche un énième soupir. En se levant ce matin, il n'aurait jamais penser se retrouver dans une telle position. Il devait juste supporter sa journée de cours et s'asseoir paisiblement pendant son service, ici même, pour finir ce satané livre. Il en a perdu l'envie. Totalement. Cela doit bien faire 20 minutes que Merry est entré - malencontreusement ou non - dans la librairie, réussissant à perturber sa lecture et tout ce qui fait que sa vie est tranquille. Tout ce qu'il demande, c'est d'avoir la paix. C'est visiblement trop demandé. Il n'a pas l'air d'être le seul à avoir l'esprit embrumé. La jeune femme répond au tac au tac, sans avoir pris la peine de réfléchir, car Joshua n'a strictement rien compris. Au dessus de ça ? On ? Il ne voit pas ce qu'il a faire là-dedans. Plus fort ? Elle devrait savoir que ce n'est pas lui le plus fort dans l'histoire. Et manifestement, ils ne le font pas ensemble. Leur amitié n'a pas survécu à une simple séparation.
joshua ▬ tu vois ça ?
Il pointe son portable et elle semble incrédule face à la réactivité de sa réponse. D'habitude, il pèse ses mots mais il connait Merry depuis qu'il a 15 ans, il a outrepassé ce stade.
joshua ▬ ça s'appelle un téléphone portable. dessus, il y a une invention magnifique: INTERNET. c'est magique parce que ça permet au gens comme moi de pas avoir subir les bêtises des gens comme toi. apparemment, tu as perdu l'usage de tes doigts parce que c'est trop difficile de contacter les gens et de faire savoir que tu vas bien.
Il ferme une nouvelle fois les yeux, excédé, et tente de calmer les battements de son cœur. Il ferme les poings, une fois, deux fois, et lâche un regard à son patron, qui est étrangement muet. Ce vieux est bizarre. Il l'a toujours su mais là, ça dépasse l’entendement.
joshua ▬ j'ai pas envie de m'énerver. et encore moins de me disputer avec toi, tu me donnes mal à la tête. et arrête de me regarder comme ça d'abord !
Précipitamment, il fait le tour du comptoir et son patron s'écarte sur son passage, toujours aussi passif. Il empoigne les épaules de Merry et la pousse - le plus doucement possible, il est pas là pour lui casser une jambe - en direction de la sortie. Il perd son calme mais lorsque son franc parler et la discrétion sur ses sentiments se confrontent, il ne peut s'empêcher d'être impulsif.
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tenue (+) Il lui en veut. Elle en est certaine, il lui en veut. Et pas qu’un peu, oh non. Il lui en veut à mort (ou presque). Il lui a presque hurlé de dessus en lui expliquant qu’avec son téléphone, elle aurait pu garder contact, lui envoyer des messages. Faire savoir qu’elle allait bien. Mais pas de nouvelle bonne nouvelle non ? C’est pas ce qu’on dit normalement ? Puis il s’imagine pas la vie qu’elle a eue après son déménagement. Le début des cours, les heures supplémentaires le soir pour travailler à l’atelier sur ses projets, puis son petit commerce de bijoux en ligne, travailler sur ses collections, travailler pour l’école, sans oublier de dormir et se nourrir, accessoirement. Même garder contact avec ses copines ici relève presque du défi quand elle y pense. Mais bon, elle sait bien que ça reste sa faute, qu’elle aurait dû faire un effort, au moins pour lui, surtout pour lui. Parce que c’est lui, après tout, ça reste lui. Elle n’ose pas en placer une, après les reproches -légitimes- qu’il vient de lui faire, elle n’ose rien dire. Qu’est-ce qu’elle pourrait dire de toute façon ? Qu’elle a eue tort ? Que c’était une erreur ? Vu son ton, il risque de ne pas l’écouter. Et puis elle le regarde normalement. Enfin, elle pense. S’il n’a pas envie de se disputer avec elle, il n’a qu’à pas la gronder comme une enfant. Elle l’observe passer de son côté du comptoir, la prendre par les épaules avant de la pousser vers la sortie. QUOI ?
merry ▬ arrête tu me fais mal Joshua. arrête !
