La journée n’avait pas été des plus mauvaises. En fait, hormis un début de crise d’angoisse le midi, je ne m’en étais pas trop mal sorti. J’avais réussi à éviter les bains de foule au maximum, j’étais resté à peu près attentif en cours et j’avais même trouvé un instant pour écrire dans un coin de la bibliothèque. C’était en sortant de cette dernière que je l’avais croisé. En voyant son visage s’illuminer, j’avais accéléré le pas et avais même fini par courir. Mes poumons me brûlaient quand j’arrivais enfin aux portes des dortoirs. Il ne m’avait pas suivi. Le poids qui s’était posé sur ma poitrine s’allégea quelque peu. Je ne comprenais pas ce jeune homme. Il ne pouvait pas passer près de moi sans me parler, me couvrir d’éloges, m’étouffer de compliments. Il ne pouvait pas m’admirer avec autant de ferveur. Il devait y avoir une bonne part de moquerie dans tout ça. Sans compter les cadeaux, les prestations exubérantes et les sourires ravageurs de Minh Hien. Le pire dans tout ça, c’est que par moment, j’avais envie d’y croire.

Je poussai la porte de mon dortoir en chassant ces réflexions de ma tête. Mais là où je pensais me retrouver au calme, à l’abri de tout stress, je découvrais mes colocataires en grande discussion. Ils avaient mis de la musique et certains ne se privaient pas de parler fort. Trop de bruit… Trop de bruit ! Je me faufilai discrètement jusqu’à mon lit et attrapai à la va-vite quelques affaires propres. Personne ne m’avait remarqué quand je m’étais enfermé dans les douches. Je regrettais de ne pas avoir trouvé, à mon arrivée, de salle de bains privative. C’était comme si l’école entière était contre moi. Je ne demandais pourtant pas grand-chose ! Juste un peu de calme et de solitude, de quoi me sentir bien en somme.

J’investis une cabine et me défis de mes vêtements. Un dernier coup d’œil à travers l’embrasure de la porte mince, puis je la fermai. L’eau chaude qui coulait sur mon corps ainsi que son bruit apaisant me rassurèrent. J’étais enfin seul. Personne ne prenait de douche à cette heure-ci. Les sportifs avaient depuis longtemps quitté leurs terrains et les autres élèves attendaient généralement que le repas soit passé ou le matin pour se laver. J’étais donc sûr de ne pas être dérangé. Du moins c’est ce dont j’étais persuadé..

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La journée avait plus ou moins bien commencé pour Minh Hien, il s'était réveillé avant même que son alarme ne sonne, merci à un de ses précieux camarades de chambre pour ses ronflements incessants. Même son oreiller n'avait pas pu le sauver ce matin et ne supportant plus ce vacarme, il n'avait pas eu d'autre choix que de se lever afin de se préparer pour sa longue journée de cours. Et c'est donc doucement mais sûrement qu'il s'était frayé un chemin jusqu'à la salle de bain, prenant bien soin d'éviter tous les obstacles, essentiellement des vêtements sales, qui lui barraient le chemin entre son lit et la porte de sa chambre.

Ce matin, contrairement à d'habitude, il était arrivé en avance en cours, grande première pour lui. Peut-être allait-il enfin être attentif et sérieux, hélas non, il avait décroché au bout d'une vingtaine de minutes, laissant les mathématiques à ceux que ça intéressaient, préférant déprimer dans son coin de l'absence d'une certaine petite tête brune. Quand la sonnerie retentit pour annoncer la fin des cours, il fut le premier à quitter la salle de classe. Et il savait parfaitement où aller, la bibliothèque, le lieu de prédilection d'une certaine personne à qui il ne faisait que penser nuit et jour. Il le connaissait par cœur à force, et ce fut donc sans surprise qu'il le vit prendre ses jambes à son cou pour l'éviter. Comme si il avait la moindre chance de lui échapper, Minh Hien avait un radar quand il s'agissait de le trouver, et le seul lieu où il pouvait s'isoler c'était son dortoir or le lycéen savait dans lequel il résidait.

