Des mouvements de sabres coupant l’air résonnaient dans le gymnase, ce matin je m’étais levé aussi tôt que d’habitude pour pouvoir m’exercer seul jouissant ainsi de la place qui m’était accordée. Je dansais et épousé parfaitement mon épée, chaque geste était fluide, rapide et je les maitrisaient à la perfection. Jia Heng ne sera pas disponible pour manger en ma compagnie aujourd'hui, apparemment c’était une affaire urgente qu’il devait communiquer avec son père par téléphone et je ne pas souhaiter l’interrompre. Qui étais-je pour lui demander des informations, je suis né pour le protéger, les raisons, les histoires de famille... Rien de tout ça ne m’intéresse. Dégoulinant de sueur après de nombreux exercices et des heures de pratique, mon souffle toujours aussi régulier et mon visage impassible, je n’exprimais aucune émotion. Ni fatigue, ni joie, ni contentement ou agacement. Pas que je ne ressentais rien, mais simplement parce que j'avais du mal à le faire. Toute ma vie je suis resté stoïque et droit dans mon apprentissage, ce manque d’expression est en partie la récompense, le fruit de cet entrainement.

Il était presque l’heure de manger lorsque je quitta le gymnase après avoir ranger mon sabre dans mon sac et prit une douche dans les vestiaires. Je marcha dans le couloir, écoutant les voix des étudiants s’enthousiasmer, rire et gueuler pour se faire entendre, pour ma part je continué mon chemin jusqu’à croiser Su Hwan. Ce petit bonhomme qui arrive parfois à me sortir de ce quotidien routinier. En dehors de Jia Heng, c’est celui à qui je parle le plus, pour cause il s’intéresse vraiment à moi, à mes voyages et mon histoire et ça m’a tout de suite donné envie d’en comprendre le sens. Il est intéressant et il ne me fuit pas comme la plupart des gens qui me jugent sur mon apparence et mon métier, pensant que je suis un être « à part ».

Notre conversation n’a duré qu’un instant, assez pour qu’on immisce dans notre planning un moment pour nous retrouver et discuter simplement. Assis sur les marches à l’extérieur de l’établissement je mangea mon repas en me demandant si mon maitre s’en sortait avec ses affaires, on avait échangé quelque texto, ce qui m’a encore pris une éternité au vu du talent dont je fais preuve avec un objet électronique dans les mains. La modernisation ce n’est pas mon truc... Ayant terminé mon pain, je pris le chemin menant au planétarium.

Poussant la porte, j’avais trouvé en un regard l’emplacement de mon camarade, bien que ce ne fût pas difficile... Le lieu était désert à chaque fois qu’on y venait. M’approchant discrètement, mais sans intention caché, je m’étais penché au-dessus de son épaule pour lire quelques mots de ce qu’il était en train d’écrire. L’indiscrétion dont je faisais preuve ne me vint même pas à l’esprit, il faut dire que je ne pause que rarement de question sur ce que je peux ou ne peut pas faire.

Posant ma main sur son épaule pour annoncer ma présence et finalement prendre place sur un siège à ses côtés.

« Je n’ai pas assez mangé, j’ai envie de ramens. J’aurais dû m’en acheter avant de venir. Et toi ? » Montrant du doigt son carnet je repris. « L’un finit par trouver le courage de… c’est quoi la suite ? Tu t'es inspiré de qui pour cette histoire ? » J’étais curieux concernant ses textes et son imagination. Adossé à mon siège je leva les yeux vers le « ciel » qui nous faisait face.

« C’est toujours aussi calme comme endroit. »

En dehors de Jia Heng ou les arts martiaux, des pandas ou des sabres je n’avais pas beaucoup d’intérêt commun avec les autres. Je n’ai jamais réellement cherché à m’adapter à eux, je ne suis pas ici pour rechercher des amis et au final j’ai pu rencontrer des gens qui ne me jugent pas et me font découvrir des choses auxquelles que je n'avais jamais pensé. Su Hwan, sa passion pour fouiner et écrire des histoires, c’est une chose qui m’a tout de suite attiré, moi qui suis rarement curieux, je l’ai été avec ce petit bonhomme et de fil en aiguille je me retrouve à passer du temps en sa compagnie lorsque mon maitre est occupé ailleurs et que mon planning me le permet. Ne pouvant afficher que rarement des expressions je n’étais pas doué pour lire la vérité ou la comédie derrière des sourires ou des gestes anodins. Parfois je pouvais envier la facilité que les gens ont de s’exprimer et de se faire comprendre avec de simples expressions faciales.

