Tout aurait dû aller pour le mieux. J’étais habituée aux voyages en avion maintenant. Cela n’avait jamais été ma tasse de thé, mais, avec ce nouvel emploi c’était devenu mon moyen de transport le plus utilisé après le taxi. Une entreprise m’attendait de pieds fermes à Sidney pour un nouveau shoot. Mon manager, cloué au lit à cause d’une grippe, n’avait pas pu m’accompagner et j’étais à présent seule à attendre sur le tarmac. Etrangement, je n’étais pas spécialement agacée par la situation. Je n’avais strictement aucune idée du lieu où nous nous trouvions, mais, au moins nous étions en vie. A quelques pas de l’appareil, j’avais dégainé mon téléphone portable pour envoyer un message rapide à mon manager afin qu’il contacte la personne qui devait m’attendre à l’arrivée – et accessoirement lui dire que j’étais encore en vie. Je ne savais pas si le réseau tiendrait le coup, mais bon… autant essayer.

Plongée dans mes pensées, je retins un sursaut en entendant une voix s’élever non loin de moi. Je levai les yeux vers mon interlocuteur, reconnaissant sans trop de mal la personne face à moi. Il était un des pilotes. Lors de mon enregistrement à l’aéroport, lui et son équipage étaient passé enregistrer leurs bagages avec l’agent se trouvant à côté de moi. J’haussai simplement les épaules à sa question avant de répondre :

« Je ne suis pas fan des attroupements. Je les laisse prendre un peu d’avance. »

Répondis-je simplement. Ce n’était pas faux. J’aimais mes voyages dans la discrétion, et le bon tiers de l’avion semblait être plein d’étudiants en voyage… ce qui ne me m’était pas en joie non plus.

« Ce n’est pas trop la folie à l’intérieur ? »

Ajoutai-je en désignant du bout du doigt les minuscules fenêtres du cockpit. Je n’étais pas là pour jouer les curieuses, juste pour tuer un peu le temps… Qui sait combien d’heures nous allions restés là ?

Au final, ce n’était pas si dérangeant que cela de s’être retrouvés sur une île au milieu de nulle part. Je me disais que c’était le bon moyen de souffler, pendant une minute, une heure ou le temps que cela prendrait pour relancer le moteur et repartir. Un moment suspendu où je pourrais agir à mon bon vouloir, sans trop craindre d’être reconnue. C’était également pour cela que je ne voulais pas trop me mêler à la foule, au reste des passagers. Ma notoriété commençait à faire son chemin, et je ne voulais pas entendre parler d’Airi.

« Il ne nous reste qu’à prendre notre mal en patience. »

Dis-je simplement. J’imaginais qu’il devait y avoir un bon nombre d’impatients. Voir le pilote habillé en civil me fit penser qu’il avait bien fait. L’équipage devait s’être pris un bon nombre de remarques violentes de la part de quelques passagers capricieux. De mon côté, j’espérais simplement une toute petite connexion internet, même sur un vieil ordi poussiéreux pour indiquer à mon manager que j’allais bien. Même alité avec trente-neuf de fièvre, il restait le père poule que je n’avais jamais eu.

« C’est bien vrai. Espérons simplement que les habitants ne soient pas une tribu anthropophage ! »

Ajoutai-je avec un sourire, en regardant vaguement le paysage autour de nous. C’était, d’ailleurs, presque joli par ici.

Je laissai mon regard vagabonder un instant sur les alentours. Sur le paysage au loin. Me demandant soudainement quelle heure il pouvait bien être. Mon portable était dans la poche de ma veste, mais, je n’avais aucunement l’envie de regarder. Finalement, il pouvait bien être n’importe quelle heure, cela ne changeait pas grand-chose à la situation. Par contre, j’en vins à me demander si certains ne paniqueraient pas lorsque le soir commencerait à tomber… Si certains passagers avaient déjà hurlé au scandale dès que l’avion avait posé tant bien que mal ses roues sur le bitume fragile, je n’osais imaginer leurs comportements dans quelques heures.

« L’archipel a son lot de petites îles inconnues. Je pense que rencontrer les locaux ne pourra qu’être bénéfique, même si j’en entends déjà certains rechigner à l’idée de quitter leur luxe quotidien. »

Je ne pouvais m’empêcher de faire une remarque à ce sujet. J’avais l’avantage de connaître ce que c’était que de vivre avec peu, dans un lieu un peu bancal. Mais, beaucoup donnaient l’image d’être né avec une cuillère en argent dans la bouche…

« Je ne dirai pas non à un café. »

Répondis-je avec un sourire à sa proposition. D’autant plus que le temps n’était pas estival, et que le froid n’était pas à ignorer.