Arrivé à l'étage où il résidait, il l'aperçut se faufilant hors de sa chambre pour se rendre vers les douches. Et dire qu'il l'avait déjà imaginé de nombreuses fois nu sous la douche, Su Hwan ne l'aidait vraiment pas sur ce coup là. Une fois à l'intérieur, il se faufila vers la seule cabine occupée et toqua à la porte. « Je vais vraiment finir par croire que tu cherches à m'éviter. » Fit-il avec une moue enfantine alors qu'il ne pouvait pas le voir. « Si jamais tu as besoin de quelqu'un pour te frotter le dos je suis là hein ! » Lâcha t'il en s'adossant contre la porte de sa cabine, lui et son incroyable subtilité pour exprimer son affection.

Je pourrais peut-être inclure un passage de ce genre à mon histoire. Dommage que je n’eus pas de carnet résistant à l’eau. Néanmoins, les mots commençaient à venir tous seuls, réveillant ma démangeaison. J’avais envie d’écrire soudainement. Je fis un effort de mémoire, me concentrant sur le bruit de l’eau et fermant les yeux pour faire abstraction du reste et visualiser les lettres qui s’alignaient devant mes paupières closes.

Harassé de fatigue, il se glissa sous le jet brûlant, ignorant un mouvement de recul quand sa peau rencontra le flux. Au fur et à mesure que ses muscles se détendaient, il parvenait à chasser de son esprit la main qu’il avait tenue un peu plus tôt dans la journée. La peau était douce, soyeuse ; de celles qu’on rêvait d’explorer dans sa totalité. Quand il avait tourné la tête vers son ami, son sourire l’avait déstabilisé. Il regrettait à présent de s’être enfui. Il avait bien sûr trouvé un stratagème habile, mais…

Mais l’autre m’avait retrouvé. Je sursautai et manquai de justesse de rejoindre le carrelage. Mes mains s’étaient d’abord posées sur les parois pour m’éviter la chute, puis elles avaient parcouru mon corps frêle dans l’espoir de le dérober à des yeux qui ne transperçaient de toute façon pas encore les cloisons. Que faisait-il là ?!
Mon dos rejoignit le mur tandis que je coupais l’eau, cherchant à tâtons ma serviette.

« Qu’est-ce que tu me veux à la fin ?! »

Les mots m’avaient échappés, plaintifs et désemparés. Je tremblais en m’enroulant dans la serviette que je coinçai sous mes bras à la manière d’une demoiselle. Je ne comptais pas sortir de cette cabine, mais au cas où il trouvait le moyen d’entrer, je refusais qu’il vît ne serait-ce qu’un détail de mon corps nu. Dans mon ventre, je sentais quelque chose d’inattendu grouiller. Ce n’était pas de la peur qui venait de me saisir ; c’était une sorte de colère impuissante. Je fulminais, j’étais à bout de nerfs. Il n’avait pas le droit de violer ainsi mon intimité !

« Bien sûr que je t’évite ! Qui ne le ferait pas ?! Dehors !!! »

Ma voix se brisa malgré moi et je baissai les yeux pour m’assurer que la serviette était assez longue pour tout cacher. Ma gorge était nouée. Les larmes perlaient aux coins de mes yeux. Jusqu’où allait-il aller ? Et surtout, pourquoi faisait-il tout ça ? J’aurais aimé avoir ces réponses ; des réponses sincères. Je n’en pouvais plus d’être malmené de la sorte.

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Minh Hien aurait bien tenté un « Toujours vivant ? » en l'ayant entendu se retenir contre les parois de la douche pour ne pas glisser lorsqu'il lui avait parlé pour manifester sa présence, mais il s'était abstenu, de peur de se prendre la porte de la douche en pleine poire. « Qu’est-ce que tu me veux à la fin ?! » Question très pertinente mon suzerain. Tout ? Il ne désirait qu'un peu d'intérêt de sa part et surtout qu'il arrête de le rejeter ou pire de prendre le fuite en le voyant comme s'il avait la peste. « Un peu d'attention ? » Tenta-t'il sur un ton enfantin dans l'espoir totalement futile de l'attendrir d'une quelconque manière.