« Tu as remarqué ça simplement avec un regard ? » Oui ce genre de choses était justement ce que je n’arrivais pas à comprendre. Je m’étais assis, je n’avais pas vraiment envie de me balader tout de suite, j’étais plus intrigué par la suite de son récit et, ça m’intéressait pas mal à savoir ce qu’il écrivait comme histoire. Mon visage resta inexpressif mais intérieurement je ne pouvais m’empêcher de sourire.

Je me perdis rapidement dans le ciel étoilé, c’était apaisant et calme, parfois faire une pause et ne penser à rien pouvait être bénéfique, je ne prenais pas le temps de m’arrêter. Ma vie est sans cesse une lutte, une protection, je ne connais pas de « long fleuve tranquille » mais en présence de Su Hwan il peut m’arriver de me détendre plus facilement. Je ne me plains pas, j’aime la vie que je mène et je ne la changerai pour rien au monde, juste que ce que je ressens en l’écoutant parler ou partager sa passion et ce que je vis aux côtés de Jia Heng n'est pas comparable. Lorsque je suis avec le Chinois, j’ai constamment cette envie de le protéger, certes c’est mon métier, mais plus encore... J’ai toujours peur qu’il sorte de mon champ de vision, autant je suis sa force, autant il est ma faiblesse. Je suis l’ombre de sa lumière et l’un ne va pas sans l’autre ! Mais mon esprit est tout le temps accaparé par lui et je ne me suis jamais demandé si c’était normal ou non.

Soupirant lourdement, je tourne ma tête vers le plus jeune lorsqu’il pose sa question et réfléchissant un instant, je croise les bras sur mon siège.

« Rien ne change vraiment, je m’entraine, protège Jia Heng. Je n’ai plus grand choses d’intéressant à te raconter qui sorte de l’ordinaire. » Avais-je simplement dit avant de rapidement reprendre.

« Ah, je suis tombé sur un membre de ma famille l’autre jour... Il a gobé ma peluche de panda que je venais d’acheter. » Oui information très importante ! J’avais dis cela d’un ton plutôt calme, mais en fait je n’avais pas pu cacher ma colère devant un tel acte. Quand on touche a mes pandas, j’ai du mal à digérer.

« Et toi ? D'ailleurs tu n’écris plus sur moi dernièrement pas vrai ? » Ça pouvait sonner comme un reproche, mais non, il faut dire que ce qui nous a rapprochés au début c’était le fait que j’entendre parler d’un gars qui était « intéressé » par moi, mes voyages, mon histoire. Donc je serais peut-être « déçut » qu’il perde son intérêt a mon égard. Sachant que j’ai encore tellement d’anecdotes qui pourraient l’intéressait, même si ce ne sont pas des choses que je peux dire facilement.

C’était donc son imagination qui débordait ? Je pouvais entendre ses paroles et les comprendre dans un sens, mais je ne suis pas du genre à réfléchir ou à me faire des films, j’ai les pieds ancrés dans la réalité et c’est un fait que je ne peux pas changer. J’enviais parfois sa facilité à écrire et à inventer des histoires aussi facilement, surement que dans ce monde, voir même dans cette école ils étaient nombreux dans ce cas-là, mais c’était une capacité, un don qui m’était totalement inconnu. Les seuls réels talent que j’ai sont ceux que j’use en arts martiaux et ma fidélité envers mon maitre, qui en soit... n’est pas vraiment considéré comme tel.

