Je dois avouer que l'Amérique me manque beaucoup. Toutes les personnes que j'y ai rencontrées et la culture que j'ai découverte là-bas, totalement différente de ce à quoi j'étais habitué au Japon, me manque cruellement. Parfois, j'hésite à y retourner, pour une période plus ou moins longue. Arriverais-je seulement à abandonner Arata? J'ai du mal à m'imaginer le laisser seul, maintenant. Nous avons toujours été si proches. Nous possédons un lien particulier, j'aimerais dire irremplaçable, mais je sais que ce lien a beaucoup changé. J'ai dû accepter de voir mon jumeau suivre son propre chemin, bien différent du mien, et ce sans broncher une seule fois. Je l'ai toujours encouragé, avec cette peur au ventre que son métier, dangereux pour quelqu'un qui possède un problème cardiaque, finisse par avoir raison de lui. Désormais, j'ai appris à passer au-dessus de cette crainte. J'ai compris que plutôt que vivre pour lui, je dois vivre tout court. Il est grand temps.

Aujourd'hui, je traverse l'un des longs couloirs de l'hôpital, adressant des sourires aux différentes personnes qui attendent afin d'assister à leurs rendez-vous médicaux. La seule chose qui pourrait trahir les raisons de ma venue aujourd'hui sont ces dossiers que je transporte avec moi. Des cas avec lesquels j'ai dû travailler récemment, et dont je n'ai pas récupéré les informations auparavant. J'ai pu tout obtenir, mais je peux déjà prédire de longues heures de travail à venir. Heureusement, je suis passionné par mes études et prêt à endurer tout ça, si c'est pour le bien d'autres par la suite.

Mais alors que je me dirige vers le bout du couloir, espérant y trouver l'ascenseur que j'ai emprunté pour monter - sait-on jamais, que cet idiot ait soudainement décidé de partir faire un footing? - mon regard croise un visage qui, malgré les années, me semble étrangement familier. Il me faut un moment pour le réaliser et, immédiatement, mes sourcils s'élèvent de surprise. « Par tous les... » Mes lèvres s'arrondissent, mais je ne sors de mon silence qu'un instant plus tard, hasardant de façon peu assurée un « Tenma? » tout en essayant de capter son regard.

TENUE » Si je pouvais courir à toute vitesse je serais surement entrain de le faire à cet instant précis. J’avais dû enchainer les visites sur les plateaux pour suivre les membres du groupe qui bien entendu ne faisaient en ce moment rien ensemble, histoire que je me multiplie cinq fois en une journée. Je ne râle pas du tout, je trouvais ça amusant, sauf quand on a un rendez-vous important et que l’heure annonce déjà vingt-cinq minutes de retard, là j’avoue que je ruminais intérieurement en espérant ne pas me voir rétrograder en bas de la liste... Même si ça date du collège il y avait toujours un risque, la guérison totale dans mon cas était une utopie et je me souviens encore de ces mois passés sur une chaise roulante ne sachant pas si j’allais remarcher un jour, pourtant le miracle s’est produit et je préfère qu’il perdure en toute franchise, donc interdiction de loupé cette visite... Les portes coulissantes de l’entrée s’ouvrent et je me dépêche de rejoindre l’ascenseur pour m’arrêter a l‘étage des consultations, tirant mon ticket pour faire la queue à l’enregistrement, je patiente dix minutes de plus avant que cela ne soit mon tour, donnant les papiers, j’explique mon retard en deux mots rapides "la circulation", pas la peine de s’éterniser dessus avant d’être appelé par le médecin, heureusement que je n’ai besoin de venir qu’une fois par trimestre sinon je deviendrais fou.

La visite passée et l’ordonnance en main je peux quitter les lieux, me dirigeant de nouveau vers l’ascenseur. Remarquant qu’on me regarde, je me mets à tourner la tête l’air de rien fixant les alentours, espionnant par moments ce gars qui me relooke du coin de l’œil, pas très rassuré. Si je l’avais bien regardé j’aurais pu le reconnaitre, mais je ne suis pas très à l’aise avec les gens donc je suis plutôt du genre à les fuir au maximum. En entendant mon prénom, je l’observe plus attentivement, traçant vite fait les traits de son visage avant que l’ampoule s’éclaire subitement. « Akira !? » Je crois que tout le monde dans l’étage m’a entendu, oh shit... Pour le côté discret je n'ai pas très bien géré mon coup. J’envie les souris dans ces moments-là, c’est atroce. Secouant la tête pour passer outre ce détail. « Qu’est-ce que tu fais ici ? Tu n’étais pas parti en... euh, ailleurs ? » On s’est perdu de vu avant qu’il ne s’en aille, mes « mauvaises » fréquentations avaient eu un peu raison de mon amitié avec le garçon, mais par le passé on a partagé trop de choses marquantes pour être oubliés.

On a souvent du mal à croiser les personnes que l’on souhaite à tout prix revoir, mais il est très facile de rencontrer un fantôme du passé lorsqu’on pense l’avoir totalement perdu de vue, et ce depuis des années. Ce paradoxe m’étonnera toujours. Reste qu’il est bien réel, que c’est bel et bien Tenma qui se trouve devant moi ; je parviens à mieux reconnaître ses traits à mesure que les secondes passent. Incroyable, ce que le hasard peut faire pour nous. Mes lèvres s’étirent en un large sourire quand mon nom est donné en réponse ; je me pincerais bien, tant je suis surpris, mais je vais éviter de passer pour plus bizarre que je ne le suis déjà. Au lieu de cela, je resserre la main sur les différents dossiers qui s’y trouvent, heureux comme jamais. « C’est bien moi ! » Un instant passe avant que je ne reprenne la parole, toujours aussi enjoué. « J’étais en Amérique, oui ! »

Tant de choses se sont passées depuis la dernière fois où je l’ai vu. Nous avons tous deux grandi, changé, et j’ai un peu de mal à réaliser que c’est bien mon ami qui se trouve devant mes yeux à cet instant précis, comme sorti d’une photo vieillie, remise au goût du jour. Je n’ai plus eu l’occasion de discuter avec lui depuis si longtemps qu’une farandole de questions me vient à l’esprit, questions dont j’ignore si je peux les poser ou si je dois me réserver. Après tout, j’ignore totalement ce qu’il s’est passé pour lui, durant toutes ces années ? « Je suis venu récupérer des informations pour mes études, je les ai oubliées l’autre jour. Je t’avais dit que j’envisageais la médecine, non ? » Mais lui ? « Qu’est-ce que tu deviens ? »

TENUE » Je n’oublie jamais une personne, du moins quand elle m’a marqué ou été proche de moi il m’est difficile de l’effacer de ma mémoire. Bien entendu ce n’est qu’en le regardant que je mets un nom immédiat sur son visage, après avoir fui son regard bêtement en me demandant quel fou me scruter dans mon dos en sentant déjà venir les sueurs froides. Mais finalement c’est une surprise qui fait ressortir tout mon enthousiasme en l’interpelant, heureux de revoir un visage familier même après toutes ces années. Combien de temps cela fait au juste ? Je n’ose pas compter, mais je croyais vraiment ne jamais le revoir après son départ. En Amérique hein ? « La classe. C'était bien ? » Le sourire sur les lèvres, j’ignore même l’ascenseur qui finalement s’en va sans nous, je crois qu’on s'est finalement barricadé dans notre petit monde et nos retrouvailles, j’arrive à occulter tout le reste. Tellement de choses se sont passé, on a vécu beaucoup de mésaventure ensemble, mais ça nous avait rapprochés et grâce à lui j’arrivais parfois à supporter ce que je subissais, c’est difficile d’y repenser, mais j’ai grandi depuis et je suis capable de laisser le passé où il est aujourd’hui.