Pour une fois qu'il lui adressait la parole, il comptait bien en profiter même si pour l'instant Su Hwan était tout sauf coopératif, au moins Minh Hien avait une réaction et c'était mieux que de l'indifférence. « Bien sûr que je t’évite ! Qui ne le ferait pas ?! Dehors !!! » Et il en avait une belle de réaction, il était même surprit, voir un peu déçu, du ton qu'il employait avec lui. Certes il le suivait un peu partout et le harcelait légèrement pour ne pas dire beaucoup mais c'est parce qu'il était la seule chose qui lui donnait envie de se lever le matin, bien sur il était incapable de le lui dire de cette manière. « Pourquoi est-ce qu'on m'éviterait, je suis parfait ! » Et le roi des connards, mais à part ce petit détail insignifiant il était parfait et il n'y avait que Su Hwan qui lui résistait. « Et au cas où tu ne l'aurais pas remarqué, je suis dehors... » Fit-il en s'écartant de la cloison de la douche contre laquelle il était adossé comme pour lui laisser plus d'intimité et surtout parce qu'il avait sentit la détresse dans sa voix...

« Je ne voulais pas t'effrayer. » Même s'il avait bien conscience qu'agir de cette façon aurait pu effrayer n'importe qui. « J'avais juste envie de te voir. » Il ne l'avait pas vu de la journée, alors forcément il s'était montré enthousiaste à l'idée de le voir à la fin des cours, même peut-être un peu trop invasif en se pointant ici. « Je ne suis pas très doué pour exprimer mes sentiments... » Fit-il en murmurant les derniers mots de peur qu'il ne le rejette encore, de toute manière il était habitué à ce que les seules personnes auxquelles il porte un minimum d'intérêt le rejette.

D’attention ? Pourquoi ? Il était connu à ce que j’avais compris et j’avais également remarqué que son charme ne laissait pas indifférent grand monde. En quoi mon attention lui manquait-elle ? Il jouait au plus malin, m’assurant être parfait et être déjà dehors. Non, hors de cette pièce ! Voilà ce que je voulais. Juste une douche, un quart d’heure de tranquillité et surtout d’intimité ; c’était trop demander ? Je vivais avec plusieurs personnes qui, bien qu’elles fassent de leur mieux, ne me laissaient jamais réellement souffler.

Son ton changea quelque peu. Appuyé contre la mince cloison, j’avais posé une main sur ma poitrine. Je me remémorais les conseils de Jang Sensei pour ne pas céder à la panique. « J’avais juste envie de te voir. » Je tournai la tête vers la porte. Sa voix s’était légèrement éloignée. Me laissait-il la place d’ouvrir ? Je ne comptais pas sortir de cette cabine, pas tant qu’il était là. Je l’imaginai, fixant l’espace entre la porte et le sol. Peut-être voyait-il mes pieds d’ici ? En tout cas, j’eus l’impression qu’il surveillait mes mouvements. Respirer profondément, faire le vide, sentir l’air passer dans mes poumons et m’imaginer dans une situation idyllique. Je souris légèrement en sentant la main chaude d’Ayden dans la mienne ; tous deux tournés vers un arbre gigantesque qui pourrait nous abriter sans problème en cas de pluie. L’arbre eut soudain un visage, qui murmura quelque chose qui brisa ma bulle imaginaire.

« Je ne suis pas très doué pour exprimer mes sentiments… »

Ayden avait disparu, me laissant seul avec ces paroles troublantes. J’entrouvris les lèvres, prêt à répondre, plus calme qu’avant. Un sursaut me prit lorsque la porte de la salle se fit entendre. Etait-il parti ? Curieux, j’avançai légèrement la tête.