« Il y aura assez de kérosène, pour repartir ? »

Demandais-je soudainement, un peu naïvement sans doute. Nous avions fait un détour, et bien que le trajet prévu était long et l’appareil conséquent, je me demandais ce qu’il en était. Je le regardai alors, en attente d’une réponse à ma question curieuse.

Sa remarque me fit sourire. Il avait sans doute raison. Chacun réagissait différemment. Certaines personnes voyaient le verre à moitié vide, et d’autres à moitié plein. J’imaginais également que quelques passagers n’avaient jamais eu affaire à une situation allant à l’encontre de leur programme. Peut-être pourraient-ils sortir d’ici un peu plus grandi ? J’en doutais, mais il fallait garder espoir pour tout le monde. J’acquiesçai donc d’un signe de tête à la suite de ses mots, sans rien ajouter de plus à ce sujet.
Je fis quelques pas derrière lui alors qu’il remontait dans l’avion pour nous chercher une boisson. Je frottai mes mains l’une contre l’autre, me demandant alors si les nuits étaient vraiment froides ici. Mêmes dans le cas où nous aurions l’idée d’ouvrir les soutes à bagages, nous allions tous à Sidney. Je n’avais pas prévu de pull et d’écharpe dans ma valise… D’autant que j’allais sur place pour y rencontrer un styliste qui m’offrirait sans doute quelques pièces sur place, j’étais partie léger… Je le regrettai soudainement. Le pilote revint assez rapidement, me tirant de mes pensées, et j’acceptai le gobelet avec plaisir et m’assit à ses côtés en le remerciant.

« Maintenant que vous le dites, ça parait tout à fait logique effectivement. »

Répondis-je en regardant autour de nous. Je n’avais pas eu beaucoup de cours de physique, mais, il était clair que l’engin ne bougerait guère du terrain sur lequel il se trouvait. Buvant une gorgée du café, j’affichai une moue sur mon visage avant de reprendre parole.

« Il doit y avoir des bateaux de temps en temps. Les personnes vivant ici reçoivent surement des vivres, du courrier. »

C’était certain. Le Japon regorgeait de ces petites îles à 50 habitants. Les gens n’y vivaient pas en parfaite autarcie. Une fois un bon contact effectué avec la personne en gestion du coin, nous aurions sans doute plus d’informations. Le problème étant que souvent les bateaux qui viennent sur ce genre de d’île sont minuscules et rares…

J’acquiesçai d’un signe de tête à son observation sur un envoi éventuel d’éclaireurs. C’était certain que cela allait arriver d’ailleurs. Un avion qui disparaît d’une carte et qui n’arrive, de ce fait, jamais à destination n’était pas sans laisser de réaction. Les nouvelles en parleraient sans doute, si ce n’était pas déjà fait. Et, j’imaginais sans mal certains passagers faire partis de familles avec un nom qui peut servir à faire avancer les choses plus rapidement dans ce genre de situation.

« Oui, il faut rester confiant, cela arrivera sûrement. »

Nous savions déjà que nous n’étions pas sur une île inhabitée, et c’était beaucoup. La situation aurait pu être bien pire, en dehors de la mort par un crash en pleine mer, nous aurions pu finir au beau milieu de nulle part. Mon café presque terminé entre les mains, je laissai mon regard vagabondé pour la énième fois sur le paysage qui nous entourait. L’eau d’un côté. Un mont plutôt boisé de l’autre. Pas grand-chose hormis cela n’attirait mon attention pour le moment.

« Nous sommes sans doute du mauvais côté de l’île. »

Ajoutai-je à la suite de sa remarque. Je ne doutais pas que sous peu nous aurions un retour des personnes étant partis à la recherche des habitants, ou d’une quelconque autre vie présente ici qui pourrait nous donner un coup de main. Terminant ma boisson chaude, je l’écoutai se présenter. C’était une bonne idée ; quelque chose de tout à fait naturel finalement, en sachant que nous allions sans doute échanger encore de longues minutes l’un avec l’autre.

