Tenue ☥ à peine rentré de vacance qu'on me cassait déjà les pieds avec le comportement de mes étudiants durant la croisière. Certains, pas tous, ont agit comme des idiots et n'ont pas écoutés un seul traître mot des enseignants ou des surveillants présent sur le paquebot de luxe. Ces étudiants-là m'ont causés du tord, puisqu'ils sont dans ma classe et que j'étais censé m'en occuper... Sauf que mon autorité est aussi élevé que le pourcentage de neige en pleins mois d'août. « Vous auriez dû les sanctionner. Ces cancres n'hésitent pas à vous marcher dessus dès qu'ils voient une faille. Vous êtes pleins de faille, Inuzuka. » ça fait mal de l'entendre, surtout quand je le sais parfaitement et qu'importe les exercices psychologiques, ça ne m'aide pas à leur tenir tête pour les calmer. Un autre professeur s'ajoute à la partie, du côté du premier. « à ce rythme-là, vous serez remplacé avant de disputer un match avec une école voisine. » J'ai la sensation de recevoir des coups de poing dans l'estomac, ça me retourne le ventre mais aucun son ne sort de ma bouche. Tête baissée, mains jointes devant moi, j'encaisse les paroles acerbes de mes collègues en me torturant discrètement les doigts. ça m'agace d'être ainsi réprimandé, même s'ils n'ont pas tord pour la partie responsabilité, mais de là à me rabaisser aussi bas... Les remarques continuent encore quelques minutes, avant qu'ils ne se désintéressent de moi et que je puisse souffler, quittant rapidement la salle des professeurs sans demander mon reste. Il est tard, la plus part du personnel a quitté l'école pour rentrer chez soi, et moi je suis toujours là à me faire taper sur les doigts. Décidément, qu'est-ce que j'ai fait de devenir professeur ... J'aurai dû continuer les études ou devenir professionnel. ça me pèse, mine de rien. Tous les jours ils ont un truc à dire sur ma façon d'être, mais je ne peux pas être autrement.

C'est qu'une fois dans la cour que j'éclate et lâche un « raaah » bien bruyant. « Tu es trop faible, Inuzuka. Regarde-toi, ta taille n'est pas suffisante pour être professeur de sport. Tes jambes sont trop courte pour faire des bonnes passes. Inuzuka le nain, Inuzuka l'incapable. Je les emmerde! » Gueulais-je fortement, à l'aide de grand geste pour évacuer toute la colère qui m'a subitement envahi. Je suis moi, qu'est-ce qu'ils veulent que je fasse de plus ? ça me saoul qu'on me corrige pour une chose que je ne peux corriger, justement. « Ils n'ont qu'à se regarder avant de me juger, bande d'abrutis. Toujours à dire un truc pour me faire chier, j'en ai marre de ces enfoirés! » Levant mon bras, je me retiens de jeter ma pochette par terre. De toute façon elle est presque vide, puisque je suis un professeur de sport qui ne donne pas de cours pratique, où très peu. Mes élèves viennent en survête, les mains vides et se contentent de se dépenser physiquement, sans trop utiliser leurs neurones. Je suis sûr que s'ils savaient se servir de leur tête, peut-être qu'ils ne feraient pas autant d'histoire. Je n'entendrais même pas parler d'eux, ni du fait que je sois trop indulgent et pas assez sévère. Finalement, je jette ma pochette sur le sol, rouge d'avoir piqué une crise.