« Bah alors Su Hwan! Tu lui ouvres pas à ton ami ? Le pauvre, il va avoir froid à force de rester dehors ! En plus tu dois avoir bien chaud sous la douche ! »

Mon sang se glaça et je sentis mes jambes trembler légèrement. BaeHyun ? Pourquoi se mêlait-il de ça ? Et surtout, comment savait-il que j’étais dans cette cabine ? Mes doigts se crispèrent sur ma serviette. J’étais incapable de répondre. Fallait-il que je réponde ? Ce garçon, qui partageait mon dortoir, me terrifiait ; ce n’était rien de le dire.
Il se présenta, comme si tout était normal, à celui qui avait franchi les dernières limites de ma vie privée. Et il le faisait d’une telle façon qu’il ne mentionnait même pas le fait que nous soyons colocataires. Sans compter qu’il remit encore une fois ma réserve sur le tapis. Je me sentais humilié, terrifié. Les deux personnes que j’évitais le plus étaient dans la même pièce, seulement séparés de moi par une cloison si fine que je me demandais si elle n’allait pas tomber dans la seconde. En partant, il n’oublia pas de nous qualifier de « tourtereaux », achevant de me mettre mal à l’aise. Le calme revint, pas le mien. Je ne me sentais vraiment pas bien.

« Minh Hien… Je… Je vais ouvrir la porte. J’ai besoin d’air… »

J’étouffais. C’en était trop pour moi. J’avais l’impression que cette cabine, aussi rassurante eut-elle pu être, se jouait à présent de moi. Les murs s’étaient rapprochés, j’en étais sûr. Ils n’allaient plus tarder à m’avoir. Tremblant, je m’approchai de la poignée, prenant tout de même garde à ce que ma serviette soit bien serrée. Juste avant de sortir, je le rappelai à l’ordre. Qu’il ne pense même pas à regarder !
J’étais dehors. Je me tournai vers la cabine que je venais de quitter pour constater que tout était redevenu normal. Une main fébrile écarta une mèche de mes cheveux. Je lançai un coup d’œil au jeune homme, un peu perdu. Je ne savais plus vraiment où j’en étais. Toutes mes émotions se brouillaient pour m’étourdir. Il y avait eu ces mots qui m’avaient adouci et apaisé et puis cette intervention qui avait tout amplifié… Minh Hien n’était pas un mauvais garçon au fond, j’en étais certain. Il se donnait des airs assurés, insupportables, mais il cachait quelque chose de plus doux et sensible, j’en étais sûr. Néanmoins, après m’être un peu calmé – les tremblements et les sueurs froides ne voulaient pas disparaître totalement – je repris plus doucement.

« Tu ne peux pas faire ce genre de choses. C’est… gênant, effrayant, bizarre… Je ne veux plus que tu viennes quand je suis susceptible d’être… nu. »

Mon ton était plus doux, mais il gardait une certaine fermeté associée à une quelconque forme de détresse. Je n’étais pas bien. Mes bras restaient croisés sur mon torse afin de retenir la serviette, formant une croix dont les extrémités, mes mains, se trouvaient sous mes aisselles. Je me retins de poser des questions qui m’effrayaient inconsciemment. Mais ce qu’il avait dit me trottait dans la tête.