« Echantée ! Je m’appelle Eun Ha. »

Oui. Eun Ha. Pas Airi. Non, Airi était fermé dans la soute à bagage avec un cadenas bien verrouillé. Je fronçai alors les sourcils alors que mon regard observait une partie du ciel, au loin. D’un signe de la main, je lui montrai la zone que j’étais en train de regarder avec un air dubitatif sur le visage.

« C’est moi où, il y a un peu de fumée là-bas ? »

Cette fine fumée, au loin, m’intriguait au plus haut point. Alors, je n’avais pu m’empêcher de lui en faire part. Les sourcils légèrement froncés, je m’étais au départ dit que cela était un nuage un peu plus étiré qu’un autre. Puis, à bien y regarder, j’en avais conclus à de la fumée – claire et blanche. C’était étrange. Cela attisait ma curiosité. Bien sûr, mes connaissances en géologie étaient bien médiocres, et j’étais loin de me douter qu’il s’agissait en réalité d’un volcan caché dans le paysage forestier. Ainsi, lorsqu’Hinata indiqua que c’était sans doute là l’œuvre d’aventuriers en herbe, cela me paraissait plutôt probable.

« Ce doit être ça oui ! Même si, au fond, je ne suis pas certaine que ce soit l’idée la plus sûre. »

Après tout, nous ne connaissions rien de l’île. Nous présumions la présence d’habitants non loin de nous. Nous présumions donc une part de civilité peuplant au-delà des bois, mais, au final, nous n’en savions que peu. Ma seule angoisse était peut-être la présence d’animaux sauvages peu sympathiques. L’Asie avait déjà son lot d’insectes improbables, qui, bien heureusement étaient moins courant en automne donc, on ne pouvait être trop prudent !
« Faudra faire attention de n’oublier personne au moment d’évacuer. » Un rire léger échappa mes lèvres à sa remarque. Il ne manquerait plus que ça ; après un atterrissage forcé au milieu de nulle part, devoir repartir en oubliant quelques passagers.

« Oh, je ne me fais pas de souci pour ça ! Si vous dites que vous les ramenez à la maison, ils accourront ! »

Certaines personnes avaient beau l’impression d’être sur une petite escapade digne de ces émissions télévisées, je doutais fortement que l’appel du confort de leur chez eux soit faible au point de les faire rater un bateau – ou autre transport qui viendrait nous chercher ici. Moi la première, bien que je profitai pleinement de cet instant sans mensonge de mon existence.

Nous étions après tout avec un petit groupe d’étudiants parmi les passagers. Il n’était pas impossible que certains aient vu ce voyage en Australie comme une opportunité tout à fait merveilleuse d’échapper à leur quotidien – ne doutant pas que certains étudiaient selon le bon vouloir de leurs parents. Alors, avoir atterri au milieu de nulle part comme nous l’avions était sans doute une chance de plus pour échapper à tout cela… Il avait raison, il vaudrait mieux vérifier deux fois qu’une lorsque nous partirons.

Alors que le jeune pilote se relevait, je le suivis dans son mouvement. Main vide dans une main, j’étirai mes bras vers le haut pour détendre un peu mes muscles qui s’étaient légèrement crispés à cause de la fraicheur arrivante. Puis soudain, une secousse. Venue de nous ne savions où. Mais yeux s’ouvrirent en grand sous la surprise, avant de froncer légèrement les sourcils. C’était étrange. C’était soudain. Les tremblements de terre étaient un quotidien dans la capitale nipponne, mais, quelque chose paraissait différent.

« Oui. »

Répondis-je simplement à sa question, joignant geste et parole en acquiesçant d’un signe de tête en même temps. Dubitative, je jetai à nouveau un œil vers la zone boisée que nous avions à quelques mètres de nous. Les arbres étaient hauts, le paysage au loin recouvert mais, la fumée était toujours là.

« Vous croyez vraiment que c’est un feu de campeurs amateurs ? »

Inquiète, je ne savais si je voulais entendre sa réponse au final. Je le regardai, incertaine de ce qui venait d’arriver. En espérant que nous étions simplement deux fous dont la fatigue jouait des tours et qu’au fond, rien ne s’était passé.

Laisser le pessimisme à la porte. C’était quelque chose dont j’étais parfaitement capable. J’angoissais à cause de ma situation personnelle, mais jamais en situation extrême. Alors, bien qu’inquiète, je faisais mon possible pour garder la tête haute – même si au fond, mon regard ne devait pas savoir mentir. Aussi, j’avais ce côté terriblement réaliste qui me faisait penser que quelque chose clochait. Je ne savais pas quoi, et une partie de moi mourrait d’envie de ne rien savoir de plus. Seul le temps nous dirait ce qu’il en serait, et j’espérais bien qu’il ne se presserait pas trop et que nous pourrions partir avant.
L’équipage non loin de nous avait également senti la secousse. Bon. Nous n’étions pas officiellement fous. C’était déjà un bon point. Je crois. Je détachai mon regard de cette fichue fumée qui, plus je la regardais, m’intriguait de trop. « Vous inquiétez pas, ça va aller. » J’esquissai un sourire à sa phrase, reconnaissante malgré tout de l’effort fourni. Lui aussi devait garder la face, il était le capitaine après tout.

« Ce n’est pas rare qu’une secousse se fasse ressentir et que rien ne vienne après. »

C’était la vérité. Mais, une vérité dite là pour nous rassurer. D’autant que nous étions sur une île. Je ne savais pas ce qui m’inquiétait le plus au final ; le feu étrange provenant de la forêt avoisinante ou bien l’eau qui pourrait venir sous submerger si une secousse trop grande venait à se faire ressentir. Perdue dans mes pensées, j’en vins à me dire que finalement, qu’importe le cas, l’avion serait un bien maigre refuge.

Le fait qu’il fasse dériver légèrement le sujet sur un autre thème n’était pas déplaisant. Cela nous permettrait d’occuper notre esprit à autre chose que la géologie de l’île sur laquelle nous nous trouvions pour une durée indéterminée. J’en vins alors à ressentir une légère curiosité à l’égard du jeune homme. Il avait l’air guère plus âgé que moi ; c’était l’impression qu’il me laissait en tout cas. Et pourtant, il avait pu acquérir un statut suffisant pour pouvoir effectuer des vols internationaux. Je ne m’y connaissais pas vraiment en aviation. La première fois que j’avais pris l’avion était assez récente, lors de ma venue au Japon. Avant cela, je n’avais jamais ressenti aucune attirance vers l’univers de l’aéroportuaire. J’imaginais facilement qu’il fallait malgré tout une bonne dose de passion pour réussir dans ce milieu, et sans doute suffisamment d’argent pour pouvoir se payer le diplôme.

« Chaque emploi a son anecdote ; pour vous, ce sera aujourd’hui. »

Dis-je avec un sourire. Bien sûr, l’ampleur de la situation et de l’histoire à raconter variait selon ledit emploi mais, toujours est-il qu’il était sans doute préférable de se dire que ce serait une bonne aventure à raconter dans quelques temps, lorsque nous serions de retour chez nous.

« Vous avez toujours voulu faire pilote ? »

Demandai-je finalement, pour éloigner ma pensée des hypothèses d’une prochaine secousse. C’était sans doute une question fort rhétorique, mais, elle ferait affaire pour continuer la conversation.

J’esquissai un sourire alors qu’il répondait à ma question. J’avais quelques difficultés à imaginer ce que cela pourrait être d’aller jusqu’au bout de ses envies et vivre d’une passion qui tenait à cœur depuis tant d’années. Cela n’était pas mon cas. Je n’étais pas mal lotie, mais, ma seule ambition avait été de quitter ma famille, mon pays et vivre une nouvelle vie. Je n’avais jamais pris le temps de me plonger tête la première dans un passe-temps ; car j’imaginais peu la manipulation et le mensonge comme étant des occupations dignes d’être exposées au grand jour avec fierté.

« Je trouve cela beau. Vous pouvez être fier de vous. »

Ajoutai-je en réponse. C’était simple, et sincère. S’il me connaissait, il saurait à quel point il était rare que je parle ainsi avec franchise et gentillesse sans espérer quoi que ce soit en retour. Finalement, cette mésaventure serait peut-être l’occasion pour moi de renouer avec l’essence même de ma personne que j’avais mis de côté pendant bien des années pour me protéger.
« Vous aimez ce que vous faites ? » Je ne puis répondre tout de suite. C’était étrange. Je ne savais pas vraiment pourquoi mais, il m’avait fallu un temps de réflexion. Sans doute parce que le métier que je faisais n’était pas effectué sous ma véritable identité. Pourtant, après quelques secondes, j’acquiesçai d’un signe de tête.

« Je pense que je permets aux gens de rêver un peu. Et, me rendre compte que j’ai été capable de décoller de mon ancienne vie m’encourage un peu plus chaque jour. »

C’était bien la raison pour laquelle je m’accrochais, désespérément sans doute à la fois fabuleuse et dangereuse dans laquelle je me trouvais. Le temps passait, et bien que reconnaissante de la présence du pilote à mes côtés, je me rendis compte que notre situation n’évoluait pas. Le ciel prenait doucement des couleurs orangées, signe que la nuit n’allait pas tarder à pointer à l’horizon.

Il avait sans doute raison. C’était peut-être quelque chose que tout le monde n’était pas dans la capacité de faire. Je n’en savais trop rien. Une partie de moi croyait en ses paroles, dur comme fer. Toutefois, une petite voix avait tendance, ces derniers temps, à me souffler que tout n’était qu’illusion ; je m’étais mise dans un pétrin improbable, et le rêve se terminerait bientôt de façon violente. Mais, là n’était pas le moment de penser à ces choses-là. Je devais réussir à relativiser, et à concentrer mon esprit sur autre chose.

« Oui, cela vaut sans doute le prix à payer. »

Un léger sourire étira mes lèvres, et je n’en ajoutai pas plus. Il n’y avait rien à ajouter de toute façon. J’étais déjà bien contente de pouvoir parler à quelqu’un sans avoir à jouer un rôle, que ce soit une Eun Ha sur la défensive ou un Airi fragile et souriante.
L’après-midi se terminant, le ciel commençait à prendre une teinte légèrement orangée et j’étais loin d’être rassurée à l’idée de passer la nuit dans l’avion. J’aurais préféré que des locaux nous accueillent, mais, il semblait qu’il n’en serait rien. Les réparations sur la radio ne semblaient rien donner non plus, car nous n’avions eu aucun retour positif de la part de l’équipage restant. Aucun passager n’était non plus revenu avec une bonne nouvelle… J’étais un peu perdue dans mes pensées lorsqu’une nouvelle secousse, cette fois-ci plus violente que la précédente se fit ressentir. Prise au dépourvu, si Hinata n’avait pas été à mes côtés pour me retenir j’aurai sans doute fait une mauvaise chute. Les mains légèrement crispées sur ses bras, j’acquiesçai d’un léger signe de tête à sa question. Puis, mes yeux s’ouvrirent sous la surprise, et je pointai un doigt en direction de la forêt dans son dos.

« Je crois que ce n’est définitivement pas un petit feu de campeurs… »

Soufflai-je, me redressant légèrement, une main toujours sur son bras. La fine fumée étrange que nous avions remarquée plus tôt s’était épaissie. Cela n’annonçait rien de bon.

Bien que gardant mon calme, je ne pouvais nier le fait que je commençais à avoir peur. J’essayais tant bien que mal de ne pas imaginer le pire scénario catastrophe digne de tout film à budget, mais, c’était bien plus simple à dire qu’à faire. J’essayais de me rassurer comme je le pouvais. Après tout, n’avais-je pas déjà entendu une fois qu’un volcan peut fumer pendant plusieurs jours avant d’exploser. Et puis, les éruptions sont toutes différentes, n’est-ce pas ? Nous n’allons pas forcément finir brulés par la lave, ou étouffés par les cendres. N’est-ce pas ? C’était bien qu’avait dit la voix off, cette nuit-là, à deux heures, quand je ne dormais toujours pas ?

Hinata remonta rapidement dans l’avion, très certainement pour refaire le point avec l’équipage et leur avancée ; si toutefois il y en avait bien une. Je le suivis un instant du regard, avant de lui emboiter le pas. Il était hors de question que je reste toute seule sur cette plage, en bas de l’appareil. J’imaginais avec grandes difficultés la façon dont nous pourrions nous en sortir… Sans la radio. Et encore, même si elle se décidait à fonctionner maintenant, combien de temps nous restait-il avant que le mont boisé décide de faire des siennes une bonne fois pour toute ? Les secours n’arriveraient pas dans la demi-heure suivant notre appel.

« Est-ce qu’il y aurait un moyen pour rappeler les passagers à l’avion ? »

Demandai-je alors. Certains étaient partis depuis bien longtemps déjà. Tous avaient sûrement ressentis les secousses, mais je doutais fortement que tous aient levé les yeux vers le centre de l’île pour y remarquer la fumée afin d’avoir les mêmes déductions que le pilote et moi.