Jetant un œil au dossier qu’il tient entre ses mains lorsqu’il m’explique les raisons de sa présence je hoche la tête en signe d'approbation trouvant ça cool. « Tu es retourné à Royal alors ? » Il l’avait quitté en partant sur l’autre continent. « Si tu deviens médecin tu risques de m’avoir comme patient un jour ! » Ce serait amusant, je suis certain que je serais bien plus enthousiaste à l’idée de me rendre à l’hôpital pour voir un ami que pour me faire occulter. « Moi ? » Dis-je bêtement à sa question. « Je suis dans l’artistique maintenant. » Il doit se souvenir que j’aimais tout ce qui touché a l’art, les endroits que je fréquentais était toujours lié à ce domaine qui me permettait de m’évader quelques instants loin de cette existence fatigante que je menais. « Tu as du temps ? » On pourrait peut-être s’installer quelque part pour parler, on est un peu au milieu du chemin là. Mon occultation s’est évaporé on dirait.

Plus que de la surprise, retrouver Tenma après tant de temps me remplit d’un profond sentiment de joie. N’est-ce pas normal, de la part d’un étudiant plutôt solitaire, qui passe ses journées à réviser ses cours ou à explorer la ville, parce qu’il n’est pas forcément le plus doué pour nouer des amitiés ? Ne vous méprenez pas. J’aime étudier et je ne me plaindrai jamais de mes études à la Royal, mais imaginez un peu le bonheur que j’éprouve à retrouver un ami avec lequel j’ai fait face à l’adversité pendant si longtemps. Imaginez le un instant. Je n’aurais jamais pensé cela possible, s’il n’était pas là, devant mes yeux, à discuter avec moi comme si nous n’avions jamais perdu contact. Mes lèvres s’étirent en un sourire plein de sincérité alors que nous discutons et que s’écoulent les secondes. « C’était vraiment bien ! Très enrichissant, surtout. » Ce voyage en Amérique est, de très loin, la chose la plus passionnante qui m’ait été donnée de faire, même si c’est assez bouleversant de se retrouver baigné dans une culture qui n’est pas la nôtre. Sans même prêter attention à cet ascenseur qui s’en va, comme une personne indignée à qui l’on n’aurait pas souhaité parler, je continue à discuter avec cet ami ressurgi du passé. Un véritable plaisir.

Son regard qui se pose sur mon dossier, je ne mets pas longtemps à le remarquer, comme je l’observe depuis le début, et je laisse un sourire, toujours aussi posé, se former sur mes lèvres à sa question. « Oui, malgré tout. Arata étudiait là-bas aussi, alors c’était le plus évident. » Même s’il est diplômé et que j’ai eu du fil à retordre avec cette école, il est hors de question d’abandonner. Seul un idiot abandonnerait aussi près du but. J’obtiendrai également mon diplôme. « T’avoir comme patient ? » Mes yeux papillonnent sous le coup de la surprise, je ne me rappelle pas de ses problèmes de santé. « Qu’est-ce que tu as ? » Mais je ne m’aventure pas plus loin, ne souhaitant pas glisser sur une pente trop dangereuse.

« Oui, maintenant que j’ai récupéré ça, j’ai tout le temps que je veux. » Et c’est assez rare pour que je souhaite en profiter. « Je suis sûr que tu as plein de choses à me raconter. » Je réalise à ce moment que nous sommes plutôt mal placés, en effet. Mes yeux explorent les environs, je réfléchis à une idée. « Je connais un café sympathique, pas trop loin, ça te dis ? »

TENUE » Au cours de notre vie on n'a pas mal de connaissance, peut-être pleins de camarades, mais pas tellement d’amis. Du moins je n’ai que très peu de gens que je peux classer dans cette catégorie au final, surtout que jusqu’au lycée j’étais l’exclu, le solitaire, la tête de turc, la bête noire, celui qui prenait pour tout et n’importe quoi, parce que oui, même à Royal on a ce genre de personne lamentablement pris au piège dans cette roue infernale et victime de ses camarades pour une raison ou pour une autre, j’ignore ce qui a poussé tout le monde à me voir comme l’intrus, pourtant même dans cette situation désespérante, j’avais un ami, un seul et je le retrouve face à moi aujourd’hui. L’eau a coulé sous les ponts depuis notre dernière rencontre et pourtant dans ma mémoire les souvenirs sont encore présents et distinctifs. Je suis content de le revoir après tout ce temps, de savoir qu’il est finalement rentré de son voyage, puis il semble avoir passé du bon temps là-bas donc c’est le principal. Ce genre d’expérience vous enrichis sur tous les points, prenant en maturité comme en connaissance, je suis certain qu'Akira a des tonnes de choses à raconter et étrangement ça me rend curieux.

Remarquant ce qu’il tient entre les mains je l’interroge et apprends qu’il fait toujours des études de médecine, j’imagine donc assez vite qu’il est retourné à notre ancienne école commune, royal. « Ça reste le meilleur choix dans le coin. » Même si par le passé je n’en ai pas eu de bons souvenirs, c’est cette université qui m’a permis de décocher mon travail actuel indirectement certes, mais l’enseignement est irréprochable contrairement à certains étudiants. Je lui glisse l’information qu’il pourrait m’avoir comme patient, trouvant l’idée intéressante et amusante. À sa question je me rends compte qu’il n’a peut-être pas su toute l’histoire sur mon problème avec mon paternel et les conséquences de mon absence durant une bonne partie de l’année a la fin du collège. Je ne veux pas trop lui déballer tout ça là, dans le fil de la conversation, du coup je réponds en toute simplicité. « Des conséquences du passé, visite de routine. » Je lui donnerai des détails plus tard. C’est justement pour pouvoir rattraper tout ça que je demande s’il a du temps, j’aimerais éviter qu'on se sépare comme ça.

« Et toi aussi je suis certain. » On a des années de retard, mais il n’est jamais trop tard pour rattraper le temps « perdu » ni pour relier avec des vieilles amitiés, les vraies ne meurs jamais, en tout cas c’est ce que je crois. « Bien sûr, j’ai fini ma journée donc c’est parfait. » Me tournant pour faire face à l’ascenseur qui est fermé, forcément on l’a ignoré plus tôt... Appuyant sur le bouton, on va éviter de le louper cette fois, même si c’était pour la bonne cause. Une fois ouvert j’entre avec Akira, ça évitera qu’on bloque le passage plus longtemps haha.

Si une chose est bien vraie me concernant, c’est que je ne suis pas quelqu’un de très loquace et que j’ai quelques difficultés à m’exprimer lorsque je ne connais pas la personne qui me fait face. J’essaie généralement de faire au mieux, c’était du moins vrai avant mon départ pour les États-Unis, mais je ne suis pas particulièrement doué pour ce genre de conversation. Avec Tenma, par contre, c’est tout à fait différent. En subissant ensemble les difficultés de l’école, nous avons développé un lien que je n’échangerais pour rien au monde et, même si j’ai malheureusement, été séparé de mon ami par les quelques années qui se sont écoulées jusqu’à cette rencontre, je suis on ne peut plus heureux de croiser à nouveau son chemin. Je n’aurais jamais pensé cela possible.

