Tenue - La nuit fut agitée par les révélations d'un jeu idiot entouré d'énergumènes étranges. Linh Dan dormit seulement deux heures, juste le temps de ranger ses méfaits de veilles dans un coin de son esprit de façon logique et implacable. Son réveil finit cependant par sonner au plus mauvais moment, lorsque son corps, détendu, réclamait un minimum de sommeil. A son âge neuf heures dans les bras de Morphée ou non, aucune marque visible défigurait son visage. Ce qui ne laisserait pas la chance à ses petits camarades de l'interpeller pour lui rappeler le clou du spectacle.  qu'à y penser, la paume de sa main aterrit au centre de son front sans retenue lui laissant une belle marque rouge en guise de souvenir et un bon mal de crâne en prime. Pour la peine, il avait choisit de se lever une heure avant tout le monde pour continuer ses révisions en douce ou encore occuper la salle de bain dans les premiers - persuadé qu'Ewon Bak était réveillé avant lui. Le temps pour lui de s'habiller en uniforme obligatoire, d'ajuster sa queue de cheval pour laisser une belle mèche de cheveux dissimuler la partie haute de son visage, il fut fin prêt à débuter sa journée.

Ses dents croquaient une pomme par intermittence, laissant son corps continuer sa route dans les couloirs de l'établissement pour se retrouver dans la salle de classe du premier cours. Il se serait bien permis d'écouter un peu de musique pour s'occuper avant l'arrivée des autres mais il lui restait encore une bonne dizaines d'exercices à faire avant de clôturer un chapitre d'anglais. Il se pencha alors sur son sac qui trainait sur le  sol afin d'en extirper un cahier d'exercices, de quoi écrire et un livre de cours de son année scolaire pour cacher le livret à l'intérieur, juste au cas où. Une tactique bien huilée qui donnait l'illusion de travailler à l'aide du manuel ce qui n'était pas du tout le cas. Étudier devenait difficile surtout lorsque son cerveau se positionnait en mode surcharge d'information; Ses pensées restaient prisonnières des révélations de la veilles et de ses interrogations sur cet échange rapide lèvres à lèvres. Ca ne devait rien signifier, ca ne pouvait rien signifier. Non, tout ne pouvait pas être calculé par des idées rationnelles. Il ne comprenait pas ce qui se déclenchait à l'intérieur et se refusait à y regarder de plus près au risque de se voir propulser du haut d'une falaise. Un voyage sans retour qui lui donnait le vertige. Alors, plutôt que de se laisser conduire par une suite d'images incessantes qui représentaient ses souvenirs, il positionna un casque sur ses oreilles et enclencha la musique pour pouvoir se concentrer sur son cahier, crayon en mains.

TENUE - Je ne sais pas trop où j’en suis, je ne suis pas un gars facilement perturbé par les mots et les situations, je pense avoir eu ma dose durant mon enfance, les interrogations, les doutes, les larmes, les peurs, je me suis souvent remis en question après la disparition de Shaka, j’étais jeune et je me sentais pourtant coupable, les choses qui pourraient être insignifiant aux yeux des autres on prit une importance aux miens, le passé, mes souvenirs, je me souviens de tout, sauf du visage de mon meilleur ami, du moins il est flou, comme si un voile se fige dessus, je me rappelle ses cheveux, son sourire, mais comment me regardait-il ? Mes parents ont pris toutes les photos que j’avais de peur que je reste coincé dans cette relation, mais pour moi c’est pire que tout, ne plus avoir les images, jusqu’à maintenant je le vivais bien, mais aujourd’hui je tente de comprendre pourquoi Linh Dan me perturbe, est-ce la ressemblance ? Je pensais que ce n’était que ça, mais ses mots, ses réponses au jeu, tout me laisse perplexe. Depuis quand est-ce que je me prends la tête ? Je l’ignore et finalement le regard sur le réveil je me suis encore levé à cette heure précise qui hante mon quotidien depuis toutes ces années, ça ne changera pas, qu’il sonne ou non, mon corps a cet automatisme, ses habitudes...

Les habitudes ? Quels étaient celles de Shaka ? Je devrais m’en souvenir, bien qu’enfant on soit toujours si insouciant. Je me lève alors que mon regard se pose sur les deux peluches de notre enfance. Un soupire et je m’accroupis à leurs niveaux pour les regarder tour à tour.

« Peut-être que je devrai vraiment retourner en Corée ... » Qui sait, j’y obtiendrai des réponses qu’ici je n’aurai jamais. Je me relève pour prendre une douche et enfiler mon uniforme, il est encore tôt, je suis toujours le premier levé de toute façon, une fois prêt, j’attrape un gâteau et quitte le dortoir en regardant la chambre de Linh Dan, cette soirée fut vraiment bizarre, autant que les mots qu’il a prononcés... Mais c’est surement des situations qui se superposent à mes souvenirs qui m’ont troublé, rien de bien méchant, je ne dois pas faire de fixation sur cette histoire, ce n'est pas mon genre.

C’est calme, je m’arrête à la fontaine entre le campus et le lycée, l’air matinal et agréable, le soleil n’est pas encore levé, je m’allonge sur le rebord, mes doigts trempant dans l’eau, le paquet de gâteaux sur mon ventre, mangeant ainsi, profitant de ce moment isolé, j’aime le silence, cette solitude qui autrefois me faisait peur est devenu aujourd’hui mon alliée pour réfléchir, me calmer et me requinquer quand mes pensées sont trop tourné vers le passé. Puis les minutes passent et de loin je vois le blond partageant mon dortoir s’échapper vers l’école, il ne m’a pas vu, me redressant j’attrape mon sac, ma boîte à moitié vide et marche en direction de la salle de classe, passant le couloir vide, pour arrivée dans cette pièce où mon camarade est déjà installé à sa table, bossant un casque sur les oreilles. Passant par la porte de derrière pour prendre place à la table voisine, le coude sur le bureau tenant ma tête, je l’observe simplement tourné dans sa direction, sans un mot, il ne semble pas m’avoir remarqué, un sourire se dessine sur mes lèvres alors que je détail son visage... Depuis le début il me semble si familier, mais tout ça n’est que dans mon imagination, je dois arrêter de le regarder, arrêter de voir en lui celui qui m’est le plus cher, Linh Dan n’est pas Shaka et Shaka n’est plus là, c’est pourtant simple.

Tenue - Sa capacité d'apprentissage approchait la moyenne. Rattraper autant d'années sans une éducation correcte, lui prenait une énergie importante, juste pour arriver à paraître à peu près équivalent aux autres. Seulement, ils avaient tous tort. Son paraitre n'était que subterfuge. Il ne comprenait pas grand chose à ses notes et encore moins lorsque des exercices obligatoires étaient donnés en direct live à tous ses camarades. A chaque fois que le professeur réclamait son intervention au tableau pour résoudre la question posée, il souffrait de devoir planifier un semblant de réponse. Parfois, son stratagème fonctionnait quand la plupart du temps, il finissait par entendre un fou rire générale. Oh non, il n'avait pas l'intention de jouer les clowns devant tout ce petit monde mais il ne pouvait pas non plus effacer les sept années perdues. Alors, faute de pouvoir les récupérer facilement, il lui fallait de la discipline, beaucoup de travail sans oublier la majorité de son temps libre. Pas si simple pour un adolescent de dix sept ans qui devait réapprendre à vivre en communauté.

Le nez plongé dans son manuel d'anglais. Il reprenait sans cesse la même phrase, fronçant les sourcils car le contexte lui échappait; Au risque de paraitre idiot, il était prêt à regarder les dernières pages pour obtenir la réponse facilement. Ses doigts levèrent légèrement une dizaine de feuilles avant de les relâcher. Ce n'était pas la méthode la plus appropriée pour progresser mais son absence de compréhension pouvait devenir un frein s'il en devenait démotivé. Ses épaules, quelque peu tendues, se mirent à mimer la forme de petits cercles alors que son visage basculait de devant en arrière marquant une trajectoire circulaire, le tout en faisant craquer quelques os sur son passage. Son corps tentait de diminuer les signes de fatigues afin d'augmenter sa concentration. Au final, son crayon atterrit sans aucune élégance, sur le manuel, dans un soupir qui en disait long sur son désespoir. Les traits de son visages montraient une grimace colérique jusqu'à ce qu'une ombre sur le côté ne l'interpelle. Son visage se tourna doucement dans la direction de cette silhouette avant de faire un bon en arrière, suffisamment grand pour en tomber de sa chaise."Ah !" Ses fesses atterrirent sur le sol, le laissant dans une position amusante mais peu confortable. Ewon Bak ... il lui était de plus en plus difficile d'affronter sa présence à ses côtés au risque de vouloir récupérer cette chaleur humaine qu'il partageait lorsqu'ils étaient enfants, souvent collé l'un à l'autre pour faire les pires bêtises. Ils étaient juste, eux. Deux aimants attirés l'un par l'autre qui se complétaient et se soutenaient peu importait la raison.