C’était la même chose lorsqu’on me demandé de raconter des histoires, des anecdotes ou même ma journée. Les choses me paraissaient inintéressantes car elles étaient souvent routinières ou en rapport avec Jia Heng et cela n’était pas le genre de récit que les « amis » voudraient entendre, pour être franc je n’aimais pas raconter les moments que je partageais avec le Chinois car en tant que garde du corps je dois garder secret tout ce qui le concerne, même avec ceux en qui j’ai confiance. Mais plonger dans mon admiration des étoiles, le silence avait rempli les lieux. Les derniers mots qu’avait prononcés mon camarade avant de ce jeté dans l’écriture m’avaient fait plaisir, bien que je ne sache pas vraiment comment lui exprimer.

J’aime quand Su Hwan écrit ses récits et j’aime aussi en faire partie, peut-être qu'inconsciemment c’est une façon d’exister en tant que Jiang Ayden et non le garde du corps de Li Jia Heng.

J’avais ponté mon regard noir sur le garçon à mes côtés, tandis que son stylo glissé sur la feuille de son cahier. Les mots remplirent rapidement la page blanche et bien que je ne lisais pas, j’étais en quelque sorte « fasciné » par sa concentration, en une seconde il avait totalement oublié ma présence et cela me fit sourire intérieurement, c’était un vrai passionné. Mais je ne brisa pas son élan, attendant qu’il se rende compte lui-même de son écart, son absence pour revenir à mes côtés. Pourtant la remarque concernant mon enfance me rendit mon sérieux, m’adossant à mon siège une nouvelle fois.

Honnêtement j’hésitais à lui en parler, mais il n’y avait rien à cacher réellement, le passé ne pourrait pas me faire de mal, bien que je compte dévoiler que les grandes lignes pour les laisser se marier à son imagination débordante.

« Comment penses-tu que fut mon enfance ? » Demandais-je en tournant ma tête vers lui. Avant d’afficher un léger sourire mais qui se voyait sur mes lèvres, il était rare que je montre mes expressions, pourtant je n’avais pu m’en empêcher.

« Je ne sais pas ce que je t’ai déjà dit, mais je suis né dans une famille de gardes du corps. De génération en génération on protège la famille Li. Et toute mon enfance jusqu’à mes sept ans je me suis entrainé en Amérique pour être digne de partir rejoindre mon protégé. » Je souffle légèrement en me rappelant de notre première rencontre, c’était vraiment bizarre. « Ce fut dur, les arts martiaux étaient tout ce que je voyais, à l’école les enfants me considéraient comme « différent » la plupart du temps et je ne me sentaient pas à ma place. » Ma jeunesse n’a été que sueur, détermination, force, patience, foi et conviction.

« Tu as des questions précises sur mon enfance que tu voudrais connaitre ?»

Je n’ai jamais été habitué à ce qu’on s’intéresse réellement à moi, je ne pense pas que ce soit une mauvaise chose étant donnée que ça ne m’a jamais « manqué » mais au fond c’est normal puisque dans mon « monde » il n’y a pas de place pour les sentiments, les compliments, la reconnaissance, je suis un garçon vivant « hors du temps » comme si parfois je n’avais pas ma place parmi eux. Par chance j’arrivais à me faire des amis, à discuter ouvertement avec les personnes qui m’en laissaient l’opportunité... Mais ma vie ressemblé en rien à celle des étudiants de nos jours, des jeunes hommes de mon âge.

Je ne savais pas vraiment quoi raconter sur moi lorsque Su Hwan me le demanda, pour être honnête j’ignorais ce qu’il attendait de moi, ce qui l’intéressait, ce que je serais aussi capable de lui raconter... Mais l’idée qu’il veuille écrire sur moi me rendait fier, je voulais vraiment voir ce que ce récit donnerait une fois terminé et pour cette raison je ne devais pas lui couper son inspiration... S'il avait besoin de détails j’allais lui en fournir autant que je le pouvais.