Évidemment, l’absence est un moment à rattraper, l’espace durant lequel tant de choses arrivent, sans que l’on puisse les empêcher. Nous vous y trompez pas : je n’ai aucun regret et je suis très heureux d’avoir vécu des expériences mémorables durant cette période, mais je garde un certain pincement au cœur à la pensée de ce temps que je n’ai pas passé en compagnie d’un bon ami. La vie sépare parfois, mais lorsqu’elle réunit, il faut savoir apprécier la chance qui nous est donnée et, désormais, je compte bien tenir Tenma à portée. Nous sommes amis et nous le resterons. Enfin, j’ose l’espérer.

J’approuve son opinion d’un hochement de tête. Peu importe les ordures qui s’y trouvent, la Royal reste un bon choix pour les études, y compris celles de médecine. Je n’ai pas à me plaindre des exigences ou du niveau. « Hm… Je vois. » Mes sourcils se froncent d’appréhension et je remets la conversation à plus tard, réalisant à mon tour que nous ne sommes pas au meilleur endroit pour discuter de tout ce que nous avons manqué dans la vie de l’autre. « Allons-y alors. »

Un sourire revient fleurir à mes lèvres et je m’embarque dans l’ascenseur en compagnie de mon ami. Le café se trouve à quelques pas de l’hôpital. Comme je compte y travailler, une fois diplômé, j’ai commencé à noter des adresses malgré moi, dans un coin de mon esprit. J’attends sagement d’atteindre le rez-de-chaussée pour sortir de la cabine, le dossier coincé sous le bras. Un vague sourire flotte toujours à mes lèvres alors que je mène mon ami vers le café dont nous avons parlé un peu plus tôt et que je cherche une place du regard, glissant soigneusement le dossier dans mon dos pour ne pas le perdre. « Alors, tu prendras quoi ? »

TENUE » Il y a toujours des moments marquants dans une vie, des rencontres qui malgré le temps laisseront leurs traces, des souvenirs impérissables dans nos mémoires. Honnêtement je semble très sociable d’un point de vue extérieur, mon métier est assez animé et je dois fréquenter énormément de monde, croiser beaucoup de gens, mais je suis loin d’être aussi à l’aise que j’en ai l’air. J’ai très peu d’amis, même si j’ai changé avec les années et tenté de prendre en assurance et de me démarquer de ce passé victimiser, ça ne change pas ce que je suis. Akira est l’un des rares avec qui je n’ai pas besoin de jouer la comédie, c’est spontané devant lui que je peux parler sans hésiter. Mon cœur est léger et rassuré, heureux de l’avoir retrouvé de façon aussi soudaine qui plus est. Sans notre passé commun on aurait été que de simples camarades, mais dans la douleur et le rejet on a trouvé une amitié forte et vrai, assez pour surmonter le temps et l’éloignement. Une belle fierté et j’espère pouvoir de nouveau en profiter.

Je n’entre pas dans les détails sur ma présence ici comme sur le fait que je pourrais devenir son patient, l’avenir seul nous le dira, je ne compte pas lui cacher non plus mes visites ou mon état, je le remets simplement à plus tard, lorsqu’on pourra se poser et se raconter les choses qu’on a manqués au cours de ses dernières années. Hochant la tête on est donc parti pour ce café qui se trouve réellement à quelques pas seulement de l’hôpital, y arrivant donc rapidement. Suivant les pas de mon ami jusqu’à cette table qu’il a choisie, je m’installe face à lui, posant mes affaires sur le siège voisin, je réfléchis à sa question, hésitant entre un macchiato et le latte, mais je choisir finalement le premier. « Un macchiato ça me tente bien et toi ? » Souriant simplement en attendant de prendre la commande. « Du coup tu vis toujours aux dortoirs ? » Si j’avais continué mes études ont aurait pu se retrouver ensemble ! Mais maintenant j’ai mon propre appartement et mon indépendance la plus totale, au début c’est impression et perturbant, mais finalement on s’y fait rapidement.

On se connait. Nous avons subi la cruauté des autres étudiants suffisamment longtemps pour que ça nous rapproche, et c’est en cela que notre relation est différente des autres. Je veux dire, ça tisse les liens de supporter les mauvais traitements à la chaîne, et même si nous avons réussi à sortir de ce cercle infernal, j’ose croire que nous sommes toujours amis. Après tout, il n’y a pas de rose sans épines. Ces épreuves nous ont rendus plus fort et je veux penser que nos vies, désormais, seront plus belles ; je dois quand même avouer que cette histoire de maladie m’inquiète. En tant que médecin, ce n’est pas facile d’oublier ce genre de choses.

« Je vais prendre un chocolat je pense. J’ai besoin de sucre. » Dis-je calmement, lorsque nous sommes enfin installés dans ce café, dont l’ambiance me plaît assez bien, je dois l’avouer. Mon sourire s’étire discrètement alors que mon regard passe à l’entour. Il n’y a pas trop de monde, il fait plutôt calme. C’est idéal. « Oui ! Ça fait bizarre de voir les têtes changer. » Mais ça fait partie de ce que j’aime, dans ces études. « J’avais un appartement avant de partir aux États-Unis. J’hésite parfois à en reprendre un ; ça me manque. » D’un autre côté, avec Arata qui a terminé ses études, j’ai peur de me sentir un peu seul. Il est tellement occupé. « Et toi, tu vis loin d’ici ? Pourquoi on s’est pas croisés plus tôt, hein ? » Je suis parfois trop sérieux, mais rarement avec mes amis. Aussi un large sourire s’étire-t-il sur mes lèvres, alors que je lève les yeux pour constater l’arrivée d’un serveur, à qui je ne tarde pas d’énoncer mon choix, fait depuis quelques minutes déjà. C’est presque comme au bon vieux temps. Nous avons juste grandi, l’un comme l’autre.

TENUE » Il y a très peu de personne capable de comprendre ce que j’ai vécu, quand on me voit aujourd’hui il est difficile de penser a cette enfance difficile et compliqué que j’ai passé, autant à l’école qu’à la maison. On croit toujours que l’endroit qu’on appelle « chez nous » est un lieu de sécurité où on peut recharger nos batterie quand celles-ci sont épuisé, sauf que je n’ai pas eu cette chance.  A l’époque où que j’aille je devenais une cible et c’était épuisant.  Seul contre tous j’ai longtemps voulu en finir, pourtant la rencontre avec Akira a été une bénédiction dans notre malheur.  Ce genre d’amitié ne peut s’oublier, ce lien ne peut s’effacer, même si on a été séparé, les souvenirs qui nous ont marqué reste gravés et quoiqu’il arrive il sera lié à moi. Hier, demain, dans dix ans, les choses ne vont pas changé parce que je serais incapable d’oublier. Il y a des liens que personne ne peut expliqué et ça me convient très bien.