Et au final, ils se retrouvaient dans des situations inconfortables. Linh Dan tentait de se dépatouiller avec les fils de son casque audio. "Je ne savais pas que tu te trouvais dans le coin. Je peux partir si tu veux être seul ?" Ses yeux se posaient tout droit sur le sol abimé, encore marqué par l'évènement de la veille. Ce n'était surement rien dans l'esprit de son meilleur ami mais pas pour lui. Oh ca non. Et c'était déstabilisant de ne rien contrôler aux réactions disproportionnées de son corps, comme s'il ne maitrisait plus rien de ses gestes. Il s'aida de ses mains pour se relever en douceur, tapotant l'arrière de son pantalon afin d'enlever la poussière fine qui s'y était déposé.

TENUE -  Pourquoi Linh Dan passait il tout son temps à étudier ? Il semblait ne faire que ça et ce n’était pas une mauvaise chose à mes yeux, mais ce « retard » qu’il semblait avoir, pour quels raison l’avait-il ? Il y avait finalement tellement de choses qui m’échappait et qui en même temps me faisait me questionner d’avantage aujourd’hui. Il y a quelques semaines je ne me serait surement pas posé autant de question, mais assis a ses côtés, l’observant faire, sa concentration et sa façon acharné de vouloir comprendre ce qui était marqué, on pourrait pensé qu’il aime étudier et qui s’avance sur les autres, mais est-ce le cas ? Etant dans la même classe que lui je peux affirmer qu’il n’a rien en commun avec ses petits intello passant leur temps dans leurs bouquin, pourtant c’est aussi ce qu’il fait, je suis perplexe devant son implication, j’aimerai en connaitre les raisons, il ne voulait pas de mon aide quand je lui ai proposé le premier soir de notre « première » conversation, mais ça aussi, y a t ‘il une raison derrière son refus catégorique ? Je ne sais pas, je ne sais plus quoi penser de lui. Habituellement j’évite de m’attacher aux gens, je ne veux plus jamais être aussi proche de quelqu’un que je l’ai été de Shaka. Mais Linh Dan m’intrigue, il me trouble et mon regard continu jour après jour de se poser dans sa direction comme si j’étais attiré par sa présence, comme des... aimants.  Secouant la tête, c’est insensé, je dois arrêté de voir ce genre de chose, ce n’est que des supposition du au nombreuses coïncidences entre nos vies, rien de plus.

Je souris doucement devant ses gestes, il fatigue, mais en même temps s’il ne dort pas comment pourrait il prendre le temps de récupérer. Après plusieurs minutes il capte enfin ma présence, mais peut-être que sa réaction est un peu exagéré non ? Suis-je aussi effrayant pour qu’il se casse la gueule en tombant de sa chaise, je me retiens de rire en mettant ma main devant ma bouche, mais c’est trop tentant, il est mignon comme ça.  Je voulais l’aider a se relever, mais j’imagine qu’il ne veut pas de mon aide, je me souviens encore de ses paroles et je préfère ne pas forcer les choses et le voir me fuir ou m’éviter sans en connaitre la raison, peut-être que c’est ce que je devrai faire pour une courte durée le temps de reprendre mes esprits et oublier tout ce qui me tracasse, tout ce qu’il éveille en moi et qui ne devrait pourtant pas refaire surface.  A sa question j’hoche la tête simplement.

« Tu étais ici avant moi et si je voulais être seul je ne serai pas là. » Je l’ai quand même suivi après tout.  Je l’observe de nouveau avant de demander. « Tu semblait concentrer sur ton travail donc je ne voulais pas te déranger, tu as trouver la solution ? » J’avais observé toute la scène donc bon.

« Tu t’es remis d’hier soir ? » J’aborde le sujet pour justement éviter que cela nous déstabilise, si cela semble rien pour moi en apparence il se trombe, intérieurement j’ai une boule d’émotion et d’interrogations sans réponses qui se mélange tel une tornade dans mes entrailles, je ne suis pas aussi impassible que je pourrais en avoir l’air, moi aussi j’ai mes faiblesses.

Tenue - Installé sur le sol, Linh Dan se sentait idiot d'avoir réagit aussi brusquement. La faute à la musique un peu trop forte qui camouflait les pas de son camarade, ainsi qu'à une concentration sans faille sur son cahier d'exercice. Transporté dans son monde, il fut rapidement de retour à la réalité lorsqu'un visage aux traits si familiers, vaint à l'observer. Le tout agrémenter d'un sourire qui s'apparentait à une attaque surprise. Son fessier venait d'accuser le choc peu recommandé, tapotant l'ensemble de son pantalon pour en faire fuir la poussière qui s'y était logée. A croire que le ménage n'était pas réalisée à une fréquence convenable mais il laisserait passé ce point. D'une part, parce qu'il connaissait ses professeurs qui trouveraient le moyen de donner la tâche à leurs élèves adorés et d'autre part, parce qu'il ne voulait pas attirer l'attention sur lui. Dommage, ce matin, les débuts n'étaient pas des plus discrets. "Ok" Ce fut tout ce qu'il trouva à dire sur sa présence alors qu'il voulait exprimer beaucoup plus mais sa retenue naturelle l'empêchait de mener à bien sa démarche juste parce qu'il voulait instaurer une certaine distance entre eux ou tout du moins tenter de la créer.

Sa lèvre inférieure se logea entre ses dents avant que sa main, d'un geste simple, rapide et efficace, ne ferme le manuel qui en contenait un deuxième sur le coup de la surprise. Depuis son arrivée au lycée, le blond réussit à dissimuler son retard scolaire afin de limiter les questions sur son passe temps nocturne. Et là, faute d'une attention aux aguets, ils se retrouvaient face à cette même question qu'il tentait d'éluder. "Je m'en sors pas trop mal. Il me reste quelques lacunes qui seront au programme ce soir." Son corps s'installa de nouveau sur sa chaise. Cependant, plutôt que de faire face à sa table et donc casser toute tentative de discussion avant qu'elle n'ait lieu, le lycéen pivota légèrement sur le côté afin de pouvoir l'observer de temps en temps. Son visage afficha un sourire timide tout en utilisant ses mains libres pour faire glisser le manuel dans son sac en contrebas. Il ne restait plus qu'un simple cahier et un crayon sur le dessus de la table. Le tout donnait des airs un peu vide mais ce n'était pas si mal de discuter dès le matin.

Sauf peut être lorsque la soirée d'hier était remise au goût du jour. "Hier hein ... pas vraiment ... mais ca viendra avec le temps. Et toi ?" Au moins il restait vrai dans sa démarche sans pour autant vendre la mèche sur les raisons qui le tracassaient. Si seulement il avait fait les efforts nécessaires pour éviter cette soirée, il ne se retrouverait pas à discuter du sujet compliqué. Il avait l'impression de marcher sur un fil tendu entre deux building à plus de cent mètres de hauteur. De quoi lui donner le vertige et quelques hauts de coeurs au passage. "C'était une sacrée soirée pfiouu. La prochaine fois, je passerais mon tour." Une révélation qui n'en était surement pas une vu ses réactions en chaine. "Je n'aime juste pas que l'intérêt se pose sur ma vie passée. Je cherche à tourner la page."

TENUE -  Je ne m’attendais pas à ce que Linh Dan réagisse de cette façon en me voyant, mais c’est assez marrant de le voir perdre ses moyens ainsi, il semble arriver à maitriser ses émotions en temps normal, mais je le rassure, il ne me dérange pas du tout et de toute façon ça ne me déplaise pas de discuter avec lui dans cette salle de classe seul à seul, bien que notre soirée se soit arrêté sur une note des plus perplexes je ne suis pas vraiment le mec qui va garder ce genre de détails en rancune, bien au contraire. Je devrai être celui qui tente de comprendre, mais cela aussi n’est pas vraiment dans mes habitudes, peut-être que seulement Linh Dan entre dans cette case en me rendant curieux ? Honnêtement je déteste qu’on tente de rentrer dans ma vie, mes souvenirs, c’est privé et un sujet sensible, je peux donc imaginer sans peine que tous ceux qui m’entourent, le blond y compris ait ses secrets. Pourtant c’est juste ce que j’ai pu entendre de lui, comprendre, ses aveux balancés qui me perturbent, j’ai l’impression d’avoir mis les pieds dans du sable mouvant, m’enfonçant un peu plus a chaque instant et que le seul moyen de m’en sortir et de rendre clair tout ce qui me trouble, sauf que j’ignore comment faire, il n’y a surement rien derrière tout ça, Linh Dan n’a rien à voir avec Shaka, il n’est pas dans les évènements de mon passé, pourtant sa seule présence réduit à néant des dizaines de mes convictions, une soirée et les barrière tenté de s’abaisser alors que je tente de les laisser bien hissées.