Tenue ♦ Les mains dans les poches, Sang Tae faisait une dernière ronde, s'assurant que tous les étudiants et lycéens étaient bien rentrés dans le dortoirs, au lieu de traîner encore à l'extérieur sur le campus comme ils aiment tant le faire. S'amuser, fumer en cachette, s'embrasser loin des regards indiscrets, petits règlements de compte, tout motif était une bonne excuse pour ne pas rentrer bosser puis aller se coucher aux heures fixer par Royal. Des excuses que le coréen comprenait, même très bien, même si lui à l'époque tout comme Dal Ja n'était pas des élèves internes. Chaque soir, il rentrait chez eux. Bien souvent les deux chez l'un ou chez l'autre, pour se laisser aller dans leur baiser ou même plus, discrètement pour ne pas réveiller leurs parents. Une belle époque à laquelle sans mentir il aimerait revenir. Lui qui avait quitté l'école à dix-huit ans, ne trouvant plus aucun intérêt d'y rester après s'être brutalement disputé avec son premier amour, Dal Ja. Oui, il regrettait ce choix qu'il avait fait, car aujourd'hui il ne serait très certainement pas endetté jusqu'au cou... Et il serait très certainement encore avec Dal Ja. L'aimait-il encore ? Ou était-ce ce sentiment que chaque personne ressentait en revoyant la personne qu'ils ont aimée pour la première fois ? Il n'en savait rien, mais dire que le métisse ne lui faisait aucun effet serait mentir....

Sang Tae soupira et continua à marcher alors que tout un tas de questions prenaient place dans sa tête vide. Des questions qui s'envolèrent lorsqu'un bruit ou plutôt des paroles bruyantes, à peine compréhensible depuis où il était. S'arrêtant, il regarda dans la direction du bruit pour poser ses yeux sur cette silhouette masculine qui lui disait vaguement quelque chose. Doucement il s'avança pour voir un peu plus nettement son visage et l'écouta par la même occasion râler. Sourire sur les lèvres face à cet homme qui semblait être énervé par quelque chose vu la manière dont il jeta sa pochette à plusieurs mètres devant ses pieds. Il mit un moment avant de s'approcher de la pochette et ne pût s'empêcher une remarque. « Tant de violence dans ton geste. » Sourire sur les lèvres, le surveillant se pencha pour ramasser celle-ci, tapant un peu dessus pour la dépoussiéré et la lui tendit. « En colère ? » En fait, il n'avait même pas besoin de poser la question, car ça se voyait clairement que ce jeune homme était rouge de rage. Oui bien rouge, même lui quand il s'énervait il ne virait pas aussi rouge que lui. Plus près de lui, il regarda son visage et cela ne lui prit pas longtemps pour le reconnaître. Inuzuka Reon soit le professeur « victime » comme on le surnommait sur le campus de Royal. Un professeur dont les élèves aimaient joyeusement faire tourner en bourrique et qui n'avait absolument aucune autorité sur eux. Peut-être était-ce parce qu'il était encore jeune ? Peut-être qu'avec l'âge, il gagnerait en poigne. En tout cas pour le moment, le pauvre se faisait plus manger que respecter par ses élèves ou même certains profs qui se faisaient une joie de le critiquer.

Tenue ☥ C'est bien souvent comme ça, on a tendance à regretter une époque où tout allait pour le mieux, du moins en apparence. Puis quand la bulle éclate et que les choses changent, on se dit que rien ne reviendra comme auparavant. Les années à être un simple étudiant, celles où on aimait quelqu'un de tout son coeur, quand on ne devait rien à personne. Malheureusement, rien ne reste intacte. Les accusations contre Sasuke, l'arrêt soudain de nos conversations tournant autour du sport, les événements qui s'enchaînent que l'on veuille ou non. C'est difficile de grandir, de devenir un adulte et d'assumer ce qui va avec. Je devais faire un choix quant à mon avenir, mais à présent je me demande si j'ai fait le bon choix. Malgré ma place obtenue, les autres continuent de me remonter les bretelles comme si j'étais toujours un élève de cette école. Ce sont mes anciens professeurs, pour certains. Ils n'ont pas dû assimiler le fait que je sois à leur niveau, d'égal à égal. Peut-être qu'ils ne me considèrent pas comme eux, mais dans ce cas, je ne préfère même pas me poser la question ou savoir les réponses.