Prenant notre commande, on est tranquillement installé en attendant nos boissons, pouvant discuter de tout et de rien, du passé et du présent dans cet environnement calme et agréable. « Tu m’étonnes ! Enfin je n'ai pas que des bons souvenirs des dortoirs, mais ça comble la solitude d’être avec d’autres étudiants. » Les dernières années que j’ai passées en étant à l’université étaient cool, j’avais « changé » en même temps donc je pouvais apprécier les choses que j’avais haïes par le passé. « J’ai trouvé ça bizarre au début, vivre seul d’un coup ça m’a changé, mais d’un autre côté je m’y suis habitué assez vite. » Je suis plus un solitaire intérieurement, donc ça me convient. « Je vis à Minato, vu que je travaille à l’agence j’ai trouvé un appartement assez proche pour être tranquille. » C’était une chance d’ailleurs. « Je me le demande aussi ! Tu es revenu depuis quand d’ailleurs ? » Je ne crois pas lui avoir encore demandé. « D’ailleurs ton frère est toujours dans la musique ? » Je n’ai pas vraiment fréquenté Arata, mais j’en ai entendu parler par Akira, forcément.

La vie met les gens face à différentes difficultés. Ça a été mon cas comme celui de beaucoup d’autres, et je mentirais si je disais que je n’en ai pas souffert. La persécution, l’ijime, comme on l’appelle chez nous, est une vérité bien douloureuse que connaissent bien trop d’adolescents. Ce n’est pas toujours le même degré, ni les mêmes conséquences, mais personne ne devrait avoir à faire à de tels idiots. Qui sait, après tout, ce que les victimes vivent, une fois éloignées des murs de l’école ? J’ai la chance d’avoir un frère pour me soutenir depuis ma plus tendre enfance, un frère inséparable. Cela ne nous a pas fait que du bien, malheureusement, mais je ne peux pas nier l’avantage que ça représente. Nous nous sommes soutenus dans les moments les plus difficiles et, maintenant encore, c’est toujours un asile, l’un près de l’autre. Je ne cracherai jamais sur ce lien incroyable.

Installé dans le café, en compagnie de mon ami, je laisse un large sourire étirer mes lèvres alors que mon regard passe d’un client à l’autre. C’est fou, ce que l’on s’habitude à un environnement. Je m’étonne encore d’entendre du japonais autour de moi, à l’occasion. L’Amérique me semble si lointaine désormais. Je me demande pourquoi les habitants de ce pays, soi-disant des hommes libres, est devenu un tel enfer. Comment ont-ils pu voter pour un homme comme tête d’orange ? L’avenir ne m’inspire pas grand-chose, le concernant. Mais ce n’est pas le moment d’avoir de sombres pensées : je vais boire un verre avec un ami. C’est tout ce qui compte.

« C’est clair. Surtout lorsqu’ils font n’importe quoi et passent leur temps à hurler. » Certains étudiants sont assez cons pour ça. Clair que pour combler le vide, rien n’est mieux. « Je crois qu’avoir un jumeau m’a habitué à une présence. » Affirmé-je en un doux rire. « Franchement, je doute d’être un jour capable de vivre totalement seul à nouveau. » Je réfléchis un instant à sa question. Difficile à dire, en vérité. « Je suis rentré début juin ! Ça fait quand même quelques mois. » Mon sourire s’étire doucement et je hoche la tête en réponse à sa question. « Oui, toujours. Je doute que ce soit vraiment bon pour lui, mais c’est son rêve, pas vrai ? »

Même si le temps passe, je vis la peur au ventre. Je sais que ce n’est pas toujours facile, qu’il faut beaucoup donner de sa personne, être disponible à tout moment, même lorsque l’on est triste, fatigué, blessé. Certaines personnes ne réalisent pas à quel point ils font des sacrifices, ces artistes. Ils doivent parfois s’oublier, abandonner leur personnalité au profit d’un personnage qu’on leur a donné. Je crains parfois que ce mode de vie ne nuise plus à mon frère qu’il veut bien l’admettre. Alors que j’y songe, un soupir fuit entre mes lèvres. « Et toi, sinon ? Tu fais quoi exactement ? »

TENUE » Avoir un soutien fraternel m’aurait surement aidé à surmonter cette douleur et me soutenir dans cet enfer, je n’aurais peut-être pas fait de tentatives désespérées. Pourtant je suis soulagé d’avoir été seul, ne pas être témoin de la souffrance d’un frère ou d’une sœur, ne pas être deux à être des victimes ou ce genre de choses atroces. Puis dans mon malheur j’ai eu un « frère » bien que Akira ait son jumeau et qu’ils aient une relation que je n’essaierais jamais d’égaler, il est plus qu’un simple ami et ça m’a énormément aidé à tenir le coup.

J’en viens à parler des dortoirs et ça me fait remonter dans le temps, c’est un lieu plein de vie en permanence, l’établissement est remplis d’étudiant, de lycéens et forcément ça anime le jour comme la nuit. J’ai mis du temps à trouver ma place, pourtant j’ai quand même pu profiter et passer de bons moments une fois à l’université, cela n’a pas effacé le passé, mais ça m’a permis de voir les choses d’un regard différent que celui d’une victime. « Carrément, parfois c’était impossible de dormir. » Pour une raison ou pour une autre, on vit pas mal de choses entre ses murs. Souriant à ses propos, lui est encore entouré, par son frère ou ses amis à l’école, tandis que je suis seul dans mon appartement, pourtant je pense que je suis mieux comme ça. Parfois j’avoue qu’avoir un colocataire ou quelqu’un avec qui partager mes journées, parler ou m’amuser me manque un peu, mais d’un autre côté je ne risque pas d’être blessé et j’ai une entière liberté sur ma vie. « On a dû se croiser ! » J’ai quitté l’école il y a quelques mois aussi, dommage qu’on ne se soit pas revu à ce moment-là.

« Qu’est-ce qui t’inquiète ? » Je n’ai pas croisé Arata à l’agence, mais maintenant que je sais qu’il y est je devrais ouvrir l’œil, même si ce sera surement étrange de croiser le sosie de mon ami dans d’autres circonstances. « Je suis manager d’un groupe de musique. » Un sourire sur les lèvres, je suis fier de m’occuper des Colorful diamonds, même si je ne peux pas le crier sur les toits étant donné leurs popularités. « C’est assez incroyable quand j’y pense, mais je suis content de pouvoir bosser entouré de musiques et d’arts. » Étant un grand passionné, je ne peux que me sentir à ma place.

Un franc rire m’échappe au commentaire de Tenma, dont la justesse n’est rien plus qu’amusante. « Oui, c’est vrai que c’est parfois la galère. » Et pas qu’un peu, hélas. À croire que certains étudiants ont l’impression que les dortoirs sont un lieu de débauche où il est permis de hurler à tue-tête à trois heures du matin parce que notre colocataire a décidé de prendre sa douche – je ne l’avouerai jamais, mais je suis peut-être celui qui a dénoncé cet idiot, cette nuit-là. Je ne plaisante pas avec les veilles d’interrogation. Dommage pour lui. J’ose parfois croire qu’il n’a pas idée de ma dénonciation, et c’est tant mieux.

Dans le temps, je partageais ma chambre du dortoir avec Arata. Il y faisait bon vivre, plutôt calme et, pour ce qui était de l’ambiance de travail, c’était particulièrement rassurant de l’avoir autour de moi. Parfois, cette relation me manque cruellement. Nous nous sommes tellement séparés au cours des dernières années. Nous avons grandi, chacun de notre côté, jusqu’à ne nous ressembler qu’en quelques rares points, mais toujours autant au niveau physique. C’est meilleur pour nous deux.