« Ok, je ne te proposerai pas mon aide, c’est ton combat n’est-ce pas ? » C’est ce qu’il m’avait fait comprendre lors de notre première véritable conversation, donc je ne compte pas insister sur ce détail et de toute façon je comprends son envie d’évoluer seul, bien que j’en ignore les causes et les raisons, on a encore une fois tous nos petits secrets. Je le regarde alors qu’il jette des regards dans ma direction, un sourire a ses nouvelles paroles, mon expression d’adoucie davantage alors que mes lèvres s’étirent se voulant plus chaleureuses. « Je m’en doutais déjà. J’espère que la prochaine fois tu arriveras à les convaincre de ne pas t’emporter de force, surtout que je ne pourrais surement pas sécher mon boulot à nouveau. » Je suis un homme de responsabilité, c’était surement la première fois que j’annulais mon travail à temps partiel pour suivre la petite bande, mais je devais « veiller » sur le blond, je n’en connais pas les raisons, mais je suis attiré par lui et j’ai envie de simplement le protéger sans vraiment savoir pourquoi ni même de quoi au fond.

« Est-ce que tu vas y arriver ? » J’avais pris une expression plus fermée, plus sérieuse alors que je ne le regardait plus, un peu évasif, je repris simplement. « Tourner une page est plus difficile à faire qu’on ne le pense, mais je te comprends, je n’aime pas non plus qu’on creuse dans mes souvenirs et j’ai eu l’impression de les voir s’étaler tour à tour hier soir, étrange n’est-ce pas ? » Je souris en lui jetant un regard, ancrant mes iris dans les siens. « Parfois même si on pense pouvoir avancer, on nous met des personnes, des situations pour nous rappeler...  Nous empêcher d’oublier justement. » C’est surement ce qu’est Linh Dan pour moi comme un souvenir réel une image passée, une raison de me rappeler, même si je ne le pourrais jamais, il est comme le reflet de cette existence que j’aurais voulu changer, modifier et de cet être que je voulais sauver, plus que quiconque, le seul dont j’avais besoin à mes côtés.

Tenue - Il devrait prendre ses distance, ne plus l'approcher au risque de dire une phrase de trop ou de se comporter bizarrement comme aujourd'hui par exemple ou la veille à la fin de la soirée. Une sorte de bataille interne compliquait sa vie de façon perpétuel, regrettant par moment d'avoir posé un pieds sur le sol nippon et parfois il remerciait ses anges gardiens de l'avoir guidé dans la bonne direction pour retrouver la seule attache encore en vie de son "lui" passé. "Oui c'est bien mon combat ... un de ceux que je dois mener seul." Son visage reprit des couleur et un aspect plus accessible car il se sentit compris sans avoir besoin de rajouter un alignement d'argument en sa faveur pour faire valoir son point de vue; Il n'avait pas à se battre pour défendre cette partie de sa vie qu'il considérait comme un échec, une cicatrice encore fraiche de son absence de la civilisation. Et plutôt que demander de l'aide sur des sujets, vu et revu depuis au moins trois ans par ses camarades, il préférait en apprendre un peu plus sur la vie "normale" d'adolescents présents au Japon, pour diminuer la taille du fossé qui le séparait de sa génération.

Le soulagement se lisait sur son visage alors même qu'il exprimait son refus potentielle lors de la prochaine "sortie" proposée par ses semblables. La précédente restait encore bien trop fraiche dans son esprit. D'ailleurs, il appréhendait déjà les réactions des personnes encore lucides, présentes lors de son accès de colère sortit de nul part. Au final, un sourire s'étira au creux de ses lèvres lui donnant un aspect beaucoup plus relaxé qu'auparavant. "Merci. Si tu n'avais pas été là, je crois que cette soirée aurait été encore plus difficiles à passer. Je saurais me rattraper ok ?" Dans son esprit étriqué, toute action avait un prix si bien qu'il lui était impossible de simplement remercier un geste héroïque, terni par une finalité étrange mais bouleversante. Leur contact fut si rapide que ce geste se trouvait surement invisible auprès des deuxièmes années mais pour lui c'était plus que ça. La peur de se sentir proche d'une autre personne pour ensuite voir ce pont se couper de façon brutale, demeurait ancré dans son être. Il ne voulait plus s'accorder à un autre instrument sur une même mélodie, avoir l'impression de ne pas être un tout s'il ne se trouvait pas aux côtés de sa moitié. De pouvoir rire sans se contenir aux blagues de son meilleur ami alors qu'ils étaient en cours. Tous ces souvenirs encore trop frais dans sa mémoire venait perturber chaque jour sa résolution de n'être qu'un lycéen souriant et sociable en apparence pour se fondre dans la masse.

Aussi, lorsque la question fatidique tomba, son visage l'observa avec beaucoup plus d'attention. Son coeur se resserra face à ses aveu se sentant automatiquement coupable de s'être glissé dans les fissures du passé pour comprendre ce qu'il n'avait pas obtenu auparavant comme réponse. Il lui manquait encore de nombreuses pièces du puzzle mais plus il creuserait et plus il risquait d'engendrer des dégâts. "Je ne peux pas te contredire. C'est une décision difficile. Est ce que je parviendrais à tourner la page ? Non pas dans cette ville." Son flux de paroles se stoppa un instant, le temps pour lui de l'observer sous toutes les coutures. "Mais est ce que tu voudrais réellement oublié ?" Il se posait la même question encore et encore. Sa conscience lui réclamait de rester qu'avec un peu de patience, sa roue de la malchance finirait par tournée et qu'enfin sa vie serait plus aisée qu'elle ne l'était à l'heure actuelle."Car je n'y arrive pas. Je ne peux pas. Je ne sais pas. Une personne compte vraiment beaucoup pour moi mais si elle me voyait là à cet instant précis, je suis à peu près sûr qu'elle serait déçu du résultat." Un "elle" choisit pour être accordé à "une personne", pour ainsi noyer le poissons. Il ne voulait pas plus attirer l'attention mais il se sentait retenu par des chaines invisibles qui souhaitait le voir auprès d'Ewon Bak pour le soutenir dans sa détresse alors même qu'il se savait à l'origine de son problème. "Je ne peux pas t'aider à oublier mais je peux être là pour écouter." Car au fond de lui, le petit Linh Dan voulait rester vivant dans les yeux d'un autre, sans ses yeux à lui.

TENUE -  On a tous des combats, tous des guerres qu’on doit mener en solitaire, pour ma part je vis dans un monde où plus de cinquante pourcents est restés dans le noir, un nuage flou, une partie de moi invisible, un jardin secret que personne ne peut atteindre ou découvrir sans que je n’en donne la clef. Je n’oublie jamais, je n’en parle jamais, je reste comme cet enfant traumatisé par la disparition de sa moitié, voyant son allié se faire kidnapper, dans l’incapacité de bouger, d’agir ou de l’arrêter et le rattraper. Je suis au centre de mon existence avec l’ombre et la lumière, le bonheur et la colère, la tristesse et le manque. Je ne peux que continuer d’aborder chaque pas, chaque jour quotidiennement sans me retourner parce que même si je le faisais mon passé ne pourrait être vu au coin de la rue, je suis prisonnier dans mes rêves, mes souvenirs et c’est ce qui me permet de me lever tous les jours pour aborder à fond chaque instant, vivre sans regret, combler ce trou noir que je ne peux remplir, ce sont mes secrets, ceux qui fond parti de moi et je ne veux pas qu’on vienne empiéter sur eux alors je comprends Linh Dan et quoiqu’il puisse affronter je n’insisterai pas, il a surement ses raisons pour agir de cette façon.

« J’ai agi ainsi parce que je le voulais, tu ne m’as rien demandé donc tu n’as aucune raison de te rattraper. Tu ne me dois rien, j’ai passé une bonne soirée malgré tout donc disons qu’on en a profité. » Bien que difficile par moments cela reste un instant de partage et a notre âge on en a besoin de temps en temps pour s’évader de notre routine, rire, s’amuser, parler, se rassembler c’est aussi des choses qui rentrent dans le quotidien d’un lycéen, même si on a tous une manière différente d’aborder notre temps libre.