Sauf que ça pèse parfois trop lourd pour le garder enfermer en soi et tôt ou tard, ça explose. Certes, j'aurai dû vérifier ou me cacher avant de relâcher la pression et de grogner, m'agitant sur place. Ma pochette n'a rien demandé, mais c'est plus fort que moi. Faut que je me défoule sur quelqu'un, même sur un objet aussi insignifiant que pratique. Je ne m'attendais juste pas à attirer autant l'attention, ni à entendre cette voix qui me glace derechef. Les yeux écarquillés, j'observe le surveillant ramasser ma pochette et la dépoussiérer rapidement, avant de me la tendre. C'est légèrement paniqué que je la récupère, ne faisant nullement attention au fait que je puisse agir maladroite ou trop brusquement. « J-j-j-je... N-non, enfin ... » Mes pensées s'embrouillent à une vitesse hallucinante, c'est à peine si je sais ce que je raconte en réalité. Je suis en colère, mais je ne tiens pas tellement à le faire savoir. Le rouge qui colorait mes joues s'intensifia sous la gêne, teintant jusqu'à mes oreilles. ça me donne étrangement chaud, comme à chaque fois que je dois faire face à quelqu'un. « Mer-merci p-p-pour la... » Ouais bon, je montre directement la pochette plutôt que chercher à prononcer un mot de plus. C'est agaçant, autant pour moi que pour les autres.

Tenue ♦  Qui avait dit que le métier de surveillants étaient de tout repos ? Tout comme avec les professeurs, Sang Tae devait sans cesse fliquer les élèves du matin jusqu'au soir quand il était chargé de s'occuper de l'internat le soir. Comme ce soir d'ailleurs. En réalité, c'était assez drôle de voir le coréen exercer un tel métier et jouer le flic des couloirs, car à leur âge il était tout bonnement pareil. Un être libre, rebelle, se fichant pas mal des règles, séchant aisément les cours comme il le souhaitait en escaladant le mur pour s'échapper, toujours à faire les quatre sans coup et se battre. Oui il a été ce genre de cancre, dans les derniers de la classe, faisant râler les professeurs en ne les écoutant pas. Un vrai petit con, il se l'avouait lui-même. Même si c'était de bon souvenirs qu'il garderait en mémoire à vie, il regrettait seulement le fait de n'avoir pas été ne serait-ce qu'un peu sérieux dans sa scolarité. Peut-être que s'il avait bossé un peu plus, il aurait un bien meilleur travail et aucune dette sur le dos. 

Debout devant ce professeur dont le visage virait littéralement au rouge, Sang Tae sourit amusée. C'était en réalité très étrange de voir un homme gêné autre que Dal Ja, mais c'était assez amusant. « Pour la pochette ? Mais de rien. » Les mains retrouvant refuge dans les poches de sa veste, il le balaya sans gêne du regard de haut en bas. Il était vraiment jeune pour un professeur, on pourrait presque le prendre encore pour un étudiant de rps. « Alors qu'est-ce qui t'as énervé pour que tu jettes aussi violemment cette pochette au sol ?  » Le surveillant n'était plus curieux que ça de le savoir, mais il avait envie de parler tout simplement et peut-être même le taquiner un peu. « Les élèves t'ont encore fait la misère ? » Ça ne serait pas étonnant que ça soit de leurs fautes. « T'es jeune, mais falloir avoir de la poigne sinon ils vont te manger tout cru. Tu devrais le savoir, tu as été élève aussi, non ?  » Même s'il le regrettait, avoir été un cancre l'aidait bien à ne pas se laisser faire par les élèves et surtout à savoir ce qu'ils font ou ce qu'ils vont faire. Après tout toutes leurs conneries, il les avait déjà faits bien avant eux. S'ils croyaient jouer les malins avec lui, ils avaient tous faux.  