« Ses problèmes de santé. » Réponds-je, le sourire légèrement éteint. « Je ne sais plus si je t’en avais parlé, à l’époque ? » Nous avons parlé de tant de choses, après tout. Son explication me fait doucement hocher la tête. Un manager de groupe. C’est plutôt intéressant, sans oublier qu’il doit être très occupé. « Ça ne te prend pas trop de temps ? Enfin, je veux dire, au niveau de la vie privée, tout ça ? »

Le travail est certainement la chose la plus chronophage du monde, mais j’ai bien pu réaliser, en Amérique, avec mes horaires réduits, à quel point l’ennui était difficile à supporter. Ça n’avait rien à voir avec l’enseignement intensif qu’on nous donne ici.

TENUE » Après même si c’est souvent bruyant et le bordel je sais aussi que pas mal sont là pour justement vivre cette période, profiter d’être étudiant et d’avoir aucune limite. Enfin ce n’est pas pour ça que cela doit devenir une habitude, surtout la nuit ou en période d’examens pour certain, car d'autres s’en fiche un peu. Gardant le sourire, le simple fait de parler de ce genre de chose librement avec Akira ça me fait plaisir, pourtant on ne dit rien d’extraordinaire.

Parlant d’Arata, je me demande de quoi il s’inquiète autant avant de me souvenir qu’il m’avait vaguement parlé des problèmes de santé de son frère, bien sûr on n'était pas vraiment entré dans les détails, faut dire qu’à l’époque on avait souvent d'autres problème à régler et à gérer. « Il me semble que tu m’en avais parlé légèrement, mais je ne me souviens pas vraiment. » Je ne vais pas mentir, autant qu’il m’explique maintenant, on a du temps et puis je comprendrais ses inquiétudes aussi.

Je ris un peu lorsqu’il évoque ma vie privée, j’avoue que je n’en ai pas vraiment, je passe mon temps à l’agence à gérer les emplois du temps des membres du groupe, allé à un rendez-vous puis à un autre, je dois les accompagner où qu’ils aillent, c’est aussi mon rôle de manager d’être là pour chacun d’eux, mais c’est prenant et j’ai rarement du temps pour moi, seulement je pense que c’est une bonne chose. « Dès que je suis libre je le passe dans un disquaire, à l’hôpital ou chez, j’avoue que je suis pas mal occupé, mais je ne saurais pas quoi faire si ce n’était pas le cas. » N’étant pas très sociable, sortir faire la fête ou des rencontres ce n’est pas mon truc, donc je mise tout dans mon boulot, je suis encore jeune, mais je suis content d’avoir pu au moins trouver un métier qui me correspond, ce n’est pas donné à tout le monde.

« D’ailleurs le groupe dont je m’occupe, ils sont tous à RPS. » Il ne faut pas croire que lorsqu’ils sont en cours je glande, je dois toujours chercher les nouveaux projets des uns et des autres, c’est souvent une guerre pour décrocher des contrats.

En retrouvant Tenma, c'est une part de moi-même que j'ai l'impression de rencontrer, comme si j'étais soudainement mis face à face à une personne que je n'ai plus vu depuis longtemps - ce qui n'est pas totalement faux, quand on regarde la situation - et que cette personne n'était autre qu'un reflet de moi-même, quand j'étais plus jeune et encore incapable de me défendre par mes propres moyens. Nous avons changé, lui comme moi, mais nous sommes toujours les même, tout au fond, derrière les années qui nous ont forcé à nous adapter et à vivre en dépit de tout ce qui a pu nous arriver depuis la dernière fois où nous nous sommes trouvés assis à la même table, à discuter autour d'une boisson. J'ignore envers qui je dois être reconnaissant aujourd'hui, mais je le suis vraiment, du plus profond de mon coeur.

Et de coeur, il en est justement question, lorsqu'il me fait remarquer que je ne suis jamais vraiment allé dans les détails concernant Arata. Je me suis souvent dit que j'aurais préféré être atteint de ce problème à sa place, car il aurait été moins dangereux pour moi que pour un artiste, mais je sais que ce n'est pas non plus le genre de souhait à faire. Pas même pour son frère. Je soupire, plus pour moi-même qu'autre chose, avant de reposer les yeux sur Tenma. « Il a des problèmes cardiaques depuis qu'il est tout petit. Il a subi une opération et on lui a sérieusement déconseillé l'activité physique trop intense, mais que veux-tu... C'est son rêve. » Et pendant ce temps, du bas de la scène, je crains sans cesse de le voir s'effondrer, rattrapé par le mal dont il devrait être soigné.

C'est à cause de cette maladie que j'ai décidé de devenir chirurgien. J'ai décidé très jeune déjà que jamais un autre frère n'aurait à attendre dans une salle froide et vide. C'est également à cause de cette conviction que je me suis senti profondément démuni au cours des derniers mois: les médecins ne sont hélas pas des dieux, ils font des erreurs et sont parfois bien incapable de sauver la vie de ceux dont ils ont la charge. C'est un choix de vie bien difficile que celui d'assister les patients dans les bons comme dans les mauvais moments. J'ai failli abandonner ces études lorsque j'en ai pris conscience, mais mon voyage en Amérique m'aura bien aidé à mettre de l'ordre dans mes idées.

« Oui, d'ailleurs, si tu m'expliquais? » Ses visites à l'hôpital ne me semblent pas vraiment anodines, et s'il n'était pas mon ami je ne serais certainement pas assez curieux pour la lui poser, mais la question me brûle les lèvres depuis quelques minutes déjà. Je m'en veux un peu d'enchaîner les sujets de conversation lourds.

« Ah bon ? reprends-je finalement avec surprise. Ah ! Attend, je crois que je les connais. Les Beautiful Caïman ? » Non, je ne l'ai pas. Mes sourcils se froncent alors que j'essaie de revenir sur le nom précis. « Faut me pardonner, moi et la musique on n'a jamais été grands copains. » Mise à part celle de mon frère, mais il est plutôt normal de s'intéresser à ce que fait sa famille, pas vrai ?

TENUE » Je n’aurais pas oublié un problème aussi grave, certes j’avais souvent la tête ailleurs à cette époque, mais je n’étais pas sourd aux paroles de mon ami, en l’écoutant m’expliquer ce qui l’inquiète sur la santé de son frère jumeau je réalise qu’il ne m’en avait réellement pas parlé, du moins pas dans les détails car j’ignorais que son cœur était mal en point. Il est clair que pour un artiste c’est extrêmement dangereux, je le vois tous les jours en suivant le groupe, la danse, le chant, l’entrainement quotidien, c’est à peine s’ils dorment trois heures par nuit et en plus ils vont en cours, je me dis qu’il faut avoir des nerfs d’acier et une volonté de feu pour supporter un tel planning et pourtant j’essaie de leur laisser des pauses entre-temps pour qu’ils se reposent, sauf qu’ils s’entrainent encore, comme si ce n’était pas suffisant. Donc oui, je comprends parfaitement qu'Akira voit le métier de son frère d’un mauvais œil, que cela soit son rêve ou non.