Elle se prend les pieds contre une étagère et trébuche, emportant sur son passage quelques livres qui finissent par terre. Et voilà, à cause de lui elle casse tout. Elle se relève précipitamment, ramassant les livres, les posant sur l’étagère rapidement avant de prendre Joshua par le poignet pour le tirer dehors. S’il veut la mettre dehors, pas de soucis, mais elle ne sortira pas seule. Aucun problème, ils parleront dehors. Elle pousse la porte et quitte la librairie en criant un vague « il revient vite » au patron en parlant du garçon. Oui, elle ne compte pas le monopoliser trop longtemps, pas de risque vu comme il risque de lui gueuler encore plus dessus après ça.
merry ▬ ok, deux petites minutes et tu retournes à ton bouquin. J’ai eu tort, je sais. Et t’as pas besoin de me le faire payer en haussant le ton, je m’en veux depuis bien longtemps et visiblement beaucoup plus que ce que tu ne sembles penser.
Elle fait une pause, brève, rapide, elle ne veut pas lui laisser le temps d’en placer une. Elle veut finir ses explications avant qu’il ne puisse continuer à la faire culpabiliser.
merry ▬ je suis désolé, terriblement désolé, tu n’imagines pas à quel point. J’aurais dû appeler, envoyer un message, un poke facebook, n’importe quoi. Le truc, c’est que chaque fois que j’essayais, j’y arrivais pas, parce que t’envoyer un message c’est pas comme t’avoir avec moi, c’est pas comme faire des conneries avec toi, comme sortir avec toi. On aurait pas pu se répondre en direct à cause du décalage horaire, on aurait pas pu se voir, et moi j’aime pas tout ça, moi j’ai besoin de te voir, pas de te lire.
Heureusement que la rue est calme, qu’il n’y a pas grand monde, parce que c’est pas du tout le genre de chose qu’elle aime dire en public. Et pourtant, elle a osé, elle a laissé parler son cœur ? Wow, sortez les pompoms, tous pour Meredith ! Elle n’a pas haussé la voix, elle lui a juste dit ce qu’elle pensait, ce qu’elle ressentait, la raison pour laquelle elle n’avait simplement pas répondu.
Il aurait dû savoir que la pousser n'était pas une bonne idée. Elle a trébuché contre une étagère et a entrainé quelques livres dans sa chute. Dans son dos, il peut sentir que son patron a avancer de quelques pas. Il a probablement peur que la situation tourne au crêpage de chignon. Son but n'était pourtant pas de lui faire mal. Au contraire, la culpabilité lui écrase soudainement la poitrine. Il a toujours détesté qu'on fasse preuve de violence en sa présence et là, en cette instant, il vient de commettre une erreur. Mais, il a à peine le temps de l'assimiler qu'il capte le regard déterminé de la jeune femme. Elle repose les livres à la hâte à leur place et s'empare brusquement de son poignet. Son poing se sert mais il ne résiste pas. Il a la force pour le faire mais après tout, s'ils doivent régler leurs comptes, autant que ce soit loin de quelque chose qu'elle pourrait casser. Tout en l'emmenant à l'extérieur, elle ose un mot en direction de son patron et se met instinctivement à monopoliser la conversation. Elle lui reproche d'avoir hausser le ton. Ce n'est pas quelque chose qu'il fait habituellement alors il accepte facilement la critique. Elle parle si vite que Joshua capte deux mots sur trois mais comprend rapidement qu'elle se confond en excuse. Il connait ce genre de réaction. Elle ne veut pas le laisser parler. Elle avait tendance à faire ça, avant, lorsqu'elle avait quelque chose à reprocher. Cela pouvait aller d'un simple retard à un affreux mensonge. Elle s'excuse mais au fond, le jeune homme juge qu'elle n'avait pas vraiment besoin de le faire. Il savait, lorsqu'elle lui a annoncé qu'elle partait, que les choses n'allaient plus être comme avant. Et à son départ, il s'était résigné en promettant tout de même de rester en contact. Après les premières semaines de silence, il a décidé de changer de portable et de se débarrasser de toutes ses données. Cela lui faisait étrangement mal de voir et revoir ses centaines de photos. Ses souvenirs qui au fur et à mesure des jours devenaient de plus en plus lointains. A quoi bon s'attacher à ce qui n'est plus près de fois. Il en a fait les frais avec ses parents. Ils étaient peu présents mais ils s'accrochaient à eux, si fort, que cet attachement a fini par le blesser. Merry méritait et mérite toujours une vie où elle n'a pas à se retourner et compter ses erreurs. Lui non plus. Mais à présent, elle est là et même après tout cette agitation, il ne peut s'y résoudre.
joshua ▬ et bien sûr, tout ça ne te semble pas trop beau ?
Il ne peut se permettre d'en demander plus. Il a beau être rancunier et ne pas être convaincu par ses excuses, il sait que le cours des choses peuvent facilement déraper. Se persuader que son comportement est le plus juste sera toujours quelque chose qui sera propre à tout être humain. Merry n'est pas une exception à la règle et elle a déjà fait le premier pas, celui d'avouer que la situation lui a échappé. Tout ce qu'il a à faire, c'est de reprendre ses esprits et de prendre une décision.
joshua ▬ il y a du boulot, Merry. je vais te faire payer ça, j'exige que tu sois à mon service pour les cent prochaines années. avant que tu dises quoi que ce soit, oui, je suis complètement conscient que ce n'est pas possible. si tu as finis de hurler comme une hystérique, j'aimerais bien retourner travailler.
Il soupire légèrement avant de décrocher un sourire paisible. Il est fatigué de se battre. Vraiment. Décidé à retourner à son poste, il fait quelque pas en arrière. Hésitant et avant de regretter son geste, il s'empare tout de même de la mèche de cheveux qui obstrue la vue de la jeune fille depuis deux bonnes minutes. Voilà. Là, elle est parfaite.
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tenue (+) Elle ne s’est pas arrêtée de parler, elle ne voulait pas lui donner l’occasion pour en placer une. En fait, si elle n’avait pas agi de la sorte, elle sait qu’il aurait trouvé quelque chose à répliquer pour qu’elle culpabilise encore plus. Elle le connait quand même un peu le Joshua, après toutes ces années. Et finalement, elle avait laissé parler son cœur, tout ce qu’elle voulait lui dire à propos de son silence depuis tout ce temps d’absence. Elle avait essayé de donner un minimum de cohésion à ses mots, histoire qu’il y comprenne un peu quelque chose le pauvre. Oui, ce n’est pas d’une correspondance dont elle avait besoin, mais d’une vraie relation, avec des sorties, des complicités, pas seulement des échanges de nouvelles, d’histoires, de textes échangés de temps en temps, pour savoir ce qu’il avait fait, pour lui raconter ses derniers cours et lui montrer ses dernières œuvres en photo. Non ce qu’elle veut c’est lui montrer en vrai, lui faire des défilés, lui faire toucher les matières, qu’ils sortent en ville, au parc d’attraction, boire un café, au bowling, comme avant. Et ça, en habitant à l’autre bout du monde, c’est compliqué. Alors oui, elle avait eu tort mais elle avait ses raisons, raisons qu’elle trouvait plus que valable après s’être entendue les prononcer à l’oral. Leur donner forme et sens changeait tout, cela semblait beaucoup plus vrai, beaucoup plus réel. Comme sa présence devant elle.
Il y a du boulot, c’est ce qu’il lui dit. En même temps, elle ne s’était pas voilée la face, elle s’imaginait bien qu’elle n’allait pas tout réparer entre eux aussi facilement, simplement en quelques minutes. Elle aurait même trouvé ça trop facile si ça avait été le cas. Trop facile. Elle n’a pas hurlé comme une hystérique non mais, c’est quoi ça d’abord. Elle ferme les yeux quand il approche sa main de son visage, de peur qu’il ne la frappe ? Non, il ne frappe pas les femmes Joshua, il n’est pas comme ça. Surement un de ces stupides réflexes humains, elle a toujours eu les yeux sensibles alors dès que quelqu’un approche quelque chose trop près d’eux, elle les ferme, instinctivement. Mais rien ne se passe. Enfin, si. Il a remis une de ses mèches de cheveux rebelles derrière son oreille. Elle ne comprend pas son geste à vrai dire. C’est un signe de paix ?
merry ▬ Deal, les cent prochaines années. Faut signer où ?
Elle lui tire timidement la langue. Est-ce qu’il appréciera toujours son humour et sa joie de vivre comme à l’époque ? Elle ne sait pas, mais qui ne tente rien n’a rien, c’est comme ça qu’on dit n’est-ce pas ?
merry ▬ je te laisse retourner travailler qu’à une condition.
Il observe Merry fermé craintivement les yeux face à son geste. Il essayait d'être tendre mais apparemment elle a pris peur. Il n'a rien à lui reprocher après l'avoir fait malencontreusement tombé. C'était tout de même assez drôle de la voir aussi maladroite. D'habitude, c'est à lui qu'on reproche de ne pas regarder où il va. Mais malgré son côté rêveur, il est très prudent et maîtrise ce qu'il fait. Bon ok, il se brûle souvent la main en prenant sa tasse de café le matin et il rate régulièrement la dernière marche de ses escaliers mais ce n'est que lorsqu'il lit ou qu'il bidouille son téléphone portable. La plupart du temps, il est vigilant. Merry n'a donc aucunes raisons d'être inquiète. Ce geste n'est pas réfléchi, c'était juste que ... ça le perturbait. Voilà. C'est ça. Il aime que les choses soient à la leur place. Il sort de sa rêverie lorsqu'elle lui répond impunément qu'elle signe le deal.
joshua ▬ tu n'as qu'à graver mon prénom sur toi, ça me suffira amplement.
Elle signerai même un pacte avec le diable, cette idiote. Sa réaction enfantine le fait sourire. Cela lui rappelle ses 15 ans et de cette fille, celle qui s'extasiait encore de tout et rien. Il ne demande pourquoi il s'est tant inquiéter, elle n'a pas changé. Elle enchaine en disant qu'elle a une seule condition. Ah en plus de ça, elle exige quelque chose. Ça va pas où quoi. C'est lui qui devrait avoir compensation. Elle lui a fait perdre 45 minutes de travail - et de lecture - donc du temps et de l'argent.
joshua ▬ le deal a déjà commencé. je me plierai pas à tes exigences mademoiselle hwang.
Sur ses dires, il tourne les talons, bien décidé à retourner lire. Il lui reste encore une centaine de pages et s'il se dépêche, il a encore le temps de pouvoir le finir avant que la boutique ferme.
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tenue (+) Graver son prénom sur son corps ? Euh, non, peut-être pas quand même. Déjà, elle a peur des aiguilles alors se faire tatouer Joshua sur le corps, inimaginable, impossible, impensable. Elle n’irait probablement pas au bout et se retrouverait avec un minable « Jos’ » quelque part sur le corps. Non, pas possible. Mais elle pourrait le faire au marqueur peut-être ? Même si ça part avec l’eau et sous la douche, tant pis, elle le refera pour que ça dure, comme s’il s’agissait d’un tatouage. Non mais elle s’entend réfléchir un peu ? Se graver son prénom dans le corps juste pour qu’il accepte d’arrêter de lui en vouloir pour son absence ? Comme dirait une célèbre philosophe, non mais allo quoi. Il ne se pliera pas à se exigences ? Où est la blague ? Elle a accepté d’être à son service pour les cent prochaines années et il ne voudrait pas accepter une toute petite condition qu’elle n’a même pas encore énoncé ? Quelle blague. Qu’importe, elle ne compte pas le laisser s’en tirer comme ça, pas question. Non, il ne repartira pas travailler sans qu’elle ait imposé sa condition. Hors de question.
merry ▬ eeeeh, reviens ici toi.
Elle le tire par son polo de travail, décidée à ne pas le laisser passer la porte d’entrée de la librairie. Elle veut sa condition, elle la veut et elle l’aura, c’est comme ça, elle a toujours été bornée comme pas possible et ce n’est pas maintenant que cela va s’arrêter.
merry ▬ un café. C’est ma seule condition, un café. Quand tu veux, où tu veux. Je t’invite.
C’est quand même pas une condition de fou qu’elle lui demande, ce n’est qu’un café, pour discuter. Parce qu’elle a des tas de questions qu’elle ne peut lui poser maintenant parce qu’il travaille et qu’elle ne veut pas le déranger pendant ses heures. Juste un café, une petite heure ou deux, autour d’une tasse de café, enfin chocolat chaud pour elle, juste ça, c’est quand même pas grand-chose.
Hum ? Qu'est-ce ? Oula. Il a à peine le temps de se retourner que Merry le fait reculer de quelques pas en tenant fermement son polo. Elle va le tuer si elle continue. Le pire, c'est qu'elle se rend même pas compte de sa force. Et dire qu'il y a quelque instants, il en faisait un portrait touchant. Elle n'a rien de doux et de sympathique, surtout lorsqu'elle veut quelque chose. Ok, le côté déterminé peut être une bonne chose. La plupart du temps. Mais là, ça relève de l'obsession.
joshua ▬ hey, Merry, tu te calm-.
Il est coupé dans son élan en croisant son regard. L'intrépide et l'incorrigible Meredith est de retour. Une main sur la hanche, le buste en avant et le poing refermé sur son vêtement, elle a l'air d'une mère sur le point de gronder son enfant. Sauf que Joshua n'est pas celui qui a fait la bêtise. Depuis quand les rôles se sont inversés, c'est sensé être lui le chef. Maintenant. Un café ? C'est ça sa fameuse condition ? Elle sait que c'est tentant. Elle sait aussi qu'il ne peut pas refuser. C'est comme vanter les caractéristiques d'un livre et ne pas lui en donner le titre. C'est quelque chose d'inacceptable. C'est du chantage. Il fronce des sourcils et lui accorde une grimace. 'Manipulatrice' chuchote-t-il. Il déposa sa main sur son poignet et l'a détache de son polo en souriant hypocritement. Bien entendu il a envie de dire oui. Mais les choses ne vont jamais dans son sens et Merry gagne toujours. Il a vraiment envie de la titiller un peu. La main toujours accroché à la sienne, il l'a tire d'un coup sec et s'approche de son visage en murmurant :
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tenue (+) Elle était déterminée à avoir sa condition, elle n’allait pas être la seule à subir des exigences non mais. Puis elle ne demandait pas la lune en plus, un simple café, pour se retrouver, discuter, échanger, rattraper le temps perdu en quelque sorte. Elle se doutait bien qu’un café n’arrangerait pas totalement les choses entre eux mais c’était un début et il faut bien un début à tout. Repartir du bon pied, recommencer presque de zéro. C’est ça qu’elle voulait, repartir sur de bonnes bases pour retrouver son Joshua, celui qui lui a manqué à l’instant où elle a senti l’avion quitter le sol américain à la conquête du sol nippon. Alors elle le retient, accrochant sa main à son polo pour l’empêcher de retourner dans la librairie, non elle ne le laissera pas filer aussi facilement. Elle n’a jamais eu l’impression d’avoir de la force alors qu’elle arrive à l’arrêter la surprend tout autant que cela le surprend lui. Ca muscle la couture ? Ah bon ? Elle n’en avait aucune idée ! Son autre main sur la hanche, en position de force, elle impose sa condition, son café. Et ça marchera, elle le sait. Elle entend le petit ‘manipulatrice’ qu’il lui lance mais ne relève pas, à quoi bon mentir, elle l’est actuellement. Elle le veut et elle l’aura, son café avec Joshua. Sans qu’elle ne s’en soi rendue compte, il a attrapé sa main pour la détacher de son polo, elle n’a plus de moyen de le retenir maintenant. Mais il n’a pas lâché sa main, c’est qu’il ne compte pas partir, n’est-ce pas ? Il va accepter, c’est obligé. Elle ne voit pas d’autres solutions, il est obligé. Sinon elle finira sous sa couette avec de la musique triste et un pot de glace, comme une dépressive. Elle se sent tirée vers lui alors que son corps cogne celui du garçon. What. The. Fuck. C’était actuellement ce que son cerveau avait pensé sans le laisser échapper de ses lèvres. Une autre condition, encore une ? La position dans laquelle elle se trouvait pouvait très mal être interprétée par les passants, pourquoi a-t-il fait une chose pareille ?
merry ▬ encore une condition ? Tu en demanderais pas un peu trop là ?
Elle rigole doucement, incertaine de ce que va lui imposer Joshua cette fois-ci. Le servir durant les cent prochaines années était déjà bien compliqué et long non ?
Joshua observe sa réaction avec amusement. Elle doit probablement être choquée ou embarrassée. Qu'elle se rassure, il est tout autant gêné qu'elle. Le problème n'est pas ce qu'il essaie de faire mais ce qu'il essaie de lui faire comprendre. Il trouve ça plutôt amusant de la voir se décomposer pour une simple proximité. C'est futile, pas vrai ? Il déglutit en sentant sa main se serrer dans la sienne. C'est probablement une réaction résultant de sa surprise mais tout d'un coup, en l'a voyant scruter son visage en quête d'une quelconque réponse, il n'est plus très certain de lui. Il retire ce qu'il a dit, ce n'est plus très drôle. Le rouge lui monte aux joues et il s'empresse de fixer un point dans le vide. Après de longues secondes de silence, elle lui demande de clarifier sa condition. A vrai dire, il n'en a pas vraiment. Il pourrait exiger qu'elle lui paie son café mais elle le fera certainement déjà. Il pourrait aussi lui expliquer clairement qu'elle ne doit plus remettre les pieds dans cette librairie. Elle risque de 1) tout casser et 2) profondément l'agacer. Après tout, il a le droit de prétendre à quelques privilèges et il pourrait lui demander toutes sortes de choses. Auxquelles il n'a pas pensé pour le moment mais ça viendra. Enfin il espère. Le temps continue de s'écouler et ils sont toujours collés l'un à l'autre comme des idiots. Joshua ne serait dire ce qu'il lui a pris. Faut absolument qu'il trouve une issue de secours sinon elle risque de ne jamais partir. En plus, elle continue de le regarder d'un air ébahie et ses grands yeux ne l'aident pas du tout. Tout en reprenant un peu d'aplomb, il lâche sa main et s'avance pour accéder à la pochette de son sac à main. Il l'a vu le ranger là, il est en persuadé. Nice. Avant qu'elle ne puisse faire quoi que ce soit, il fait deux pas en arrière, déverrouille son téléphone, appuie sur la liste de contact et fait de son numéro, une priorité. Elle n'a plus aucune excuse. Au passage, il scroll gentiment la liste et aperçoit quelques noms qu'il ne connait pas. Après on ose freiner l'innocence lorsqu'il parle de copain. Il a envie de les supprimer un par un du répertoire. Argh. Il devrait arrêter de regarder des séries télévisés, cela lui fait perdre la tête. Il aurait très bien pu lui demander gentiment son téléphone mais face à sa réaction, il mentirait s'il disait qu'il ne prend pas de plaisir à la taquiner. Ils ont perdus une année de chamaille et à cet instant, il regrette presque leurs disputes puériles.
joshua ▬ done. voilà. plus d'excuses. maintenant, si tu veux bien, j'ai vraiment besoin de retourner travailler.
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tenue (+) Oui, elle trouvait la situation plus que gênante. Pourtant la proximité physique avec Joshua ne l’avait jamais dérangée, ils dormaient même parfois ensemble à l’époque où elle vivait encore à New York, lorsqu’ils allaient l’un chez l’autre. Alors pourquoi était-elle gênée qu’ils soient aussi proches là dans l’instant, elle n’en avait aucune idée. Elle aurait bien aimé le savoir. Les yeux fixés vers son ami, elle le regardait, l’incompréhension se lisant sur son visage. Que voulait-il ? Pourquoi avait-il fait ça ? Une nouvelle condition, oui mais laquelle ? Elle ne voulait pas d’un truc impossible, et elle savait qu’il était bien capable de lui imposer quelque chose de la sorte. Non, elle voulait un petit truc sympa comme un café ou un cinéma, sans prise de tête. Mais au lieu de ça, elle le regarda attraper son portable et le déverrouiller. Elle reste béate, ne comprenant pas qu’il s’agit de son portable, de sa vie privé, tout ça. Elle n’a aucune idée de ce qu’il fait dessus mais elle n’a pas envie de se battre avec lui. Elle n’a rien à cacher de toute façon, pas de messages douteux, pas de photos compromettantes. Il tombera sur quoi ? Des messages avec ses copines ? Des photos de ses créations ? Des échanges de mails avec ses clients ? Et après ? Rien de bien méchant. Mais il prend trop de temps, elle est certaine qu’il fouille à la recherche de quelque chose.
merry ▬ rends moi mon téléphone Joshuaaaaaa
Elle tend la main vers son portable mais il lui tourne le dos pour finir son complot contre elle avant de lui rendre le précieux objet.
merry ▬ c’est ça, retourne travailler. Samedi prochain pour le café, je t’enverrais l’adresse par message. Pas d’excuses.
Elle le pousse vers la porte de la librairie avant qu’il ne puisse lui répondre et lui fait un dernier signe de la main avant de tourner le dos et prendre le chemin du dortoir de l’école. Elle ne peut s’empêcher de déverrouiller son portable à la recherche de ce qu’il a traficoté dessus. À peine a-t-elle fait glisser l’écran de déverrouillage qu’elle tombe sur le contact de Joshua, l’étoile jaune des favoris visible en gros au-dessus de la photo qu’elle lui avait attribué. Elle ne peut retenir un gros sourire sur son visage, ses pas la menant directement à son dortoir.
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