Tenue ☥ Le métier de surveillant n'a jamais été le centre de mes conversations mais je suppose que ce n'est pas facile tous les jours d'être confronté aux élèves, même les pires. Je me plains de ma classe, mais les surveillants doivent aussi les connaître si jamais ils font des bêtises en dehors de mes cours ou du terrain de sport. à leur âge, je ne faisais aucune vague, en même temps j'hésitai sur tout et j'avais peur de tout le monde. Mon adolescence à Royal se résume surtout à mes cours où j’excellai, sinon j'étais un étudiant calme, voir trop calme. Aucune entorse, aucune folie, toujours à être dans le droit chemin sans lever les yeux du sol. On pourrait croire que je n'ai pas eu d'années étudiantes, pourtant je me suis bien amusé en étant à l'école. C'est différent maintenant que je suis professeur et que je dois gérer ces adolescents différents de moi, et de loin. J'ignore vraiment ce qu'il m'a prit de vouloir devenir enseignant, mais je dois l'assumer et remonter cette pente, sinon j'aurai inutilement perdu du temps, de la patience et de l'admiration dans ce métier-là. Je ne veux pas baisser les bras, mais je ne peux pas non plus faire de miracle. C'est à double tranchant, soit je m'endurcis et recadre mes élèves, soit je me laisse marcher dessus et ça n'en finira jamais de me décourager. La première option semble la meilleure, mais la moins facile à réaliser.

Face à Sang Tae, je perds à nouveau tout mes moyens. C'est comme ça avec le trois quart de la population mondiale, sauf mes vieux amis qui ont su me bousculer franchement. Avec mon langage de timide, je tente de le remercier pour la pochette et une chance qu'il ait compris, sinon je serais encore là demain. Son regard me dérange, mais je ne dis rien, me contentant d'amener mes yeux ailleurs que vers lui, sauf quand il me parle et que mes iris se ramènent automatiquement sur sa silhouette. La raison de ma colère ? Elle est multiple, mais là encore, ça va prendre du temps. Sang Tae cherche à savoir avec des questions mais  à part bouger ma tête ou mes épaules, je ne savais que faire de plus. Ce n'était pas seulement les élèves, bien qu'ils participent beaucoup à mon saut d'humeur. « C-ce n'est... Pas facile. » Articulais-je doucement, pour ne pas m'embrouiller et bégayer à nouveau. « Les élèves... Les au-autres professeurs... » Il doit voir à peu-près le schéma, pas besoin d'information supplémentaire. Il n'a pas tord pour la poigne, mais on dirait que j'ai peu de force. « J-je sais. » Soufflant un bon coup, je secoue doucement la tête et tente de poser une question, les yeux rivés vers le bas. « Co-co-comment vous faites... Avec les élèves ? » Il a forcément un secret, non ? Il s'en sort à merveille. « Pourquoi vouloir devenir surveillant ? » Marmonnais-je d'une voix basse, l'air incompréhensible. Y a tellement plus de boulot que surveiller des gamins qui ne réalisent pas encore à quel point la vie est vache quand on quitte le système scolaire.

Tenue ♦   Comme Sang Tae se doutait, le jeune professeur était dans tous ses états à cause des élèves, mais également à cause de ses autres collègues qui lui avaient très certainement fait des remarques peu plaisantes. Bizarrement ça ne l'étonnait même pas, si on croyait que tous les professeurs et les autres membres du personnels s'entendaient, c'était totalement faux. Tout comme dans la vie de tous les jours, il y avait des gens faux-cul, prenant un certains plaisir de se moquer des autres, qu'ils aient quinze, vingt ou plus de trente ans. D'ailleurs, le coréen lui même en a été victime avec son passé de cancre et de raté de la vie à ses débuts de surveillants, mais ses commères, comme ils aimaient tant les appelés, avaient vite compris qu'il en avait tout simplement rien à foutre et qu'il ne fallait plutôt pas lui chercher des noises.

«Le surveillant continua à le fixer alors que le plus jeune ne dédaignait même pas le regarder dans les yeux. Ça l'amusait. Comment un mec pouvait être aussi gêné et timide, encore s'il avait été une demoiselle il comprendrait, il serait sûrement éblouie par sa beauté naturelle... Non non ses chevilles allaient parfaitement bien. L'écoutant lui poser ses questions, il se gratta la nuque d'un air penseur. S'il avait la réponse pour la première question, la deuxième était difficile à trouver, car lui même ne savait pas pourquoi il était devenu surveillant. Enfin si, mais devait-il réellement le lui dire ?   Je sais juste ce qu'ils pensent, parce que j'ai été tout simplement comme eux, un petit branleur, pro dans le non respect des règles et la rébellion. » S'il avait dit ceci naturellement sans gêne, il n'en était pas vraiment fier, mais bon il était jeune et con à l'époque. Il ne pensait pas à l'avenir et voulait tout simplement profiter de sa vie d'adolescent à fond au lieu de rester le nez dans les bouquins comme Dal Ja.

Pour ce qui est de ta deuxième question, je n'ai pas de raison particulière. Ce n'est ni par conviction ou par passion que j'ai fais ce boulot. J'avais tout simplement besoin d'un job et qu'on a reconnu qu'au vu de mon passé de cancre je serais doué pour gérer les élèves. » C'était aussi simple que ça.  Si j'avais pu faire autre chose que courir après les élèves et leur gueuler dessus, je l'aurais fais. » Mais son cv était trop pauvre pour avoir un bon job, d'ailleurs il l'était même pour être surveillant à RPS, mais on lui avait donné sa chance et puis hormis ça, il était livreur le soir quand il n'était pas chargé de s'occuper de l'internat.  Déjà si tu veux qu'on te respecte... » Sortant les mains de ses poches il s'approcha de lui et lui releva le visage pour l'obliger à le regarder dans les yeux, avant de le lâcher doucement.  Regarde les gens dans les yeux quand tu leurs parles ou qu'il te parle. Hormis le fait que ce n'est pas poli, ça montre déjà que tu n'as pas peur des gens. »
 

Tenue ☥ Quand j'étais étudiant dans cette école, les professeurs n'avaient jamais rien à redire sur mon compte. La plus part n'était pas mes enseignants, et ceux qui m'avaient dans leur classe disaient que j'étais un bon élève, calme, posé et intelligent. Pourtant, en devenant moi-même un professeur, les rôles ont étés comme inversé. Je ne suis plus l'élève modèle de sa classe, mais l'enseignant boulet qui donne une image peu glorieuse au métier. Je ne fais pas cela pour ternir l'école ou le boulot d'enseignant, ce n'est pas par envie que j'agis ainsi. à moins que ce soit de la jalousie, après tout je n'ai que vingt trois ans et je suis déjà un professeur dans une école de renommé. à mon âge, je devrais être le cul sur un banc devant un bureau ou à galérer pour un travail qui me rapportera pas grand chose, si ce n'est des ennuies. Les ennuies, ils sont partout, même avec une très bonne place dans la société, avec un bon salaire et des bonnes horaires. Rien n'est évident, voilà la morale de chaque histoire.

Sang Tae ne m'apporte pas de véritable réponse à ma question, mais en même temps, ses paroles en disent long sur la raison de son choix. Il n'est pas devenu surveillant par obligation, peut-être pas non plus par passion -mais ça j'en sais rien- mais parce qu'il parvient à se mettre à la place des élèves. Nous avons tous été à leur place, moi-même j'ai vécu avec des étudiants dans ce genre-là, à ne rien respecter, à troubler les cours, à répondre aux professeurs ou aux surveillants. Même si je n'étais pas comme ça, je le voyais partout. Sasuke était ce genre de garçon à vivre sa vie comme il l'entendait, sans se soucier des autres. Je l'ai envié, mais jamais imité. Peut-être que je regrette cette époque, car ça aurait été le meilleur moment pour « évoluer » et saisir ma chance de changer. Maintenant, je me fais juste marcher dessus et ce n'est pas agréable du tout.

Il confirme ce que je pensais, pour le choix de son boulot. J'acquiesce timidement, comprenant parfaitement ce qu'il me raconte. Comparé à lui, je peux dire que j'ai une chance en or d'être enseignant dans un domaine que j'adore particulièrement. Alors de quoi est-ce que je me plains ? Je fais ce que j'aime, je devrais être content. Perdu dans mes pensées, je ne m'attendais pas à sentir sa main sur mon menton, ni à ce qu'il me redresse le visage et croise ses yeux. C'est embarrassant, au point où je rougis sans le contrôler. C'est surtout dû à la gêne et à la honte. « P-pardon ! Je veux dire ... Oui ! » Regarder les gens dans les yeux. Je tente vraiment le coup en gardant la tête droite pour le fixer, mais bien vite je ressens à nouveau cette gêne et cette boule dans mon estomac. « Je vais mourir ... » Baragouinais-je en posant mes mains à plat sur mon visage, cachant mes rougeurs et mon regard se voulant fuyant. Il m'en demande trop, ils m'en demandent tous trop. Je ne peux pas changer de personnalité, pas sans avoir l'impression de prendre feu ou de me désintégrer sur place... Misère.

Tenue ♦   Sang Tae n'avait pas honte de dire que ce n'était pas par passion ou par envie d'aider les élèves à suivre le bon chemin qu'il avait décidé de devenir surveillant. Il avait tout simplement fait ce métier, car on lui avait donné la chance de l'obtenir et que cela allait lui permettre de gagner de l'argent pour payer sa dette. Oui c'était tout simplement pour l'argent, c'était d'ailleurs pourquoi le soir quand il n'était pas en charge de surveiller à l'internat, il bossait en tant que livreur d'un restaurant de sushi. Deux jobs, afin de rembourser son énorme dette qui ne cessait de grossir chaque mois à cause des intérêts et dont il n'arrivait malheureusement pas à combler.

Le coréen regarda le plus jeune dont le regard était fuyant, n'osant pas affronter ses yeux qui le fixait. Petit sourire aux lèvres, il se rapprocha de lui et il lui leva son joli petit minois de jeunot innocent. Un petit sourire moqueur se traça sur le bout de ses lèvres en voyant son visage virer rouge. Il était vraiment sensible comme gars, cela l'amusait énormément. Lui qui croyait passé une soirée chiante, à gueuler après les gosses de rentrer au plus vite dans leur chambre, pour le coup il allait pourvoir s'amuser un peu avant... Bien évidemment sans méchanceté.

Ne détournant pas le regard, plongeant ses prunelles sombres dans celle du jeune professeur, il ne lui fallut pas longtemps pour fuir. Le surveillant ne pût s'empêcher de rire, il n'avait jamais vu un mec aussi timide dans ses trente-cinq années d'existence et pourtant il en avait vu un paquet de personnes timides, mais lui battait tous les records. «  Mourir ?! Quand même pas jusqu'à là hahahaha.  » Remettant les mains dans les poches, tout en calmant ton rire, il garda le sourire aux lèvres et poursuivit. « Va falloir que tu t'entraînes. C'est la base de regarder les gens dans les yeux quand tu leur parle ou quand ils te parlent.  » Oui la base, car ne pas regarder une personne dans les yeux était quelque chose de très impoli. Penchant la tête doucement sur le côté, le coréen se mit à réfléchir quelques secondes tout en le regardant et finalement lui proposa quelque chose. « Si tu veux, je peux t'aider.  » Proposer son aide à quelqu'un était quelque chose que Sang Tae ne faisait quasiment pas sauf pour une personne particulière, mais pour le coup il allait le faire pour une deuxième personne. « Profite de cette opportunité que je te tends, car tu n'en auras très certainement pas d'autre. » Surtout venant de lui. « Je vais t'aider à être un peu plus sûr de toi pour que les élèves et les profs ne te marchent plus dessus et te considère réellement comme un professeur compétent.  »
 

Tenue ☥ Ce n'est pas évident de regarder quelqu'un dans les yeux, que ce soit quand on parle avec lui ou même en gardant le silence. Les combats de regard n'ont jamais été mon truc, à moins d'être le pire des perdants. Sang Tae profite de cette faiblesse pour me relever le visage, et plutôt que rester stoïque, mes joues s'enflamment aussitôt. C'est incontrôlable chez moi, j'ai beau dire de ne pas rougir, ça arrive quand même. ça me gêne d'être réprimander à mon âge et en sachant pertinemment que ce n'est pas bien d'éviter le regard des gens quand on discute avec eux. Il n'est pas le premier à le penser, mais sûrement le premier à me le dire clairement. C'est trop dure, soutenir ses yeux est trop difficile et je ne peux m'empêcher de détourner mes pupilles des siennes, encore plus embarrassé qu'auparavant. C'est un boulot surhumain pour moi, un travail de titan. L'entendre rire me donne l'impression qu'il se moque, mais en même temps, je ne fais rien pour lui éviter de rire. Parler de mourir pour si peu, c'est gros, voir exagéré. Pourtant j'ai vraiment la sensation de faire une crise cardiaque quand je suis autant honteux et pris au dépourvu.

S'entraîner ? Comment ? Avec qui ? Je ne peux pas le faire avec mon meilleur ami, puisqu'il est l'un des seuls à me connaître sous mon vrai jour. Donc, il est une aide inutile pour combattre ma timidité. M'aider ? On dirait que sa proposition tombe à pique, pile quand je songeais à n'avoir personne apte à remplir ce rôle. Relevant ma tête, cette fois-ci je le regarde, mais avec étonnement. « Vous êtes s-sûr ? » Ce n'est pas tous les jours qu'on m'offre ses services pour combattre mon plus gros défaut, celui qui me pourri à quatre vingt pour-cent la vie. Il a raison, je n'aurai pas d'autre opportunité, ni d'autre personne pour me tendre la main. « Comment ? » ça fait rêver ce qu'il dit, j'aurai même envie d'essayer de suite en croyant changer directement. Mais à bien réfléchir, ça me paraît davantage impossible. Je fais la moue, réalisant à quel point il se donne la peine, mais aussi à quel point il s'encombre par ma faute. « Je ne veux pas v-vous déranger... » Ce n'est pas comme si il devait rentrer chez lui ou comme si j'avais des choses importantes à faire, mais j'ignore s'il compte m'aider maintenant ou plus tard. « Aidez-moi. » Je m'incline poliment devant lui, tout en quémandant son aide. J'ai vraiment besoin de cela, j'ai besoin que les choses changent définitivement dans ma vie.  

Tenue ♦   Il faut croire que pour une fois dans sa vie, Sang Tae allait faire une bonne action en aidant une personne à surmonter son problème. Les seules fois où il s'était montré bon samaritain c'était à l'époque où il avait connu Yumi, puis évidemment Dal Ja et ses parents. Bien que pour ses derniers voilà plus de quinze ans que le coréen ne leur avait pas adressé la parole et n'avait même pas dédaigner à se renseigner sur le fait s'il vivait toujours au Japon ou étaient-ils reparti dans leur ville natale sur les terre sud-coréenne. Petit sourire en coin fasse à son interrogation, il se retint de retirer sa proposition qui aurait pour effet que de paniquer plus son interlocuteur. « Comment ?... Surprise.  » Tout dévoiler n'était pas du jeu, puis fallait bien que tu réfléchisses à comment tu allais l'aider à vaincre son problème de timidité, ce n'était quand même pas chose facile, surtout en voyant comment il agissait en face de lui.

Les yeux posés sur le jeune professeur, soupirant face à sa phrase. S'il lui proposait de l'aider ce n'était pas pour dire non au final. Oui, il était du genre taquin et aimait faire des blagues, mais pour cette fois ce n'était pas le cas. Il était pour une fois sérieux dans sa misérable vie. Il s'approcha de lui et lui tapa amicalement l'épaule avec sa main droite. « Yah... Tu n'as pas besoin de t'incliner pour me remercier. Si tu veux vraiment me remercier, fait-le une fois ton problème régler.  » Levant son poignet pour regarder l'heure, il se mit à siffler. « Bon je vais devoir y aller, j'ai encore une ronde à faire pour m'assurer que ces fripons ne fassent pas le mur.  » Sortant son phone, il tendit sa main en direction du plus jeune et lui demanda : « File-moi ton numéro, ça sera plus simple pour que je puisse t'aider. » Une fois son portable en main, Sang Tae enregistra son numéro en marquant comme nom « mon sauveur » et s'envoya un message pour enregistrer le sien dans son phone. « Voilà... Tiens. Par contre je ne t'assure pas de répondre rapidement.  » Il faut dire tu avais une vie bien remplie. « Allez rentre chez toi et essaye d'avoir un peu plus confiance en le fait que tu vas réussir. Sérieux avec une belle gueule comme la tienne, je ne comprends pas comment tu ne peux pas être un peu plus sûr de toi.  » Un petit rire s'échappa de ses lèvres. Tapotant son épaule trois fois, puis lui faisant un bye de la main, Sang Tae s'en alla faire sa ronde.
 

Tenue ☥ Cette proposition est un cadeau du ciel. N'importe qui aurait dit oui, surtout si ça peut aider. C'est rare qu'une personne nous propose son aide, même si j'ignore pourquoi il ferait cela ou s'il veut quelque chose en échange. D'ailleurs, je devrais peut-être lui demander ce qu'il attend en retour. Pour l'instant, j'aimerai simplement savoir comment il va s'y prendre pour vaincre ma timidité. Ce n'est pas que je m'en sens incapable, mais presque. Finalement, Sang Tae ne me laisse aucun indice, mais davantage de question. Je ne pense pas une seule seconde qu'en réalité, il n'a aucune idée de comment procéder. Dans le fond, j'ai subitement et entièrement confiance en lui, sans me poser plus d'interrogation à son sujet. Il peut m'aider à m'en sortir, c'est la seule chose que je me répète.

Des fois, je ne sais comment réagir face aux gens. Pour moi, je dois être poli et respectueux en toute circonstance, même contre ceux qui me cherchent des noises et me font tourner en bourrique. Puis Sang Tae est mon aîné, je ne peux qu'être droit avec lui. « O-oui ! C'est évident. » Une fois le problème réglé. Mais là encore, je ne sais comment le remercier. Je verrais ça en temps et en heure, puis qui sait, je pourrais en apprendre un peu plus sur lui. Une ronde ? Sang Tae était vraiment occupé, même à cette heure tardive. à ses paroles, je m'empresse de prendre mon portable dans ma poche pour lui donner et le laisser échanger nos numéros. Récupérant ensuite celui-ci, un sourire s'étire sur mes lèvres en voyant le nom du contact. « Merci, vraiment. » ça me fait chaud au coeur de voir des personnes me soutenir, qu'ils me connaissent ou non. « ça me va. » Pour le temps de réponse. Une belle gueule ? Son commentaire me fait aussitôt rougir, sans pour autant perdre mon esquisse qui devient à nouveau timide et gênée. Pour le coup, je me demande aussi pourquoi avec un visage comme le miens, je n'arrive pas à m'affirmer davantage. « Bon courage pour v-v-votre ronde. » Dis-je, sur le point de m'incliner à nouveau mais je m'arrête avant même de me pencher, préférant lui rendre son signe de main avant de filer à mon tour.