« Il n’a pas un médecin pour lui déconseiller ? Enfin, je suppose que ça le briserait davantage de le retirer de la scène que de le laisser prendre des risques pour sa santé. » Je soupire, imaginant ce que peut ressentir mon ami sur cette affaire, mais maintenant que je suis au courant, si je croise Arata je m’assurerais qu’il va bien et donnerait des nouvelles à Akira, ainsi il sera surement moins tourmenté en étant incapable de l’arrêter. Les boissons arrivent alors que mon ami me demande plus d’informations sur mon état, de toute façon je ne comptais pas réellement le lui cacher, seulement en parler devant une cage d’escalier à peine retrouvé ce n’était pas cool.

« Après avoir reçu un mauvais coup j’ai perdu l’usage de mes jambes et le fait que je puisse remarcher est apparemment un miracle, donc je dois faire des visites pour voir si rien n’a empiré. » En gros c’est ça, même si je vis une vie normale, je dois faire attention de ne pas m’abimer plus les vertèbres qui ont été grandement fragilisé.

« Je n'ai pas envie de retourner dans une chaise roulante. » Souriant, je le rassure par la même occasion, c’est juste une conséquence de ses nombreuses choses qu’il a fallu surmonter. Concernant mon boulot je donne rapidement une information sans lâcher le nom et quand Akira tenté de les nommer j’avoue avoir grimacé une seconde avant de pouffer et rire de bon cœur. « Beautiful Caïman !? » Je ris bon sang. « Ne t’inquiète pas, puis je trouve que c’est cool comme nom de groupe... » Plaisantais-je en buvant une gorgée de mon café. « Les Colorful diamonds oui, mais chut. » Dis-je en portant mon index sur mes lèvres, je l’ai chuchoté pour pas que des fans me tombent dessus.

Aux propos de Tenma, je ne peux que soupirer légèrement. J’aimerais pouvoir déconseiller à mon frère de s’épuiser plus qu’il ne le fait déjà, mais je suis impuissant face à la situation. Je ne peux que l’écouter, accepter sa décision, celle de continuer et de mettre sa vie en danger, même lorsqu’elle est la plus mauvaise qu’il aurait pu prendre. Cette angoisse ne me quitte jamais, me ronge le cœur et l’âme, lorsque je commence à penser au moment où il me quittera à cause de cette maladie stupide qui l’a attaqué lorsqu’il était plus jeune. Il ne mérite pas que le sort s’acharne ainsi sur lui, mais je ne le connais que trop bien pour ignorer ce risque. Je ne suis pas aveugle. « C’est une tête de mule. Un peu comme moi, en fait. » Un franc rire me vient, que je ne retiens pas. « Il n’arrêtera jamais avant d’en être tout simplement incapable. »

Vient alors le temps de questionner Tenma au sujet de ce qu’il m’a dit à l’hôpital. Si je dois l’avoir comme patient, ce n’est sûrement pas anodin. Mes yeux s’arrondissent à son explication. « Sérieusement ? Une lésion du nerf ? Le dos ? » Mes sourcils se froncent et j’observe la boisson qui se trouve devant moi, songeur. « C’est fou, ce à quoi on échappe… » Je peux m’estimer heureux d’avoir toujours été en bonne santé jusqu’à maintenant. Si ce n’est un rhume ou l’autre, à l’occasion. Qui eut cru que je serais le plus résistant des deux jumeaux à l’heure actuelle ? « Je peux comprendre. C’est tellement contraignant. T’y es resté longtemps ? »

Qu’on me pardonne de ne pas avoir plus de culture musicale. Mon rire fuse dans l’air et rejoint celui de Tenma. Il a bien raison de se moquer. « Ça fait groupe de rebelles, un peu. Avoue, tu devrais m’engager pour donner des noms aux groupes. Après les Beautiful Caïman, saluez les Wonderful Whales. » Reprends-je sans trop pousser sur ma voix, pour rester discret malgré tout. « Je crois que je tiens un concept. » Bien sûr, je ne suis pas sérieux et un rire me trahit. « Je vois… Mon frère est sûrement allé en cours avec eux à une période alors. Il faudrait que je lui demande s’il les connait. » Je ris doucement. « Tu bosses à la Angel du coup ? [/color]»

TENUE » Malheureusement je ne peux pas imaginer ce que ressent mon ami avec les problèmes de son frère, les jumeaux ont apparemment un lien déjà bien fort, mais même sans ça je n’ai pas de frère ni de sœur pour me mettre à sa place. Je ne veux pas dire quelque chose qui sonne faux en avouant comprendre juste pour lui faire plaisir. La seule chose logique est qu’il s’inquiète pour lui et est peur, ça prend tout son sens avec ce qu’il m’a raconté, sa maladie n’est pas un simple rhume, mais si Arata met sa vie en jeu pour son rêve je doute qu'Akira puisse y faire quelque chose, même en l’enfermant il trouvera surement le moyen de vivre sa passion. « En clair tout ce que tu peux faire c’est attendre et espérer. » En résumé c’est ça. Enfin, je me dis que dans la vie très peu de personnes sont capables de réellement savoir ce qu’ils veulent, quand on le trouve il est normal de foncer et parfois d’en oublier que le plus important c’est la santé, car c’est ce qui nous permet de vivre.

Je lui avoue que de mon côté aussi j’ai eu des complications, si malgré les violences dans mon enfance j’ai pu supporter le rang de victime, il fut un jour où mon corps ne l’a pas supporté. Un coup mal placé et ma vie ont manqué d’être gâché, je n’étais qu’un gosse dans une chambre d’hôpital, incapable de bouger à moins d’être assis sur une chaise roulante. J’ignore comment je m’en suis sorti, j’ai passé énormément de temps en rééducation et apparemment le fait que je sois « jeune » m’ait aidé à guérir plus vite et à me tenir de nouveau sur mes jambes. « Hum, j’ai eu l’impression que mon dos s’était brisé. » Je garde le sourire en avouant cet épisode douloureux de ma vie, mais je me souviens ô combien j’en ai réellement souffert. « Je suis resté plusieurs mois à l’hôpital, personne ne miser sur ma guérison, mais quand j’ai réussi à me tenir debout j’ai décidé de ne plus me laisser faire. » La « victime un jour victime toujours » avait cessé, je ne voulais plus être faible.

Parlant ensuite de mon métier et du groupe dont je m’occupe je ne pus franchement pas m’empêcher de rire devant la manière qu’à Akira de renommée mes protégés. « Sérieusement ? Je pense que tu devrais tenter ta chance ! » Plaisantais-je en ayant du mal à m’arrêter de rire. « Il doit les connaitre, c’est sûr. » Que ce soit par l’école ou à l’agence. « Yep ! Après un stage ils m’ont embauché, j’ai eu de la chance, mais je ne vais pas m’en plaindre. » Après tout ce que j’ai traversé, voir la roue tourner ça fait du bien. « Je pourrais essayer de croiser Arata à l’avenir, voir comment il se débrouille. » Je comptais déjà le faire, mais si ça peut rassurer Akira aussi.