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« Bah alors Su Hwan ! Tu lui ouvres pas à ton ami ? Le pauvre, il va avoir froid à force de rester dehors ! En plus tu dois avoir bien chaud sous la douche ! » C'était une blague, ils étaient filmés et il y avait une caméra cachée quelque part ? Non mais quel genre d'individu s’immisçait comme ça dans une conversation privée, enfin à part lu ? Franchement il avait trop ruiné son coup là, Minh Hien jouait la carte de l'homme blessé et rejeté, et il avait espoir que ça marche, et l'autre là il venait interrompre tout ça avec sa réplique débile ! Su Hwan avait besoin de douceur, même lui l'avait compris à force de le suivre partout, alors s'il l'attaquait de front comme ça il n'avait absolument aucune chance... Si Minh Hien pensait être tranquille à une telle heure et en un tel lieu il se trompait fortement, comme par hasard l'idiot du village -jusqu'à ce qu'il connaisse son prénom- avait décidé de pointer le bout de son nez et de ruiner le peu de chemin qu'ils avaient réussi à faire, c'est à dire pas grand chose. Alors forcément il était surprit et surtout agacé parce que non seulement il les interrompait mais en plus il continuait. « Bonjour, je suis Hoon BaeHyun ! Je suis au lycée, et je suis aussi une connaissance de Su Hwan. Il traîne beaucoup à la bibliothèque, moi aussi... Voilà. » Comment ça une connaissance ? Alors pourquoi est-ce qu'il ne l'avait jamais vu ?! Bon c'était fort possible que le fait de ne regarder que Su Hwan, et vraiment quee lui, joue sur le fait qu'il ne connaisse pas son entourage, même de vue. Pour le coup il était fautif donc il lui rendit sa poignée de main, c'était la moindre chose et puis au moins maintenant il connaissait le prénom de l'idiot du village. « Aaaah, Su Hwan ! Pourquoi tu lui ouvres pas ? Il est pas mal pourtant, je savais pas que c'était ça ton genre ! Vous allez super bien ensemble, en tout cas ! Ouvre-lui, le pauvre ! Il a l'air gentil, là je te comprend pas ! » Habituellement il aurait adoré l'intervention, et le compliment, c'était tout à fait son style mais là non content de ne pas lui laisser le temps d'en placer une et de se présenter, il l'enfonçait plus bas que terre, à ce rythme là Su Hwan risquait de le tuer ou pire changer de lycée ! « Ah oui, j'avais oublier de demander un truc à quelqu'un ! Faut que j'y ailles les tourtereaux. Réconciliez-vous, je vous assure que vous allez être mignon ! » Et la tempête Baehyun était partie, aussi vite qu'elle était venue. C'était franchement l'intervention la plus étrange de toute sa vie, ça plus quand sa cousine l'avait surpris en train de regarder un film pour adulte. Minh Hien n'arrivait pas encore à savoir s'il détestait Baehyun ou pas, tout allait dépendre de la réaction de Su Hwan.

D'ailleurs avec tout ça il avait complètement oublié Su Hwan qui était toujours dans la douche, comment est-ce qu'il allait ? Est-ce qu'il était en train de mourir ? Est-ce qu'il avait besoin que Minh Hien défonce la porte et lui fasse du bouche à bouche ? Est-ce que... « Minh Hien… Je… Je vais ouvrir la porte. J’ai besoin d’air… » Ok... C'était sûrement le signal pour lui dire de se retourner et de ne pas regarder, ou un truc dans ce style, les gonzesses étaient comme ça et même si Su Hwan n'en était pas une mieux valait respecter un peu son intimité surtout avec ce qui venait de se passer. Honnêtement Minh Hien avait peur de la réaction du coréen, déjà qu'il l'avait à moitié foutu à la porte parce qu'il avait osé le suivre jusqu'ici, alors qu'est-ce que ça allait être après l'intervention de Baekhyun ? Il jeta un rapide coup d’œil par-dessus son épaule en entendant la porte de la douche s'ouvrir, c'est pas comme si il avait attendu ce moment depuis longtemps mais presque alors forcément il n'avait pas pu s'en empêcher mais ce fut bref, là encore il tenait trop à sa vie pour s'attarder trop longtemps sur le corps de Su Hwan.

« Tu ne peux pas faire ce genre de choses. C’est… gênant, effrayant, bizarre… Je ne veux plus que tu viennes quand je suis susceptible d’être… nu. » Minh Hien osa de nouveau un regard vers Su Hwan et constata qu'il tenait bien fortement sa serviette par peur que celle-ci tombe et ne l'expose totalement, et Minh Hien n'était pas contre l'idée mais il ravala ses pensées perverses et s'approcha de lui saisissant au passage une serviette propre qu'il déplia et qu'il posa ensuite sur la tête de Su Hwan. Il aurait bien fait plus mais c'était déjà beaucoup et il préféra s'écarter et se retourner de nouveau pour lui laisser de l'air, il tremblait alors peut-être que ce geste allait l'aider à se réchauffer un peu. Oui Minh Hien n'était pas trop doué pour tout ça mais au moins il essayait. « Donc ça veut dire que si tu n'es pas... nu... je peux venir ? » Il était obligé de la placer celle-là, ce n'était pas de sa faute si Su Hwan lui tendait ce genre de perche.

Conscient de sa propre bêtise il se racla la gorge et tenta sur un ton un peu plus sérieux. « Je suis désolé, je vais essayer. » Ça lui demandait vraiment un effort surhumain de s'excuser, il détestait faire preuve d'une quelconque forme de faiblesse et s'excuser en faisait partie. « Tu vas bien ? Enfin... tu trembles, c'est à cause de lui ? » Ou de moi ? Il était à deux doigts d'aller casser la tête de Baehyun si c'était le cas !

Je sentais le regard du jeune homme se poser furtivement sur moi, loin de me rassurer. Je lui avais pourtant dit de ne pas regarder ! Je ne savais pas de quoi j'avais le plus honte. Mes jambes tremblantes ou mon corps à peine couvert ? La serviette s'arrêtait à mi-cuisse, peut-être même un peu au-dessus...  
Il s'approcha et je courbai légèrement la tête comme si la serviette qu'il venait d'y poser pesait une tonne. Lentement, je relevai mes grands yeux étonnés vers Minh Hien. Il s'était reculé, comme s'il avait compris que ce n'était pas le moment de m'étouffer. Il était pourtant le spécialiste pour ça... D'ailleurs, il ne manqua pas de glisser une remarque qui me fit faire une petite moue.  

« Tu seras mieux reçu au moins... »

Nous savions tous deux que c'était faux. Quoi qu'il fit, Minh Hien avait un don naturel pour me faire fuir. Je ne comprenais pas ce qu'il me voulait et, honnêtement, je ne voulais pas comprendre. Je voulais juste qu'il me laissât tranquille. Mais c'était trop demander. Pour ma plus grande surprise, il s'excusa. En fouillant rapidement dans ma mémoire, je constatais que c'était la première fois que de tels mots sortaient de sa bouche. Alors il avait conscience d'être allé trop loin.  

Prudemment, je sortis une main de sous mon bras pour frotter lentement mes cheveux avec la serviette. Il avait remarqué mes tremblements et s'enquit de leur origine. Je jetai un petit coup d'œil à la porte puis baissai les yeux. Je ne pouvais décemment pas lui dire que les murs de la cabine se rapprochaient ; il m'aurait pris pour un fou. Alors je me pinçai les lèvres et haussai les épaules.

« N-Non. Ca arrive parfois... Ce n'est pas grave, ça va passer. »

J'avais paniqué et le trop plein d'émotions avait eu raison de moi. Pas très à l'aise dans ce dialogue que j'aurais préféré ne jamais avoir, je réajustai ma serviette pour être sûr qu'elle ne tombât pas. Et puis je dis la chose la plus stupide qui me vint en tête.

« On pourrait se voir demain plutôt ? »

Dans mon monde imaginaire, Ayden venait de me donner un coup de pied dont mon esprit se souviendrait longtemps. Je voulais être seul. Et m'habiller. Alors j'avais dit la chose la plus susceptible de faire déguerpir Minh Hien d'ici. Et puis qu'est-ce qu'il allait imaginer maintenant ? Que j'étais intéressé ? Que j'aimais qu'on se fiche de moi ? Je ne savais même pas ce qu'il me voulait. C'était le problème avec les gens comme lui : ils parlaient sans cesse mais ne dévoilaient jamais clairement leurs intentions. Et maintenant, je n'osais même plus le regarder. Je retournai dans la cabine de douche et ramassai le savon et mes vêtements sales. Les bras chargés, je pressai mes affaires contre mon torse pour soutenir ma serviette. Peut-être n'avait-il pas compris ou entendu ma phrase ; ce qui m'aurait bien arrangé. Je passai devant lui, me dirigeant vers la porte. Je venais seulement de comprendre que si je voulais m'habiller tranquillement, j'aurais tout aussi bien pu retourner dans mon dortoir depuis le début. Au lieu de lancer des idées étranges.

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C'était une bonne chose, pour l'instant il ne l'avait ni envoyé bouler, ni insulté, Minh Hien était sauf. Faut dire qu'il n'avait rien fait qui méritait autant de haine, bon certes l'avoir suivi jusqu'ici ce n'était pas très correct, mais jusqu'à preuve du contraire il n'avait pas été plus loin. Il aurait pu tenter de s'inviter dans sa douche et passer pour un gros pervers mais il avait respecté les frontières personnelles du coréen, personne n'est aussi directe et stupide. Minh Hien avait beau avoir des difficultés dans tout ce qui touchait au relationnel, il savait où était les limites, la preuve il avait posé cette serviette sans aucune arrière pensée. « Tu seras mieux reçu au moins... » Vraiment ? Alors pourquoi est-ce qu'il n'était pas du tout convaincu ? Su Hwan avait passé tellement de temps à le fuir qu'il avait un peu de mal à croire qu'il puisse d'un seul coup se montrer docile envers lui. « Ça veut dire que tu ne t'enfuiras plus en me voyant ? » C'était presque à croire qu'il avait la peste ou un truc du genre tellement il prenait ses jambes à son cou en le voyant, si au début c'était drôle, au bout d'un moment ça devenait frustrant.

« N-Non. Ca arrive parfois... Ce n'est pas grave, ça va passer. » Le ton de sa voix et son hésitation laissa un peu perplexe Minh Hien. « Tu es sûr ? Enfin si tu le dis... » Tenta t'il faisant toujours face au mur, ce qui devenait un peu lourd à la longue, Minh Hien n'allait pas lui sauter dessus. Et pour une fois qu'il se montrait intéressé, ce qui n'était pas souvent le cas, il était un peu déçu de voir que Su Hwan ne voulait pas lui dire la vérité mais il ne pouvait pas vraiment être surpris par sa réaction, après tout ils ne se connaissaient pas, même lui ne se serait jamais confié au premier venu.

« On pourrait se voir demain plutôt ? » Le sang de Minh Hien ne fit qu'un tour dans ses veines, il se retourna presque aussitôt à cette proposition, oubliant totalement l'intimité désirée de Su Hwan et sa quasi-nudité. « Vraiment ? » On ne pouvait pas nier son expressivité, il avait un sourire jusqu'aux oreilles comme si c'était Noël et qu'on lui avait offert le cadeau qu'il avait toujours voulu. Su Hwan était en train de ramasser ses affaires et s'apprêtait à partir en le laissant ici comme s'il ne venait pas de lancer une bomber à Minh Hien. Est-ce qu'il était sérieux au moins ? Parce que si ce n'était pas le cas c'était plutôt méchant de le faire espérer... « C'est sérieux ? » Il ne pouvait pas partir comme ça, il était hors de question qu'il le laisse, après deux trois enjambées il se mit en face de lui pour lui barrer le chemin. « Tu es sérieux ou tu tu veux juste me faire espérer ? » Il avait besoin d'être sûr, après tout ça ne faisait que des mois qu'il le suivait partout et avait espoir qu'il lui laisse sa chance. « Comment être sûr que tu ne fais pas ça pour te débarrasser de moi ? » Certes il était lourd et collant mais pas au point qu'on se joue de lui comme ça même s'il l'avait déjà fait à d'autres.

A ça il eut une idée, pas forcément brillante mais au moins ils seraient obligés de se voir. Il retira sa veste en cuir qu'il avait sur le dos et la posa sur les épaules de Su Hwan prenant soin de récupérer ses affaires et son portable. « Avec ça tu seras obligé de tenir ta parole ! » On se serait cru au lycée, wait ils étaient au lycée donc c'est bon on lui pardonnait. « Où tu veux et quand tu veux, je serais là !? » Bon ça prêtait à confusion mais ce n'était pas du tout le but. Minh Hien s'était peut-être fait des films mais le pauvre on ne pouvait pas lui en vouloir, il avait attendu ce moment depuis trop longtemps.

Je n'avais pas répondu aux questions de mon camarade. Je ne savais pas être blessant ; alors lui répondre qu'il était toujours d'actualité de fuir à son approche n'était pas, dans mon esprit, quelque chose à dire.
J'étais reconnaissant du respect qu'il me témoignait en restant dos à moi. Je ne supporterais pas qu'il se retournât et me dévisageât alors que j'étais presque nu. Néanmoins, à peine avais-je suggéré que l'on se revît qu'il me fit face de nouveau. Il était incrédule, ce qui se comprenait. De mon côté, je m'efforçais de m'enfuir avant d'être obligé de répondre à ses questions qui devenaient trop nombreuses à mon goût. Perdu dans ma tentative de le laisser en plan, je ne savais plus ce que je devais dire pour espérer retrouver mon intimité au plus vite. Sa silhouette s'imposa soudain devant moi, me stoppant net. Je relevai les yeux alors que mes bras tremblants serraient mes affaires contre mon torse. Minh Hien me faisait peur. Je ne savais pas ce qu'il voulait, je ne cherchais pas à le savoir. Je voulais juste qu'il trouvât quelqu'un d'autre à persécuter. J'en avais marre qu'il se fichât de moi de la sorte. « Tu es sérieux ou tu tu veux juste me faire espérer ? » Le faire espérer quoi ? J'entrouvris la bouche, déstabilisé, ne sachant absolument pas ce que je devais répondre à ça. Il avait compris que je cherchais à fuir une fois de plus et ne comptait pas me laisser filer si facilement.

« Je... J'aimerais juste être tranquille ce soir. Et arrêter d'être surpris et poursuivi à longueur de journée... »

Jang Sensei m'avait conseillé d'être honnête sans blesser mes interlocuteurs. J'essayais donc simplement de trouver les mots afin de faire preuve de tact. Mais ce n'était pas un exercice qui était facile pour moi qui avais plutôt tendance à refouler tous mes cris et mes mots.
Minh Hien retira alors sa veste et je courbai de nouveau la tête lorsqu'il la posa sur mes épaules. Il comptait visiblement se servir de mon honnêteté pour me faire tenir parole. Il était loin de se douter qu'en d'autres circonstances, j'aurais trouvé n'importe quel moyen pour qu'il retrouve sa veste sans avoir à la lui rendre en personne. Je me mis alors à projeter la soirée de demain, la situation dans laquelle je me trouverais. Minh Hien parlait bien assez pour deux, alors je pourrais espérer que je n'aie qu'à l'écouter en silence. Mais il posait aussi beaucoup de questions. Peu de ses phrases étaient exemptes de point d'interrogation. A cette idée, mon ventre se noua. Je devrais répondre à tout ça ? Déjà ce soir, mon esprit s'embrouillait à force de l'entendre me harceler. Je n'avais pas le temps de formuler une phrase complète que déjà il enchainait sur autre chose, me perdant d'autant plus. Autant dire que Minh Hien était mon parfait opposé ; il réfléchissait à toute allure, ne pesait visiblement pas souvent le pour et le contre avant d'ouvrir la bouche et était du genre à s'imposer pour avoir ce qu'il voulait. Mais que voulait-il ? Encore cette question qui finissait par me donner mal à la tête.

Avant d'angoisser, je devais trouver un lieu de rendez-vous. Réfléchissant le plus vite possible, je choisis un endroit qui, je l'espérais, serait vide de monde demain. Restait à trouver une heure. Afin de répondre vite, je me calquai sur mes entrevues avec Ayden.

« A l'aquarium, après le dîner..?»

Timide, je relevai la tête pour capter un quelconque signe d'approbation. Et puis je le contournai et sortis de la pièce le plus vite possible, après un pitoyable et craintif « A demain ». Ne lui laissant pas le temps de me retenir, je me hâtai de rejoindre ma chambre et de m'y habiller. Je me glissai alors sous la couette, mes grands yeux fixés sur la veste en cuir qui avait trouvé sa place sur le dossier de ma chaise. Même l'image rassurante d'Ayden n'apparaîtrait pas ce soir. Le rendez-vous fixé pour le lendemain tournait sans relâche dans ma tête, me laissant présager le pire. Je ne serais jamais capable de tenir une conversation avec mon camarade. Il m'impressionnait. Je me sentais minuscule quand il était là. Et, surtout, je me sentais vulnérable. Devrais-je demander à Ayden de m'accompagner ? J'aurais besoin de soutien et d'un éventuel défenseur au cas où, non..? Je fus incapable de trouver le sommeil, assailli de doutes et de questions.