Tourner la page n’est pas une chose mince à faire, je le sais très bien, pas que j’ai essayé... Parce que je ne veux pas oublier, pas abandonner Shaka, où qu’il soit pour moi sa présence m’est vitale, même si ce n’est qu’en rêve ou dans ma mémoire. « Pourquoi es-tu venu ici alors ? Tu vivais en Corée avant n’est-ce pas ? Là-bas non plus tu ne pouvais pas y parvenir ? » Je suis curieux avec ses informations, mais d’un côté s’il veut avancer et que ce lieu l'en empêche, n’est-ce pas un signe qu’il ne doit pas oublier au final ? « Je ne veux pas. » Ma réponse était clair, net et précise, je n’ai pas hésité une seconde, ma gorge se noue sous cette phrase qui est prenante derrière la simplicité des mots. Mais j’arrive à sourire pour cacher mon désarroi à parler ainsi de ce que je veux garder dissimuler, bien que les détails ne soient pas exposés. « Je ressens ce que tu ressens, je me demande ce qu’il penserait de moi s’il me voyait, mais la douleur du manque et bien plus dur à supporter que la peur de le décevoir. » Je me suis laissé emporter et secoue doucement la tête, je m’adosse à mon siège en regardant Linh Dan. « Je ne peux pas en parler, même si j’ai l’impression qu’il me serait facile de me confier à toi pour une raison que j’ignore, tu es trop... » Je souris avant de souffler. « Similaire ? Je ne sais pas comment l’expliquer, mais être avec toi me fait du bien autant que cela me brusque et me perturbe. » Me blesse aussi, mais je ne peux pas vraiment lui dire que tous ses souvenirs sont le reflet des miens ou l’accuser de plagiat, on ne peut pas vraiment faire ça sur la mémoire des gens n’est-ce pas ?

« Cette personne, si tu pouvais choisir entre la revoir ou l’oublier totalement, qu’est-ce que tu choisirais finalement ? » C’est peut-être idiot, mais si un moyen nous était donné de pouvoir modeler notre esprit et effacer des bribes de notre passé, choisirait-il de le faire ou non ?

« On dirait qu’on se ressemble pas mal, c’est encore plus... frustrant et troublant, tu es sûre de ne pas être un ange envoyé sur terre ? » Plaisantais-je en riant un peu pour détendre l'atmosphère assez pesante sous cette conversation qui m'échappe, mais c’était de plus en plus le bordel dans ma tête, bien que je continue inconsciemment de me voiler totalement la face sur la possibilité de sa véritable identité.

Tenue -Le concept du donnant donnant lui échappait encore sous cette forme. Qu'avait il pu lui apporter durant la soirée ? Cette question restait en suspend entre ses lèvres, incapable de la lui poser. Au fond, il ne voyait pas l'intérêt de réouvrir un sujet considéré comme clos. Son visage se contenta de le suivre et ses oreilles, de l'écouter avec la plus grande attention. Le geste s'arrêta un instant, comme bloqué par un mur invisible lorsque sa remarque passait pour un sujet glissant dont la suite ne dépendait que du blond. "J'ai habité longtemps en Corée mais d'autres circonstances m'ont obligé à déménagé. Ca n'est pas plus mal. Je voulais un nouveau départ, là où personne ne me connaissait et ca me va très bien comme ça." Les mots dépassèrent son instinct de protection qui régissait chacune de ses paroles afin de s'assurer qu'aucune information trop importante ne se libère sous le poids de sa conscience. Et pourtant, l'envie ne manquait pas de lui dire son nom. Une sonorité qui lui semblerait étrangère s'il venait à l'entendre. Les années ont rapidement passées et avec le temps, cette appellation qui fut dites plusieurs fois par jours, s'oublia au même titre que sa personnalité et le visage de ses proches. Pour survivre aussi longtemps, il lui fallut compter sur ses propres instinct de survie. Encore aujourd'hui il se demandait s'il était encore humain ou bien animale à l'apparence humaine.

Le silence finit par se rompre par l'une de ses questions dont la réponse fut plus que clair. De quoi faire apparaitre un sourire plus large sur son visage heureux de savoir qu'il se refusait de l'oublier. Seulement, l'information ne collait pas avec son abandon. S'il ne voulait pas l'oublier alors pourquoi l'avoir laissé seul en Corée, lui partit pour le Japon avec ses parents ? Une interrogation rapidement effacée par le son d'une voix familière. Il déglutit fortement, sentant sa gorge se serrer d'avantage sans savoir comment formuler un ensemble cohérent de mot sans sembler déplacer ou faux. Sa demande allait à l'encontre de ses propres convictions, bien décidé à garder le silence et pourtant, son iceberg commençait à fondre en profondeur. Alors, plutôt que des mots qui seraient sans doute vide de sens, il choisit rester assis sans rien dire, se contentant d'écouter et de le regarder lorsqu'il sentait un besoin de contact visuel. "Les plus grands fardeaux finissent toujours par céder un moment ou à un autre. La seul liberté qui nous reste c'est de décider quand et avec qui nous partageront ces secrets pour nous en libérer." Son visage conservait ses couleurs et ce sourire en demi ton alors qu'intérieurement il se sentait secoué par ses propos comme si la vérité qu'il tentait de cacher aussi bien que possible, revenait comme un effet boomerang. Il se sentait changé depuis des années alors qu'Ewon Bak lui donnait l'impression d'être rester le même. Combien de fois avait il rêver d'entendre ces paroles ? "C'est que je suis utile !" Il finit par en rire pour tenter de limiter cette ambiance lourde.

Ses yeux se tournèrent vers le tableau puis vers Ewon. "J'aurais surement choisi la deuxième solution par manque de moyen pour retrouver cette personne mais par pur hasard, je l'ai rencontré à nouveau sans être reconnu." Il serra le poing qu'il vint taper doucement contre l'épaule de son voisin pour le bouger, le taquiner, lui changer les idées. "Ah ah. Non je t'assure à choisir je serais plutôt un démon venu pour tourmenter les autres. Regarde ca marche déjà" Il sourit à cette petite boutade mais au fond il n'en pensait pas moins. Son existence n'avait plus vraiment grand intérêt si ce n'était grandir, obtenir plus de problèmes avec son passage au rang d'adulte et finalement solitude qui le croquera bien vite pour ne laisser plus qu'un souvenir. "Et tes parents ils en pensent quoi ?" Une question sans doute osée dans un contexte qui était devenu un peu plus joyeux. "Les miens, je veux dire, mes parents biologiques, n'ont jamais su...." Un micro sourire fit son apparition, aussi rapide que l'éclair avant que son visage ne change de couleur "Mais j'ai des parents adoptifs qui me soutiennent. Je me demandes comment ils s'y sont pris pour me choisir." Pour la toute première fois, Linh Dan tentait de faire un pas en avant, parler d'une chose précieuse, d'une partie de sa vie dont personne n'était au courant.  petit Linh Dan voulait rester vivant dans les yeux d'un autre, sans ses yeux à lui.

TENUE -  Je lui souris simplement en écoutant son explication, je me doute bien qu’il vivait en Corée, tout comme je l’ai fait, bien entendu j’ai dû la quitter il y plusieurs années et forcément les seules choses qui me forcent à rester attacher à ce pays c’est mes souvenirs et toutes mes pensées pour Shaka. Notre quartier aura été le meilleur endroit où j’ai mis les pieds, ce parc voisin où on s’amusait, tout là-bas n’a été que bonheur et joie depuis que je l’ai rencontré, mais c’est aussi dans ce lieu que je l’ai perdu à jamais et il ne me reste que ma mémoire pour en garder une trace intacte. « Je vois. » Dis-je naturellement, au fond j’ai été forcé de déménager alors que je voulais y rester, mais maintenant je ne regrette pas d’être venue vivre ici, peux importe ou je me trouve de toute façon ce n’est pas comme si je pouvais oublier mon meilleur ami, je ne l’ai pas pu en huit ans, je n’y arriverai clairement pas maintenant et c’est parfait ainsi. Cela n’empêche que je n’arrête pas de me questionner, je n’ai toujours aucune réponse à mes interrogations, en aurais-je seulement un jour ? Ça je commence à en douter sincèrement.

Les plus grands fardeaux finissent toujours par céder hein ? Mais où est mon fardeau au fond, bien entendu que ma culpabilité en est un, mais le manque est davantage pesant, bien plus prenant, j’ai vécu toutes ses années dans le silence, la peine, la douleur, tentant d’avancer pour deux, avancer sans m’arrêter et ne pas déprimer en me disant que Shaka n’aurait pas aimé que je « gâche » des années de ma vie à pleurer. Bien que mes larmes aient glissé au début, je suis devenu assez fort pour garder mes sanglots enfermés dans mon cœur, est-ce qu’un jour je devrai en parler ? Est-ce que ça me ferait du bien de communiquer mon histoire et celle de Shaka au fond ? Qu’est-ce que j’y gagnerai à la raconter, ça ne me le ramènera pas... quoi que je fasse il ne va pas se présenter devant moi avec son regard brillant et son joli sourire en me disant « je suis revenu ! » haha, si seulement...

Pourquoi sa phrase me fait manquer un battement, chacun de ses mots, chaque situation m’induit en erreur et me trouble davantage, je fixe Linh Dan intensément devant ses propos, le regardant sans détourner les yeux... « Pourquoi tu ne lui dis pas qui tu es alors ? » On pourrait croire que cela pourrait être adressé à moi, après vous comprenez pourquoi je suis perdu en l’écoutant, en le regardant, c’est complètement fou. Même si je reste totalement détacher de cette situation, borné je n’imagine toujours pas une telle vérité, ce serait trop facile si je pouvais être assez lucide pour lire entre les lignes, mais non...

« Mes parents ? Je n’en sais rien. Depuis qu’ils m’ont forcé à quitter la Corée ils m’ont prié d’oublier, de tourner la page, ils ont même pris mes photos souvenirs, mais ce n’est pas comme si j’en étais capable. »  Comprenait-il seulement de quoi je pouvais parler ? Au fond à mes yeux Linh Dan n’était au courant de rien de cette histoire... Il ne pouvait surement que supposé devant les faits et les informations que je voulais bien lui donner. Je finis par répondre de manière naturelle et spontanée alors que ce sujet n’est pas vraiment facile à aborder, mais les questions de Linh Dan sont entièrement dans le sujet... « Ils n’ont jamais su quoi ? » Je suis dangereux aussi à le questionner, mais ça me paraît tout aussi naturel de demander. « Tu es mignon » Encore un point commun. Je tends ma main pour effleurer ses cheveux. « J’ai connu quelqu’un qui avait d'aussi beaux cheveux que les tiens~ » un doux sourire et je repris. « Ce n’est pas une question que tu devrais te poser, le principal c’est qu’ils l’ont fait pas vrais ? Il y a parfois des choses qu’on ne peut pas expliquer, malheureusement j’en sais quelque chose... »

Tenue - La discussion devenait de plus en plus étrange, croisant les mots comme des révélations à demi ouvertes. A chaque fois qu'il laissait échapper une parole, le blond la regrettait aussitôt derrière de peur de vendre son identité et plus son rapprochement avec Ewon Bak serait important, plus dangereuse sera la situation. Le blond continuait toutefois dans sa lancée, sentant un regard persistant se poser sur lui. Le tout agrémenté d'une question qui le prenait de court et qui pourtant semblait suivre la logique de la conversation. Sa lèvres inférieure fut prise entre ses dents, cherchant un moyen d'y répondre à sa façon, sans s'enfoncer d'avantage. "Je peux tout supporter, sauf sa culpabilité. Je ne veux pas la voir apparaitre dans ses yeux à chaque fois que cette personne me regardera." La culpabilité jouait les poignards aiguisés. A peine visible et pourtant si tranchante, elle ne laissait pas la place à la joie, au souvenir joyeux. Au fond, les souvenirs les plus marquants restaient les plus traumatisants. L'impact sur la psychologie était tel, que la trace semblait indélébile; Il était sur de se souvenir à jamais du jour de son enlèvement tout comme il était certain que son meilleur ami se souviendrait, malheureusement de se souvenir également. La vie n'était pas juste, les épreuves inégales. Et au final, ils souffraient tous les deux d'avoir perdu une part de leur vie sans pouvoir la récupérer.

Être installer à lui parler dans cette salle de classe lui laissait une chance de plus de réapprendre à le connaître mais il s'évertuait à garder les informations importantes sous silences, le laissant encore dans un flou artistique qui ressemblait à une brume épaisse. Ce brouillard commençait à se dissiper car la langue du brun se déliait tandis que sa propre mâchoire se resserrait. Comment des parents pouvaient ils prendre la décision de tourner la page, tirer un trait sur une histoire, supprimer les traces d'une amitié en lui volant des photos si précieuses. S'il les avaient en face de lui à cet instant précis, il aurait surement vu rouge. D'ailleurs sa respiration semblait plus lourde marquant la colère qui le prenait mais qu'il tentait habilement de dissimuler. "Tes parents tentaient surement de te protéger. Mais si tu n'as pas envie d'oublier, tu devrais récupérer ce qui est à toi, tes souvenirs." Le lycéen tentait de relativiser, voir les choses d'un peu plus haut. Si était parent et voyait son fils mal en point, incapable d'avancer sans son ami qui pourtant restait introuvable pendant plus jours, semaines, mois, années, au final, il aurait surement fait la même chose pour briser le lien qui le retenait à un souvenir douloureux. Ce qu'il était pour son ami. Son visage s'abaissa un peu plus prêt à poser son menton sur la table en bois devant lui, rejoint par ses bras croisé sur le dessus du mobilier afin de lui offrir un oreiller confortable. "Il n'ont jamais su que j'étais en v..." Le dernier mot fut coupé avant la fin incapable de le dire. "Laisse tombé de toute façon le passé ne peut pas être changé."

C'était surement la première fois qu'il parlait de ses parents adoptifs. L'une de ses mains s'échappa de sa position pour balayer l'air en guise de "non". "Tu dis n'importe quoi." Mignon lui ? Non ce n'était clairement pas le cas. "Ah ah merci. J'aime bien mes cheveux blond. " Surtout que sa tignasse dissimulait facilement son visage."Et c'est qui cette personne ?" Il embrayait sur une question dont il connaissait la réponse ou en tout cas lui semblait la connaitre. Ah moins qu'il ne parlait de l'une de ses nombreuses conquêtes d'un soir chose, qu'il avait encore du mal à comprendre. "Oui ... tout ne peut pas s'expliquer. Mais tu devrais prendre soin de toi en priorité plutôt que de prendre soin des autres." Son visage s'était allongé sur ses avant bras recroquevillé, tourné dans la direction de son camarade. "Tu sais que tu es quelqu'un de bien Ewon Bak ? Et celui qui dira le contraire goutera à mes poings."Ce fut dit en toute connaissance de cause, sourire aux lèvres,vu qu'il aimait la personne qu'il était. Ce lycéen amusant, sociable, facile à vivre, prêt à rendre service sans demander quoique ce soit en retour. Une espèce rare en voie de disparition. "Un jour, tu me feras peut être suffisamment confiance pour me parler."

TENUE -  La culpabilité. Je n’en connaissais que trop bien le sens, bien que mes souvenirs étaient élargis, que je me souvenais encore des bons moments, de notre complicité et de toutes les choses qu’on a quotidiennement partagées, combien de fois me suis-je dis que j’aurais pu empêcher cet évènement marquant d’arriver. J’aurai tant voulu être kidnappé a sa place, je sais que c’est quelque chose qu’on ne peut pas souhaiter, mais j’aimais assez Shaka pour me sacrifier si ça lui permettait de vivre, de sourire et de grandir en sécurité. Plus j’en parle et plus il me manque, c’est un sentiment qui me bouffe de l’intérieur alors que je tente simplement de l’emprisonner dans une cage dorée, de le garder enfermer, là où personne ne pourrait l’atteindre, là où il pouvait être protégé par mes soins, ce sentiment que je ne laisserai personne m’enlever. Je peux comprendre ce que ressens Linh Dan, si Shaka revenait, s'il se trouvait tout à coup face à moi, comment réagirais-je ? Comment le regarderais-je ? Je l’ignore, même si j’y crois encore une part de moi tait cet espoir pour me permettre d’avancer en étant simplement réaliste... Les chances que mon meilleur ami soit en vie soit libre sont minces, mais je veux encore penser qu’il est heureux où qu’il soit, parce que c’est la seule chose qui me permet de continuer à sourire malgré son absence parfois pesante, surtout dans les moments d’anniversaire ou quand j’en parle, me retrouvent seul, il y a tant de moment où je voudrais qu’il soit à mes côtés pour profiter avec moi de ce que la vie peu nous offrir, mais je ne suis pas un magicien et la lampe d’Aladdin n’existe pas pour que je puisse souhaiter revenir dans le passé, à mon plus grand regret.

Mes parents m’ont enlevé les choses auxquelles je me rattachais, j’en ai voulu à mon père à ne pas l’avoir retrouvé, de ne pas avoir aidé les policiers, de n’avoir pas mis le monde à l’envers, mais j’ai compris avec les années qu’il ne le pouvait pas. Pour les photos j’aurais voulu les garder, les avoir sur moi, pouvoir me souvenir de son visage d’enfant, de nos sourires si éclatants, de la période de ma vie la plus heureux et joyeuse, mes plus belles années. « Je sais... Mais, mes souvenirs sont toujours là. » La main sur le cœur, je souris en le regardant. « Je n’ai besoin de rien pour m’en rappeler. » Même si je voudrais enlever ce « flou » qui ne cesse de se mettre sur le visage de Shaka comme pour m’empêcher de m’en rappeler, c’est étrange.

« Que tu étais en ? » Je me suis arrêté un instant, n’étant pas con, j’avais bien compris que c’était un truc important, mais Linh Dan me troublait, il me rendrait tout aussi étrange, cette ressemblance, ses anecdotes, ses souvenirs, tout ce qui semble se relier entre son histoire et la mienne, c’est fou et je ne suis pas assez naïf et idiot pour ne pas le remarquer, alors oui ça me trouble, j’ai l’impression d’être quelquefois perdu dans un océan d’incompréhension, mais je ne me pose pas plus de question en me disant que ce serait possible que nos histoires se ressemble, qu’on n'est pas « unique » je me voile simplement la face parce que je ne peux pas « voir » la vérité en face. « Tu as raison, malheureusement il n’y a aucun moyen de faire marche arrière. » Un sourire mélancolique, je pose mon coude sur la table pour appuyer à nouveau ma tête contre la paume de ma main, tourné avec le blond touchant ses cheveux avec ma main libre, si je me souviens d’une chose c’est bien la tignasse magnifique qu’il avait quand il était petit, une expression incontrôlée affichant surement mes sentiments nostalgiques trônaient sur mon visage alors que je les lâche.

« La personne qui compte le plus pour moi. » Peu importe le temps, passé, présent, futur, Shaka aura toujours cette place que personne ne pourra prendre, ça par contre, j’en ai bien conscience. « Qu’est-ce qui te fait croire que je ne prends pas soin de moi ? » Demandais-je en croisant mes bras sur le bureau, le regardant intrigué. Je ris, amusé par les paroles du blond. « Je ne pensais pas que tu dirais une chose pareil, c’est adorable, mon meilleur ami était aussi du genre à me défendre. » Je ris un peu, bien que j’aie ma propre conception du mot « défendre » sans Shaka j’aurai été perdu, être mon pilier était pour moi comme être entouré d’un mur infranchissable, il représentait mon monde d’enfants. Mais j’ai trop parlé et je repris en tentant d’être le plus naturel possible. « Enfin mon meilleur ami est loin maintenant, je te l’avais déjà dit... Mais tu me l’as rappelé un instant. » En fait, je crois qu’il me le rappelle tout le temps, depuis le début, depuis ce soir-là je revis dans le passé.

« Tu en sais surement déjà assez. » Je ne braque pas, mais j’ai l’impression de simplement « trop » me confier avec lui, alors que ce n’était pas mon intention. Linh Dan doit vraiment être un ange, non vraiment, c’est frustrant.

Tenue - Les souvenirs, ces seules traces visuelles encore vivantes dans un esprit et qui pourtant, s'effaçaient au fur et à mesure que le temps s'écoulait. A croire qu'il lui était interdit de choisir ceux qu'ils souhaitaient conservés dans les moindres détails; Seulement quelques informations vives et intemporelles le ramenaient dans le passé, pour quelques minutes tout au plus. Son coeur n''en accepterait pas plus et son esprit n'appréciait pas l'idée d'une fin heureuse. Elle était réservée aux contes pour enfant ou aux rêveurs. Peu importait leur nom au fond. "Ah ? Tu dois avoir une bonne mémoire dans ce cas." Un sourire se glissa sur ses lèvres mais il n'y croyait pas un instant. Même en prenant quelques années dans la vue et avec une mèche blonde, il n'avait pas beaucoup changé alors s'il se souvenait si bien de son apparence, ils ne seraient pas en train de discuter tranquillement dans cette salle de classe encore vide à cette heure matinale, tout en jouant aux devinettes.

"Je te raconterais ca peut être un jour si tu es suffisamment chanceux." Le blond préféra prendre sa demande sur le ton de l'humour plutôt que de répondre à sa question. Il ne voulait pas le dire. Oui, personne ne le croyait encore en vie. Ses parents biologiques étaient morts sans jamais l'avoir revu, lui qui pensait retrouver les êtres chers à son cœur à son retour à la civilisation. Au lieu de cela, il fut purement et simplement rejeté à la porte de son ancienne maison, appris que son meilleur ami était partit depuis des années, qu'il devait être placé dans un foyer pour enfant orphelin le temps d'être accueilli par une famille ou bien adopté dans le meilleur des cas. De quoi le confronter une nouvelle fois à la solitude et à l'absence de tout visage familier qui pourrait l'aider à se rappeler l'enfant qu'il avait pu être autrefois. "Il n'est pas possible de changer ce qu'il s'est passé mais il existe toujours un moyen de se faire pardonner." Linh Dan l'observait, il avait l'impression d'un manque à l'intérieur, une sorte de chemin obscur qui cherchait sa lumière désespérément. Il voulait se montrer plus proche, plus ouvert mais il se sentait également retenu dans sa démarche de peur de devenir un peu trop amical, de redonner vie à certains souvenirs qui le conduirait à la vérité. Au final, il se contenta de poser son regard sur lui, le laissant triturer sa chevelure. Si ca lui apportait un minimum de réconfort alors, il le laissait prendre cette initiative.

"Tu me poses encore la question ? Ralentir pour te faire piquer à ma place par des abeilles énervées, sauter dans un trou le premier pour amortir ma chute, m'aider à monter à l'aide d'une branche ce qui ne devait pas être facile pour toi. Boire trop un certain jour de l'année tout en criant un nom à répétition Sha ... ka ... avoir une collection importante de "relation d'un soir" qui ferait pâlir de jalousie un certain hum ... comment il s'appelait déjà.... Don Jua ou Don Juan." Ah le manque de culture se faisait parfois ressentir dans des moments atypiques. "Oh mais je ne te juge pas. J'essaie juste de comprendre pourquoi tu es prêt à risquer ta vie pour un inconnu, lui porter secours ou mettre ta santé en jeu pour quelqu'un qui se trouve très loin." Son visage s'était relevé au même titre que ses deux mains qui se positionnaient paumes face à lui, mimant une arrestation pour être sur de place un peu d'auto dérision même si le fait de l'entendre parler de son ancien "lui" et l'associer à sa blonditude, commençait à le placer sur des charbons ardents. "Ah ah" Il plaça son bras autour de ses épaules, rapprochant son corps du sien, en tirant un peu sur lui avant d'ébouriffer ses cheveux d'une autre mains. "Vengeance." Glissa t'il l'air malfaisant tout en s'affairant à ruiner son image de beau gosse bien coiffé. Au fond, il voulait redevenir cette épaule sur laquelle il pouvait se reposer, juste cette personne qui briserait cette image de lycéen cool et proche de tout le monde parce que ce n'était pas tout à fait l'image qu'il conservait de son meilleur ami. Et plutôt que de prendre soin des autres, il devait avant tout pense à lui. S'il n'arrivait pas à changer sur ce point, il trouverait le moyen d'être son ange gardien. "Je n'en sais pas encore assez pour enlever le poids qui semble peser sur tes grandes épaules. En parler ne le fera pas disparaitre."

TENUE -  Bonne mémoire hein ? Ce sont des souvenirs que je ne peux effacer, que je ne veux pas perdre, on était des enfants et j’ai bien grandi depuis cette époque, cependant... Je n’oublie pas, je ne peux simplement pas, oublier serait comme tirer un trait sur mon passé, sur Shaka, mais c’est impossible et je ne pense pas en être un jour capable de toute façon. Décidément on avait beaucoup de secret et une vie pourtant qui me semblait étroitement liée, seulement je n’en avais pas conscience et surtout je n’avais pas idée à quel point elle l’était, si pour moi il y avait des similitudes et si j’avais l’impression au fond que Linh Dan pouvait me comprendre, d’un autre côté j’ignorais tout de la vérité, de son identité, si seulement je pouvais le regarder et le reconnaitre, croire qu’il était bien là, mais ça c’était à des années-lumière de pouvoir arriver... Borné, « mon » Shaka ne pouvait être ici et mes yeux étaient simplement fermés à toute évidence qui pouvait se manifester devant moi. J’avais envie de le questionner sur son histoire, mais je ne le ferai pas. Pas maintenant en tout cas, vouloir en savoir plus sur lui, c’est lui donner l’occasion d’en savoir plus sur moi et au fond j’ai déjà l’impression d’avoir trop parler, c’est difficile de se confier sur des « évènements » qui nous ont marqués, alors pourquoi y avait-il cette « facilité » avec le blond ? Je l’ignorais totalement, mais c’était toujours aussi troublant.

« Tu as surement raison. » Même si je ne sais pas vraiment comment je pourrais lui demander pardon sans qu’il soit à mes côtés, s’il était là j’aurais voulu lui dire tant de chose, « désolé », « merci », « tu m’as tellement manqué »... Ce genre de chose qui surgit quand je renvoie mes pensées vers lui. Il me dit que je ne prends pas soin de moi et le questionner sur le sujet me vaut un bon petit résumer sur ma personne, cependant l’entendre prononcer « Shaka » m’est douloureux. Mais je souris au reste en levant la main. « Ça va, ça va, j’ai compris ! » Riant un peu, je le regarde en reprenant. « Tu ne m’avais rien demandé pour Shaka. » J’ai un air plutôt sérieux, mais pas froid, juste un peu perdu. « Je ne réfléchis pas vraiment, je ne veux simplement plus voir quelqu’un disparaitre devant moi, mais je suppose que c’est dans mes gênes ! J’ai dû être un super-héros dans une vie antérieure~ » si la première partie de ma phrase était sérieuse, la seconde se fit beaucoup plus moqueuse, je devais arrêter de m’ouvrir autant, vraiment.

Soudainement je pus sentir son bras autour de moi, il me tire contre lui pour ébouriffer mes cheveux brun, d’abord surpris par une telle initiative du blond, je me mis à rire, ça faisait longtemps que personne n’avait osé une chose pareil a mon égard. « Yah ! » Rouspétais-je sans grande conviction, avant d’élargir mon sourire, me redressant pour jouer avec ses cheveux de nouveau tout en gardant cette distance rapprochée, peut-être trop pour le coup.?

« As-tu seulement conscience de ce poids ? Tu es surement le seul à l’avoir vu, tu les étranges... Song Linh Dan. » Le fixant dans les yeux, je mets de la distance entre nous avant qu’un malaise puisse naitre dans le blond, puis je demande. « Au fait, tu m’as dit que tu avais été adopté, c’était quoi ton nom avant ? » Je ne pensais pas que cette question pouvait être difficile pour Linh Dan, n’ayant toujours pas conscience de celui qu’il est réellement.

Tenue - Au moins son petit spitch venait de gagner un point dans la conversation. Plutôt que de se cacher derrière des apparences chevaleresque, il trouvait son comportement dangereux, un peu trop d'ailleurs. Surtout quelques dernières semaines furent chargées en évènements douteux et en situations compliquées. A ce rythme, il ne lui faudrait pas beaucoup d'année avant d'obtenir une médaille au dépend de sa propre santé. Et il redoutait ce moment fatidique où Ewon Bak s'engagerait dans l'armée pour faire de son rêve une réalité. S'il s'agissait toujours de son plan de carrière future. En attendant, seuls dans cette salle de classe qui ne manquerait pas de se remplir sous une vingtaine de minutes, le blond profitait de l'instant présent pour évoquer son propre prénom, celui qu'il avait prononçait une seule fois. "Tu n'avais pas l'air de vouloir partager son nom alors j'ai juste ... attendu que tu te décides à aborder le sujet. Et puis je ne connais que son nom sauf si tu veux m'en dire plus ?" Ce n'était pas très fairplay puisqu'il n'avait pas vraiment évoqué son nom ni même son identité mais puisque son passé lui était connu, le lycéen s'appuyait sur ses propres expériences pour avancer dans la conversation. Un sourire étira ses lèvres amusé par sa caricature. "Je te préviens si tu portes une combinaison fluo, je ne te connais plus." Visiblement amusé par cette pause légère, Linh Dan en profita pour s'attaquer à sa tignasse brune, la décoiffant sans ménagement histoire de pouvoir ajouter à quelques paroles, le mouvement adéquates afin de lever la discussion difficile qui eut lieu juste avant. La vie s'avérait bien trop courte et imprévisible pour ne pas profiter de ces instants magiques qui lui redonnaient le sourire, un vrai sourire.

"Etrange ? Moi ? non jamais ?" Il venait tout juste de d'éviter la première partie de sa question parce qu'il ne voulait pas emprunter ce chemin. S'il ne connaissait pas l'ampleur des dégâts que sa disparition laissait sur lui, l'histoire par contre, restait ancrée dans ses veines. La proximité de son camarade de classe ne semblait pas le gêner même si une sorte de soulagement se lit sur son visage au moment où l'espace s'agrandit entre eux. Une sensation de courte durée puisque la suite le touchait fortement. "Un autre. Tu sais ca n'a pas d'importance, au final, les coréens n'ont pas un nombre très important de noms. Celui ci ou un autre." Ou peut être pas finalement. Le blond se sentit blessé par ses propres paroles. Bien sur que son nom de naissance possédait une grande importance et avec lui, des parents aimant et joyeux, qu'il appréciait autrefois. Changer de nom lui permettait de tourner la page sur le papier, d'avoir une nouvelle identité de se sentir l'âme d'une autre personne parce que c'était plus facile que d'affronter la vérité en face. "Song comme la musique en anglais, je trouve que ca a beaucoup de classe." Ses yeux s'étaient décrocher de son regard un instant avant de les repositionner sur lui l'air de rien. "Tu aimes bien mes cheveux on dirait mais pas question que je coupe une de mes mèches blondes." Il faisait allusion à cette invasion capillaire de tout à l'heure qui avait eu lieu deux fois au total. De quoi l'amuser d'ailleurs. "Je t'aime bien. Tu n'es pas comme les autres." Il venait de placer son pouce et son index de chaque côté de l'arrière de son coup pour le malmener un peu mais au final, il pensait chacune des paroles qu'il venait tout juste de lui avouer.

TENUE -  Il a raison, parler de Shaka m’est difficile je ne suis pas assez « ouvert » pour pouvoir l’évoquer et raconter notre histoire, c’est barricadé, protéger depuis tellement d’année que c’est compliquer de seulement évoquer son nom. J’aimerais pouvoir le rendre « vivant » dans les esprits de mes camarades, faire que plus de personnes sachent la personne qu’il était, mais qu’est-ce que cela changerait ? Ça ne le ramènerait pas près de moi en un claquement de doigt et personne ne pourrait comprendre de toute façon, ce serait un étranger sans aucun impact ou importance à leurs yeux, je ne veux pas que Shaka soit réduit à ça, je préfère garder ce qu’il était intact dans mon cœur et dans ma tête, même si j’en ai « oublié » son visage, ça ne change pas ce que je ressens et ce qu’il représente. Je souris aux paroles du blond, en détournant les yeux pensifs. « Merci, de ne pas avoir demandé. » Mon regard en biais je finis par rajouter. « Il est simplement la personne que j’aime le plus sur cette terre. » Je souris ne souhaitant pas aborder le sujet en détail pour l’instant, même si mes mots peuvent sembler étrange. Une combinaison fluo ? Je ris en secouant la tête alors qu’il ébouriffe mes cheveux bruns.

« J’aurais le costume super serrer a ras le corps et tout, trop classe ! » Ironique. Sérieux je ne sais pas pourquoi les super-héros portent ce genre de chose où on voit toute leur forme, ça me fait déliré des fois, même s’ils sont cool hein. Pour moi Linh Dan est étrange, sa façon d’être, celle de me rappeler sans cesse mon meilleur ami, le fait que je m’ouvre un peu plus avec lui, balançant des informations que je pensais pourtant sceller, ses points communs avec ma propre enfance, il me trouble et j’ai cette impression que cela n’ira pas en s’arrangeant. Puis il ne veut pas me dire son ancien nom... étrange, vraiment. Je le fixe avec une certaine insistance avant de lui dire :

« Tu caches quelque chose ? » Je souris ne pensant pas vraiment que je suis dans le vrai, mais en même temps pourquoi ne pas me donner son nom de famille ? « Ton nom était celui de tes parents biologique pas vrai ? Comment tu peux dire que ce n’est pas important ? » Je ne le sermonne pas, je pose une question en toute simplicité, mais s’il ne veut pas me le dire c’est son choix. « C’est vrai que c’est classe. Ça change des Kim, Park, Lee. » Je souris à nouveau, il n’y a pas non plus énormément de nom coréen.

« Tu ne veux pas m’en donner, égoïste ! » Je rentre dans son jeu, mais il a raison, j’aime ses cheveux. « Ne les coupe pas, ça te va bien. » Dis-je en repassant ma main dedans, l’esprit évasif. « Moi aussi. » Dis-je simplement, il m’intrigue, mais je l’aime bien, même si je ne veux pas être aussi proche de quelqu’un que je l’étais de Shaka, Linh Dan a quelque chose qui m’empêche de le laisser de toute façon, c’est... frustrant de ne pas savoir quoi, mais c’est comme ça. Mais les autres ne vont pas tarder à arriver et les cours à commencer, pourtant ça fait du bien de parler comme ça seul à seul, j’ai bien fait de le suivre.