C’est en un hochement de tête résigné que j’accueille la réponse de mon ancien camarade. « Exactement. » Je ne peux qu’être spectateur de l’épanouissement scénique de mon frère et des risques qu’il prend quotidiennement afin de vivre la musique qui le fait tant rêver. Je le comprends, dans un sens. Si j’étais un jour privé de ma capacité à exercer, j’ignore comment je réagirais. Accepterais-je de rester inactif, comme si de rien n’était ? Certainement pas. La vie met parfois des obstacles sur notre chemin. Des obstacles qu’il faut savoir surmonter lorsque besoin s’en fait sentir. Il m’arrive d’envier cette capacité qu’il possède à vivre sans se soucier du lendemain. Au jour le jour. Il est mon carpe diem, je suis son memento mori. Un bel équilibre que la vie a créé.

Mes yeux se ferment alors que je l’écoute parler. Je peine à imaginer ce qu’il a traversé pour en arriver là. La douleur incommensurable qu’il a dû éprouver. Perdre l’usage de ses jambes, ça n’est jamais une partie de plaisir, et j’en ai vu quelques-uns, des cas où la personne ne récupérait jamais. Cela m’effraie, rien que d’y penser. « Comme quoi, au final, on n’est rien de plus que des humains qui donnent des avis… » Un diagnostic qui décide de la vie ou de la mort d’un homme, dans certains cas. Ainsi que de la suite de certaines carrières. Tant de pouvoir dans les mains d’une poignée d’hommes. « Content que tu te sois battu. » Je le reconnais bien là. L’avantage, quand on est un cuir battu, c’est qu’on est à l’épreuve des coups durs, du moins en partie.

« S’ils m’acceptent, ils ont vraiment un humour en mousse. » Affirmé-je en riant de bon cœur. « C’est quand même dingue, ce que le monde est petit. [/color] » Surtout le leur, quand on y pense. Mon sourire s’étire largement. « C’est clair. Ton tour est venu. Je crois qu’ils n’auraient pas pu tomber sur mieux que toi. » Il est suffisamment conscient du pouvoir des critiques et des dangers de l’opinion des autres pour les mener sur le droit chemin. Enfin, ce n’est que mon avis. « Si tu pouvais, ça m’aiderait énormément. J’ai l’impression que je ne le croise plus jamais depuis que je suis rentré d’Amérique… »

Mon cœur se serre un peu à cette pensée, mais je m’empresse de la chasser, reprenant une gorgée de ma boisson. « J’espère quand même ne pas t’avoir comme patient, quand je serai chirurgien… » La chirurgie cardiaque, ce n’est pas une plaisanterie, et c’est rarement une balade de santé, lorsqu’on doit y passer.

TENUE » Quand on ne peut rien faire on finit par simplement se résoudre à l’accepter et c’est ce que doit faire Akira, je l’ai bien compris et j’espère sincèrement que toutes ses craintes ne se réaliseront pas et que tout ira bien pour son frère. De mon côté même si je ne parle que rarement de mon passé, d’ailleurs je n’emploie jamais le coupable dans mon histoire, mon père... Mais je vais mieux aujourd’hui, en dehors de quelques visites j’ai appris à vivre avec et je ne m’apitoie pas sur mon sort, après tout j’ai surmonté les épreuves et c’est ce qui m’a rendu plus fort toutes ces années. « Exactement, sauf qu’on a tendance à croire ce qu’on nous dit. » Les mots employés, « sans espoir » ou « les statistiques disent qu’il y a peu de chance » ce genre de choses là j’y ai cru aussi au début, mais parce qu’il y en avait d’autres qui me poussé en me disant que rien n’était impossible j’ai tout donné dans la rééducation et que ce soit un miracle ou non, je tiens sur mes jambes maintenant. « On n'a pas vraiment le choix. » Se battre on connaît ça, même si ce n’est pas physique on a dû tenir bon à de nombreuses reprises et c’est une force de caractère que toutes les grosses brutes où toutes les malchances du monde ne pourront atteindre.

« Moi je t’accepte. » Prenant un faux air convaincant et sérieux, en même temps avec Akira je pourrais rire aisément d’un rien et ça fait du bien. Je suis content d’avoir trouvé une place dans ce que j’aime et de pouvoir vivre chaque jour pleinement, même si ça me prends du temps, je n’ai pas vraiment besoin d’une vie privée pour l’instant, donc autant en profiter. « Merci, c’est gentil. » ça fait plaisir à entendre en tout cas. Gardant mon sourire je ne manque pas de parler d'Arata, si je peux l’aider je le ferais et avec plaisir même. « Compte sur moi, faudrait que tu me donnes ton numéro, tu as dû changer depuis le temps. » Si ce n’est pas le cas, moi j’ai changé, donc je sors mon téléphone pour qu’on puisse échanger nos contacts histoire qu’on puisse s’appeler plus souvent et que je puisse aussi lui laisser des messages quand je croise son frère, maintenant qu’on s’est retrouvé autant éviter de se perdre bêtement de nouveau.

« J’espère ne pas t’avoir comme médecin aussi. » Riant un peu. « Mais je suis sûr que tu seras un super chirurgien, donc même si c’est le cas j’aurais confiance. » Hochant la tête pour approuver mes paroles. Je n’ai rien au niveau du cœur donc c’est peu probable, mais on ne sait jamais.

Nous avons toujours besoin de nous rabattre sur des situations rassurantes. On cherche une façon de ne pas craindre ce qui viendra, on essaye de se rassurer avec ce qui est, et lorsque les choses se passent bien, on se rassure en se disant que tout devait se passer comme ça, de toute façon, et qu’on n’avait pas de raison de craindre le contraire. C’est pour cela aussi que nous avons besoin des avis extérieurs, des médecins et des conseillers, par exemple. Certaines personnes s’en sortent très bien sans, mais pour le reste, c’est une aide essentielle dans la prise des décisions et, pour les médecins, une aide primordiale, même. Ce métier est celui que je veux faire depuis des années, et tout ce temps passé sur les bancs n’aura en rien émoussé mon désir de me dépasser. Je souhaite encore devenir un médecin talentueux, respecté et, surtout, sauver des vies, autant que j’en serai capable. « C’est vrai… Ça serait bien que les choses se terminent toujours aussi ‘bien’ que pour toi… » Je ne sais que trop bien à quel point, parfois, un diagnostic favorable se termine en drame. Et contrairement à ce qu’il dit, certaines personnes décident de ne pas se battre et se laissent mourir à petit feu. Je suis heureux de pouvoir encore lui parler aujourd’hui.

« Alors c’est toi, l’humour en mousse ! » Rétorqué-je en un rire. « Mais je t’invente tous les noms nuls que tu veux, quand tu veux ! » D’un autre côté, je pense être plus à l’aise avec un scalpel qu’avec des noms de groupes à établir. Je me demande s’il y a des spécialistes pour ce genre de choses. Certainement du marketing, des chargés de communication ? Aucune idée. « Pas de problème, attends… » Je cherche le contact que j’ai enregistré, ayant un peu de peine à mémoriser mon numéro entier, et je tourne mon téléphone déverrouillé et allumé vers Tenma, afin qu’il puisse prendre note du numéro affiché à l’écran. « C’est ça. »

Son commentaire m’arrache un rire sincère. « J’aimerais que tu aies raison… » Je reprends une gorgée de boisson chaude, pensif, alors que je glisse une main dans mon dos, laissant mes doigts froisser légèrement les plis du dossier que je suis allé chercher. « L’air de rien, c’est intimidant… J’arrive à la fin de mes études et j’ai l’impression que je vais être lâché en pleine nature, sans filet… Je ne sais pas si j’ai hâte ou peur, au bout du compte. » Sûrement un gros mélange des deux… Qu’est-ce que ça pourrait être d’autre ?