« J’aime l’idée, j’ai même l’impression que ça correspond plus à mon mode de vie pour être honnête. De nos jours on ne prend pas vraiment au sérieux les personnes comme moi. » Je ne me plaignais pas ! C’était plus une constatation, bien que je n’abandonnerai jamais mon rôle et qu’en Chine c’était plus courant, ici être garde du corps officiel d’une seule personne depuis l’enfance en laisser plus d’un dans l’incompréhension. Je ne compte plus le nombre de fois où l’on m'a demandé si je ne regrettait pas ou si ça ne me déranger pas de ne pas avoir de « vie ». Mais là où le monde se trompe, c’est que justement... J’en ai une et bien rempli en plus !

Puis lorsqu’il me posa des questions sur les relations avec ma famille et mon maitre je réfléchis un instant.

« Je n’ai pas vraiment de relation avec mes parents. Dès l’âge de sept ans je les ai quitté et je n’ai plus jamais repris contact avec eux. Mon père est quelqu’un de strict, il est fort et impose le respect, j’ai toujours voulu suivre ses pas et devenir quelqu’un d’aussi respectable. Mais les seuls moments que je passais à ses côtés étaient lors de mes entrainements, pour qu’il juge mes progrès ou clame mon incapacité. » Je fis une petite pause, me remémorant des scènes dans ma tête pour reprendre.

« Ma mère était quelqu’un d’effacé. Elle était dans l’ombre de mon père, elle faisait son rôle d’épouse et c’est tout... Une fois je me suis entrainé jour et nuit non stop pendant plusieurs jours, mes instructeurs et mon père se fichaient pas mal que j’y laisse la vie, un garde du corps ne doit pas avoir peur de la mort. Je m’entrainais sans cesse et après avoir eu droit à un moment de repos, ma mère m’a apporté de la soupe... chose que je trouve immangeable d'ailleurs... en me disant. « Ne pas craindre la mort est une force, mais aller a sa rencontre c’est de l’inconscience. Être fort c’est protéger ton maitre, mais te protéger aussi. » Je me souviens que je n’avais pas compris ce qu’elle voulait dire a l’époque, j’avais seulement cinq ans. Mais ma mère n’avait pas énormément de liberté et moi pas assez de temps à lui accorder. » Je fis une nouvelle pause. Regardant Su Hwan pour voir si ça l’intéressé un minimum.  

« À l’âge de sept ans je battais toutes les personnes qui me défiait, je n’ai jamais eu peur des blessures ou même de trépassé. Mais ça annonçait aussi mon départ. Mes parents savaient que ce jour arriverait, mon père était fier et ma mère semblait tourmenté. Nous savions que nous ne nous reverrions surement jamais, c’est ainsi que ça se passe dans ma famille, une fois sur le départ c’est un voyage à sens unique, pas de retour possible. » Riant légèrement, assez naturellement pour une fois.

« Je ne sais pas si ça t’intéresse vraiment, mais j’essaie de te donner le plus de détail possible... Je ne suis pas très doué pour les histoires. »

Je pouvais avoir énormément confiance en moi lorsqu’il s’agissait de me battre, de protéger les gens et de risquer ma vie sans concessions, que ce soit clair, je suis très loin d’être un beau parleur, je ne communique que très rarement et quand je le fais la plupart du temps les gens ne me prenne pas au sérieux, ne m’écoute pas et me trouve inintéressant. Je n’ai pas cette capacité innée de lancer une conversation, de partager rire et déception, de raconter des anecdotes, lorsque je parle et que j’arrive à aligner de longue tirade je ne dis que ce que je ressens, que ce que je me souviens sans aucun détour. Je pense que lorsqu’on dit de moi que je suis une coquille vide de sentiments c’est ce qui pourrait être le plus blessant. Derrière mon rôle de garde du corps, j’ai un cœur et à force de rabaisser ma façon de vivre, ma façon d’être, je ne trouve pas l’opportunité d’apprendre à m’ouvrir aux autres plus facilement. Pourtant, Su Hwan m’écoute, il semble vraiment porter de l’intérêt à ce que je raconte et je me sens plus à l’aise avec lui, parce qu’il ne me juge pas et que mon mode de vie, plus que de le faire fuir... l’attire.

Je doute énormément de ma façon de raconter mon passé, je ne sais pas trop si c’est linéaire, si j’ai manqué des faits importants, pour être honnête c’est les seuls choses que je me souvienne... En quittant le bercail j’ai oublié tous mes souvenirs, grandissant en m’en créant de nouveau, mettant de côté famille et ville natale, je suis parti sans me retourné. Mais mon camarade me rassure sur le fait que je me suis bien débrouillé, chose à laquelle je me sens un peu soulager, je n’ai pas vraiment l’habitude de parler autant. Cependant mon soulagement est de courte durée. La question qui suit me met dans l’embarras... Je ne peux pas entamer ce sujet, il m’est impossible. C’est donc avec une petite appréhension que je lui réponds.

« Désolé. Je ne peux pas vraiment parler de mes employeurs, ils sont importants et toutes les infos que je pourrais dire pourraient se retourner contre eux sans vraiment le voir venir. » Je suis certes le garde du corps personnel de Jia Heng, mais je protège aussi les Li quand ça peut atteindre toute la famille. J’ai confiance en Su Hwan, mais le simple fait de parler d’eux me fait me sentir mal à l’aise.

« Tu connais déjà Jia Heng non ? Sans entrer dans les détails je me suis senti en territoire inconnu. C’était la première fois que j’allais en Chine. Puis lui et moi on n’a pas échangé un mot au début pendant un moment. » Pour ce qu’il s'est passé ensuite... ce passage de ma vie où je fus résigné à mourir, enfermé pendant 672 heures... Je ne peux pas entamer ce sujet, je ne me souviens même pas en avoir parlé un jour en détail, je ne connais pas les coupables et au fond ça me travaille encore aujourd’hui. Personne à part moi ne sait ce que j’ai vécu pendant ses quatre semaines, pas même Jia Heng. Mais je sais que je n'ai jamais été aussi fier de l’avoir protégé que ce jour-là.

« Je ne t’aide pas trop pour la suite, mais je suis sûr que ton imagination fera du bon boulot.» Peut-être un jour je serais capable de lui parler de certaines choses, mais toute ma vie j’ai su où était ma place et mes responsabilités sont toujours présentes. Il y a une ligne invisible qui me suit partout et que je ne dois en aucun cas dépasser.

Ne pas parler des choses qui ne me concernez pas directement était l’une des règles accrochées a mon métier. Être garde du corps ne voulait pas dire que je devais juste mettre ma vie en jeu et me battre physiquement contre les gros méchants qui en avaient après la sécurité des Li. Non, bien sûr c’était plus de soixante-dix pourcents de mon boulot et c’est pourquoi je continuais chaque jour à m’entrainer malgré mon niveau, je n’étais pas à l’abri de rencontrer quelqu’un de plus fort que moi ! Ce jour-là, s’il devait arriver que je me frotte à des hommes m’envoyant au tapis, alors je devrais tout miser sur ma vie, je préfère mourir que de perdre et laisser Jia Heng être la victime d’un coup monté politique ou ce genre de choses. Les autres trente pourcents étaient ceux que je devais utiliser avec ma tête... Ne jamais divulguer d’informations, retenir les discours importants, trouver les bons mots et soutenir mon ami dans la vie de tous les jours. Pour moi cette partie était de loin la plus importante ! En fait j’avais transgressé une règle, sa remonte a des années, mais le fait est que j’avais interdiction de lier une amitié avec le cadet de la famille, je n'étais pas là pour jouer les bons copains et m’amuser, pourtant c’est ce que je faisais chaque jour. Plus qu’un protégé, il était ma lumière dans l’obscurité, je ne pourrais pas expliquer les choses, ni ce que je ressens vraiment, mais c’était le seul écart que je m’étais permis en plus de quatorze ans de service.

J’avais cependant raconté quelques détails à Su Hwan, je savais que ce n’était pas vraiment très utile, en tout cas de mon point de vue je ne savais pas vraiment ce que ça valait, mais tant pis. Si ça pouvait simplement l’inspiré un peu, c’était suffisant pour moi. De nouveau calme pendant que mon camarade noté ses idées, je m’étais replongé dans le ciel étoilé quelques minutes, avant que sa voix ne résonne à nouveau. Le regardant sans vraiment comprendre pourquoi il me pose cette question, je fis un signe négatif de la tête.

« Non, jamais. En fait je passe plus mon temps au gymnase que dans l’enceinte même de l’établissement. Pourquoi tu me demandes ça ? » Il semblait vraiment préoccupé cette question qu’il m’avait posé, je n’en connaissais pas les raisons étant donné que je ne lisais pas les nouvelles, les rumeurs et toutes ses choses... Je ne pouvais donc pas savoir ce qu’il tentait de découvrir de manière détourné. Puis il faut dire que je suis trop « dans mon monde » pour tenir compte des ragots et des chuchotements lancés par les étudiants. Jamais l’idée que cela me concerne me passerait par la tête...

« Qu’est-ce qui te tracasse ? » Avais-je demandé simplement en ayant remarqué que mon ami semblait avoir un peu changé d’expression. Bien que je ne sois pas quelqu’un de doué, j’ai quand même l’habitude de comprendre certaines choses quand ça concerne mes « proches »

Il me paraissait vraiment troublé et inquiet, mais je ne suis pas doué pour lire à travers les lignes, si on ne me dis pas les choses directement je suis de ceux qui ne comprennent rien... Je le sais moi-même, à quel point je peux parfois être désespérant. En tout cas je ne voulais pas qu’il cache ce qui le tracassait, si moi je n’avais pas le droit de dire certaines choses, de me plaindre ou bien même le fait que je ne sois pas doué pour montrer mes émotions et mes sentiments, je pouvais être préoccupé par mes amis. Je suis peut être un garde du corps, tuant des gens pour en protéger d’autre, j’en restai pas moins un homme, un humain. Et lorsqu’il finit par me dire la chose, j’avais pris un air pensif, je ne savais pas du tout pourquoi les gens disaient ce genre de chose et rapidement comme si j’avais eu un éclair d’illumination, j’avais levé l’index en m’exclamant.

« Ah ! » Je regarda Su Hwan et repris. « On ne s'est pas embrassé... En fait, il m’a embrassé. Mais c’est parce qu’il est bizarre, il m’a dit que je lui avais sauvé la vie et d’un coup il m’a sauté dessus près du gymnase... » Je pouvais bien dire la vérité à ce sujet, mais je ne pouvais pas raconter la suite, que ce mec était mon cousin, qu’il était sous couverture... Non pour l’instant je devais taire cette histoire, enfin il n’y avait pas besoin d’entrer dans les détails, de toute façon il n’y avait rien entre nous ça c’est sur, je ne suis pas ce genre de mec.

Mais ça me faisait bizarre qu’on puisse raconter de telles choses sur Yunnie et moi, je devrais prêter plus attention à ce qu’on dit sur mon compte, mais au fond je pense que je m’en fiche. Du moment que ceux avec qui je « traine », mes potes et Jia Heng connaissent la vérité, les autres peuvent bien penser ce qu’ils veulent, je n’ai aucun compte a leur rendre et si ça les amuse de blablater derrière le dos des gens de manière lâche, soit ça fait partie de la stupidité humaine apparemment.

« Tu pensais qu’il y avait quelque chose entre nous ? Tu sais bien que je suis une quiche niveau relationnel. » Avais-je dis en me levant pour m’accroupir à sa hauteur, ayant rapproché mon visage du sien en voyant à quel point il semblait sérieux, surement encore partie dans son imagination. « Je t’ai perdu ? » avais-je lancé en affichant un léger sourire. En tout cas j’étais surpris que cette histoire le trouble et au fond je me demandais pourquoi, mais je n’avais pas besoin de le questionner si je pouvais simplement le rassurer c’était ce qui m’importait. Posant ma main sur sa tête, d’un geste affectif et amical j’avais caressé ses cheveux en lançant.

« Demande moi les choses directement la prochaine fois si tu veux les réponses, tu sais bien que je ne te mentirais pas, pas vrai ? » J’étais incapable de mentir de toute façon, je préférais encore dire clairement « je ne peux pas en parler » que d’inventer des choses, je n’ai pas été élevé pour inventer des histoires. Même lorsque je me suis fait kidnapper à la place de Jia Heng, je n’avais pas menti, Juste gardé le silence.

Dans mon monde, la parole est d’argent et le silence est d’or comme on dit.

Je ne pouvais pas voir la détresse de mon ami, pas la comprendre, j’étais même incapable de simplement imaginer que je puisse le faire souffrir à mon insu. Toute ma vie très peu de gens se sont attaché à moi et moi à eux, la confiance est un sentiment qui met du temps à se donner, l’amitié n’est pas une chose qui peut naitre en quelques jours, pas la vraie en tout cas, celle pour laquelle je pourrais facilement mettre ma vie ou ma réputation en jeu, celle ou je pourrais sourire honnêtement et rire sans tenir compte du manque d’expression habituelle. Su Hwan avait su trouver sa place à mes côtés, par sa curiosité, son honnêteté, son implication et sa compréhension. Je suis heureux d’avoir quelqu’un comme lui dans mon entourage, parfois il semble assez fort pour gérer certaines situations et d’autres si vulnérable que je voudrais le protéger pour que personne ne puisse le briser, il est mon ami et cela même s'il sait que je ne serais jamais comme les autres, que mon existence est encadrée et que je suis lié à jamais à la vie de mon protégé. Quand d'autres me prenne en pitié, quand ils me fuient parce que je leur fais peur, quand il craigne mon regard fixe et mon impassibilité, ce petit bonhomme lui... Il embrase le pas vers moi et me tire le bras, il reste avec moi et ne me juge pas.

Pour toutes ses raisons, je veux réussir à le rassurer, à faire en sorte qu’il ne fasse pas ce genre de tête, pas devant moi. Je ne suis pas doué et je le sais, mais si je peux simplement lui dire la vérité et effacer tous ses doutes qui pourraient le blessé ou l’inquiéter alors je le ferais. Je ne sais pas si son état a un rapport avec les rumeurs qu’il vient de m’apprendre sur mon compte, sur la relation que j’entretiendrais avec le professeur, sur notre baiser échangé... Mais rien de tout ça n’est vrai, bien sûr Cho Yun est le genre de type à agir de manière exagéré et à être plutôt extrême, j’avais pu le remarquer lors de nos retrouvailles, mais déguisé dans cet accoutrement d’idiot qu’il abordait, les rumeurs seraient faciles à détourner, pourtant je n’avais pas menti à Su Hwan, il m’avait embrassé, bien qu’à mes yeux cela n’ait rien de bien méchant et que je ne trouvais pas ça... grave ? Bon après, je ne suis pas très ouvert sur le sujet et assez nul dans tout ce qui touche de près ou de loin aux relations du genre, mais faut pas m’en vouloir...

Et rapidement je sens des lèvres se poser sur ma joue, un peu perdu dans mes pensées j’avais fixé le jeune homme sans détourner le regard, un peu interloqué par ce qu’il vient de se passer, mais mon visage n’affichait rien de tel, pour changer... Je le regarde sourire et ma main vient se poser sur sa joue pour la lui pincer.

Affichant simplement une légère esquisse sur le visage. « C'était quoi ça? Si ça tourne en rumeur préviens moi, je ne veux pas que tu ais des problèmes à cause de moi ! » Ce fut dit d’un ton se voulant taquin. Il faut dire que je ne sais pas vraiment comment réagir ou quoi dire, même si c’est une plaisanterie, je reste généralement de marbre ne cherchant pas plus loin la signification. Je me relève et ébouriffe une nouvelle fois ses cheveux.

« Je vais y aller. On se voit plus tard ? » Et en tapotant son épaule amicalement je termina. « Et si quelque chose te tracasse, je suis toujours là pour toi, donc appel moi. » je ne suis peut-être pas le plus doué pour me faire des amis, mais lorsque je considère quelqu’un comme tel, je ne le lâche pas et ne le laisse pas tomber, l’amitié c’est aussi une forme de loyauté non ?