Tenue -C'était étrange, la manière dont la situation continuait d'avancer, les quelques mots qui finissaient par être divulgués et d'un coup d'un seul, il se retrouvait clouer sur sa chaise. Visiblement, le lycéen ne s'attendait pas à entendre cette déclaration qui ressemblait à un couteau dans le dos, le laissant saigner doucement mais surement. Son visage se ferma complètement, tournant ses yeux vers la fenêtre à la recherche d'une échappatoire. Il n'avait pas de mots, pas de réponses à donner parce qu'il ne savait pas vraiment comment réagir à cette affirmation. S'il était véritablement a personne qui comptait le plus, alors pourquoi l'avait il laissé ? Ou pourquoi décidait il qu'il était mort sans avoir utiliser tous les moyens possible pour le retrouver ? C'était idiot de penser de cette façon puisqu'ils ne pourraient jamais faire machine arrière mais si le message était sublime, le contre sens paraissait bien amer. "Ce ne serait pas plutôt son souvenir que tu aimes ?" Linh Dan aimait les souvenirs d'Ewon Bak, leur manière d'être ensemble, toujours collé l'un à l'autre pour faire des aneries en cours, jouer les duos de chocs lorsque les professeurs proposaient des binôme et une personne sur qui compter en cas de besoin. Ce visage familier, qui lui apportait une stabilité de plus dans sa vie. Aujourd'hui, il n'avait pas énormément changé et au fur et à mesure de leur conversation s'attachait un peu plus aux nouveautés qu'il lui montrait.

D'ailleurs il agissait comme un super héros ce qui lui donnait un aspect fonceur sans regarder ce qui se passerait, comme un casse-cou sans parachute ou sans filet de sécurité. Une fait qui l'effrayait d'autant plus qu'il avait déjà eu l'occasion de le voir à l'œuvre. Un jour, il finirait gravement blessé s'il continuait, une des raisons pour lesquelles il restait à proximité. Sauf qu'à certains moments, la situation devenait compliquée et là encore il pointait involontairement le doigt sur une vérité qu'il se refusait à dévoiler. Alors, tentant de cacher son malaise, un rictus apparut promptement sur ses lèvres. "Exactement ! En vérité je suis le fils d'un yakuza chinois et si je te révélais mon identité je serais obligé de te tuer pour garder le secret." Il prenait sa question sur le ton de la rigolade, ironique à son plus haut niveau pour répondre sans rien dévoiler. Au fond, son nom de famille n'était pas coréen et ne ressemblait à rien des noms usuellement rencontrés alors le dévoiler ce serait comme crier un morceau de son identité et laisser une nouvelle brèche dans son armure pourtant épaisse. "Ce n'est pas important parce que je les ai oublié comme eux m'ont oublié et d'un sens, ne plus en parler m'aide à continuer d'avancer sur un chemin différent."

Son visage s'était abaissé le temps de tenir son visage entre ses deux mains. Lorsqu'il sentit une nouvelle invasion de sa chevelure, Linh Dan ne bougea pas d'un pousse, se contentant de faire pivoter son visage sur le côté pour l'observer tranquillement. "Non pas question que tu en aies un échantillon. Et merci" Ca lui faisait plaisir d'entendre ce type de compliment mais sa chevelure était également un morceau de sa barricade car dissimulé derrière sa chevelure blond il passait inaperçu ou presque. "Oui oui tu me dis ca parce que je suis là" Ses bras s'étaient croisés devant lui l'air faussement bougon avant de changer du tout au tout lorsque les premières silhouettes approchèrent de la salle l'air peu réveillés. Aussitôt sa carapace se remis en route, comme une image facile à utiliser. Il trouva tout de même le moyen de glisser. "On se voit après les cours ?" Enfin, ses cours n'allaient pas se réviser tout seul mais il se permettait parfois de faire une pause bien méritée. Et pour ajouter un peu plus de piquant au tout, il attendit que ce camarade leur tourne le dos pour attraper un bout de la veste d'Ewon Bak afin de l'obliger à se rapprocher à le regarder et très rapidement déposa ses lèvres sur les siennes avant de sourire "Il faut toujours payer ses dettes." Sans en dire plus il le relâcha pour se positionner face au tableau, amusé par son action bien qu'il pouvait sentir son coeur battre à milles à l'heure, pas habitué à se rapprocher d'une autre personne. Au fond, il avait cette envie de profiter de sa présence pendant qu'il était encore temps.

TENUE -  Je ne peux m’empêcher de le regarder sans un mot, ce qu’il dit est peut-être vrai, peut-être que je pourrais avouer n’aimer que le souvenir de Shaka, après tout... Je ne sais pas ce qu’il est devenu, je ne sais pas comment il est, je ne sais même pas où il se trouve, alors pourrais-je dire avec certitude « il est celui que j’aime le plus dans ce monde » ? Et bien oui, je l’affirme. Je n’ai aucun doute, pour moi que ce soit il y a sept ans ou à l’heure d’aujourd’hui vit dans mon esprit, dans mon cœur, dans chaque chose que j’entreprends, mes pensées en sont toujours remplis, depuis que j’ai rencontré Linh Dan encore plus, avant je pouvais vivre en me disant que c’est ce qu’il voudrait, que je puisse avancer sans pleurer son absence, mais aujourd’hui je ressens ce besoin de le voir qui devient de plus en plus présent, qui s’accentue avec les jours, les semaines et les mois. Je ne sais pas si je serais capable de le trouver, de le croiser ou même d’apprendre ce qui lui est arrivé... Mais quand je fixe le blond à mes côtés j’ai seulement envie de pleurer devant cette sensation qu’il me fait éprouver, cette frustration, ce trouble, bien entendu « pleurer » n’est pas dans mes habitudes et c’est seulement une façon de dire que je suis affaibli par cette ressemblance, mais je ne peux rien y faire. Je souris simplement après avoir mis mes idées aux clairs sans répondre, je sais ce que je ressens, je n’ai pas besoin de convaincre qui que ce soit et puis je suis de base assez secret et enfermé sur mon passé, Linh Dan creuse de plus en plus et je dois fermer les portes entrouvertes avant qu’il ne m’atteigne et me rende vulnérable.

Il ne veut pas me dire son ancien nom, des cachoteries on semble en avoir l’un comme l’autre, il joue sur l’humour, mais je sais bien que c’est parce qu’il ne veut pas en parler, je ricane cependant à son histoire, pouffant d’amusement tandis que j’appuie ma tête sur mon coude pour l’observer. « Devrais-je fouiller pour que tu me tue ? » Je prends un air sérieux avant de rire, non je ne suis pas suicidaire, je rigole simplement... « Oublié hein. » Je l’avais chuchoté, mais au fond je déteste ce mot, on m’a enlevé tous ceux qui me rappelé Shaka pour que je « l’oublie » mais contrairement à ce qu’on pourrait penser, jamais, non jamais je ne l’ai oublié. Tentative futile de la part de mes parents. On croit souvent qu’on est oublié, mis de côté, mais ce ne sont que des sentiments qui nous bouffent, des suppositions sans fondement, des ressentis dus aux situations, est-ce que Shaka pense qu’on l’a oublié lui aussi ? Je serre les poings à cette simple pensée qui me déchire le cœur.

Les cheveux de Linh Dan pourraient être une nouvelle addiction, il semble plus ouvert à mes gestes, ça me rassure après ses mots de la veille que d’ailleurs je n’ai pas compris. « Je pourrais en prendre une mèche dans la nuit pendant que tu dors fufufu. » Je prends un faux air sadique, mais je ne peux pas rester sérieux deux secondes, riant simplement en lâchant ses cheveux, je plaisantais bien entendu. « En même temps ça servirait à quoique je le dise si tu n’étais pas là ? » Je le regarde perplexe, dire qu’il a de beaux cheveux au voisin ou que ça lui va bien ne sera pas très concluant. Malheureusement toutes les bonnes choses ont une fin et les autres étudiants commencent lentement à arrivée, un premier et bientôt le second va se pointer, râlant un peu, c’était agréable comme conversation et Linh Dan semble se refermer automatiquement.  À sa question je souris en hochant simplement la tête pour affirmer, cela va de soi. Prêt à me remettre correctement a ma place quand ma veste fut légèrement tirée par le blond me forçant à tourner la tête vers lui pour voir ce qui se passer, la surprise fut grande en sentant ses lèvres sur les miennes, mes yeux grands ouverts l’observant, il venait de me laisser sur le cul autant le dire. Mon cœur pour je ne sais quelle raison s’est mis à accélérer, pourtant je suis loin d’être facile à surprendre avec ce genre de geste, on peut dire que je suis « habitué » mais encore une fois on dirait que le blondinet sort simplement du lot... Pour changer.

En tout cas c’est une belle surprise, je n’aurais pas pensé le voir agir de cette façon et un sourire se glissant sur mes lèvres trônant de longues secondes voire minutes, avant de reprendre une expression « normal » alors que les cours sont sur le point de commencer. Mais notre « relation » semble avoir cependant évolué d’un coup en l’espace de quelques minutes, comme quoi la communication ça aide.