TENUE » Le médecin est un allié, quand quelque chose arrive on se rattache à cette seule personne, c’est un humain aussi et pourtant à nos yeux chacune de ses paroles est capable de nous atteinte. Le fait de se sentir en sécurité avec eux, de se dire qu’ils seraient capables de nous sauver, de nous guérir, d’être là en cas de complication, de nous soutenir malgré eux psychologiquement. J’étais jeune quand j’ai été interné, mais ce n’est qu’avec ma mère qu’ils employés des mots assez clairs laissant paraître le peu d’espoir sur ma situation. On essayait de me faire garder le moral alors que j’étais en train de perdre littéralement mes chances de remarcher. Certains diront qu’il y a pire que ça, mais être cloué sur une chaise, dans un lit, ne pas pouvoir se déplacer librement, à mes yeux cette nouvelle m’a conduit dans un enfer pendant quelques jours. Heureusement l'expérience passée m’a permis de rapidement remonter en scelle et de surmonter l’épreuve, aussi difficile cela a pu être. Que ce soit un miracle, la chance ou ma détermination, les choses se sont bien terminé pour moi. Comme l’annonce Akira, si cela était le cas pour tout le monde se serait bien, malheureusement ce n’est pas le monde des bisounours où tout est beau dans le meilleur des mondes.

Tirant la langue, j’accepte d’être ce qu’il veut, mais du moment où ça nous fait rire quelle importance ? « Je prends note. » Si j’ai besoin d’aide pour un nouveau groupe je ferais appel à ses talents. Gardant le sourire, je pense à échanger nos numéros de téléphone, faut dire que ce sera plus pratique pour garder contact. Une fois échangé, je range le téléphone, ça me fait vraiment plaisir de retrouver mon ami donc maintenant je vais essayer de prendre des nouvelles souvent pour ne pas de nouveau laisser le temps nous séparer bêtement.

Je ne doute pas des capacités d'Akira pour devenir un super chirurgien, je ne dis pas ça parce qu’il est mon ami, bien que cela aide mon jugement, mais aussi parce que je sais qu’il a travaillé dur pour atteindre ce but, toutes ses années d’études et puis il est aussi déterminé que je peux l’être. J’en suis certain. Il aura surement le talent pour parler aux patients, il a la bonne tête aussi, ça favorise la confiance haha. « Tu vas surement le savoir quand tu y seras, mais l’inconnu fait toujours peur. Même si tu sais à quoi t’attendre ce sera une étape supérieure et faudra que tu prennes tes marques rapidement. » J’imagine que c’est angoissant et effrayant, mais il fait ce qu’il aime et c’est le plus important. « Ce qui serait étrange c’est que tu ne ressentes rien. » Plaisantais-je, bien que ce soit vrai malgré tout.

J’ai parfois peur de ne pas être à la hauteur et de ne pas être capable de répondre aux attentes des personnes qui m’entourent. Cette peur s’est faite de plus en plus forte, à mesure que se sont écoulées les années, quand j’ai commencé à étudier la médecine, en me destinant de cette façon à la chirurgie cardiaque. Des vies de centaines de personnes vont un jour reposer entre mes mains. Ce sera une vraie responsabilité. La mienne. Suis-je prêt à porter le poids si lourd de ces existences qui viendront alourdir la mienne ? Sans doute. J’ai appris à gérer le stress, j’étudie bien, mieux que certains, et lorsqu’il s’agit de procéder aux exercices qu’on nous donne, je ne pense pas être le plus mauvais. C’est toutefois une peur qui ne me quittera jamais, pas tant que je serai aux études et que je n’aurai pas la preuve de mes capacités. Ah, ce que le temps me semble long avant d’obtenir des résultats. Je souhaite de tout mon cœur que mon frère sera fier de moi.

« C’est clair… » Dans tout ce qu’il dit, il a cruellement raison. Je ne suis pas sans savoir que les études que j’ai entreprises sont difficiles et, en bien des points, différentes de la réalité du métier. Aller chercher un dossier à l’hôpital et tenir entre ses mains la vie d’un autre sont deux choses incomparables, et je ne sais pas combien de temps il me faudra pour m’habituer à la deuxième. Ce sera sûrement effrayant, grisant, peut-être. J’ai entendu certains médecins affirmer qu’ils trouvaient cette sensation incroyable, dans le sens positif du terme. Il m’arrive de me demander de quel côté je me trouve. Serais-je la personne effrayée ou la personne enivrée ? J’ai toujours eu de bonnes capacités à gérer le stress, heureusement. La vue du sang ne me dérange pas non plus. Ah… « Je me prends vraiment trop la tête, en fait ! »

Aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours été comme ça, à chercher des questions où il n’y en avait pas. C’est ce qui fait de moi une personne curieuse, sans l’être de trop. Je sais faire la part des choses. Un sourire me vient alors que je prends une nouvelle gorgée de café, cette pensée à l’esprit. Tenma aussi m’a toujours connu comme ça, même si nous étions avant tous des compagnons d’infortune. Je peine à me dire que nous en sommes là désormais, à nos âges. Notre vie a radicalement changé. « En tout cas, ça me fait vraiment plaisir de te revoir. » Avoué-je finalement, en reposant ma tasse. « J’espère qu’on se recroisera souvent. En dehors de l’hosto, j’entends bien. »

TENUE » Je peux seulement imaginer combien le métier d'Akira risque d’être pesant au quotidien, il va sauver des gens, mais il va aussi en perdre et c’est normal. Il doit juste se souvenir des raisons qui l’ont poussé à faire ce travail, parce que devenir médecin ce n'est pas seulement une profession, c’est quelque de bien plus. Je crois en mon ami et je suis certain qu’il sera vraiment un très bon chirurgien, parce qu’il sait ce que c’est justement d’avoir peur, il est confiant, mais pas trop et de cette façon il se remettra en question et continuera d’évoluer encore et encore pour devenir meilleur et ça je pense que c’est la clef pour ne pas rester sur ses acquis et juste se contenter du minimum, surtout quand on a une vie entre les mains. Je souris me voulant rassurant. Je vis une vie différente, je m’occupe d’un groupe super populaire et j’ai toujours du boulot, mais on ne peux pas dire que je sauve des vies ou que malgré la pression je ressente mes épaules lourdes, j’aime ce que je fais et c’est ce qui importe. Akira le comprendra et découvrira aussi à son tour quand il sera officiellement sur le terrain, loin de ses études et du cadre éducatif qui l’entoure et lui enseigne actuellement.

« Tu te pose des questions, c’est normal. » Gardant mon sourire, je hoche la tête a ses nouvelles paroles. « Moi aussi ! Et je compte bien te voir plus souvent, la prochaine fois organisons quelque chose ensemble. » Une sortie entre amis, nous avons beaucoup à rattraper et cette fois il n’y a rien de négatif dans notre relation, personne pour nous frapper et nous rendre la vie dure, c’est loin derrière nous tout ça et heureusement. « Tu as mon numéro, appel moi quand tu veux. » Je ferais de même, même des messages, du moment qu’on garde contact c’est le principal. En tout cas c’est vraiment agréable de passer du temps avec lui dans un cadre différent du passé.

HRP: